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4.4 Instruments

4.4.1 Mots cibles et indices de récupération

Pour l’intervention, nous avons eu besoin de 20 mots cibles. Il nous semble que ce nombre de mots cibles est raisonnable. En effet, les participants aux études antérieures (Barcroft, 2007 ; Folse, 2006 ; Kasahara, 2010 ; 2011 ; Webb, 2007) que nous avons recensées au Chapitre III avaient appris environ 20 mots cibles en moyenne (voir Tableaux XXV, XXVI et XXVII, pp. 108-110). Ces 20 mots comprennent seulement deux mots abstraits. Selon Bogaards (1994), ce genre de mot est difficile à apprendre parce qu’ils ne sont pas visualisables. Pour cette raison et parce que nous allions travailler avec des débutants, nous avons limité le nombre de mots abstraits à deux.

Par la suite, pour les groupes expérimentaux, nous devions préparer un indice paradigmatique et un indice syntagmatique pour chacun mot cible. Rappelons ici, comme il est précisé à la section 2.3.1 (p. 42), qu’un indice de récupération correspond au fragment de souvenir aidant à atteindre un item emmagasiné dans la mémoire. Dans le cadre de notre étude, un mot accompagnant chaque mot cible servait d’indice de récupération. Aussi, l’indice paradigmatique constitue un mot qui 1) ne constitue pas une connexion séquentielle avec un mot cible, 2) possède une relation sémantique et hiérarchique avec le mot cible telle que le synonyme, l’antonyme, hyperonyme, l’hyponyme ou le méronyme, 3) une connexion claire (conceptuelle ou contextuelle) avec le mot cible, bien qu’ils puissent être loin l’un de l’autre (chagrin - larme) ou 4) représente le symbole du mot cible (amour - cœur) (revoir le Tableau V, p. 28). Par ailleurs, l’indice syntagmatique, correspond à un mot qui constitue 1) une relation séquentielle avec le mot cible accompagnée de particules ou d’un article entre ces deux mots ou 2) un mot composé (revoir le Tableau VI, p. 29).

Afin de sélectionner l’ensemble de ces mots sur la base de la fréquence, nous avons employé quatre sources : le dictionnaire comportant les mots fondamentaux, soit A frequency

dictionary of French: Core vocabulary for learners (Lonsdale et Le Bras, 2009), la liste des

mots fondamentaux en français, établie par Mikami (2004), et les dictionnaires d’Antidote. En principe, nous avons retenu les mots peu fréquents comme mots cibles et les mots

fréquents comme indices de récupération. Afin de mettre sur pied la liste des mots cibles en prenant en compte la fréquence, nous avons premièrement consulté le dictionnaire de fréquence de Lonsdale et Le Bras (2009). Tenant compte d’un certain nombre de dictionnaires de fréquence antérieurs (Buxbaum, 2001 ; Gougenheim, 1958 ; Henmon, 1924, etc.) portant sur le lexique de la langue française, les auteurs ont créé leur dictionnaire provenant d’un corpus de 23 000 000 mots français dont la moitié (environ 11 500 000 mots) provenait de textes oraux et l’autre (encore environ 11 500 000) découlait des textes écrits. Les auteurs ont tiré les 5000 mots les plus fréquents.

Cette source nous a servi à vérifier le niveau de fréquence des mots cibles, car nous avions besoin de choisir ceux qui étaient peu fréquents, pour lesquels la probabilité pour les participants de les avoir rencontrés antérieurement étaient quasi nulle. Selon Milton (2009), il faut 2500 mots les plus fréquents pour les apprenants en FLE pour aller du niveau A1 (débutant) au niveau B1 (intermédiaire). Par conséquent, nous avons retenu des mots qui se trouvaient au-delà des 2500 premiers mots. Aussi, pour la sélection, nous avons éliminé les mots similaires à l’anglais du point de vue orthographique, car les étudiants japonais ont normalement étudié cette langue pendant six ans au collège et au lycée. En ce sens, le dictionnaire de Lonsdale et Le Bras nous a été très utile parce que chaque mot en français est accompagné de son équivalent en anglais. La longueur des mots cibles faisait également partie des critères de la sélection. En effet, tous les mots cibles que nous avons retenus étaient composés de deux syllabes et de 6 à 8 lettres pour restreindre la différence entre les mots sur le plan de la forme. Ce critère est important dans notre recherche dans la mesure où nous avons utilisé la moitié des mots cibles pour le post test de rappel productif et l’autre moitié pour le post test de rappel réceptif (voir les sections 4.6.2.1. et 4.6.2.2. pour la description de ces post tests).

Ensuite, concernant la sélection des indices, nous avons fait appel à cette notion de fréquence pour nous assurer de leur familiarité à l’instar d’autres chercheurs ayant mené des travaux portant sur l’association lexicale (Fitzpatrick, 2006 ; Wolter, 2001 ; Yokokawa et al., 2002, etc.). En plus du dictionnaire de fréquence de Lonsdale et Le Bras (2009), nous avons également eu recours à la liste de Mikami (2004) qui a cherché à déterminer, dans le cadre de la didactique de la langue française, les mots fondamentaux pour les apprenants japonais

aux premières étapes de l’apprentissage du français. Tel que l’a souligné Mikami, il n’est pas simple de déterminer un critère clair pour la sélection des mots fondamentaux. Donc, elle a pris connaissance de trois sources publiées au Japon : deux dictionnaires (appelés respectivement « Le Dico » et « Nouveau petit royal dictionnaire Français-Japonais») utilisés par beaucoup d’apprenants japonais du français et la liste de 500 mots fondamentaux (appelée « Furansugokihon500go » en japonais) publiée par l’APEF (Association pour la Promotion de l’Enseignement du Français), soutenue par le Ministère de l’Éducation du Japon. Elle a intégré dans sa liste 494 mots qui sont indiqués comme « les plus importants » dans les deux dictionnaires, 62 mots provenant du Le Dico seulement, 50 mots du Nouveau

petit royal dictionnaire Français-Japonais seulement et 42 de la liste de 500 mots

fondamentaux seulement.

La dernière source, dictionnaires d’Antidote, était aussi primordiale pour vérifier des associations entre l’indice et le mot cible. Créé par l’équipe de Druide, Antidote est un logiciel proposant trois grandes fonctions : le correcteur, les dictionnaires et le guide linguistique. Pour notre étude, nous avons eu recours notamment à la deuxième fonction.

S’appuyant sur une grande quantité de ressources, modernes ou anciennes, l’équipe de Druide a organisé une nomenclature de 117 000 mots, en se basant sur dix types de dictionnaire (dictionnaires des définitions, des locutions, des synonymes, des antonymes, des cooccurrences, de la conjugaison, des familles, des analogies, de citations et des anagrammes).

Les indices de récupération employés dans notre expérimentation doivent être associés aux mots cibles de façon syntagmatique ou paradigmatique. En ce qui a trait à l’association paradigmatique, le mot cible et le mot stimulus doivent constituer une relation sémantique : synonymie, antonymie, hypéronymie, hyponymie et méronymie. Par conséquent, nous avons exploité les dictionnaires de la définition, du synonyme et de l’antonyme dans Antidote. D’un côté, le dictionnaire des synonymes contient un million de synonymes pour 65 000 mots. De l’autre côté, l’autre dictionnaire comprend 100 000 antonymes. Il nous fallait ces deux dictionnaires pour trouver les synonymes ou les antonymes de certains mots cibles, ce qui constitue l’association paradigmatique.

Comme nous le signalions dans le cadre conceptuel (voir 2.1.2.2.2, p. 29), l’association syntagmatique est en général composée des mots provenant d’une classe grammaticale différente. Autrement dit, ces deux mots représentent une relation de collocation. Pour cette raison, nous avons très souvent fait appel au dictionnaire des cooccurrences d’Antidote afin de trouver les associations syntagmatiques et paradigmatiques par rapport aux mots cibles. En profitant de 2000 sources distinctes, l’équipe de Druide a établi un corpus constitué de 500 millions de mots ou bien de 2 000 phrases. Puis, elle l’a analysé et enfin extrait 750 000 paires de mots. Ces dernières ont été classées en fonction des contextes syntagmatiques : les épithètes (« enragé »), les participants (« le chien aboie ») et les compléments directs (« promener son chien »), etc.

Il y avait trois chemins pour déterminer le mot cible, son indice syntagmatique et son indice paradigmatique.

Cas 1 : Chercher d’abord un mot pour l’association syntagmatique, ensuite le mot cible et enfin le mot pouvant s’y associer de façon paradigmatique.

1. Nous avons tout d’abord choisi un verbe ou un adjectif à partir des listes de Mikami (2004) ou du dictionnaire de fréquence de Lonsdale et Le Bras (2009) pour constituer l’indice syntagmatique. Prenons « ouvrir » par exemple.

2. Ensuite, à partir de ce mot, nous avons cherché un nom à l’aide du dictionnaire des cooccurrences dans Antidote, qui semblait peu familier pour les apprenants débutants. Avec l’indice « ouvrir », nous avons trouvé le mot cible « armoire ». 3. L’armoire est un meuble. Alors nous avons choisi son cohyponyme « table »

comme indice paradigmatique dans la liste de Mikami.

Cas 2 : Chercher d’abord un mot pour l’association paradigmatique, ensuite le mot cible et enfin le mot pouvant s’y associer de façon syntagmatique.

1. Nous avons tout d’abord choisi un nom à partir de la liste de Mikami ou du dictionnaire de fréquence de Lonsdale et Le Bras pour constituer l’indice paradigmatique. Prenons « plaisir » par exemple.

2. Ensuite, à partir de ce mot, nous avons cherché un autre nom à l’aide du dictionnaire des synonymes et des antonymes dans Antidote, qui semblait peu familier pour les apprenants débutants. Avec « plaisir », nous avons trouvé son antonyme « chagrin » comme indice paradigmatique.

3. Enfin, nous avons cherché ce dernier dans le dictionnaire des cooccurrences d’Antidote et trouvé l’indice syntagmatique « profond », figurant dans la liste de Mikami.

Cas 3 : Sélectionner d’abord un mot cible, peu familier pour les apprenants débutants, puis trouver un mot pour l’indice syntagmatique et un autre pour l’indice paradigmatique dans la liste de Mikami ou du dictionnaire de fréquence de Lonsdale et Le Bras. 1. Nous avons trouvé par hasard le mot cible « poussin », et ensuite cherché ce mot

dans Antidote.

2. Enfin, parmi les mots les plus souvent utilisés avec le mot « poussin » par le dictionnaire des cooccurrences, nous avons choisi « petit » comme l’indice syntagmatique et puis nous avons trouvé l’indice paradigmatique « oiseau » dans le dictionnaire des synonymes.

Nous avons ainsi sélectionné les mots cibles et les indices de récupération. La prochaine section décrira les instruments que nous avons créés à partir de ces mots et les tâches que chaque groupe a dû exécuter avec ces instruments.