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La mondialité de l’imposition des bénéfices des sociétés américaines

Section 1 : Eléments de définition du principe de mondialité

2- La mondialité de l’imposition des bénéfices des sociétés américaines

Aux Etats-Unis, la loi reconnait différentes formes d’entreprises. En plus les entreprises individuelles (sole proprietorship), il y a les sociétés en nom collectif (general partnership) ; les sociétés en commandite simple (limited partneship), les sociétés par actions à responsabilité limitée (limited liability company LLC), les sociétés anonymes (corporations)1 et les joint-ventures2. Mais les sociétés anonymes et les limited liability company (LLC) sont les formes le plus souvent utilisées par les investisseurs étrangers3. A l’instar de l’Algérie, les revenus des corporations sont imposés de façon indépendante de ceux des actionnaires. Les sociétés aux Etats-Unis sont soumises à l’impôt sur les sociétés, c’est un impôt collecté par le gouvernement fédéral et par la plupart des gouvernements des Etats membres. Mais il existe encore une taxe additionnelle sur les bénéfices d’une filiale dont les sociétés étrangères doivent être au courant4. C’est-à-dire les sociétés étrangères réalisant, des activités aux Etats-Unis sont assujetties non seulement aux impôts sur les revenus au niveau fédéral et fédéré, mais elles pourraient être soumises à une taxe additionnelle de 30% appelée « la taxe sur les bénéfices d’une filiale ». Cette taxe s’applique aux revenus américains qui ne soient pas distribués comme dividendes ni réinvestis aux Etats-Unis5. De plus, au niveau de l’Etat fédéral, les sociétés sont imposées selon un barème progressif dont les taux varient de 15% à 39%6.

Un débat a été lancé en 2011 à Washington, sur la question comment imposer les entreprises américaines sur les bénéfices qu’elles gagnent à l’étranger. Le résultat de ce débat, sera déterminé comment les travailleurs américains et les entreprises peuvent participer à l’évolution globale de l’économie. Actuellement, les Etats-Unis ont un système d’imposition mondiale, ce qui signifie qu’un revenu d’une entreprise

1-J.NACMIAS, op.cit., p. 2.

2-Les joint-ventures : peuvent prendre la forme d’une association contractuelle ; d’une société de personnes ou d’une société de capitaux.

3 -Il y a des raisons pour lesquelles les investisseurs préfèrent les sociétés anonymes ; telle que la facilité de leur création et leur dissoudre et la facilité de transférer la propriété et même leur fondation est peut être à peu de frais.

4 -RICHARD S. LEHMAN and associates, U.S. Taxation of foreign investors, 2004, p. 15.

5 - La filiale américaine d’une société étrangère est soumise à une double imposition aux Etats-Unis, une première fois, lorsque les bénéfices sont réalisés, et une deuxième fois, lorsque les bénéfices sont distribués à la société étrangère. Afin d’empêcher ces sociétés d’éviter cette double imposition, elles peuvent soumettre à une taxe supplémentaire sous réserve d’une convention fiscale bilatérale.

6 - Par la réforme fiscale de 2017, les entreprises bénéficieront d’une baisse taux d’imposition de 39 à 21%.

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américaine est imposée aux Etats-Unis quelle que soit sa source, nationale ou étrangère1. Or, les résultats des succursales étrangères sont inclus dans le résultat imposable aux Etats-Unis2.

Il s’ensuit qu’un rapport spécial a été mis en 2011 afin d’englober toutes les raisons d’une mise en œuvre d’un système territorial dans l’imposition des bénéfices réalisés par les sociétés américaines : « 1.Parité. Le système américain doit être aligné

avec celui de nos partenaires commerciaux mondiaux ;

2. Les expériences du Japon et de la Grande-Bretagne sont des leçons pour les Etats-Unis ;

3. Le principe de mondialité - neutralité à l’exportation de capitaux (capital export neutrality CEN3) - est obsolète lorsque les filiales ont accès aux marchés de capitaux mondiaux et peuvent autofinancer leur expansion avec des bénéfices non répartis ; 4. Le système fiscal mondial viole le principe de l’avantage de l’imposition ;

5. Les États-Unis maintiennent un système fiscal territorial pour les entreprises étrangères, mais un système mondial pour les entreprises américaines. Le mouvement à un système territorial complet peut stabiliser le terrain de jeu4 ;

6. Le coût de la conformité du système actuel est trop élevé par rapport aux entreprises ayant des activités à l’étranger et les recettes provenant de l'imposition des revenus de source étrangère ;

7. Notre système actuel piège les capitaux à l'étranger - l'effet de «lock-out»5 ;

8. Notre taux d'imposition élevé et un système mondial, il est moins coûteux pour les entreprises de prendre sur la dette plutôt que d'utiliser leur propre bénéfices pour financer leur croissance ;

1 -Special Report, op.cit., p. 1.

2 - Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, op.cit., p. 3.

3 -La neutralité à l’exportation de capitaux NEC est respectée lorsqu’une entreprise résidant dans un Etat soumise à un taux d’imposition similaire, soit elle choisit d’investir à l’étranger ou dans son pays d’origine. En tant que la neutralité à l’importation de capitaux est respectée lorsque le principe de la source est appliqué.

4- Les sociétés étrangères opèrent généralement dans des pays avec un taux moins élevé que celui appliqué par les Etats-Unis (à l’exception des sociétés au Japon). On va comparer entre le rendement après impôt d’une entreprise américaine et une autre entreprise canadienne ; si les deux entreprises réalisent des revenus aux Etats-Unis et au Canada, la société américaine doit payer l’impôt américain sur l’ensemble de leurs revenus de source américaine et canadienne sur le même taux qui est 35% ( un revenu de 200$, taux 35%, le rendement est après impôt est 30$) si la société canadienne réalise le même revenu, ça nous donne le même rendement.

5 -En vertu du principe de mondialité, les sociétés n’ont pas toujours la volonté de ramener leurs bénéfices à leur pays d’origine.

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9. Le système actuel dissuade les entreprises mondiales de s’installer aux États-Unis ; 10. Le retard d’adopté le principe de territorialité a presque tué l'industrie du transport maritime des États-Unis »1. En plus, il y a un retard dans le paiement de l’impôt au fisc

américain jusqu'à ce que le revenu soit rapatrié, c’est comme le cas de versement d’un dividende entre une filiale étrangère et sa société mère américaine.

Aujourd'hui le principe de mondialité est adopté par plusieurs Etats tel est le cas de l’Allemagne qui soumet les entreprises résidentes dans son territoire à une imposition mondiale. Cette imposition englobe les résultats des entreprises réalisés en Allemagne et ceux obtenus par leurs établissements stables situés à l’étranger. Parmi les pays du G7, seuls les États-Unis ont un système fiscal mondial. Parmi les pays de l'OCDE, 26 ont des systèmes territoriaux, dont l'Australie, le Canada, la France, l'Espagne et le Royaume-Uni. Huit pays de l'OCDE ont des systèmes mondiaux, y compris États-Unis, la Grèce, l'Irlande, la Corée du Sud et le Mexique2.

Afin d’empêcher unilatéralement les entreprises de payer l’impôt deux fois sur le même revenu, une fois dans le pays d’accueil et une seconde fois aux Etats-Unis, le code fiscal américain octroie aux entreprises un crédit d’impôt3 sur leur déclaration de revenus. Le crédit d’impôt consiste pour l’Etat de résidence à déduire de son impôt exigible, un montant en principe équivalent à l’impôt déjà supporté à l’étranger. Il en résulte un partage de la perception de l’impôt et non, comme dans la méthode d’exemption, un partage de la matière imposable. Cette méthode connaît deux variantes selon les conventions de non double imposition : l’imputation intégrale (ou totale) et l’imputation ordinaire (ou limitée). On est devant une imputation intégrale lorsque le crédit d’impôt représentatif de l’impôt payé dans l’Etat de la source est déduit totalement de l’impôt de l’Etat de résidence. En tant que l’imputation ordinaire est réalisée lorsque la déduction est limitée à la fraction de l'impôt national qui correspond aux revenus ou biens étrangers. En effet, le mécanisme de crédit d’impôt peut inciter les entreprises à s’implanter à l’étranger et on trouve pendant de nombreuses années que les Etats-Unis sont considérés comme un refuge pour les investisseurs étrangers. Ce pays est devenu aujourd’hui un vrai abri d’investissement.

1 - SCOTT A.HODGE, op.cit.,, p. 1.

2 - JOHN BARASSO, Territorial vs. Worldwide Taxation, September 19, 2012, p. 2.

3 -Le mécanisme du crédit d’impôt est fondé par les articles 901, 908 et 960 de l’Internal Revenue Code (IRC).

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L’adoption d’un tel mécanisme est justifiée par la volonté des Etats-Unis de mettre en place une politique de neutralité à l’exportation1. De ce fait, si les Etats-Unis légitiment leur système d’imposition mondiale accompagné par un mécanisme de crédit d’impôt par la neutralité2, cette dernière « est aujourd’hui imparfaite puisque l’imputation des crédits d’impôts étrangers n’est que partielle et non totale »3. En effet, pour avoir une imputation du crédit d’impôt étranger, il est pris en compte le montant de l’impôt américain calculé sur les revenus de source étrangère. Or, les revenus de source américaine n’y sont pas concernés. Lorsque l’impôt étranger est plus élevé que l’impôt américain4, le crédit est limité à l’impôt américain qui serait dû sur les revenus étrangers5.

Après le payement des impôts dans le pays d’accueil, les entreprises ont deux choix pour les bénéfices résiduels : soit les ramener aux Etats-Unis ou bien les réinvestir dans leurs activités à l’étranger6. Alors, lorsqu’une société choisit de rapatrier les bénéfices et de payer l’impôt aux Etats-Unis, la loi américaine permet un crédit pour impôt étranger afin de compenser une partie du montant de l’impôt américain que la société serait autrement payé7. A titre d’exemple, si une société dans le taux d’imposition est de 35% rapatrie un millionde dollar ($) de revenu gagné à l’étranger, il serait redevable de 350.000$ au trésor américain. Mais elle a déjà payé une somme de 200.000$ au taux de 20% dans l’Etat où ces revenus sont réalisés, donc il reste 150.000 $ à payer au trésor américain par l’application du mécanisme de crédit d’impôt. Ainsi, la société peut réinvestir les revenus de source étrangère à l’étranger sans avoir payé

1 - N.MELOT, op.cit., n°928, p. 454.

2-Neutralité: « La fiscalité devrait viser à assurer la neutralité et l’équité entre les différentes formes de

commerce. Les décisions devraient être motivées par des considérations économiques et non fiscales. Les entreprises qui se trouvent dans des situations similaires et qui effectuent des transactions similaires devraient être Soumises à des niveaux d’imposition similaires ». En ce sens v. Principes

directeurs internationaux de l’OCDE pour l’application de la TVA/TPS principes directeurs sur la neutralité, OCDE, Comité des affaires fiscales, Groupe de travail n°9 sur les impôts sur la consommation, 2011, p. 4. La neutralité est donc l’objectif primordial de la politique fiscale, son but est de mettre fin aux différences qui existent entre les entreprises qui utilisent le commerce traditionnel ou le commerce électronique.

3 - N.MELOT, op.cit., n°933, p. 456.

4 - Un exemple chiffré permettra de faire mieux comprendre l’imputation limitée : supposant que l’impôt dû en Etat « A » est 300.000dollars, et l’impôt dû aux Etats-Unis est 200.000 dollars. Supposons que la somme déduite est de : 50 000 dollar, alors l’impôt exigible aux Etats-Unis est 200.000-50.000=150.000 dollars.

5- Jane G. GRAVELLE, Reform of U.S. international taxation: alternatives, Congressional Research Service, june 3, 2015, p. 6.

6 - Special Report, op.cit., p. 2.