• Aucun résultat trouvé

La notion d’établissement stable (l’installation fixe d’affaires)

Section 1 : Les critères législatifs en législation comparée

Section 2 : Le critère conventionnel

1- La notion d’établissement stable (l’installation fixe d’affaires)

Le Modèle de convention de l’OCDE définit dans l’article 5 l’établissement stable de la manière suivante : l’expression « établissement stable » désigne une installation fixe d’affaires3 par l’intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité4.

1 - On ne peut pas envisager le concept d’un établissement stable sans références aux conventions fiscales. L’origine de ce concept revient à la seconde moitié du XIXème siècle où était utilisé dans les Etats allemands, notamment en Prusse. Il n’avait aucun sens fiscal. Par lequel, il est possible de désigner l’espace où l’activité est exercée. Il faut attendre le début du XXème siècle où les Etats signaient des conventions prévoyant l’imposition des bénéfices réalisés au lieu de la situation de l’établissement stable. V. Marie-Aline PIERRET, op.cit., p. 9.

2 -B.GOUTHIERE, 9ème édition, op.cit., n°16630, p. 268.

3 - Une installation d’affaires fixe : La fixité est synonyme de permanence, il suffit que l'installation n'ait pas été créée à des fins purement temporaires (ce qui exclut, par exemple, un stand dans une foire) ou, dans le cas contraire, qu'elle présente une durée suffisante.

4- L’article 5 de la convention algéro-française s’inspirant du Modèle de l’OCDE a défini l’établissement stable : «1) Au sens de la présente Convention, l’expression « établissement stable » désigne une

installation fixe d’affaires par l’intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité.

2) L’expression « établissement stable » comprend notamment : • a) un siège de direction ; • b) une succursale ; • c) un bureau ; • d) une usine ; • e) un atelier ; • f) un magasin de vente ;

• g) une mine, un puits de pétrole ou de gaz, une carrière ou tout autre lieu d’extraction de ressources naturelles.

3) Un chantier de construction ou de montage ne constitue un établissement stable que si sa durée dépasse trois mois.

4) Nonobstant les dispositions précédentes du présent article, on considère qu’il n’y a pas « établissement stable » si :

• a) il est fait usage d’installations aux seules fins de stockage, d’exposition ou de livraison de marchandises appartenant à l’entreprise ;

• b) des marchandises appartenant à l’entreprise sont entreposées aux seules fins de stockage, d’exposition ou de livraison ;

120

La fixité est synonyme de permanence, il suffit que l'installation n'ait pas été créée à des fins purement temporaires (ce qui exclut, par exemple, un stand dans une foire) ou, dans le cas contraire, qu'elle présente une durée suffisante.

L’autonomie de cet établissement peut être caractérisée, notamment, par l’existence des éléments ou de certains d’entre eux : d’un personnel distinct, de services commerciaux ; financiers ou techniques propres ; d’une comptabilité séparée de celle du siège ; d’un centre de décision.

La notion d’établissement stable telle qu’elle ressort des commentaires de l’OCDE suppose la réunion de trois conditions : une installation d’affaires (locaux, matériels…)1, fixe c’est-à-dire établie dans un lieu précis avec un certain degré de permanence et non pas de façon purement temporaire, et une activité exercée par l’intermédiaire de cette installation au moyen du personnel2 ; ce qui signifie que, les personnes qui dépendent de l’entreprise, exercent les activités de l’entreprise dans l’Etat où est située l’installation fixe.

Cette notion utilisée notamment dans le cadre des conventions fiscales internationales est assez proche d’un autre concept appelé le concept d’entreprise exploitée utilisée en France dans l’article 209 du CGI en matière de territorialité de l’impôt sur les sociétés. Dans le cas où on trouve une différence dans la définition d’établissement stable3 donnée par le droit interne et les conventions fiscales qu’elle

• c) des marchandises appartenant à l’entreprise sont entreposées aux seules fins de transformation par une autre entreprise ;

• d) une installation fixe d’affaires est utilisée aux seules fins d’acheter des marchandises ou de réunir des informations, pour l’entreprise ;

• e) une installation fixe d’affaires est utilisée aux seules fins d’exercer, pour l’entreprise, toute autre activité de caractère préparatoire ou auxiliaire ;

• f) une installation fixe d’affaires est utilisée aux seules fins de l’exercice cumulé d’activités mentionnées aux alinéas a à e, à condition que l’activité d’ensemble de l’installation fixe d’affaires résultant de ce cumul garde un caractère préparatoire ou axillaire… ». J.O.R.A. n° 24 du 10 avril 2002, n°24, p. 6.

1 -Il doit exister un local, ou, dans certains cas, des machines et outillages. Peu importe que l’entreprise soit propriétaire ou non du local ou du matériel (elle peut être donc locataire). Selon les commentaires de l’OCDE, une place sur un marché, ou un emplacement, sont des installations. Il est aussi possible qu’une société ait un établissement stable dans sa filiale, cette possibilité a été confirmée par le Conseil d’Etat français à propos d’une société luxembourgeoise qui exercer une activité de commerce de gros et d’exportation de parfums, de produits cosmétiques et d’accessoires de mode en utilisant les locaux de la filiale française. CE 12 mars 2010 n°307235, 8 et 3 s.-s., Sté Imagine action Luxembourg : RJF/5/10 n°465 ; conclusions au BDCF 5/10 n°53, V. B.GOUTHIERE, 9ème édition, op.cit., n°17355, p. 269.

2-Daniel GUTMANN, Société et établissements stables en droit fiscal international et de l’Union

Européenne, l’Harmattan, Paris, 2012, p. 15.

3- parfois, des difficultés se posent pour qualifier l’établissement stable. Ainsi, en a-t-il été dans le cas d’un commissionnaire. Dans une affaire Zimmer, une juridiction du fond avait jugé qu’un

121

définition qu’on peut l’utiliser ? Il ne faut pas oublier qu’il existe un principe de subsidiarité1 des conventions fiscales internationales. Cette exception permet en effet au juge de considérer la notion d’établissement au regard du droit interne en prime abord, et au regard du droit conventionnel ensuite.

La notion d’établissement stable n’est toutefois pas une notion définie dans tous les pays, cette notion varie relativement d’une convention à autre2. Car le problème est que le contenu des conventions fiscales bilatérales est relativement variable3. Mais la plupart des conventions signées par l’Algérie reposent sur le Modèle de l’OCDE. Ainsi, toutes les conventions donnent des exemples d’établissements stables mais il ne s’agit jamais de listes limitatives. De surcroit, il est important de dire qu’il existe une similitude entre le concept d’établissement stable et celui de base fixe. Cette similitude consiste dans la fixité dans un même Etat en excluant certaines activités de leur définition4. Cependant si cet établissement s’applique dans le cadre des activités industrielles et commerciales, l’expression de base fixe ne s’applique que sur le revenu tiré d’une profession libérale ou plus généralement d’une activité indépendante. Avant2000, la convention Modèle de l’OCDE avait traité l’imposition des revenus tirés des professions libérales dans un article séparé, soit l’article 14. Cependant, cet article a

commissionnaire français d’une société étrangère constitué un établissement stable en France de la société « commettante ». La juridiction du fond avait estimé que le commissionnaire français qui était soumis aux instructions de la société « commettante » (une société anglaise), ne pouvait être regardé comme ayant jouit d’un statut indépendant au sens de la convention franco-britannique du 22 mai 1968, et devait être regardé comme un établissement stable en France de la société « commettante » qui y était donc imposable. CAA de Paris 2 février 2007, 2e chambre B, n° 05-2361, société Zimmer Ltd, RJF 2007, n°5, comm. N°540. V. BERNARD BEIGNIER, Cours droit fiscal des affaires, Lextenso, 2010,

p. 312.

1-Le principe de subsidiarité apparaît essentiellement comme une méthode ayant vocation à guider le contribuable, l’administration et le juge de l’impôt dans l’application des règles fiscales dans un contexte international. En pratique, il est dans tous les cas nécessaire de prendre en compte à la fois les dispositions du droit interne et celles des conventions fiscales internationales. D’une manière générale, la subsidiarité peut être définie comme « le caractère de ce qui est subsidiaire », ce qui « a vocation à

venir en second lieu (à titre de remède, de garantie, de suppléance, de consolation) pour le cas où ce qui

est principal, primordial, vient à faire défaut. Il signifie donc, que ce sont normalement les dispositions du droit interne qui doivent être examinées en premier lieu, et par la suite, les dispositions de la convention fiscale internationale applicable. V. CLOUTÉ Alexandra, Le principe de subsidiarité des conventions fiscales internationales, master 2, université Paris 1, 2011, p. 13.

2- Notamment dans le cas de la durée exigée pour les chantiers de construction pour pouvoir être considéré comme établissement stable. Cependant, à nos jours, presque toutes les conventions fiscales considèrent l’établissement stable comme une base d’imposition d’une entreprise étrangère. Selon B. PARTY la notion de cette installation est « assez stable, mais qui est loin d’être simple à la fois dans

son concept et dans ses applications ». B. PARTY, op.cit., n° 23, p. 13.

3- JEAN-PIERRE CASIMIR et MARTIAL CHADEFAUX, Droit fiscal, Nathan, 2011, p. 234.

122

été supprimé sur la base de leurs dispositions semblables à celles applicables aux bénéfices des entreprises. Il résulte de cette suppression que le concept d’établissement stable sera appliqué aussi bien à ce qui constituait auparavant base fixe1. En dépit, de sa suppression, l’Algérie maintient cet article dans la rédaction de ses conventions fiscales. Aussi en est-il de la convention avec la Chine dans son article 14 qui prévoit : « Les

revenus qu’un résident d’un Etat contractant tire d’une profession libérale ou d’autres activités de caractère indépendant ne sont imposables que dans cet Etat, sauf :

• a) s’il dispose de façon habituelle d’une base fixe dans l’autre Etat contractant pour l’exercice de ces activités. Dans ce cas, seule la fraction du revenu imputable à cette base fixe est imposable dans l’autre Etat contractant… ». Cet article octroi donc le droit

d’imposition à l’Etat où est située la base fixe. De plus, certaines conventions ont utilisé le terme d’un « bureau de liaison » telle que la convention algéro-française du 17 mai 1982. La question qui se pose donc est de savoir si un bureau de liaison est qualifié comme établissement stable ? Il avait admis lors de la négociation de la dite convention qu’un bureau ne peut être en aucun cas comme établissement stable. L’Algérie, a subordonné l’ouverture d’un tel bureau à un agrément préalable et à l’immatriculation au registre de commerce2.

D’une autre côté il est important de rappeler que la notion d’établissement stable permet d’attribuer à un Etat contractant le droit d’imposer les bénéfices d’une entreprise de l’autre Etat contractant. En effet, un Etat ne peut taxer les bénéfices d’une entreprise résidente de l’autre Etat que si elle exerce ses activités par l’intermédiaire d’un établissement stable situé dans le premier Etat. Ce droit d’imposition est fondé sur un élément de rattachement matériel qui se dessine autour de la notion de cette installation fixe3.

L’article 5 du Modèle de l’OCDE vient préciser que la notion d’établissement stable comprend notamment : un siège de direction, une succursale, un bureau, une usine, un atelier et une mine, un puits de pétrole ou de gaz, une carrière ou tout autre

1 - OCDE, Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune, n°1.1, p. 88.

2 -V. circulaire du 27 mars 1982 relative aux conditions d’ouverture des agences, succursales ou autres établissement en Algérie. Cité par Masmi Yasmine, L’établissement en droit fiscal international,

Mémoire de master en droit public économique, Université Oran 2, 2015, p. 28.

123

lieu d’extraction de ressources naturelles. A noter que l’ensemble des conventions fiscales internationales conclut par l’Algérie reprennent généralement ces éléments.

Certains pays ont inséré, dans leurs conventions s’inspirant du Modèle de l’OCDE, des nouveaux exemples qui considèrent autres installations comme établissement stable. Telle est le cas de la convention fiscale conclue entre l’Algérie et les Emirats Arabes Unis, qui prévoit que ce terme englobe également une exploitation agricole ou un champ.1 Il en est de même, dans la convention fiscale entre l’Algérie et Bahreïn qui a ajouté une ferme ou une implantation2. Le terme d’exploitation agricole est utilisé également dans la convention franco-australienne de 19763. D’autres conventions ont utilisé l’expression de bureau d’achat4. Ces ajouts permettent aux Etats d’élargir leur droit d’imposition puisque ces installations se situent sur leur territoire.

Selon le Modèle de convention de l’ONU, la liste des établissements stables s’étend pour rejoindre, les services de consultants, lorsque leur durée dépasse 6 mois5. L’Algérie de son côté a ajouté ces services dans sa convention précitée conclue avec l’Etat du Bahreïn6. Cet ajout est justifié par les sommes considérables mises en jeu par la fourniture de services dans ces pays7.

En effet, et en dépit que l’article 5 de Modèle de convention de l’ONU entre pays développés et pays en développement se fonde sur l’article 5 Modèle de l’OCDE, il diffère cependant sur ce dernier dont l’énumération des installations qui peuvent être

1 - V. l’article 5 de la convention fiscale signée le 24 avril 2001 entre l’Algérie et l’Emirat arabe en vue d’éviter la double imposition et prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu et sur le capital p. 6, J.O.R.A n°26, du 13/04/2003, p. 4.

2 -V. l’art 5 al.1 g de la convention conclue entre l’Algérie et Bahreïn en vue d’éviter la double imposition et prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôt sur le revenu, JORA n°50 du 20 août 2003, p. 03.

3- PIERRET Marie-Aline, La définition de l’établissement stable à la lumière du Modèle de convention

de l’OCDE, Mémoire pour l’obtention du Master II de recherche en droit fiscal, Université

Panthéon-Assas Paris II, 2006-2007, p. 21.

4 - La convention franco-argentine de 1979.

5 -Art 5 al3-b du Modèle de convention de l’ONU : « La fourniture, par une entreprise, de services, y

compris de services conseils, par l’intermédiaire d’employés ou autre personnel engagés par l’entreprise à cette fin, mais seulement si des activités de cette nature se poursuivent ( pour le même projet ou un projet connexe) dans un Etat contractant pour une période ou des périodes totalisant plus de 183 jours d’une période de 12 mois commençant ou s’achevant au cours de l’année fiscale concernée ». Modèle de convention des Nations Unies concernent les doubles impositions entre pays

développés et pays en développent, Révision de 2011, Nations Unies, New York, 2015, p. 10.

6 -Art 6 al.3-i : « La fourniture de services, y compris les services de consultants, par une entreprise

agissant par l’intermédiaire de salariés engagés par l’entreprise à cette fin, mais seulement lorsque ces services continus ou interrompus se poursuivent pendant une période de plus de six (6) mois dans les limites d’une période maximale de douze(12) mois ».

124

constituées des établissements stables. L’article 5 de l’ONU considère la fourniture de services par une entreprise agissant par l’intermédiaire de salariés comme un établissement stable. Ce dernier article exige également la durée de 6 mois pour qu’un chantier de construction constitue un établissement stable au lieu la durée de 12 mois requise par l’OCDE.

Toutefois, si une installation figurant au nombre des exemples donnés par une convention fiscale ne répond pas à la définition générale1 elle ne constitue pas, donc, un établissement stable. Par exemple, si une installation figurant dans la liste (une succursale, ou un bureau…) ne fait pas d’affaires ou ne sert pas à l’exercice de l’activité de l’entreprise, elle n’est pas constitutive d’un établissement stable2.

Donc, pour que l’on soit en présence d’un établissement stable, trois conditions doivent être remplies : il doit s’agir d’une installation dans laquelle s’exerce une activité génératrice de profits ; elle doit être permanente et elle doit avoir une autonomie réelle même si cette autonomie est limitée.