• Aucun résultat trouvé

1. Une méthodologie actuelle en géographie de la santé

1.2. Le modèle PRECEDE-PROCEED

1.2.1. Description du modèle

Pour établir la liste des facteurs qui influent sur les maladies, des outils conceptuels sont utilisés pour penser la complexité plutôt que de la disséquer ou l’ignorer. Green et Kreuter ont construit un modèle de planification pour l’élaboration d’interventions en prévention. Ce modèle décrit les facteurs qui prédisposent au comportement (valeurs, croyances, attitudes, perceptions), le facilitent (habiletés, ressources) ou le renforcent (gains ou résultats visibles, support des pairs)16.

Dans les projets de développement, une réflexion opérationnelle est nécessaire sur l’application des outils de communication d’où l’utilisation incontournable de l’approche systémique.

Si différents modèles existent, le modèle PRECEDE-PROCEED a été choisi car contrairement à d’autres, il a déjà été utilisé dans le cadre de projets en développement. Ce modèle émane du monde anglophone de la promotion de la santé. Cette origine et sa multidisciplinarité (modèles issu de plusieurs disciplines : épidémiologie, sciences sociales, comportementales et de l'éducation) a conforté notre choix.

Pour Green et Kreuter, concepteur du modéle, la promotion de la santé est « t t c i i d’ cti planifiées de type éducatif, politique, législatif ou organisationnel appuyant des habitudes de vie et des

conditions de vie favorables à la santé des individus, de groupes ou de collectivités. » (Green, Kreuter,

1999)

1.2.2. Méthodologie et utilisation du modèle

Le modèle met l'accent sur la planification des interventions et sur les résultats recherchés à partir de diagnostics (sociaux, épidémiologiques, comportementaux, environnementaux) directement en relation avec le(s) problème(s) ciblé(s). L'analyse du problème sanitaire se concentre sur les explications des déterminants des comportements en santé (déterminants éducationnels). Le diagnostic institutionnel permet de compléter l'analyse de situation à un niveau macroscopique.

La lecture du modèle se fait de droite à gauche, du diagnostic épidémiologique et social au diagnostic comportemental vers les déterminants éducationnels pour arriver au diagnostic institutionnel. Des boucles de rétroactions existent dans sa construction et son utilisation (Green, Ottoson, 2006). Le

16 L'acronyme PRECEDE signifie « Predisposing, Reinforcing and Enabling Constructs in Educational/Environment Diagnosis and Evaluation » c'est à dire « les facteurs prédisposants, facilitants et de renforcement identifiés par le diagnostic éducationnel et environnemental et de l'évaluation de ce diagnostic. »

L'acronyme PROCEED signifie quant à lui « Policy, Regulatory and Organizational Contructs in Educational and Environmental Development » c'est à dire « Politiques, réglementations et organisations dans le développement éducationnel et environnemental. »

59

modèle se construit à partir du vécu des acteurs qui œuvrent dans la lutte contre les problèmes de santé. Il doit être source de débat.

1.2.3. Pourquoi utiliser ce modèle ?

Plusieurs avantages penchent en faveur du choix de ce modèle. Tout d'abord, le modèle permet une planification plus opérationnelle des activités avec la définition de résultats attendus mesurables pour une ou plusieurs populations bien déterminées. Une analyse complète basée sur une approche systémique fait, en général, apparaître d'elle-même les axes stratégiques pertinents. Les composantes du modèle peuvent être traduites en stratégies d'intervention.

Par ailleurs, sa capacité d’adaptation aux différentes problématiques et à ses différentes formes d’utilisation est importante. Le modèle peut être utilisé dans un contexte d'action, de recherche, d'analyse de situation ou transversale à ces différentes utilisations. Avec des mises à jour régulières, cet outil d'analyse ou d’évaluation est dynamique avec des critères variés et souples (ajouter ou retirer des composantes): cohérence, pertinence, appropriation, globalité.

Enfin, ce modèle facilite le dialogue car il donne un objectif commun aux acteurs.

Les acteurs de la prévention notamment les professionnels de santé sont incités à identifier de façon exhaustive les facteurs qui interviennent dans le(s) problème(s) auquel (auxquels) ils sont confrontés. Ce modèle permet de dresser un diagnostic précis et détaillé.

1.2.4. Les différents diagnostics du modèle

Le modèle PRECEDE-PROCEED fait partie des théories de causalité qui signifient que certaines causes engendrent tels effets (modèle Inputs–Outputs). Le modèle est décomposé en plusieurs diagnostics (Fig. 6).

Figure 6 : Le modèle PRECEDE-PROCEED (La Santé de l’homme, 2007)

Le diagnostic social : les problèmes sociaux d'une communauté sont de bons indicateurs de la qualité de

vie de celle-ci. Ces indicateurs intègrent deux dimensions, l'une quantifiable (emploi, chômage, niveau d'éducation, densité de population, logement…) et l'autre qualitative (obstacles des populations à l'amélioration de leur qualité de la vie, leur santé…).

60

Le diagnostic épidémiologique repose sur l'identification de problèmes épidémiologiques : incidence,

prévalence, distribution du problème de santé… Ces données associées aux informations des publications scientifiques aident à une meilleure définition des priorités d'actions.

Le diagnostic comportemental/environnemental étudie les relations entre comportements et problèmes

identifiés, en vue de dégager la causalité multifactorielle de situations à problèmes.

Le diagnostic éducationnel consiste à distinguer les comportements selon les facteurs « déterminants »

classés en trois catégories : les facteurs « prédisposants » (connaissances, attitudes, valeurs, perceptions,…), les facteurs « facilitants » (aptitudes personnelles ou communautaires) et les facteurs

« renforçants » (feedback ou « rétroaction » que la personne reçoit des autres quant au comportement

adopté, avec effet d'encouragement ou de découragement).

Le diagnostic administratif/politique consiste en l'analyse de données du contexte administratif,

institutionnel, réglementaire, organisationnel et politique qui influencent la mise en place d'un projet ou d'un programme.

1.3. Une ébauche de l’outil de promotion de la santé Preffi 2.0

1.3.1. Présentation de l’outil

Il est nécessaire de multiplier les études sur l’évaluation de la promotion de la santé, sur son efficacité et sur les données probantes qui permettent de l’argumenter. Aujourd’hui, la question n’est plus s’il faut ou non développer de la qualité mais de comment faire ? (Cambon, 2008) Des outils (Preffi 2.0, PromoSantéSuisse) permettent de définir des critères de qualité des interventions en promotion de la santé.

Plus qu'un instrument de mesure de l'efficacité des programmes, Preffi est un outil de pilotage et d'analyse de la planification. Il peut être utilisé dans la conception du projet, dans sa mise en œuvre ou dans son évaluation. Preffi est tout comme le modèle PRECEDE-PROCEED adapté à plusieurs types de projets quels que soient leur envergure (nationale, locale, communautaire).

Plusieurs objets d’analyse caractérisent cet outil:

1. La pertinence : les objectifs sont-ils justifiés par rapport aux problèmes ?

2. La cohérence : les stratégies répondent-elles aux objectifs ? Les objectifs sont cohérents entre eux

?

3. L’i p t ti : conditions, contextualisation de l’intervention ?

Quels sont les éléments qui rendent les programmes de promotion de la santé efficaces? Les programmes de promotion de la santé ne sont pas tous fondés sur des preuves d’efficacité, loin s’en faut. Bon nombre des programmes « estimés » efficaces ne le sont en réalité que partiellement.

Les études sur les effets des programmes de promotion de la santé ont produits beaucoup d’informations mais leurs résultats sont rarement appliqués. Par ailleurs, le chercheur néglige souvent de donner des détails sur les conditions contextuelles (temps, financement, soutien) et les circonstances (contexte local, social, culturel, économique) dans lesquelles les effets des interventions ont été obtenus. Pourtant, ces

61

détails sont nécessaires pour décider s’il faut adapter l’intervention dans d’autres contextes (réplication) ou si elle doit être modifiée.

L’outil accorde une importance particulière à trois ressources essentielles : l'engagement des acteurs, les moyens disponibles et l'expertise et les compétences du responsable du projet. Il est accompagné d'un

« guide explicatif » qui décrit les indicateurs associés aux différentes phases de la démarche et analyse

leur importance pour l'efficacité du projet. Chaque indicateur se voit attribuer un niveau de preuve selon qu'il est fondé sur des données de la recherche, de l'expérience pratique ou de la logique et du sens commun. Pour chacun des indicateurs, trois options d'appréciation, « faible », « moyen » et « fort » sont proposées. L'objectif n'est pas en de juger mais de les utiliser pour identifier les points d'amélioration importants et réalisables.

Le questionnaire reprend les différentes phases d'une démarche de projet c’est-à-dire l’analyse du problème, les déterminants, les destinataires, les objectifs, la conception de l'intervention, la mise en œuvre et l’évaluation. Huit critères sont développés :

1. Les conditions contextuelles : le soutien et l’engagement, la capacité, le leadership, l’expertise et

les caractéristiques du chargé de projet et le point de mire pour le leadership,

2. L’ y d pr : la nature, la gravité et l’ampleur du problème, la répartition du

problème et la perception du problème par les intervenants,

3. Les déterminants du problème : les comportements et le milieu, les modèle théoriques, la

contribution des déterminants au problème, au comportement ou au facteur environnemental, la susceptibilité des déterminants au changement et les priorités et sélection,

4. Le choix et élaboration d'interventions : le groupe cible, les caractéristiques générales et

démographiques du groupe cible, les motivations et possibilités du groupe cible, l’accessibilité du groupe cible,

5. Les cibles : les objectifs correspondent à l'analyse, les objectifs sont spécifiques, précisés dans le

temps et mesurables, les objectifs sont acceptables, les objectifs sont réalisables,

6. L’é r ti d 'i t rv ti : la raison d'être de la stratégie d'intervention, l’adaptation des

stratégies et des méthodes aux objectifs et aux groupes cibles, l’expérience antérieure avec la ou les interventions, la durée, l’intensité et l’échéancier, la durée et l’intensité de l'intervention, le moment de l'intervention, l’adaptation au groupe cible, la participation du groupe cible, l’adaptation à la « culture », la techniques efficaces, la faisabilité dans la pratique existante, l’adaptation aux groupes cibles intermédiaires, les caractéristiques de la capacité de mise en œuvre de la ou des interventions, la cohérence des interventions/activités, les test préliminaire,

7. L i œ vr : le choix d'une stratégie de mise en œuvre adaptée aux intermédiaires, le

mode de mise en œuvre, l’adaptation des interventions de mise en œuvre aux intermédiaires, l’acceptation des fournisseurs par les intermédiaires, le suivi et la rétroaction, l’intégration à la structure existante,

8. L’év ti : la clarté et l’accord sur les principes d'évaluation, l’évaluation du processus,

l’évaluation des effets, un changement a-t-il été mesuré?, le changement a-t-il été causé par l'intervention?, la rétroaction aux intervenants.

62

1.3.2. Organismes consultés et méthodologie de récolte

Pour utiliser cet outil peu connu dans le monde et encore moins au Mali, il a fallu contacter certaines O.N.G. et associations par Internet pour leur présenter l’outil Preffi via l’envoi de certains articles (Cambon, 2008; Molleman, Ploeg, Hosman, Peters, 2004; Molleman, Peters, Hommels, Ploeg, 2003 ; Molleman; Molleman).

Pour réaliser ces questionnaires sur place, du temps a été nécessaire pour bien expliquer chaque question et expliquer l’objectif final : déterminer sur quels points l’organisation en question peut s’améliorer. Il n’était en aucun cas question de juger ou de critiquer mais de tenter d’apporter quelques réponses. Le questionnaire de 28 pages a été long à passer d’où un nombre limité d’organisations rencontrées (N=32, Fig. 7).

Figure 7: Organisations Non-Gouvernementales ayant participées à la récolte de données avec l’outil Preffi 2.0.

Pour faciliter la passation de cet outil, les organisations rencontrées ont été des organisations déjà connues, de confiance et qui ont une expérience en matière de lutte contre le VIH/SIDA.

1.3.3. Présentation des résultats

Chaque catégorie citée précèdemment (2.1.3.a.) se compose en plusieurs pages sous la forme suivante (Fig. 8).

Figure 8 : Exemple de catégorie de question et de formulaire de notation de l’outil Preffi

Suivant les réponses « oui » ou « non » récoltées, le chercheur rempli la feuille de notation en considérant l’effort de l’organisation comme : non analysable, faible, moyen ou fort (Fig. 8).

Pour présenter nos résultats dans le corps du texte, nous utiliserons le format suivant (Fig. 9).

63

Si les outils sont importants à connaître et à maîtriser, leur utilisation ne peut être formatée à tous les milieux et tous les lieux. Le chercheur doit nécessairement adapter sa méthode, et donc ses outils, à son terrain.