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CHAPITRE 2. Cadre conceptuel

2.3. Contribution des écrits théoriques au cadre conceptuel

2.3.3. Modèle de développement professionnel de Butler, Schnellert et MacNeil (2015)

agency, efficacy and inquiry in professional development de Butler, Schnellert et MacNeil (2015) permet de pallier les limites constatées des modèles d’accompagnement d’Atteberry et Bryk (2011) et de Lafortune et Martin (2004). En effet, bien qu’il s’agisse d’un modèle qui conceptualise le processus de développement professionnel des enseignants, il a été retenu parce que le processus, tel qu’il est présenté, peut aussi illustrer celui du conseiller

pédagogique. Ainsi, les composantes liées à l’enseignant comme accompagnateur de l’apprentissage des jeunes peuvent être appliquées au conseiller pédagogique comme accompagnateur de l’apprentissage des adultes. De plus, ce modèle permet d’identifier des caractéristiques individuelles du conseiller pédagogique et des caractéristiques du contexte de l’école. Dans ce qui suit, le modèle est d’abord présenté, suivi de sa contribution au cadre conceptuel de l’étude.

Les postulats de base du modèle de Butler, Schnellert et MacNeil (2015) sont, entre autres, la reconnaissance de l’importance des connaissances et des expériences de l’enseignant, et de l’importance de considérer le caractère contextuel des besoins des enseignants et des élèves. Le modèle se base aussi sur l’idée que le développement professionnel de l’enseignant est favorisé par sa participation à un processus de recherche collaborative (collaborative inquiry) où les acteurs impliqués agissent de manière intentionnelle dans des activités authentiques. Selon les auteurs, l’objectif de ce processus est de soutenir les enseignants dans l’identification et l’atteinte d’objectifs de changement de pratiques dans leur classe ou ce que les auteurs appellent la recherche orientée vers l’atteinte de buts, ou goal-directed inquiry. Le modèle est constitué de trois concepts : 1) les cycles de recherche collaborative qui correspondent au processus d’accompagnement; 2) les perceptions d’agentivité et d’autoefficacité qui correspondent à deux caractéristiques individuelles du conseiller pédagogique et de la direction et deux caractéristiques collectives des enseignants; 3) les niveaux du contexte (layers of context) dont certains ont été retenus comme des caractéristiques du contexte de l’école. Ces trois concepts sont présentés dans ce qui suit.

Cycles de recherche collaborative correspondant au processus d’accompagnement

Selon le modèle de Butler, Schnellert et MacNeil (2015), les enseignants sont engagés dans un processus de recherche collaborative lorsqu’ils identifient des objectifs, planifient et mettent en œuvre des stratégies d’enseignement pour atteindre ces objectifs dans leurs classes, contrôlent leurs stratégies en se basant sur le progrès de leurs élèves et ajustent leurs objectifs ou leurs stratégies en conséquence de manière itérative jusqu’à l’atteinte des objectifs tracés. Durant toutes ces phases, un recours à des ressources pour alimenter la pensée et la pratique se fait au besoin. Les phases du cycle de recherche collaborative sont alors : l’identification

d’objectifs, la planification, la mise en œuvre, le contrôle du progrès et des résultats, et l’ajustement des objectifs et des pratiques.

Perceptions d’agentivité et d’autoefficacité correspondant à deux caractéristiques individuelles du conseiller pédagogique et de la direction, et à deux caractéristiques collectives des enseignants

Le modèle se base sur les deux concepts de perception d’agentivité et d’autoefficacité de Bandura (1989; 1993; 2000). Selon Butler, Schnellert et MacNeil (2015), les perceptions d’agentivité et d’autoefficacité sont importantes pour comprendre l’engagement des personnes dans les cycles de recherche collaborative. Selon les auteurs, l’investissement des enseignants dans des initiatives de changement dépend aussi bien de leur perception à avoir leur mot à dire dans l’identification des objectifs à atteindre et comment y arriver (perception d’agentivité), que de leur perception de compétence à atteindre ces objectifs (perception d’autoefficacité).

La perception de l’agentivité personnelle est « la perception que les gens ont du contrôle qu’ils exercent sur leurs activités et leurs vies » (traduction libre, Butler, Schnellert et MacNeil 2015, p. 5). Selon les auteurs, les personnes qui pensent qu’elles ont leur mot à dire dans une activité sont plus susceptibles de s’y engager. De plus, en faisant référence à la dimension sociale de l’agentivité (nommée agentivité collective chez Bandura, 2000), les auteurs préfèrent parler de rôles et responsabilités au sein des niveaux de contexte. Selon eux, « l’engagement dans la pratique et dans le changement implique souvent que les individus entretiennent une relation de collaboration riche et orientée par des objectifs [communs] » (traduction libre, Butler, Schnellert et MacNeil 2015, p. 7).

Pour ce qui est de la perception d’autoefficacité, Butler, Schnellert et MacNeil (2015) font référence à Bandura (2000) qui distingue deux types de perceptions : l’autoefficacité personnelle et l’autoefficacité collective. Les perceptions de l’autoefficacité personnelle sont les croyances que les gens ont de leur efficacité personnelle à accomplir ou non une tâche donnée (Bandura, 1991). Les perceptions d’autoefficacité collective, que l’auteur rattache aux perceptions de l’agentivité collective, sont « les croyances partagées des gens de leur pouvoir collectif à produire les résultats désirés » (traduction libre, Bandura, 2000, p. 75). Selon

Bandura (2000), l’autoefficacité collective n’est pas la somme des croyances d’autoefficacité individuelle des membres, mais une propriété émergente au niveau du groupe. Elle influence

« le type de futur qu’ils cherchent à atteindre par les actions collectives, l’utilisation de leurs ressources, la quantité d’efforts qu’ils déploient dans leur travail de groupe, les forces qu’il leur reste lorsque les efforts collectifs ne parviennent pas à produire des résultats rapides ou lorsqu’ils rencontrent une opposition forte, et enfin, leur vulnérabilité au découragement » (traduction libre, Bandura, 2000, p. 76).

Selon Butler, Schnellert et MacNeil (2015), les gens qui se perçoivent capables d’atteindre un but sont plus susceptibles de persévérer.

Niveaux de contextes correspondant à certaines caractéristiques du contexte de l’école D’après le modèle de Butler, Schnellert et MacNeil (2015), la recherche collaborative des enseignants se déroule dans des niveaux de contexte qui créent les conditions qui permettent ou entravent leur implication. Il s’agit du contexte sociopolitique gouvernemental, des politiques éducatives, des pratiques, des incitateurs, des ressources et du soutien offert au niveau provincial, régional et au niveau de l’école. Au niveau de l’école, le modèle insiste sur le rôle que peuvent jouer les directions et les conseillers pédagogiques auprès des enseignants. En effet, ils peuvent soutenir le processus de recherche et permettre ainsi aux enseignants d’accéder à des ressources qui peuvent les aider à développer leur pratique. De plus, ils peuvent encourager l’agentivité des enseignants. En effet, les enseignants exercent leur agentivité, mais dans un contexte où d’autres agents exercent eux aussi leur agentivité, d’où l’importance de considérer les rôles et responsabilités de chacun. Butler, Schnellert et MacNeil (2015) considèrent que le leadership distribué permet aux enseignants de percevoir leur agentivité à l’école et ainsi mieux s’impliquer dans les cycles de recherche collaborative. En effet, un leadership distribué équitablement permet de donner une voix aux enseignants dans la prise de décisions qui les concernent (Butler, Schnellert et MacNeil, 2015).

En résumé, le modèle de Butler, Schnellert et MacNeil (2015) apporte un éclairage important au cadre conceptuel de la présente étude. D’abord, il permet de conceptualiser l’accompagnement d’enseignants sous forme de processus complexe et dynamique de pensées

et de pratiques orientées vers l’atteinte d’objectifs précis, favorisant l’agentivité des enseignants et relié aux caractéristiques individuelles du conseiller pédagogique et aux caractéristiques du contexte de l’école. De plus, il permet d’identifier des caractéristiques individuelles et collectives reliées à ce processus. En outre, il permet de conceptualiser les phases du processus d’accompagnement : 1) l’identification d’objectifs; 2) la planification des pratiques; 3) la mise en œuvre des pratiques; 4) le contrôle du progrès et des résultats et 5) l’ajustement des objectifs et des pratiques. Cela permet de considérer explicitement l’identification des objectifs comme la phase qui déclenche et oriente les pensées et les pratiques d’accompagnement. De plus, le modèle permet de distinguer ce qui relève de la pensée de ce qui relève de la pratique en considérant la phase de mise en œuvre réelle de la pratique d’accompagnement auprès des enseignants. En outre, le modèle permet de considérer les ressources planifiées et mobilisées dans le processus d’accompagnement, ce qui n’est pas très clair dans le modèle de Lafortune et Martin (2004).

Par ailleurs, le modèle permet d’identifier les caractéristiques individuelles du conseiller pédagogique suivantes : sa perception de l’agentivité des enseignants et sa perception d’autoefficacité personnelle. Enfin, il permet de cerner les caractéristiques suivantes du contexte de l’école : les caractéristiques individuelles de la direction (le leadership de la direction, sa perception d’autoefficacité et sa perception d’agentivité) et les caractéristiques collectives des enseignants (perception d’agentivité collective et perception d’autoefficacité collective).

Toutefois, comme ce modèle ne porte pas sur le processus d’accompagnement d’enseignants par le conseiller pédagogique, il ne permet pas de présenter les pratiques d’accompagnement. Le recours à un modèle qui conceptualise les pratiques d’accompagnement est alors nécessaire.