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CHAPITRE 1. Problématique

1.1. Contexte de l’étude

1.1.3. Accompagnement des enseignants par le conseiller pédagogique

Pour soutenir le développement professionnel des enseignants, plusieurs systèmes d’enseignement leur offrent de l’accompagnement par des professionnels dans le contexte de leur école (Mané et Lessard, 2007). Ces professionnels sont nommés conseillers pédagogiques3

dans certains pays francophones (p. ex. Belgique) et coach dans certains pays anglophones (p. ex. États-Unis). Dans la présente thèse, l’accompagnement d’enseignants par le conseiller pédagogique est considéré comme un processus complexe et dynamique de pensées et de pratiques orientées vers l’atteinte d’objectifs précis, favorisant l’agentivité des enseignants et relié aux caractéristiques individuelles du conseiller pédagogique et aux caractéristiques du contexte de l’école. Comme les caractéristiques individuelles du conseiller pédagogique et son processus d’accompagnement peuvent varier d’un contexte à l’autre, cette section présente d’abord les apports du processus d’accompagnement dans le développement professionnel des enseignants. Ensuite, des exemples de la France, de la Belgique, des États-Unis et du Canada sont présentés. Pour chaque exemple, la description des caractéristiques du conseiller pédagogique est d’abord donnée, suivie d’une description de son processus d’accompagnement dans le contexte de l’école.

3 Dans cette thèse, le terme « conseiller pédagogique » réfère à tout professionnel ayant la tâche d’accompagnement

Plusieurs recherches ont montré l’apport du processus d’accompagnement du conseiller pédagogique sur les conceptions et les pratiques des enseignants et sur les résultats des élèves. En effet, les enseignants ayant reçu un accompagnement considèrent que leur rôle est de soutenir le processus d’apprentissage des élèves (Teemant, 2014) et de répondre à leurs besoins (Stephens, Morgan, DeFord, Donnelly, Hamel, Keith, Brink, Johnson, Seaman, Young, Galant, Hao et Leigh, 2011; Vanderburg et Stephens, 2010), ce qui n’est pas constaté chez les enseignants qui n’ont pas reçu d’accompagnement. De plus, la mise en œuvre de leurs pratiques s’est améliorée par rapport aux attentes des programmes d’enseignement (Coburn et Woulfin, 2012) et aux attentes des chercheurs (Neuman et Cunningham, 2009; Sailors et Price, 2015; Teemant, Wink et Tyra, 2011; Vanderburg et Stephens 2010; Stephens et al., 2011). Certains changements de conceptions et de pratiques chez les enseignants ont même été maintenus dans le temps (Sutherland, Conroy, Vo et Ladwig, 2015; Teemant, 2014). Par ailleurs, les élèves des enseignants accompagnés ont obtenu un rendement plus élevé en littératie en comparaison avec le groupe-témoin (Biancarosa, Bryk et Dexter, 2010; Matsumura, Garnier, Correnti, Junker et Bickel, 2010) et plus précisément en lecture (Sailors et Price, 2015; Elish-Piper et L’Allier, 2011).

En France, les conseillers pédagogiques sont des enseignants en exercice qui sont dégagés partiellement de leur tâche d’enseignement pour accompagner les nouveaux enseignants (Jorro et Pana-Martin, 2012). Le conseiller pédagogique français a aussi un rôle à jouer dans la formation initiale des enseignants et « apporte son appui aux enseignants, aux directeurs et aux équipes pédagogiques » (MEN, 2019d). Diplômés d’un certificat d’aptitude à la fonction d’instituteur professeur des écoles maitre formateur (MEN, 2019d), leur processus d’accompagnement consiste à observer en classe puis à s’entretenir avec l’enseignant sur les éléments observés (Jorro et Pana-Martin, 2012).

Par ailleurs, un autre professionnel qui peut jouer un rôle important dans le développement professionnel des enseignants français est l’inspecteur (Étienne, 2015). En effet, ces cadres supérieurs de l'Éducation nationale, en plus de l’évaluation du rendement de l’enseignant, « participent à l'animation pédagogique dans les formations initiales, continues et par alternance des personnels de l'Éducation nationale, en lien avec l'université » (MEN, 2019c).

En Belgique, les conseillers pédagogiques « sont officiellement désignés depuis le Décret inspection de 2007 » (Boucenna, 2015, p. 3). En effet, le Ministère de la Communauté française (2007) distingue entre les inspecteurs ayant le rôle de l’inspection et les conseillers pédagogiques ayant le rôle de conseil et de soutien pédagogique ou d’accompagnement et il décrit la tâche de chacun. Par exemple, les conseillers pédagogiques doivent « accompagner des groupes d'enseignants qui construisent collectivement des démarches pédagogiques, des outils pour leurs cours » (Ministère de la Communauté française, 2007, art. 17.2). De plus, ils sont appelés à voir à la conformité des pratiques enseignantes avec les définitions ministérielles, à participer à l’élaboration des besoins de formation et à soutenir la programmation des formations et finalement, à répondre aux demandes des enseignants et des directions (Boucenna, 2015). Cependant, selon l’auteure, la seule fois où la notion d’accompagnement est évoquée celle-ci est en lien avec la réponse aux besoins des enseignants (Boucenna, 2015). En effet, d’autres verbes sont aussi utilisés pour décrire sa mission : soutenir, participer, assister, mettre leur savoir et leur expérience pédagogique au service (Ministère de la Communauté française, 2007).

Selon le service général de l’Enseignement supervisé par la Fédération Wallonie- Bruxelles (s. d.), le conseiller pédagogique est désigné par le gouvernement parmi les professionnels suivants :

« les membres du personnel directeur et enseignant, du personnel auxiliaire d'éducation, du personnel paramédical, du personnel psychologique et du personnel social des établissements de l’enseignement organisé par la Fédération Wallonie-Bruxelles ; les membres du personnel directeur et enseignant et du personnel auxiliaire d'éducation des Hautes Écoles organisées par la Fédération Wallonie-Bruxelles ; les membres du personnel technique des Centres psycho-médico-sociaux organisés par la Fédération Wallonie-Bruxelles. » (Service général de l’Enseignement organisé par la Fédération Wallonie-Bruxelles, s. d., p. 4)

En effet, ils « étaient avant cela animateurs pédagogiques, inspecteurs ou encore déjà conseillers pédagogiques dans le réseau libre catholique en Communauté française de Belgique » (Boucenna, 2015, p. 3). Dans l’enseignement fondamental, ils peuvent aussi, être « des instituteurs qui ont parfois assumé une fonction de direction, qui ont développé une

expérience de formateur d’enseignants et qui sont souvent recrutés parce qu’ils ont été distingués pour la qualité de leurs prestations pédagogiques ou de pilotage » (Boucenna, 2015, p. 3).

Comme le contexte belge est « structuré en réseau, les conseillers pédagogiques vivent des réalités différentes, colorées par la manière dont chaque réseau s’approprie les textes légaux et met en œuvre ses politiques de pilotage » (Boucenna, 2015, p. 3). En effet, tout en variant dans l’ordre d’un conseiller pédagogique du réseau subventionné libre catholique à l’autre, le processus d’accompagnement observé implique les phases suivantes : « 1) “analyser la demande”, 2) “identifier et formuler des objectifs”, 3) “contractualiser”, 4) “réaliser et réguler” et enfin 5) “évaluer” » (Boucenna, 2015, p. 3).

Aux États-Unis et au Canada, les conseillers pédagogiques sont en général des enseignants expérimentés qui ont reçu une formation pour soutenir l’apprentissage des adultes et aider l’équipe de direction à favoriser l’atteinte des objectifs tracés (Killion et Harrison, 2005). Ils peuvent être dégagés partiellement ou totalement de leur tâche d’enseignement (Lynch et Ferguson, 2010). Dans ces deux pays, des programmes de thèmes variés qui visent l’accompagnement des enseignants par le conseiller pédagogique dans le contexte de l’école ont étés élaborés (Cornett et Knight, 2009). Ces programmes ont tous pour objectif l’amélioration des pratiques d’enseignement, ils sont ancrés dans la pratique quotidienne des enseignants, ils ont un caractère durable où le conseiller pédagogique n’exerce aucune fonction d’évaluation auprès de l’enseignant ni n’a une relation hiérarchique avec lui (Cornett et Knight, 2009).

Les particularités de ces programmes touchent surtout le processus d’accompagnement, en voici trois exemples. D’abord, Stover, Kissel, Haag et Shoniker (2011) rapportent un processus d’accompagnement en deux phases : la démonstration et l’observation de pratiques qui se font à tour de rôle entre le conseiller pédagogique et l’enseignant et ensuite la réflexion en utilisant différentes données relevées auprès des élèves. Coburn et Woulfin (2012) et Scott, Cortina et Carlisle (2012) présentent l’accompagnement à la littératie dans le cadre du programme Reading First sous forme de rencontres hebdomadaires avec les équipes-cycles, de rencontres individuelles d’accompagnement, de l’animation de groupes de lecture et de l’accompagnement en classe. Cet accompagnement implique le coenseignement, la

modélisation et l’observation des enseignants. Dans ce processus d’accompagnement, le conseiller pédagogique et les enseignants utilisent souvent un questionnaire comme outil d’évaluation de la littératie des élèves sur lequel ils se basent pour planifier et ajuster les pratiques. Enfin, Teemant, Wink et Tyra (2011) relatent un processus d’accompagnement où les conseillers pédagogiques arrivent d’abord à un consensus avec les enseignants, organisent ensuite des entrevues individuelles avec chaque enseignant pour ensuite observer la pratique en classe et enfin entament une discussion de réflexion et d’analyse de la performance de l’enseignant.

En résumé, les caractéristiques individuelles du conseiller pédagogique et son processus d’accompagnement varient d’un contexte à l’autre. Tous les exemples présentés convergent vers l’attribution d’un rôle central, au conseiller pédagogique, dans le soutien du développement professionnel de l’enseignant. Des recherches ont montré, en effet, son apport dans le changement de conceptions et de pratiques des enseignants et, par conséquent, dans l’amélioration des résultats des élèves.