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Le modèle des douze et des caractéristiques structurelles qui présentent certaines

CHAPITRE I : Les stratégies d’adaptation et d’intégration aux origines et la consolidation

3. De la fondation de l’Église pentecôtiste Amour et Grâce à la consolidation de l’Église

3.2 Le modèle des douze et des caractéristiques structurelles qui présentent certaines

Selon Castellanos (2007a : 24-29; 2007b : 28-31 ; 2004c : 12-24, 50-60), « le modèle des 12 a toujours été dans le cœur de Dieu » et la vision G12 a été prophétisée dans la Bible, car Dieu a établi ce modèle stratégique pour les temps de la fin ou le XXIe siècle. Castellanos est convaincu que les nations du monde vont appliquer le modèle et les Églises se multiplieront grâce à « l’esprit de conquête » de la vision. Le pasteur admet que certains « serviteurs de Dieu » ont appliqué le modèle des 12 de façon sporadique dans l’histoire de l’Église, toutefois, il précise que la vision aujourd’hui est un modèle très clair grâce à la révélation graduelle que Dieu lui a donnée.

Au XIXe siècle, des leaders protestants ont été les pionniers d’une « restauration des

carismata », comme la glossolalie et la prophétie. Leur mouvement a culminé avec la création de

l’Église apostolique catholique en 1832, et celle-ci a désigné 12 apôtres qui étaient considérés comme l’équivalent des 12 apôtres de Christ pour les derniers jours (Lee 2006 : 25). Dans les années 1960, Billy Graham a suggéré la formation de 12 hommes laïques qui à leur tour pourraient s’occuper d’une douzaine d’autres pour les instruire, car l’évangéliste connaissait déjà des Églises qui avaient été transformées en suivant « ce modèle de Christ » (Coleman 1982 : 89).

Certains protestants, critiques de la MCI, affirment que le modèle G12 ne repose sur aucun fondement biblique. Selon nos interlocuteurs, il n’y a pas d’évidence biblique sur l’usage du principe des 12 dans l’Église primitive. Toledo (2006) et d’autres auteurs ont trouvé des indices qui révéleraient le modèle du G12 comme une copie de ce que Loyola a développé d'abord, ce qui a été adapté au XXe siècle par Escrivá, le fondateur de l’Opus Dei21. Escrivá a choisi 12 apôtres (Hutchinson 1997 : 99) et le modèle des 12 a caractérisé souvent les procédures de l’Opus Dei et des papes Jean-Paul II et Benoît XVI  (Martínez 2005 : 38-43, 89, 103, 105, 114).

Au-delà de la possible origine catholique du modèle G12 proposé par Castellanos, ou des emprunts faits par lui au mouvement de l’Opus Dei, il faut souligner que ce modèle établit une structure en forme de hiérarchie pyramidale dotée d’un haut niveau d’autorité attribuée à l’homme

21 Plusieurs articles des théologiens qui ont fait ces recherches sont repérés à http://www.centrorey.org/temas26.html ;

http://www.centrorey.org/nuevo%20site/temas29.html ; http://ceirberea.blogcindario.com/2008/03/00009-la-vision- celular-del-g12.html ; http://www.bolainez.org/temas/temas.php?tema_id=53 Pages web consultées en 2012-09-18.

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qui dirige l’Église. D’après Norman, pasteur baptiste québécois, la concentration de l’autorité dans les mains d’un seul individu a caractérisé plutôt le catholicisme, le pentecôtisme et le mouvement charismatique que l’association des Églises baptistes du Québec où « le modèle biblique » de gouvernance de l’Église par un groupe d’anciens est prédominant, depuis les années 1960-1970. Norman considère que traditionnellement, dans la plupart des Églises de l’association, il y avait une structure avec un pasteur qui prenait souvent les décisions, en tenant compte des suggestions des diacres. Cependant, le pasteur fait ressortir également la tradition congrégationaliste des Églises baptistes, car un certain nombre de décisions relèvent des votes de l’assemblée.

Dans l’ÉCNP la croyance à l’onction est souvent associée au pouvoir du Saint-Esprit incorporé dans une personne choisie et séparée pour Dieu, ayant reçu un appel spécial, ce qui entraîne une instruction particulière de l’Esprit de Dieu pour avoir une majeure connaissance des Écritures et développer plusieurs dons. De nombreux néopentecôtistes croient que tous les chrétiens convertis ont le Saint-Esprit en eux, mais seulement certains pasteurs ont l’onction. Ils sont « les oints de Dieu », ce qui leur confère une sagesse supérieure pour diriger les Églises. Nos interlocuteurs considèrent que les oints reçoivent les révélations, visions et prophéties les plus fiables. Pour les interviewés, Blaquière est « un homme oint » qui a reçu un appel de Dieu pour fonder et diriger la congrégation. Étant donné qu’on croit que tous les membres de l’assemblée n’ont pas cette onction, on accorde moins d’autorité à la congrégation. Par contraste, les Églises baptistes congrégationalistes se caractérisent par la croyance que tout chrétien a le Saint-Esprit et l’onction. Par conséquent les relations entre les baptistes sont plus horizontales ; même le pasteur principal est un membre du conseil d’anciens qui prennent les décisions en équipe, selon Norman. Il considère qu’il y a probablement des parallèles à retracer dans l’Ancien Testament pour faire quelques comparaisons des modes de gouvernance des charismatiques et des catholiques :

« Il y a beaucoup de gens qu’on dit que l’Église catholique… nous ramène dans l’Ancien Testament et toute la structure, avec l’autel, l’architecture de l’Église, avec le sacerdoce, les prêtres, qui n’est pas un sacerdoce universel, sinon comme dans l’Ancien Testament, alors que dans le Nouveau Testament tous les croyants sont prêtres, on a tous le Saint-Esprit ou l’onction… Peut-être qu’on peut faire certains parallèles aussi avec les milieux charismatiques qui nous ramène à cette vision du seul prophète qui dirige, alors que les prophéties de l’Ancien Testament nous disaient le contraire, un jour viendrait où tous auront le Saint-Esprit, alors, peut-être qu’il y a ce retour à l’Ancien Testament dans ces deux Églises-là ».

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Jésus comme la tête de l’Église. Cependant, dans la plupart des Églises baptistes du Québec et dans plusieurs Églises baptistes des États-Unis basées sur le modèle de gouvernance du groupe d’anciens, l’héritage de certains arguments de Calvin est plus enraciné que dans les congrégations charismatiques et pentecôtistes. En suivant le fil des critiques du réformateur à la structure hiérarchique de l’Église à la tête d’une seule personne et à l’excessive autorité attribuée au pape, comme un phénomène qui n’a pas caractérisé l’Église primitive22, les congrégations baptistes énoncées ne permettent pas que le pasteur soit investi des attributs et du même niveau d’autorité que le Christ. Dans ces Églises, les enseignements doctrinaux d’aucun pasteur ne peuvent être considérés comme infaillibles (Calvino 1999b : 909-962 ; MacArthur 2005 : 91-95, 189-210). En revanche, Castellanos (2007a : 30 ; 2004c : 58-61 ; 2007b : 28-31) a insinué que ses enseignements sur la vision G12 doivent être acceptés de manière intégrale avec obéissance et fidélité, car il élève son modèle au niveau des Écritures. Quelques théologiens et protestants affirment que Castellanos a pris pour lui l’autorité et les promesses que Dieu a donné au Christ23.

Jafet, notre interlocuteur protestant latino-américain, croit à la continuité de la plupart des dons du Saint-Esprit jusqu’à nos jours, mais il ne croit pas aux « visions » de Castellanos. Fajet considère que les allusions de Castellanos sur la vision ne doivent pas être acceptées dans le protestantisme, car il a agi comme un pape qui recourt à l’attribut de l’infaillibilité24. Jafet trouve excessive l’autorité attribuée à l’homme qui est au sommet de la structure pyramidale du G12, comme la personne qui décide et gouverne dans l’Église de façon incontestable, à cause du refus de la critique. D’après Jafet, cette structure a caractérisé l’Église catholique et les congrégations protestantes influencées par le catholicisme. Jafet cite la Bible25 pour démontrer que dans l’Église primitive on a institué un « groupe d’anciens » ayant la même autorité pour prendre les décisions et gouverner l’Église en équipe. Pour certains protestants conservateurs, comme Jafet et les baptistes

22 Calvin a revendiqué le mode de gouvernance de l’Église basé sur le modèle biblique du groupe d’anciens. D’après

les recherches du réformateur et d’historiens sur les Églises chrétiennes des trois premiers siècles, dans plusieurs congrégations, l’autorité n’était pas concentrée dans les mains d’un seul homme, car c’était un « conseil d’anciens » qui prenait les décisions (Calvino 1999b : 960 ; Eusebio 1999 : 137 ; Gonzales 1994a : 115).

23 Annexe 16 : Les petits christs du charismatisme selon des protestants non charismatiques.

24 Les papes ont rarement fait usage de l’attribut en vigueur de l’infaillibilité (Ferguson et coll. 2011: 720-722). 25 Citations de Jafet : Ac. 14 : 23 ; 20 : 17 ; Ép. 20 : 17 ; Tit. 1 : 5; Jn. 21 : 15-17 ; Ac. 15 : 4, 13-35. Selon Jafet, Pierre

était « le pasteur » établi par Jésus, mais l’apôtre était comme n’importe quel membre du « groupe d’anciens ». Il n’avait pas plus d’autorité que les autres « anciens » et les erreurs de Pierre pouvaient être débattues et corrigées selon les Écritures. Jafet affirme que Paul a adressé une réprimande à Pierre de façon légitime, car les arguments de Paul étaient fondés sur les Écritures en défense de « la doctrine saine » et du devoir du serviteur exemplaire (Ga. 2 : 1-21 ; 1 Ti. 3 : 16-17).

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interviewés, la Bible est l’unique autorité infaillible et suprême présente concrètement sur terre, de sorte que les Écritures sont au-dessus de toute personne, tradition ou Église. Ils considéraient que les chrétiens pouvaient critiquer ou remettre en question les enseignements des autorités ecclésiastiques à la lumière du texte sacré. Pour eux, il s’agit d’un exercice légitime et nécessaire, afin que toute instruction se conforme à la Bible. La proclamation de ce postulat a été l’un des facteurs qui a provoqué la scission entre les catholiques et les protestants. Ceux-ci ont dénoncé l’attribution d’une excessive autorité à la tradition ecclésiastique et au décret papal, cela au grand détriment de l’autorité des Écritures (Calvino 1999b : 886-968 ; Gonzales 1994b : 37-52 ; MacArthur 2014 : 217).

En revanche, certains leaders de l’ÉCNP enseignent l’importance de « ne pas toucher l’oint de Dieu »26. Selon les leaders il s’agit d’une doctrine biblique pour respecter l’autorité que Dieu a mise dans l’Église. À notre avis, cette doctrine a influencé de nombreux membres, leaders et pasteurs qui perçoivent comme une influence négative les commentaires des personnes qui ne sont pas d’accord avec certains enseignements de Blaquière et de Castellanos. Le fait de remettre en question les doctrines des « oints de Dieu » est souvent perçu comme un manque de respect et de fidélité aux autorités, de la part des individus qui jugent et provoquent des disputes. Les différences en matière doctrinale sont fréquemment interprétées comme des attaques des religieux.

3.3 Désertions, changements d’affiliation et d’identités, rapports du pouvoir et enjeux

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