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CHAPITRE I : Les stratégies d’adaptation et d’intégration aux origines et la consolidation

1. Performance rituelle à la mise en scène des stratégies aux assemblées

1.2 Louange et adoration

Marcos, le chanteur principal ou leader du groupe de louange, est un Mexicain dans la trentaine qui joue de la guitare, mais dans certaines occasions spéciales, Lissette, une jeune femme d’origine afro-américaine remplit le rôle de chanteuse principale. Gonzalo, le pianiste du groupe affirme que, généralement, les musiciens interprètent d’abord la musique joyeuse de louange afin de réveiller les participants et de les encourager à bouger, à lever les bras et à chanter fort, jusqu’à émettre des cris d’allégresse, pour les amener à extérioriser leur foi, dans le but de les plonger dans une ambiance fervente de louange. Quand l’assemblée est trop distraite, le chanteur et les musiciens essayent d’interagir davantage avec le public. Marcos prend la parole ou commence à entonner une phrase d’une chanson pour encourager les personnes à continuer le chant. Il peut leur poser des questions chantées sur la parole de la chanson et le batteur annonce l’intervention du public avec les cymbales. Plusieurs participants continuent d’entonner le chant et les musiciens répondent à la stimulation du public par des rythmes latino-américains de plus en plus rapides qui incitent les personnes à danser et à applaudir, mais leurs mouvements sont modérés.

La plupart de participants aiment beaucoup les chansons du genre salsa et merengue. Parfois on peut aussi écouter un mélange de musique électronique accompagnée d’une mélodie de violon et un style de rock alternatif. De nombreuses lumières clignotantes de plusieurs couleurs peuvent produire l’impression d’être dans une discothèque. Les musiciens jouent aussi au rythme du reggae et du reggaeton, mais les gens répondent avec plus d‘enthousiasme à la salsa qui met l'accent sur la

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percussion forte. Dans la mesure où le rythme s’accélère, les mouvements des participants sont moins inhibés. Une chanson de louange s’appelle « la montagne». C’est une adaptation des versets au rythme de la salsa. Les participants dansent, applaudissent et chantent à plusieurs reprises :

« Si tu aurais foi, comme une graine de moutarde, cela le dit le Seigneur, tu dirais à la montagne, bouge-toi, bouge-toi... Et la montagne se bougera ! se bougera ! ».

Pour finir, le chanteur dit : « Cette montagne de la maladie et du problème qui est devant toi se bougera! ». La plupart des musiciens sont dans la trentaine et les personnes qui participent régulièrement aux présentations sont : un batteur colombien, un pianiste de Panama, un bassiste du Venezuela, un jeune violoniste mexicain, un Haïtien qui joue des bongos. Une jeune fille québécoise et quelques femmes latino-américaines sont choristes. Les participants de l’assemblée peuvent se sentir également bien représentés par les nombreux drapeaux de tous les continents qui sont suspendus au plafond de la salle de culte. Dans certaines occasions, les musiciens ont interprété la cumbia et quelques membres ont dansé au son de la musique folklorique de leur pays d’origine. Les musiciens ont adapté la louange à la musique populaire latino-américaine, mais ils aiment plutôt interpréter les chansons modernes, ainsi que les jeunes des équipes latino-américaines organisant parfois des présentations avec danses de louange. Les jeunes adaptent les danses aux rythmes du rock, du pop, du hip-hop, du rap et de la musique électronique. Vers la fin de la louange, pendant l’assemblée latine, Marcos entonne souvent une ou deux chansons pleines de déclarations énergiques en style rock. Les chansons peuvent être choisies en fonction des paroles liées au sujet de la prédication ou à l’objectif de l’assemblée. Par exemple, à l’occasion d’une assemblée de guérison, le chanteur a choisi une chanson dont la parole déclare la présence du Seigneur « pour guérir l’âme ». Ainsi, les musiciens contribuent à renforcer la foi des participants, lorsqu’ils chantent des déclarations jusqu’à ce qu’ils se sentent prêts à expérimenter la guérison. Gonzalo et Lissette affirment que généralement la louange est suivie de chansons d’adoration, mais parfois ils peuvent jouer seulement la musique de louange ou les ballades d’adoration, selon « l’inspiration du chanteur ». C’est lui qui choisit et décide quelles sont les chansons que le groupe musical va jouer, « selon ce que Dieu met dans son cœur » et ce qu’il croit interpréter le mieux. Les musiciens peuvent lui proposer quelques chansons et il tient compte des suggestions pour diriger la louange. Selon nos interlocuteurs, les musiciens doivent être attentifs au Saint-Esprit et à ce que le chanteur souhaite interpréter, car ils sont guidés par l’Esprit de Dieu

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pour amener les participants à proclamer et adorer l’Éternel. Parfois, Lissette chante « en langues » et encourage l’assemblée à louer Dieu de la même façon. Elle et quelques femmes parmi le public chantent à voix basse, en émettant des sons aigus et intelligibles. Quelques hommes et femmes louent Dieu également « en langues », mais sans chanter. La glossolalie est interprétée comme une expression des langages spirituels de louange grâce au don du Saint-Esprit.

L’étape d’adoration se caractérise par des ballades lentes. Les paroles des chansons traitent des attributs de Dieu, de son amour, du sacrifice de la Croix et de la vie des croyants. Marcos demande aux personnes de fermer les yeux et lever les bras pour entonner les chants avec lui. Quelques femmes, les yeux fermés et les mains sur leurs poitrines, semblaient chanter de tout leur cœur et d’autres personnes avaient les bras ouverts vers le ciel. Un membre affirme que certaines chansons lui ont fait se souvenir de ses expériences personnelles, mais il chante à Dieu en se rappelant également à Jésus, comme une source d’eau vive au milieu des déserts qu’il a traversés aux moments difficiles. En effet, quelques chansons décrivent ce type d’expériences, et tandis que certains fidèles chantent, ils peuvent retourner assoiffés à la source pour être rassasiés pendant l’adoration. D’autres expriment qu’ils se sentent fortifiés par les chansons. Les ballades et des lumières couleur violette créent une ambiance dans laquelle le chanteur peut improviser des vers pour cultiver la ferveur, mais parfois les musiciens n’atteignent pas leur objectif. Selon Gonzalo :

« L’objectif est que les gens pendant la louange et l’adoration puissent avoir un moment d’intimité avec Dieu qu’on peut percevoir spirituellement… Je sens dans l’atmosphère l’Esprit qui se bouge si on est parvenu l’objectif… Quand on ne l’attend pas, c’est à cause du manque de préparation personnelle préalable des musiciens, parce qu’ils n’ont pas prié ou intercédé... On prie toujours avant, on cherche toujours la présence de Dieu et on doit aussi faire cela sur la scène, pour faire que les gens adorent en donnant l’exemple en équipe. »

Les artistes et les techniques du son et des lumières doivent créer d’abord une ambiance de louange qui encourage les croyants à chanter avec joie et enthousiasme pour les amener à expérimenter le climat rituel « dans la présence de Dieu ». Lissette et d’autres interviewés ont exprimé que certaines interprétations musicales et chants ont produit l’impression d’être seul avec Dieu lors des moments d’adoration profonde où ils ont éprouvé des sentiments intenses d’amour, des émotions qui sortent avec un léger tremblement, ainsi que des sentiments de bien-être, de joie et de paix suivis, occasionnellement des sensations d’une légère brise et d’une chaleur intérieure. D’après Lissette, le but de la louange est de toucher les personnes sur le plan émotionnel et spirituel à travers la musique et les messages, pour adorer Dieu et lui rendre grâce. Le groupe de

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louange s’efforce que les personnes puissent expérimenter cette rencontre avec Dieu au cours de laquelle elles sont souvent touchées. Les croyants expérimentent généralement le climat rituel pendant l’étape d’adoration, lorsque le chanteur a recours à la technique d’isolement en fermant les yeux. Cette technique permet de canaliser plus efficacement les pensées et les émotions des participants pour dégager l’esprit dans un état de recueillement et de méditation, ils peuvent alors répéter plus de 10 fois le chœur d’une ballade. La répétition de quelques mots suivant le même rythme pourrait créer un effet semblable à celui de la récitation de mantras. Deux participants expriment que, pendant l’adoration, ils sont parvenus à « se débrancher » de l’environnement, comme un acte libérateur de l’esprit qui leur permet d’entrer dans un état contemplatif. Pendant ces états modifiés de conscience certaines personnes prient et chantent « en langues », mais la glossolalie est devenue une pratique habituelle pour plusieurs membres de l’Église.

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