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V. Le message publicitaire, entre signification et communication

V.3 Mise en relation avec le domaine publicitaire

Nous allons montrer comment un produit (qui est d’abord un objet) émanant d’une entreprise arrive aux mains d’un consommateur : Une entreprise fabrique un produit. Ce dernier a un sens pour elle. Il aidera par exemple la ménagère à enlever toutes les tâches des vêtements de son enfant ou une femme à avoir des cheveux somptueux ou, encore, un homme à se raser de près. Ce produit aura une double fonction : d’un côte, il va améliorer la vie du consommateur (par son utilisation) ; d’un autre côté, il apportera de l’argent à l’entreprise. Pour faire connaitre son produit, l’entreprise fait appel à un publicitaire et lui soumet son produit. Celui-ci se débarrasse alors de tous les sens premiers pour revêtir l’habit d’un objet commun. Cette première mutation du produit vers l’objet commun est, à notre sens, une étape importante car elle permet de remodeler l’objet et, de ce fait, de remodeler tous les signifiants qui lui ont été accordés. Ces signifiants primaires relevant de ce premier état vont permettre au publicitaire de réfléchir sur tous les signifiés que ces signifiants risquent de produire qu’ils soient positifs ou négatifs. De ce fait, avant toute chose, il s’agira d’un contrat passé entre l’entreprise et le publicitaire qui devra conférer au produit/objet commun des caractéristiques qui feront de lui un produit incontournable.

Passant cette étape, tout sera entre les mains du publicitaire qui ira à la recherche d’abord puis à la rencontre du consommateur ‘idéal’ pour l’objet qu’il doit vanter. Il se basera sur deux éléments : 1) sur l’étude de marché effectuée par l’entreprise sur la place du produit dans le marché, et, en définitive, sur sa place en termes de besoins. L’étude de marché est un passage obligé pour l’entreprise mais aussi pour le publicitaire qui peut ainsi comprendre les enjeux de l’objet auquel il cherche à donner du sens. 2) sur l’étude du consommateur effectuée par des spécialistes comme les psychologues ou encore des sociologues. Ces études permettent de comprendre plusieurs éléments relatifs au consommateur (sa psychologie, son comportement face à tel évènement et ses attentes de manière générale). Dans cette étape, le publicitaire devra prendre en considération que tout consommateur est d’abord un sujet qui vit dans une société donnée. Ce sujet construit son individualité à partir de ce que sa société lui apporte comme traditions, culture, technologie, religions, réflexion sur les images et représentations portées par sa propre communauté, et mise en place de symboles représentant les valeurs de celle-ci. Cette étape permet de mettre en place une seconde mutation de l’objet commun vers celui d’un besoin (concret ou abstrait).

Ces objets du besoin, naturels au départ pour le sujet vont, au fur et à mesure, être influencés dans leurs acceptions grâce à – ou à cause de – la société. Nous avons, précédemment, expliqué comment la société transforme un objet/besoin vers un objet/désir ; essayons de comprendre, maintenant, comment le publicitaire réussit le passage produit/besoin vers celui de produit/désir. Nous savons que l’objet commun a revêtu son statut de produit quand le publicitaire a analysé le sujet et ses attentes (dans une société qui devient de plus en plus une société de consommation). Le publicitaire a recours à des stratégies argumentatives que nous avons vues dans la partie précédente et qui peuvent se résumer comme suit lorsqu’il s’agit de les relier au produit/besoin/désir : le discours qui porte le produit doit être pragmatique, il doit donc inciter le sujet à agir, il doit aussi prendre en considération les topiques et les doxa du sujet. Le produit/besoin va être influencé par des forces extérieures et qui vont installer de nouvelles données au produit/besoin : représentations, images et symboles donnent de nouvelles acceptions au produit. Celui-ci sera perçu comme un produit/objet ayant une valeur. Dans cette partie, de nouvelles significations vont venir s’installer, il en résulte des tensions qui vont permettre le passage de l’objet/produit du pôle besoin vers le pôle désir.

A ce stade, les tensions que subit le produit/objet suivent les mêmes tensions que les transformations des besoins en désirs. Parmi les composantes les plus importantes dans la stabilisation des tensions, nous retrouvons : séduire, fantasme et plaisir.

Comme nous le savons, la composante séductrice va englober celle du fantasme et aura une double fonction, en effet, le produit/désir doit séduire le sujet, il doit le faire en respectant ce que le sujet se représente de lui-même et du produit qu’il désire. A ce stade, il s’agira de mettre en avant les représentations et les stéréotypes de chaque partie, celle qui vend le produit et celle qui l’achète, il s’agira aussi de respecter l’identité et les valeurs du sujet. Sa seconde fonction est d’éveiller l’imaginaire du sujet : la composante du fantasme est alors activée pour insuffler au sujet tout ce qu’il pourra faire ou avoir en possédant le produit/désir. Si par exemple, une consommatrice trouve qu’un rouge vermeil est une belle couleur pour du rouge à lèvres, que c’est chic et classe, ce n’est rien à côté du fait que ce rouge à lèvres, une fois qu’il lui appartiendra, lui permettra d’être chic et classe mais aussi, elle pourra elle aussi séduire via le produit/désir. Le pouvoir de la séduction est une composante importante dans le domaine de la création de désir puisque, sans la séduction, les objets et les personnes n’ont pas d’attraction et ne peuvent pas, par conséquent, dévier de leur chemin ceux qu’ils cherchent à attirer. La publicité met en place toute cette stratégie de séduction afin d’attirer le sujet /futur consommateur du produit/désir. Ce dernier doit procurer du plaisir. La satisfaction du sujet est liée aux promesses qu’on lui a faites à propos du produit de la marque.

« Il était une fois l’Homme doté de ses besoins, mais une Nature-marâtre le condamnait à la Privation. Apres un long chemin à travers le Progrès et la Science Economique, il rencontra la Société Industrielle dont il avait toujours rêvé. Il fut enfin Heureux »184

184 Groupe Marcuse. Op.cit. p56. Les mots qui commencent par une majuscule sont l’œuvre de l’auteur de l’ouvrage.

Conclusion chapitre 2

Nous avons vu, dans ce deuxième chapitre, les parties prenantes dans toute production publicitaire, à savoir, la rhétorique, l’argumentation et l’art de la manipulation. Nous avons vu que chacune de ces parties est liée à l’autre et ne peuvent agir indépendamment lorsqu’il s’agit de construire un discours publicitaire.

Nous avons aussi compris comment le publicitaire s’y prend pour créer et construire du sens pour le récepteur-consommateur en usant de différents signes, tant linguistiques qu’iconiques. Le plus probant étant de toucher l’affect de ce consommateur en lui faisant croire que c’est son logos qui est touché.

La publicité n’est pas censée être un univers stable et raisonnable et les affiches publicitaires que nous analyserons, dans la deuxième partie de notre travail, nous montrera que les différentes stratégies, expliquées dans ce chapitre, sont utilisées afin de donner l’impression de vraisemblance et de réalité par son mimétisme (parfois, un mimétisme poussé à son maximum, l’exemple de la publicité de la BMW ou de la Batima).

Le publicitaire nous raconte une histoire pour que l’on puisse à notre tour nous en raconter une dans laquelle nous serions notre propre héro en possédant tel ou tel autre produit. La publicité crée, de ce fait, un univers dans lequel, parfois, le consommateur se projette et projette son propre univers cadré par ses représentations.

Introduction du chapitre 3

Tout individu vit dans une société. Toute société est soumise à des traditions. Toute tradition est un lègue. Et enfin, tout lègue peut évoluer. Dans cette optique, chaque acte et chaque comportement propre à un individu ne saurait être détaché de l’influence qu’ont sur lui tous les autres membres de la société à laquelle il appartient ni de toutes représentations, idéologies, religions et cultures qui font l’identité de sa société.

Dans ce chapitre, nous analysons la tradition et la modernité, d’abord dans leurs contenus et dans ce qu’elles véhiculent comme définitions et représentations, ensuite, dans leurs rapports l’une à l’autre et à la collectivité, et enfin, comment les publicitaires utilisent la modernité et la tradition dans les contenus de leurs discours publicitaires. Pour ce faire, nous aurons recourt à différents exemples puisés dans la vie quotidienne des sociétés tant occidentales qu’arabo-musulmanes ainsi que d’autres exemples spécifiques à notre problématique de départ, à savoir, la publicité vue dans les rapports qu’elle met en place entre la tradition et la modernité.

Dans ce troisième chapitre, nous commençons, tout d’abord, par définir les deux champs principaux d’études, l’univers de la tradition et de celui de la modernité afin de mieux les comprendre et d’en saisir les différents critères.

Ensuite, nous mettons en exergue la tradition et la modernité en leur appliquant une approche sémiotique afin de voir si ces deux univers sont en opposition ou, au contraire, en constante continuité l’un avec l’autre.

Enfin, nous travaillons sur l’univers publicitaire et l’impact des représentations tant traditionnelles que modernes que l’on peut y trouver.