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IV. L’univers de la manipulation dans la publicité :

IV.1 Le cadre énonciatif

Toute communication nécessite un cadre énonciatif qui nécessite, à son tour, des éléments qui fonctionnent de manière corrélative et de manière interdépendante les uns des autres. Ce cadre énonciatif doit donc être pris en considération, tout d'abord, parce qu'il est constitué par les parties relatives à la communication, ensuite, parce que son contexte d'émergence intègre des objectifs qu'il est nécessaire d’analyser.

Toute communication, au-delà du message, est portée par des interlocuteurs dont les intérêts discursifs diffèrent selon que l'on se place du point de vue de l'émetteur ou du récepteur et selon l'organisation de ce discours. Dans un premier temps, il est question de dégager les composantes du schéma de la communication traditionnel de Jakobson en faisant une analyse sommaire qui permettra, dans un second temps, de voir quelles sont les relations "autres" que ces parties ont les unes par rapport aux autres.

Le schéma de la communication traditionnel de Jakobson a démontré que dans chaque moment de communication, il y a plusieurs parties qui entrent en jeu : Un émetteur, un message, un récepteur ; un canal, un code et un référent. Chacun de ces éléments a un rôle à jouer et nécessite que l'on s'y attarde avec un autre regard plus analytique et critique.

Figure 5 : schéma canonique de la communication vu par Jakobson

Dans le schéma de communication instauré par Jakobson, la communication passe par une voie linéaire, c'est-à-dire que la personne qui instaure la communication est le récepteur. C'est à la charge du récepteur d'effectuer toutes les transformations qui vont faire que le message arrive à destination de l’émetteur. Dans cette démarche, l'émetteur commencera par choisir le canal et le code qui vont être des supports pour son futur message. Un canal qui représente le support

physique de son message et un code qui représente la partie de la matérialité de ce message. Canal et code sont donc deux éléments qui fonctionnent ensembles, l'un appelle l'autre. Dans un système de communication parfaite, le canal et le code sont perçus par le récepteur, ils sont des éléments partagés entre les deux parties de l'interlocution : Si un émetteur choisira en termes de code d'utiliser la langue anglaise, le récepteur devra partager avec lui ce code de la langue anglaise.

Le référent renvoie aux objets du monde, à la réalité présente de l'émetteur. Dans la configuration du présent, nous faisons référence à l'axe temporel qui inclus des éléments passés, présents et futurs ; mais aussi, nous faisons référence à la réalité matérielle ou non matérielle, c'est-à-dire que l'existence de cette réalité n'a pas à être avérée : prenons l'exemple du Ghoul156. Ce monstre par excellence dans les pays maghrébins n'existe pas même s'il participe à l'éducation des enfants dans la peur. Son équivalent existe dans les pays européens aussi, peut-être même dans n'importe quelle culture car il permet (ou a permis à une époque !) de maintenir le contrôle sur les enfants, ce n'est pas tant l'interdit d'aller dans tel ou tel endroit qui fera peur à l'enfant, mais c'est justement sa peur de rencontrer "le ghoul qui va le manger" qui le fera réfléchir, voire renoncer à son acte, donc, le référent existe du moment que nos schèmes culturels et nos connaissances sur le monde lui accordent une existence.

Quant au message, il est cette partie qui est le résultat de tous ces mélanges : un émetteur aura besoin de dire un référent à son récepteur, pour cela il sera obligé de passer par un canal et un code. L'émetteur encode les éléments qu'il veut faire parvenir au récepteur et ce dernier se charge de les décoder.

Ce schéma est plutôt simpliste, et peut-être ne prend-il pas assez en considération d'autres éléments comme par exemple le récepteur qui joue aussi un rôle dans l'encodage du message de l'émetteur ou encore que le code et le canal peuvent ne pas être partagés par les deux interlocuteurs ce qui crée forcément des malentendus, des incompréhensions ou des quiproquos, aussi, parfois, l'émetteur peut choisir de superposer plusieurs codes afin que son message soit ou plus clair ou plus sombre à la compréhension. Ces quelques éléments vont nous permettre de reconsidérer le schéma de Jakobson avec un autre regard, plus critique, en y incluant cette fois-ci des critères qui vont ajouter quelques nouvelles valeurs à chacune des parties de la communication. Pour communiquer, une personne a besoin d'utiliser un code, ce dernier est la

156Le monstre par excellence dans les pays maghrébins, il participe ainsi à l'éducation des enfants dans la peur du ghoul.

langue qu'elle va utiliser pour transmettre le discours. Cette langue, si elle n'est pas connue du récepteur fera que le message transmis ne soit pas compris, par contre, si l'émetteur a utilisé un code commun (à lui et à son récepteur) il pourra faire passer sa pensée à l'autre. La particularité du code est d'être multiple et diversifié.

La pluralité des discours fait la pluralité des codes. Admettons, toutefois, qu'une personne sourde ou muette veuille adresser un message à une personne qui ne possède pas une formation dans le domaine des langages des sourds-muets, quel code utilisera-t-elle pour se faire comprendre ? Est-ce qu'elle aura recours aux signes qu'elle a l'habitude d'utiliser ? Ou bien est-ce que le discours qu'elle va mettre en place influencera le code en question et, de ce fait, aura-t-il des incidences sur le canal ?

Précédemment, nous avons vu la langue comme étant un code susceptible de transmettre un message. Toutefois, est-ce que la langue est le seul moyen que possède une personne pour faire parvenir un message à un destinataire? Est-ce que le code est l'unique moyen de transmission du message ? Si ce n'est pas le cas, comment est-ce que le discours influence-t-il le code ?

Code et canal entretiennent des relations for complexes et non déterminées, non seulement, l’un par rapport à l’autre, mais aussi, tous les deux en rapport avec le référent du message et les objectifs (de communication) poursuivies dans le message car, en effet, derrière toute communication, il y a des objectifs à atteindre de la part de l'émetteur. Objectifs que nous pouvons mettre en relation avec l’(les)intérêt(s) de l’émetteur. Dans ce cas là, nous parlerons des buts de la communication.

Le message publicitaire, comme nous l'avons vu, comporte un message que tout le monde est censé comprendre et auquel tout le monde est aussi censé adhérer. Ce message global157 démontre, avant tout, l'excellence du produit ; à l'intérieur de cet événement d'excellence, le message comporte d'autres messages qui sont à même de prendre en charge la manipulation dudit consommateur. Selon Barthes, le premier message que nous recevons, nous les personnes averties et habituées à l'univers publicitaire, c'est d'abord le message global. Ce dernier consiste en un signifiant qui aurait une double charge sémantique : d'abord il dénote quelque chose (selon la définition barthiennes) ensuite, s'ajoute à ce sens premier, un autre sens (son système complexe l'imbrique de manière à ce que les récepteurs comprennent un autre sens), nous faisons référence dans ce cas là à la connotation (toujours selon la définition barthienne).