Matériaux musicaux

8.3.1 Pièces musicales

Trois morceaux : Ann and Dan (S. Nelson), Mélancolie (P. Moss, in Marcinkowska) et Full Moon (C. & H. Colledge)²⁰³ seront travaillés pendant l’année scolaire. Ces morceaux ont été choisis par rapport aux savoirs qu’ils hébergent, tant du point de vue technique

qu’interprétatif. Bien que s’agissant de morceaux pédagogiques, nous allons les considérer des œuvres musicales : en effet, même si ces trois morceaux sont plus courts et plus

adaptés aux difficultés techniques que les œuvres de répertoire, elles présentent

néanmoins un fonctionnement similaire à ces œuvres. Les points communs avec le ‘grand répertoire’ sont :

- Une forme définie ; - Un caractère ; - Un titre ;

- Un compositeur ;

- Une structure mélodique et harmonique ;

- Une palette de choix interprétatifs possible à partir du texte ; - Un attrait esthétique.

Nous allons donc dorénavant les appeler et les considérer comme des œuvres.

Ann & Dan, une introduction à l’interprétation

Ann & Dan est le premier morceau de la collection Right from the Start de Sheila Nelson, éditions Boosey & Hawkes. Il s’agit de pièces pour deux violoncelles, qui sont écrites à l’origine pour violon, dont la version pour deux violoncelles est de l’auteur. Dans Ann & Dan l’élève utilise les cordes à vide la et ré (d’où le titre Ann et Dan : les deux noms commencent avec le A pour la et D pour ré en anglais), cette œuvre peut donc être jouée dès les premiers cours de violoncelle. En effet, seuls une posture de base et un maniement rudimentaire de l’archet sont requis pour pouvoir jouer cette pièce. Mais si elle est très simple du point de vue technique, elle introduit néanmoins plusieurs savoirs interprétatifs :

- La forme ABA’ que le jeune élève retrouvera plus tard dans le répertoire, telle quelle ou complexifiée (la forme sonate en étant un exemple) ;

- Une certaine complexité harmonique : les parties A et A’ sont à la tonique, la partie B à la dominante ;

- La notion de chant et accompagnement ;

- Les nuances (f pour l’élève, mais avec plus de richesse pour la partie de deuxième violoncelle, à jouer par le professeur ou par un élève juste un peu plus avancé) ; - L’alternance entre les moments joués et les moments de silence.

Le tableau 6 récapitule les savoirs techniques et interprétatifs que cette œuvre présente et qui peuvent être abordés dès les premiers cours de violoncelle.

203 Ces partitions étant protégées par le copyright des éditeurs, nous ne pouvons pas les reproduire ici. Le lecteur en trouvera les références en bibliographie.

Tableau 6. Les savoirs dans Ann & Dan.

Cette œuvre permet de mettre en pratique, avec des moyens techniques très simples, des savoirs interprétatifs de chambriste qui sont très poussés : il ne va pas de soi pour un enfant qui est au tout début du maniement de l’instrument, de mettre en œuvre l’écoute, l’écoute comparative et l’écoute harmonique, de surplus pendant le jeu instrumental, de faire une nuance, de dissocier son jeu de celui du professeur, de garder une pulsation stable.

Mélancolie, une œuvre particulière pour un sentiment particulier

Mélancolie est tiré de la méthode Je commence le violoncelle de Barbara Marcinkowska, éditions Armiane. Ce morceau introduit l’élève au langage atonal et, avec une forme simple monostrophique, propose un travail de nuances très intéressant et avancé, avec un effet morendo à la fin. Ce morceau présente une indication de tempo métronomique (72 à la noire) et de vitesse en italien (Andantino) comme les œuvres de répertoire en musique classique. Le titre est très évocateur et permet un travail imaginatif ; la double barre à la fin du premier système permet un découpage – en introduction et ‘mélodie’ –, la densité harmonique de la partie de piano peut fournir un travail intéressant du point de vue de l’ensemble. Du point de vue technique, l’introduction des liaisons et l’utilisation de la première position sur toutes les cordes en font un morceau intéressant pour un milieu de première année.

Tableau 7. Les savoirs dans Mélancolie.

Savoirs de technique

instrumentale Savoirs solfégiques Savoirs performatifs Savoirs théoriques

- Emploi de la main

Full Moon est un morceau très connu dans le monde pédagogique du violoncelle, souvent joué lors des contrôles et auditions de fin de première année. Il fait partie du recueil Waggon Wheels de Katherine et Hugh Colledge, édition Boosey & Hawkes. Sa complexité musicale en fait une pièce très intéressante de tout point de vue pour le jeune élève en fin de première année. L’introduction du piano présente une mélodie qui sera superposée au thème du violoncelle. Il s’agit donc d’un matériel thématique à part entière qui introduit un accompagnement de piano très riche, comportant une mélodie à la main droite et des accords de soutien à la main gauche. Cette richesse à la fois mélodique et harmonique est aussi une caractéristique des accompagnements de piano du répertoire classique et romantique²⁰⁴.

L’indication de tempo est en réalité une indication de caractère : sadly (tristement).

Notre description commence par la partie de violoncelle. La forme de la pièce est ABA’

(comme pour Ann & Dan). La mélodie de la partie A est subdivisée en phrase antécédente et conséquente, comme dans la musique savante classique²⁰⁵. Cette phrase A présente la nuance piano. La phrase B a aussi une forme antécédente et conséquente, mais,

204 Les exemples dans le répertoire du violoncelle foisonnent : les sonates de Beethoven pour violoncelle et piano, ou les deux sonates de Brahms, également pour violoncelle et piano, etc…

205 http://www.polyphonies.eu/lemensuel/Introduction-a-l-analyse-la-forme.html;

https://fr.wikisource.org/wiki/Petit_Manuel_d’harmonie/De_la_phraséologie_musicale;

contrairement à ce qui se passe habituellement dans les pièces tonales, cette phrase B n’est pas à la dominante mais à la tonique. Chaque demi phrase est ponctuée par un crescendo et un decrescendo. Le point culminant de la pièce arrive à la mesure 19 avec le forte. Le rit.

(ritardando) et le decrescendo de la même mesure et de la mesure suivante ramènent l’atmosphère rêveuse de la partie A, cette fois-ci dans la partie A’.

Maintenant nous passons à la description de la partie de piano dans ses composantes harmoniques.

En plus de la richesse mélodique, Full Moon présente une richesse harmonique qui

l’apparente à une pièce de répertoire. Une des grandes richesses de cette pièce réside dans l’ambigüité dans la tonalité même de la mineur. Cette ambigüité est créée par l’utilisation du fa et du sol bécarres, à la place de fa dièse et sol dièse aux mesures 4, 11, 14, 16, 18, 27, tout aussi bien à la partie de violoncelle que à la partie de piano ; alors que la tonalité de la mineur avec élévation du 6^ème et 7^ème degrés (gamme mélodique) est utilisée aux mesures 7-8, 10, 20, 23-24. A enrichir cette alternance entre mode éolien et tonalité de la mineur, viennent la cadence picarde de la fin (utilisation de la tierce majeure) et les deux cadences évités (passage du 5^ème au 6^ème degrés) des mesures 9 et 19 et 25.

Tableau 8. Les savoirs dans Full Moon.

Savoirs de Observables choisis comme consigne pour les enseignants 1. les nuances,

10. le comportement scénique (Façon de s’asseoir, de saluer le public, de terminer un morceau, de quitter la scène etc.).

Description des observables choisis comme consigne