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77 - En pratique, les maˆıtres d’oeuvre sont des architectes ou des ing´enieurs charg´es de

travaux de conception de l’ouvrage immobilier. En principe, il n’existe aucune diff´erence de

nature entre les march´es de travaux et les march´es de services, tous deux ´etant des contrats

d’entreprise. N´eanmoins, le droit de la construction introduit une diff´erence essentielle entre

les obligations contractuelles des march´es de travaux et celles des march´es de services, puisque

seul l’entrepreneur titulaire d’un march´e de travaux est d´ebiteur de l’obligation de garantie

de parfait ach`evement vis-`a-vis du maˆıtre d’ouvrage en application de l’article 1792-6 du Code

civil, alors que l’entrepreneur titulaire d’un march´e de services, soit le maˆıtre d’oeuvre, n’est pas

soumis `a cette obligation. Mˆeme si cette particularit´e du march´e de travaux ne se retrouve pas

avec la mˆeme force en droit public, puisque la garantie de parfait ach`evement n’est pas d’ordre

public, il n’est toutefois pas illogique que le Code des march´es publics pose une diff´erence de

nature entre les march´es de travaux et les march´es de services. Nous nous attacherons alors `a

exposer la mesure de la distinction entre le march´e de travaux et le march´e de services en droit

priv´e (sous-section 1) et en droit public (sous-section 2).

Sous-Section 1 – March´es de travaux, march´es de maˆıtrise d’oeuvre, march´es de services

et contrats de sous-traitance en droit priv´e

78 - Il convient en premier lieu d’observer qu’en droit priv´e, il n’existe pas de diff´erence

de nature entre le march´e de travaux et le march´e de services, relevant de la mˆeme cat´egorie

juridique du contrat de louage d’ouvrage. La nature des obligations est toutefois diff´erente selon

qu’il s’agit d’un march´e de travaux, d’un march´e de maˆıtrise d’oeuvre, ou d’un contrat de

sous-traitance pass´e avec le titulaire du march´e de travaux ou le titulaire d’un march´e de maˆıtrise

d’oeuvre.

79 - Le contrat de louage d’ouvrage est l’ancien nom de la cat´egorie plus vaste du contrat

d’entreprise, dont la d´efinition a ´et´e donn´ee par la Premi`ere chambre civile de la Cour de

cassation en 1968

66

:«le contrat d’entreprise est la convention par laquelle une personne charge

un entrepreneur d’ex´ecuter, en toute ind´ependance, un ouvrage ; il en r´esulte que ce contrat,

relatif `a de simples actes mat´eriels, ne conf`ere `a l’entrepreneur aucun pouvoir de repr´esentation

». En droit de la construction, il n’est pas utile de recourir `a la cat´egorie g´en´erique du contrat

d’entreprise, puisque les contrats « des architectes, entrepreneurs d’ouvrages et techniciens par

suite d’´etudes, devis ou march´es »sont une des trois vari´et´es de louages d’ouvrage express´ement

nomm´es par le Code civil `a l’article 1779, alin´ea 3, dont le r´egime est encadr´e par les articles 1787

`

a 1799-1 du Code civil. Le contrat de louage d’ouvrage est«le contrat par lequel l’une des parties

s’engage `a faire quelque chose pour l’autre, moyennant un prix convenu entre elles » (article

1710 du Code civil). Le prix est un ´el´ement essentiel du contrat de louage d’ouvrage, mˆeme si sa

d´etermination n’est pas requise pour la validit´e du contrat

67

. Le contrat de louage d’ouvrage est

66. Cass. Civ. 1`ere, 19 f´evrier 1968 (Bull. civ. I, n°69 ; GAJC, 11e ´ed., n°260 ; D., 1968.393 ; JCP G, 1968.II.15490 ; RTD civ., 1968.558, Obs. G.Cornu, cit´e parP. Malaurieet L. Ayn`esLes contrats sp´eciaux, Defr´enois, 2e ´edition, Juin 2005, n°700).

CHAPITRE 2. LA DISTINCTION ENTRE TRAVAUX ET SERVICES 39

un contrat nomm´e, consensuel, synallagmatique, conclu `a titre on´ereux, `a ex´ecution successive

et, commutatif ou al´eatoire selon qu’il est pass´e `a prix unitaires ou `a prix forfaitaire. En droit

de la construction, le contrat de louage d’ouvrage est un march´e, notion consacr´ee par le Code

civil, dans la section III du chapitre III du titre VIII, « Devis et march´es ». En droit de

la construction, les notions de march´e priv´e de travaux et de louage d’ouvrage se recouvrent

parfaitement

68

.

80 - En droit priv´e, le contrat d’entreprise ou contrat de louage d’ouvrage porte indiff´

erem-ment, et par d´efinition, sur des prestations mat´erielles ou intellectuelles. Le contrat de maˆıtrise

d’oeuvre est, au mˆeme titre que le march´e de travaux de l’entrepreneur, un contrat d’entreprise,

tout comme d’ailleurs le contrat qui lie le patient `a un m´edecin, un plaideur `a son avocat, et le

client `a un cordonnier. Il est fr´equemment dit que«(l)es contrats d’entreprise sont l´egion »

69

.

Le Code civil se borne `a opposer le louage de choses au louage d’ouvrage (article 1708), puis

`

a distinguer trois sortes de louages d’ouvrage (article 1779) : le louage des gens de travail, le

louage des voituriers, et le louage des entrepreneurs et architectes par devis ou march´es. Le Code

civil pose ainsi par principe que le louage de l’entrepreneur et le louage du maˆıtre d’oeuvre sont

de mˆeme nature. On dit traditionnellement que ce sont des locateurs d’ouvrage. Il existait une

incertitude sur la qualification du contrat d’architecte entre le louage d’ouvrage et le mandat.

La Cour de cassation a clairement affirm´e en 1963 qu’il s’agit d’un louage d’ouvrage

70

. La Cour

de cassation a affirm´e r´ecemment que, «quelle que soit la qualification du contrat, tout

profes-sionnel de la construction (est) tenu, avant r´eception, d’une obligation de conseil et de r´esultat

envers le maˆıtre de l’ouvrage

71

», ce qui vise en r´ealit´e le louage d’ouvrage de l’entrepreneur,

titulaire d’un march´e de travaux pass´e avec le maˆıtre d’ouvrage, et non le march´e de maˆıtrise

d’oeuvre. En effet, si le march´e de travaux et le march´e de services sont tous deux de mˆeme

22565, concl. J´eol, note Ghestin ; Gaz. Pal. 1995. I. 626, concl. J´eol, note de Fontbressin ; Defr´enois 1996.747, obs. Delebecque ; RTD civ. 1996.153, obs. Mestre ; voirB. BoubliContrat d’entreprise, R´epertoire Immobilier Dalloz, 2003, n°39 `a 43).

68. B. BoubliContrat d’entreprise, R´epertoire Immobilier Dalloz, 2003, n°226 et 227.

69. R. Rodi`ereetA. Pigeonni`ereTome XII-1,Contrats civils divers, dansLibrairie Arthur Rousseau

(´ed.) Cours de droit civil fran¸cais, R. Beudant et P. Lerebours-Pigeonni`ere, 1947, n°173.

70. Cass. 1`ere civ., 21 janvier 1963 (Bull. civ. I, n°41 ; JCP G. 1963 II, 13185), dont le r´esum´e publi´e sur Legifrance est le suivant : « l’architecte est un locateur d’ouvrage ne repr´esentant pas le maˆıtre. Il ne saurait ˆ

etre consid´er´e comme un mandataire `a moins qu’il n’ait ´et´e charg´e par son client d’accomplir, au nom et pour le compte de celui-ci, certains actes juridiques, d´etermin´es et n´ecessaires `a l’ex´ecution du mandat ainsi confi´e

».

nature et rel`event de la cat´egorie juridique du louage d’ouvrage, le march´e de l’entrepreneur

comporte une obligation de r´esultat que ne comporte pas le march´e de maˆıtrise d’oeuvre. De

plus, si le titulaire d’un march´e de travaux est seul responsable d’une obligation de conseil et

de r´esultat vis-`a-vis du maˆıtre d’ouvrage jusqu’`a la r´eception, les sous-traitants titulaires d’un

march´e de travaux ou d’un march´e de services, pass´es respectivement avec l’entrepreneur ou le

maˆıtre d’oeuvre, sont ´egalement d´ebiteurs d’une obligation de conseil et de r´esultat, non pas

vis-`a-vis du maˆıtre d’ouvrage, mais vis-`a-vis de leur cocontractant appel´e entrepreneur

prin-cipal. Les rapports entre le maˆıtre d’ouvrage et le sous-traitant sont en effet exclusivement

extra-contractuels

72

.

81 - En droit priv´e, l’entrepreneur titulaire d’un march´e de travaux pass´e avec le maˆıtre

d’ouvrage, assume cinq types d’obligations vis-`a-vis du maˆıtre d’ouvrage :

– L’obligation de r´ealiser mat´eriellement un ouvrage exempt de vices. Avant la r´eception, il

s’agit d’une obligation de r´esultat. Apr`es la r´eception, il s’agit d’une obligation de moyens,

maintenue pendant dix ans, et permettant de justifier la th´eorie de l’indemnisation des

dommages dits interm´ediaires d´evelopp´ee par la jurisprudence judiciaire.

– L’obligation de conseiller le maˆıtre d’ouvrage sur la r´ealisation mat´erielle des travaux,

jus-qu’`a la r´eception. L’entrepreneur satisfait `a cette obligation en ´emettant des r´eserves, ou

en refusant d’ex´ecuter des travaux qu’il estime impossible `a r´ealiser. Il s’agit d’une

obliga-tion de moyens portant sur la concepobliga-tion de l’ouvrage, obligaobliga-tion assum´ee conjointement

avec le maˆıtre d’oeuvre.

– L’obligation de garantir le parfait ach`evement de l’ouvrage pendant un an `a compter de

la r´eception, sur le fondement de l’article 1792-6 du Code civil.

– L’obligation de garantir le bon fonctionnement des ´el´ements d’´equipement dissociables de

l’ouvrage pendant deux ans `a compter de la r´eception, sur le fondement de l’article 1792-3

du Code civil.

– L’obligation de garantir la solidit´e de l’ouvrage et des ´el´ements d’´equipement

indisso-ciables de l’ouvrage, ainsi que la destination de l’ouvrage pendant dix ans `a compter de

la r´eception, sur le fondement de l’article 1792 et 1792-2 du Code civil.

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