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Les lois de police étatiques

Dans le document La déjudiciarisation de l'arbitrage OHADA (Page 106-109)

Chapitre II. La modification des corpus législatifs nationaux et instruments contractuels

Section 1. La nécessaire conformité des règles nationales à l’acte uniforme

B. Les autres moyens et règles nécessitants des modifications

2. Les lois de police étatiques

Le corpus juridique des Etats se compose entre autre des lois de police étatiques. Le vocabulaire désignant ces lois est dense. Les expressions telles que lois d’application immédiates, lois d’application nécessaire, lois d’ordre public renvoient à

269Règlement d’arbitrage OMPI.

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cette même notion de lois de police étatique. Ces dernières se définissent comme étant

« les lois dont l’observation est nécessaire pour la sauvegarde de l’organisation politique, sociale et économique du pays »270. On peut donc dire que la définition de ces lois est tributaire du but qu’elles poursuivent271 même si cette approche demeure contestée272.

Face à elle, s’oppose une définition fonctionnelle qui s’emploie davantage à décrire le phénomène plutôt qu’à définir le contenu exact des lois qui y répondent.

D’après cette définition fonctionnelle, dans le domaine de conflit de lois, « les lois de police constituent une méthode dérogatoire au raisonnement conflictuel de type savignien, qui conduit le juge à appliquer une loi en fonction de sa volonté d’application aux situations qu’elle définit »273. La loi de police « est applicable même si l’ordre juridique auquel elle appartient n’est pas désigné par la règle de conflit, dès lors que l’Etat qui l’a édictée estime nécessaire de la voir appliquée aux situation présentant avec lui un certain rattachement »274 explique un auteur. « On parle de lois de police pour désigner le mécanisme d’application d’une règle interne à une situation internationale en fonction de sa volonté d’application et indépendamment de sa désignation par une règle de conflit »275 renchérit-il.

En adoptant cette définition, s’y incluent, les règles d’ordre public. En effet, sans vouloir raviver la controverse relative à la distinction entre la loi de police de la règle d’ordre public, nous constatons que tout comme la loi de police, cette dernière est d’application impérative même dans les relations de droit privé. L’exemple sur la loi relative au contrôle de change en est l’illustration parfaite.

De fait, le contrat ayant pour objet, ou pour effet de contourner la règlementation impérative est considéré comme nul et le juge ainsi que l’arbitre sont tenus de l’application de cette disposition. La règle d’ordre public s’applique au

270Ph. FRANCESCAKIS, « Quelques précisions sur les lois d’application immédiates et leurs rapports avec les règles de conflit de lois », Rev. crit. 1966, p.1.

271Ch. SERAGLINI, Lois de police et justice arbitrale internationale, Dalloz, 2001, p. 1.

272Y. LOUSSOUARN et P. BOUREL, Droit international privé, 6e éd., Dalloz, 1999, n° 130 et s., p.

128.

273Ch. SERAGLINI, Lois de police et justice arbitrale internationale, op. cit., p. 2.

274B. AUDIT, Droit international privé, 2e éd., Economica, 1997, n° 112 et s., p. 97.

275B. AUDIT, Droit international privé, op. cit, p. 97.

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contrat litigieux peu importe la loi qui lui est normalement applicable. Le but est visé est le respect de l’intérêt général, dans le cas d’espèce, le respect de la politique monétaire du pays. Ainsi, comme les lois de police, les règles d’ordre public visent à protéger les intérêts nationaux et particularistes d’une société donnée.

Même s’il évite au maximum276, l’arbitre dans sa mission de juge, doit vider le contentieux en appliquant les règles de droit277. Le refus pour ce dernier de les appliquer peut conduire à un rejet de l’exequatur de la sentence arbitrale.

A l’instar des tous les autres pays, ceux constitutifs de l’espace OHADA disposent de règles d’application immédiates. Certaines d’entre elles recommandent l’implication de l’autorité judiciaire dans certaines opérations d’arbitrage comme le recours contre la sentence. La modification des normes nationales que nous prônons doit permettre aux législations desdits Etats de modifier ces outils législatifs afin de permettre à l’arbitrage de réaliser ses opérations loin du juge sans avoir la crainte que l’exécution de sa décision soit remise en cause pour défaut de respect de règles d’application immédiate ou encore règle d’ordre public sur l’implication du juge dans l’arbitrage. Car oui, l’arbitre est tenu de respecter ou du moins de prendre en compte dans le rendu de sa sentence, la portée les lois de police du siège de l’arbitrage mais aussi celles du lieu d’exécution de la sentence.

§2. L’abandon du contrôle ainsi que des recours contre la sentence par le juge

La sentence marque la fin de la procédure arbitrale et le dessaisissement de l’arbitre. En principe, la partie défaillante peut appliquer la décision immédiatement,

276M. POMMIER explique que « les hésitations de l’arbitre à appliquer des lois de police proviennent de ce que cette application l’assimile à un juge étatique en sauvegardant les intérêts généraux d’un ordre juridique déterminé de préférence aux intérêts particuliers de ses mandants-contractants ». « La résolution du conflit de lois en matière contractuelle en présence d’une élection de droit : le rôle de l’arbitre », Clunet, 1992, p. 5, spéc. n° 37, p.35.

277 La notion d’arbitrage et sa nature juridique, v. H. MOTULSKY, « La nature juridique de l’arbitrage », in Ecrits II, Etudes et notes sur l’arbitrage, Dalloz, 1974, p. 5 et s. ; Ch. JAROSSON, La notion d’arbitrage, LGDJ, 1987.

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ce qui est généralement le cas. Dans l’hypothèse où cette dernière refuse de la faire, la partie victorieuse peut rechercher l’exécution forcée auprès du juge. Cette opération passe un contrôle de la sentence par le juge qui devra par la suite, exequaturer la sentence. Par ailleurs, la décision d’exequatur ou son refus se classe dans les recours contre la sentence lesquels, sont pour certains, du ressort du juge. La dérèglementation des systèmes juridiques nationaux nécessite que les opérations de contrôle soient retirées des prérogatives du juge (A). Dans le même ordre d’idée, tous les recours adressé contre la sentence doivent échoir à un tiers. Le juge est alors dessaisi du recours contre la sentence (B).

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