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Conséquemment à la méthodologie de recherche retenue ainsi qu’à la méthode d’analyse qui me servira par la suite, je vais maintenant m’attarder sur les limites qui me semblent surgir quant à ces outils sur ce travail de recherche.

Comme première limite, Lamoureux (2000) expliquait en effet qu’il était nécessaire d’être très attentif, pendant les interviews, au rapport qui peut s’installer avec la personne interviewée. La liaison qui peut s’installer entre le chercheur et la personne avec qui il s’entretient peut voir subvenir une certaine subjectivité, et ce des deux côtés de la discussion. Et c’est là, selon Lamoureux (2000) qu’il convient d’être le plus prévenant possible quant à ses probables dérives. En ce qui me concerne, moi chercheur, les deux dérives que je considère à même de me

123 Voir l’entretien numéro 8 en annexe, avec codage et réduction des données.

guetter sont les suivantes. La première serait celle, relative à mon objet de recherche, de mon positionnement personnel par rapport aux deux approches précitées. Car même si j’ai tenté d’être le plus objectif et neutre possible (de par mon canevas, ma façon de mener mon entretien, mes relances, etc.), j’avais néanmoins une opinion et une vision personnelle de ces aspects théoriques, qui ont également été menés à évoluer. J’ai tout fait pour que cette possibilité de biais soit inexistante mais nous ne pouvons jamais en être absolument certain. La seconde dérive que je peux imaginer s’immiscer et parasiter les entretiens serait celle de la désirabilité sociale (Keller, 2013). En effet, l’envie de convenablement s’afficher devant autrui peut affecter les relations, notamment sous forme de discussions que l’on peut avoir avec une personne (Cambon, 2006 et Giezendanner, 2012). Je peux tout à fait concevoir que, malgré mes précautions et ma préparation, j’ai pu afficher ce sentiment. Comme dans toute fréquentation d’ailleurs, notamment lorsque l’on côtoie un individu pour la première fois. Et c’est un comportement classique que de vouloir paraître le meilleur possible (Lemaine, 1965). Et cette attitude, c’est bien normal, impliquera une certaine retenue langagière - c’est-à-dire que l’on ne dira pas nécessairement l’entier de ce que l’on pense ou que l’on ne pensera pas nécessairement tout ce que l’on dit - sans pour autant travestir ses propos. Pourtant, je souhaite préciser que toutes les personnes que j’ai pu rencontrer étaient tout à fait disposées et accessibles face à mes questions et au débat ainsi que détendues pendant les rencontres.

Comme deuxième limite, j’ai bien conscience que les huit entretiens que j’ai effectués sont d’un nombre minime par rapport au nombre d’enseignants spécialisé (et personnes travaillant avec des personnes en situation de handicap, voire atteintes de TSA) du canton de Genève et même de la Romandie au sens large. L’envergure de ce travail n’est donc objectivement pas suffisante afin de supposer pouvoir présenter un avis général de la profession ou du domaine sur les questions qui m’occupent. Les points de vue sont encore plus nombreux, plus variés, plus nuancés et je ne prétends en aucun cas être ici exhaustif, complet ou définitif. J’ai plutôt tendance à imaginer et à espérer que mon travail de recherche présente un aperçu, assurément limité mais cependant adapté et pertinent, des réponses que je peux apporter à ma problématique de départ.

La troisième limite, en lien avec la deuxième, est relative au groupe de personne ayant participé à ma recherche. Effectivement, les participants avaient sciemment décidé de me répondre, que ce soit au début en ayant eu vent de ma recherche ou ensuite lors de la présentation plus détaillée. Le fait est que les autres – même si je ne pouvais de toute façon pas interroger vingt ou trente personnes dans le cadre de ce travail-là – n’ont peut-être pas répondu car ils ne

reconnaissaient pas ces deux approches (ou tout simplement pas (ou trop peu)) ou ne comprenaient pas l’intérêt de discuter de cette thématique des régulations de crise. En bref, leurs perspectives étaient possiblement autres et cela a alors impliqué l’absence de réponse. Tout comme cela aurait pu impliquer, pour moi en tant que chercheur, des avis, des opinions et façons de pensées parfois bien différentes.

La quatrième et dernière limite que je soulève dépend de mon type d’analyse, qualitative en l'occurrence. Et cette limite, rejoignant la première, est la neutralité ou l’impartialité. En effet, Lamoureux (2000) note qu’il existe communément chez le chercheur une propension à, non pas retranscrire oralement ce que l’on avait prévu (grâce au canevas d’entretien) mais plutôt ce que l’on croit. Barbillon et Le Roy (2012) le confirment, il s’avère tout à fait normal que nous ayons ce penchant de comprendre préférablement, à l’intérieur des discours récoltés, des composants qui corroborent nos suppositions ou nos croyances personnelles. D’où la nécessité, toujours selon eux, de construire, d’instaurer et d’appliquer un cadre méthodologique précis et auquel il est fort important de se tenir. Cela permettra d’aller au-delà de cet impact ainsi que de

« repousser la tentation de la sociologie naïve qui croit pouvoir saisir intuitivement les significations des acteurs sociaux, mais n’atteint que la projection de sa propre subjectivité » (Bardin, 1991, cité par Barbillon & Le Roy, 2012). Ma volonté fût donc d’être le plus strict possible concernant cette objectivité. Toutefois, mon honnêteté me pousse à reconnaître qu’il pourrait y avoir, dans l’ensemble des données que j’ai pu recueillir, des traces de mes visions.

Une certaine manipulation dans les informations et les discussions conduites peut exister et il faut pouvoir s’en apercevoir. Et cela est valable dans les deux sens : je n’ai pas de certitudes que mes propos aient été à chaque moment saisis comme mon objectivité de chercheur m’obligeait à les exprimer, tout comme je n’ai pas de certitudes que les propos des enseignants spécialisés avec qui j’ai discuté furent correctement et avec exactitude appréhendés et déchiffrés par moi-même.

A présent, je vais conclure l’exposition de cette partie sur ma méthodologie de recherche. Et je vais finir par cet énoncé de Tremblay (1968), qui me parle et m’interpelle grandement : « Si la méthodologie est, entre autres, une logique opératoire, c'est que ses démarches découlent de la position théorique du problème. Les observations qu'elle permet de recueillir sont les éléments utilisés dans l'effort d'explication. » (p.7).

Par la suite, je passerai à la description et à l’étude des informations recueillies durant les interviews que j’ai menés.