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Les lieux de collecte des questionnaires Ebimaz et Familia et Moradia à Ciriaco

a. Des histoires migratoires plus ou moins complexes

Carte 9 Les lieux de collecte des questionnaires Ebimaz et Familia et Moradia à Ciriaco

Dans le premier village, Ciriaco, environ 90% des familles font partie du projet de développement durable. Ce village est composé des localités Centro do Emídio, Povoadinho, Centro, Vila Bigode ainsi que de quelques habitations éparses (hors povoado). Dans les deux autres villages contenant des membres de la résex (Alto Bonito et Viração), la proportion de membres demeure marginale.

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Au cours de la campagne de collecte 2008, Vanusa da Silva Lima (Miqcb/Centru) a participé à l’application des questionnaires, et nous l’en remercions ici. Nous remercions également Céline Raimbert (IHEAL-Credal) de son aide pour la saisie des questionnaires.

Chapitre II – Migrations et peuplement – Enquêtes biographiques à Ciriaco

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Ainsi, lors de l’application des questionnaires, nous avons essentiellement cherché à respecter la répartition des membres dans chacun des trois villages, en veillant à conserver cette proportion par rapport au nombre total d’habitants. Au final, 83% des questionnaires ont été appliqués à Ciriaco, 9% à Viração et 8% à Alto Bonito. Si au final la proportion de membres et de non-membres s’avère représentative (74% des enquêtés font partie du projet), c’est parce que les non-membres ont été surreprésentés dans le village de Ciriaco, tandis que ceux-ci sont sous-représentés à Viração et Alto Bonito.

Nous n’avons pas réussi à nous procurer une liste exhaustive des résidents au sein de la résex, stipulant si ceux-ci étaient membres ou non du projet de réserve extractiviste. En revanche, une liste des familles membres du projet a pu nous être fournie. Ainsi, afin de procéder à notre échantillonnage, nous avons effectué une sélection aléatoire parmi les membres, et complété celle-ci par des résidents non-membres que le séjour de terrain nous a permis d’identifier.

SELECTION DES REPONDANTS PARTICIPANT AU PROJET DE DEVELOPPEMENT DURABLE

Après avoir déterminé que nous interrogerions 50% des familles participant au projet, nous avons calculé le nombre de familles résidant dans chaque localité. D’une part, la sélection des ménages s’est faite au hasard (les habitants présents à leur domicile lors du passage de l’enquêteur), d’autre part en fixant des rendez-vous avec les résidents rencontrés lors de diverses occasions.

SELECTION DES REPONDANTS NE PARTICIPANT PAS AU PROJET DE DEVELOPPEMENT DURABLE

Ayant perçu que la part des résidents ne participant pas au projet était significative, nous avons décidé d’augmenter notre échantillon de la même proportion. Ainsi, puisqu’il n’existe aucune statistique officielle sur les résidents non-membres, nous nous sommes fiés à une estimation faite par l’autorité de tutelle de la résex, qui évaluait ceux-ci à 20% de l’ensemble sur le site de Ciriaco. Dans ce cas précis, l’application des questionnaires s’est faite exclusivement sur rendez-vous.

REPARTITION HOMME/FEMME

Dans un premier temps, nous nous sommes appliqués à respecter la règle spécifiant d’enquêter uniquement les chefs de familles. Mais il faut retenir que durant la période des activités agricoles, qui a coïncidé avec les deux campagnes d’application des questionnaires, les hommes restent aux champs et ne rentrent au domicile familial que pour y passer le week-end. Pour contourner cette difficulté, nous avons résolu de faire répondre également les épouses responsables du domicile lorsque les époux n’étaient pas présents, tout en veillant à respecter une proportion équivalente d’hommes et de femmes. Par foyer, un seul adulte responsable a répondu au questionnaire.

Tableau 6 : Présentation de l’échantillon Ciriaco Structure par sexe des répondants en 2007

Effectifs Proportion (en %)

Hommes 36 47,4

Femmes 40 52,6

Total 76 100,0

Age moyen des répondants en 2007 (en année)

Hommes 49,9 Femmes 44,4 Total 47,0

Structure par groupe d'âge des répondants en 2007 (en %)

Effectifs Proportion (en %)

– de 45 ans 35 46,1

45 ans et + 41 54,0

Total 76 100,0

Effectifs Proportion (en %)

– de 40 ans 23 30,3

40-54 ans 32 42,1

55 ans et + 21 27,6

Total 76 100,0

Age médian à la première migration : 13 ans

Source : Duramaz, traitement statistique : P. Sébille

C. LES TRAJECTOIRES MIGRATOIRES VUES DE CIRIACO

L’histoire du Ciriaco ressemble à celle de nombreux autres villages de la frontière amazonienne, accueillant des familles de petits agriculteurs fuyant l’aridité nordestine et les grands propriétaires.

La plupart du temps, les petits villages étaient formés par un seul habitant, qui partait d’une rive vers l’intérieur de la forêt et ouvrait une clairière pour y planter ses cultures. De cette façon, ils s’enfonçaient et s’éloignaient des berges du fleuve. D’autres paysans s’en rapprochaient, et de petits villages se créaient ainsi (Lima et Sousa, 2007).

Ainsi, cette région devenue une zone d’arrière-front pionnier a été peuplée à partir de la fin des années cinquante, notamment par des agriculteurs ayant migré à la recherche de terres à cultiver. D’où venaient-ils ? A quelle période, comment se sont-ils déplacés ? Une partie de ces agriculteurs a-t-elle réussi à se fixer en Pré-Amazonie ? Comment se déroule la migration jusqu’à la découverte d’un lieu d’habitation ? Les opérations de régularisation foncière des années quatre-vingts, puis le décret de la réserve extractiviste de 1992 sont-ils à l’origine de flux spécifiques et observables sur notre échantillon ?

Pour apporter réponse à ces questions, la matière première dont nous nous sommes nourris a été composée des entretiens et des questionnaires appliqués sur place. A notre demande, des traitements spécifiques ont été réalisés par Pascal Sébille en plus des traitements propres à la méthodologie Duramaz et communs à tous les sites. Nous avons ensuite traduit ces statistiques originales au moyen de graphiques et de cartes, autour desquels s’articulera notre analyse.

1. Génération égo -1 : l’origine des parents des répondants

Pour comprendre l’ampleur du mouvement de migration, Duramaz a interrogé les enquêtés sur le lieu de naissance de leurs parents. Tous les enquêtés n’ont pas su répondre : certains n’ont vécu qu’avec leur mère, ont perdu leur père de vue, d’autres ne connaissent que l’Etat dont ils sont originaires. Au total, sur 76 enquêtés, 6,58% d’entre eux n’ont su fournir ces renseignements sur aucun de leurs parents, mais de nombreux enquêtés méconnaissent cette donnée de l’histoire de vie de l’un ou l’autre de leurs parents.

L’observation des lieux de naissance des parents confirme l’installation récente des migrants dans la région d’Impératriz. La mobilité fait vraiment partie des histoires familiales, souvent la trajectoire

Chapitre II – Migrations et peuplement – Enquêtes biographiques à Ciriaco

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migratoire de l’individu s’amorce là où l’a conduit celle de ses parents. L’étude des lieux de résidence des parents des enquêtés permet alors d’avoir une première approche du parcours migratoire familial.

Les cartes n° 10 (A, B et C) nous présentent les municipes de naissance des pères et des mères des répondants du questionnaire Ebimaz ayant su fournir cette information.

Les générations des parents recouvrent une période historique très étendue, allant de la fin du XIXe

siècle aux années soixante du XXe siècle. Les années de naissance des femmes sont un peu plus tardives, et ne remontent pas au-delà de 1900, tandis que certains pères sont nés jusqu’en 1880. Ces générations connaissent un modèle de nuptialité marqué par des écarts d’âge entre conjoints de l’ordre d’une quinzaine d’années et par de grandes fratries (moyenne de six enfants nés vivants par femme).

On observe pour ces générations que la proportion de pères et mères originaires de la région d’enquête, et de façon générale de la pré-Amazonie, est presque inexistante. Quelle que soit la génération, les parents sont majoritairement d’origine maranhense (tableau n° 7) : la région centrale, principale zone de production du babaçu (Lago do Junco, Bacabal, Pedreiras, Fortuna, Peritoró, Paulo Ramos, Vitorino Freire, Bom Lugar et Caxias) est le principal foyer commun aux deux parents (36,5%). Ensuite, 12% d’entre eux sont originaires du municipe de Barra do Corda, dans le sud du Maranhão, qui a été un point important de l’avancée des migrants nordestins à partir des années quarante. On peut donc supposer que leurs propres parents s’y sont installés à cette époque.

Les municipes de São João dos Patos, São Domingos do Azeitão (Maranhão) et de São Pedro do Piauí sont les municipes dont sont originaires les pionniers du Ciriaco et les membres de leur famille qui les ont suivis dans la migration. En connaissant de manière approfondie l’histoire locale, on comprend ainsi les réseaux qui se tissent dans le projet migratoire et permettent de mettre à jour certains courants de migration.

Les origines plus lointaines sont plutôt le fait des pères de répondants. En effet, il semble que les mères sont d’origine plus proche du lieu de résidence que ne le sont les pères. La proportion de

maranhenses est nettement plus élevée chez les mères (67,44%) que chez les pères (50% sont maranhenses, tandis que l’autre moitié se répartit entre le Ceará et le Piauí (38,24%) – confirmant

ainsi les foyers traditionnel de départ des migrations vers le Maranhão –, puis entre les autres Etats du Nordeste et le Minas Gerais).

Ces statistiques corroborent les premières observations d’Ebima selon lequelles les femmes sont moins mobiles que les hommes, et leurs trajectoires migratoires de plus courte distance (Sébille et al., 2005). Les cartes des migrants de Ciriaco montrent en outre que les lieux de naissance des mères se trouvent sur les chemins de migration des hommes, qui s’étirent d’est en ouest. On peut donc supposer que la migration féminine est pour partie liée à la migration masculine, permettant d’envisager que la rencontre avec l’épouse constitue une des étapes de la trajectoire migratoire de l’homme.

Tableau 7 : Etats d’origine des pères et mères des répondants par cohorte

Pères (en %) Mères (en %)

-45 ans +45 ans total -45 ans +45 ans total

Maranhão 57,14 45,00 50,00 80,95 54,55 67,44

Piauí / Ceará 35,71 40,00 38,24 14,29 36,36 25,58

autres (Paraiba, Bahia, Minas

Gerais, Goiás, Pernambouc) 7,14 15,00 11,76 4,76 9,09 6,98

total 100,00 100,00 100,00 100,00 100,00 100,00

La carte n° 3-B laisse apparaître qu’une part conséquente des mères et des pères provient de la région centrale du babaçu, principalement sur l’axe Vitorino Freire-Pedreiras-Caxias. Cela concorde avec l’origine professionnelle qui leur a été attribuée : 94% des mères des répondants dont on connait la profession étaient d’origine rurale, parmi lesquelles 55% étaient reconnues par leurs enfants comme quebradeiras de coco babaçu, contre 39% de simples agricultrices. Les pères sont quant à eux majoritairement agriculteurs : 98% des pères des répondants dont on connait la profession étaient d’origine rurale, et agriculteurs à 95%.

Si bien entendu ces statistiques confirment que l’histoire familiale est fortement marquée par cet ancrage dans le rural, la proportion de quebradeiras de coco permet de mieux qualifier cette agriculture, car cet usage confirme, d’après la relation établie par May (1989), les conditions modestes dans lesquelles vivaient ces familles d’agriculteurs. Rappelons que la casse du babaçu est d’autant plus présente dans les activités quotidiennes que le revenu du ménage est faible.

De plus, cette pratique laisse supposer une transmission de savoir-faire entre mère et fille. En ce sens, et puisqu’il est confirmé que la casse du babaçu s’est diffusée dans la région de résidence au point d’en devenir une activité emblématique, on peut affirmer que la migration n’a pas occasionné de rupture d’activité entre les générations. Au contraire, étant donné la spécificité du babaçu, on peut même affirmer que la migration a contribué à la diffusion de cette pratique dans la région d’implantation. En effet, l’avancée de la frontière agricole se caractérise par d’importants déboisements et par la progression du babaçu dans les paysages. En raison de l’origine des migrants, l’exploitation et la culture du babaçu se sont diffusés en même temps que la ressource se propageait.

2. Les origines d’égo,