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aussi peut être normative ; l’observation et la recherche intensifiées par le recours à un média donné ; la

I.6. Modélisation en géographie

I.6.2. Modéliser pour simuler des phénomènes avec un Système d’Information Géographique (S.I.G.)

I.6.2.3. Quels liens entre raisonnement informatique et raisonnement géographique ?

Aujourd’hui, les S.I.G. gèrent la représentation graphique et la description thématique d’objets géoréférencées, puis associent les deux dans un système de cartographie automatique. Ils constituent en cela un progrès indéniable par rapport à la période précédente au cours de laquelle l’espace géographique était assimilé à un espace statistique. Pour autant, la position du géographe reste relative quant à ses capacités à véritablement mener une réflexion sur l’espace. Indéniablement l’outil permet de manipuler des quantités importantes de données et les afficher rapidement pour produire des images. Cependant, le risque est grand de voir le traitement des

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Ils peuvent être regroupés dans 3 grandes familles : les opérateurs arithmétiques, les opérateurs numériques et les opérateurs logiques.

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Avec un S.I.G. raster, les objets ne sont pas connus à priori et correspondent à des groupes de pixels. Ils sont de ce fait toujours surfaciques. Les S.I.G. vectoriels reposent sur une logique de primitives graphiques : le point, la polyligne (ou ligne brisée) [n points reliés entre eux], la surface [une polyligne fermée].

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Lorsque un changement d'échelle est réalisé, cela peut consister uniquement en un effet zoom (en permettant de voir un espace plus ou moins vaste) et l'apparence des objets ne change pas. L'affichage est quantitativement modifié. Par contre il est aussi possible de changer de niveau ce qui modifie qualitativement l'information (à une grande échelle, un objet correspond à une surface alors qu'à une petite échelle, il sera représenté par un point).

données (lié à la logique informatique) prendre le pas sur le raisonnement géographique1.

L’information géographique est avant tout un processus cognitif avant d’être un produit visible à l’écran, ce qui implique une réflexion en amont, c'est-à-dire lors de la modélisation conceptuelle du phénomène étudié, afin de créer un Modèle Conceptuel

de Données (M.C.D.). Ce processus d’abstraction est nécessaire et demande au

chercheur

de préciser de quelle perception du monde observable son sujet présente une instanciation2

Pour ce qui est du S.I.G., cela se traduit dans l’organisation de la base de données. Les M.C.D. classiques implémentés dans les S.I.G. reposent sur l’idée que la formulation spatiale d’un objet est indépendante de sa formulation sémantique. Ils proposent des fonctionnalités puissantes de traitement de l’enveloppe formelle des objets, alors que leur contenu thématique (sémantique mais aussi temporel) est laissé en retrait. En analyse spatiale, l’objet3 représente le référent incontournable à partir duquel le raisonnement sera construit. Depuis les travaux de J. DE ROSNAY4 en intelligence artificielle, les données et leur traitement sont conçus sur un même plan selon une vision systémique : la démarche d’élaboration est structurée en trois niveaux successifs : conceptuel, externe, interne. En ce qui concerne le niveau conceptuel, différentes familles de pensée se sont succédées, celle restant encore la plus utilisée aujourd’hui reposant sur le modèle entité / association5. Pour autant, aucune ne prend en compte ce qui fait la spécificité d’un objet géographique, le lien entre sa dimension sémantique et sa dimension spatiale. Pour T. SAINT GERAND, ces choix

« ne reposent pas sur la logique fondamentale et sous jacente de modélisation cartographique du monde réel ou s’articulent niveaux de mesure (échelles qualitatives, échelles quantitatives), niveau de conception (variable entre l’approche élémentaire et l’approche globale), échelle de perception spatiale

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Parmi les 5 modules principaux présents dans un S.I.G., les informaticiens sont prépondérants dans 3 d’entre eux (Archivage, Accès et Analyse), les géographes agissant au niveau de l’Affichage et en partie de l’Analyse. L’Acquisition de données est extérieure et dépend de choix réalisés par les producteurs de données comme l’I.G.N.

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T. SAINT GERAND, ibidem, p. 267. Cette démarche consiste alors à se positionner par rapport au paradigme de la géographie, mais aussi de faire des choix entre les objets géoréférencés (appartenant à l’espace métrique) et leur affichage à l’écran (espace sensible).

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Identifier l’objet permet de situer le niveau de conception sémantique et spatio-temporel auquel se place l’analyse.

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J. DE ROSNAY, « Le Macroscope », Le Seuil, Paris, 1975, 346 pages.

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Celui-ci se fonde sur la théorie des ensembles. Il est conçu à 2 niveaux : les objets sont tout d’abord regroupés par famille, puis ces familles sont divisées en collections d'objets présentant des points communs. A chacun de ces niveaux, un certain nombre d'attributs sont associés : certains sont communs à tous les objets de la famille, d’autres à plusieurs collections d’objets ou bien à une seule.

(variable des plus faibles aux plus fortes) et échelle temporelle (variable de l’instantané à la durée pluridécennale voire millénaire ou plus)1 ».

La difficulté principale reste bien le caractère complexe de l’objet géographique. Dans ce domaine, la modélisation hypergraphique2 représente un progrès important. Celle-ci propose une démarche hypothético-déductive, partant des phénomènes (une description théorique holistique du monde réel) pour en déduire la structure des données.

« Le monde observable est considéré comme une hiérarchie enchevêtrée, c’est à dire une structure imbriquée d’entités mêlant relations de composition spatio- sémantiques (appartenances partielles ou totales), relations de représentation (attributaire et/ou cartographique), et relations fonctionnelles3 ».

Ce qui fait la force majeure de cette conception est liée à la cohérence permanente entre une logique systématique de description d’un phénomène (tous les phénomènes sont pris en compte) et une logique systémique de description de ce même phénomène (par la prise en compte de ses relations internes et externes). Pour les géographes, tout phénomène relevant du monde observable peut ainsi être décrit de son niveau le plus générique jusqu’à son niveau le plus spécifique, de son niveau le plus global et relationnel à son niveau le plus analytique, aussi bien dans le domaine sémantique que morphologique4.

1.6.2.4. Quel avenir pour les S.I.G. ?

Ces outils sont de plus en plus utilisés et prennent tout leur intérêt par l’adjonction de nouveaux modules. Avec un S.I.G. standard, les capacités d’analyse spatiale permettent de répondre à deux grands types de questions : le premier concerne les localisations (que trouve-t-on à cet endroit ? Où se trouvent ces objets ?) ; le second les effets spatiaux d’une modification / création d’objets (comme lors de projets d’aménagements avec la recherche d’objets se trouvant à une certaine distance d’un élément de référence par la création de zones tampons). Les S.I.G.

1

T. SAINT GERAND, ibidem, pp. 275/276.

2

F. BOUILLE, « un modèle universel de banque de données simultanément partageable et répartie », thèse d’état es sciences, Paris, Université Paris VI, 1977.

3

T. SAINT GERAND, ibidem, p. 280.

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L’I.G.N. a retenu cette démarche pour structurer les données de la BD Carto : un objet géographique (une ville) est décomposé en objets complexes (réseau routier, occupation du sol, équipements,…), chacun d’entre eux est décomposé en objets simples (linéaires, surfaciques) représentés par des primitives graphiques (points, arcs, nœuds, polygones).

actuels sont implémentés avec de nouvelles fonctionnalités permettant d’affiner leurs capacités d’analyse spatiale1.

Les enjeux actuels portent plus sur la volonté de créer des images virtuelles, fixes ou animées, le plus véristes possible de façon à simuler les modifications apportées dans un paysage par les aménagements. Les techniques de visualisation en trois dimensions (3D) sont un champ de recherche en expansion rapide, en relation avec les progrès technologiques dans le matériel informatique. Actuellement, les capacités d'un ordinateur portable actuel avec une bonne carte graphique sont suffisantes pour créer des scènes en 3D. Les difficultés restent cependant importantes, tant du point de vue de la technique nécessaire, même si les logiciels deviennent de plus en plus ergonomiques, que des résultats obtenus : réaliser une visualisation tridimensionnelle est possible, permettre une représentation réaliste et dynamique de l'espace reste difficile avec des moyens simples. Pour construire une représentation 3D, trois étapes sont nécessaires : la première consiste à construire une représentation en 3D de la structure de tous les objets de la scène en commençant par les plus élémentaires (d’où la nécessité de disposer de données décrivant leur topologie et leur géométrie tridimensionnelle) ; la seconde nécessite d’habiller tous les objets 3D de la scène avec une texture ; la troisième met en place l’éclairage de la scène. Les recherches se poursuivent pour améliorer le réalisme de l’image et la possibilité de se déplacer en temps réel dans la scène.

Ces progrès importants au niveau des techniques permettant de produire des images véristes de l’espace ne doivent pas, cependant, se substituer au problème de la compréhension des enjeux spatiaux. Recréer des espaces virtuels, manipuler les objets constituant la scène constituent des atouts pour apporter de nouvelles informations aux différents acteurs du territoire. En revanche, la relation entre le virtuel et le réel reste posée, car cet espace modélisé n’est pas l’espace réel dans lequel chacun vit et agit. C’est bien à ce niveau que se trouve le véritable enjeu géographique : au-delà de l’outil et de ses performances, comment chacun des acteurs, du simple citoyen à l’élu, comprend-il et utilise-t-il les informations auxquelles il a accès ?

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