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et met en œuvre des critères précis de validation » ; d’autre part, « elle élabore des méthodes qui lu

POSITIVISME CONSTRUCTIVISME Finalité

I.5. Former les acteurs à l’A.D.T.

I.5.1. L’individu dans le territoire

I.5.1.1. Concevoir son environnement

« L’homme n’est-il pas, enfin, un être affectif, siège d’émotions, de désirs, de craintes, façonnant dans le tissu amorphe de l’environnement physique, un monde qu’il habite ? »2

Pour un individu, l’espace n’est pas neutre, mais chargé de sens car porteur de valeurs. La question qui se pose alors tient dans la manière dont l’individu construit ses sensations puis ensuite les utilise3. Lorsque nous parcourons un espace (physiquement en nous déplaçant, ou immobiles, seulement du regard), de multiples

1

M. IMBERT, cité dans D. ANDLER (dir.), « Introduction aux sciences cognitives », Gallimard, Folio Essais, Paris, 2ème édition, 2004, 740 pages, p. 56.

2

H. DREYFUS, cité dans D. ANDLER (dir.), ibidem, p. 46.

3

« Tout homme moderne, et c’est en quoi il est moderne, vit familièrement avec une quantité de

contradictions qui viennent tour à tour sur le devant de son esprit », P. VALERY cité dans A. A.

MOLES, « Vers une psycho-géographie », dans A. BAIILY, R. FERRAS, D. PUMAIN (dir.), ibidem, p. 161.

capteurs1 présents dans tout le corps perçoivent des signes2. A. MOLES a formalisé cette démarche et développé la conception des coquilles de l’homme, reposant sur la

proxémique3 (figure 8) : de la peau jusqu’au vaste monde, l’homme vit dans un

système d’emboîtements à sept niveaux qu’il saisit et conçoit de manière subjective. Le lien le plus fort a trait à l’appropriation du lieu par l’individu et se traduit par l’idée que

« ce lieu particulier est marqué par ma présence, par mes actes, par mes objets ou les êtres que j’y ai installés, qui le rendent à mes yeux à nul autre pareil »4

Ce sentiment d’appropriation se construit à partir de la reconnaissance de signes qui marquent cet espace.

J.-Y. PIOT, d’après un tableau de A.A. MOLES5

Figure 8 : les coquilles de l’homme

De l’espace intime à l’espace public indifférencié du vaste monde, les éléments perçus par les individus ne sont pas les mêmes. Dans l’espace approprié, parcouru, les repères matériels et culturels sont nombreux, précis. L’espace identifié en compte moins et au-delà, existe un troisième ensemble caractérisé par une absence de métrique, correspondant à un espace partiellement vide, dans lequel les repères sont rares, l’individu évoluant dans une totale indifférence spatiale6. Tous ces signes prélevés dans l’environnement sont ensuite utilisés par le système cognitif. Les

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Notre appareil visuel (rétine, cortex visuel, iris, cristallin) perçoit un certain nombre d’éléments : les formes, les couleurs, les lumières (et les zones d’ombre), les dispositions spatiales entre les formes. Notre corps enregistre aussi le travail des muscles (sensations kinesthésiques), la position de la tête, les odeurs, les sons et les émotions que nous ressentons à ce moment-là.

2

Chose perçue ou à percevoir, qui est faite pour être perçue. Un signe a un signifiant (c’est l’élément que l’on perçoit) et un signifié (objet, phénomène, quantité que représente le signe). R. BRUNET, R. FERRAS, H. THERY (1993), ibidem, p. 455.

3

« Etude de l’ensemble des faits vitaux dans lesquels, toutes choses étant égales par ailleurs, ce qui est

proche est pour moi (ici, maintenant) plus important que ce qui est lointain (ailleurs, autrefois, plus tard) » A. A. MOLES, ibidem, p. 164.

4 A. A. MOLES, ibidem, p. 173. 5 A. A. MOLES, ibidem, p. 166. 6 A. A. MOLES, ibidem, p. 172.

processus mis en œuvre construisent une relation la plus logique possible entre le monde matériel (signifiant) et le monde sensible (signifié).

Les sciences cognitives, qui se sont développées en relation avec les progrès de l’informatique, de la cybernétique et de la neurobiologie, proposent des théories pour comprendre l’utilisation des signes par les individus. Le système cognitif humain peut être caractérisé par ses états internes (ou mentaux) et les processus permettant le passage d’un état à un autre (construction de représentations). Les travaux en intelligence artificielle ont formalisé un certain nombre de comportements. Dans un premier temps, l’hypothèse retenue a été que le traitement de l’information perçue est réalisé par des systèmes indépendants, les modules (thèse modulariste de J. FODOR) qui manipulent des symboles (d’où l’analogie avec l’ordinateur, constitué d’éléments indépendants interreliés1). Ces symboles correspondent à des structures mentales dans lesquelles se trouvent notamment les perceptions et les concepts. Cette approche a montré ses limites dans le sens où l’intelligence humaine s’est toujours montrée plus performante que les machines, dès lors que les méthodes de réflexion ne sont pas liées à des suites logiques d’algorithmes. Le système cognitif humain utilise des méthodes heuristiques. Plus récente, l’approche connexionniste tente de modéliser ce type de raisonnement en concevant l’esprit humain comme un grand réseau d’entités simples (les neurones) interconnectées et fonctionnant en parallèle2.

Les perceptions que nous avons permettent de repérer par nos sens les signes matériels de notre environnement. Ces signes sont ensuite traités par le cerveau afin de construire une représentation de cette expérience sensible qui consistera en

« la trace neurale d’un grand nombre de changements, certains ayant pris place dans le cerveau, d’autres ayant pris place dans le corps proprement dit »3.

Pour les psychologues, cette représentation première est en elle-même un élément complexe car elle doit répondre à des critères de pertinence par rapport au sujet qui la construit. Elle est liée à une double dynamique (figure 9). Un premier axe, correspondant à la démarche de perception, relie l’individu pensant (le complexe sujet / objet) à son environnement (le complexe monde intérieur / monde extérieur). Des

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Trois types de processus sont repérés et analysés par J. FODOR, la transduction, les processus

périphériques, le processus central. Les systèmes multi agents utilisés par les géographes sont conçus

selon cette logique.

2

« Une machine à l’image du cerveau, constituée de composants rudimentaires, lents, faillibles,

fonctionnant en parallèle, sans contrôle hiérarchique, reliés entre eux par des liens dont l’efficacité sera modulée par l’expérience et représentera la compétence, ou encore les connaissances de la machine »,

D. ANDLER (dir.) (2004), ibidem, p. 43.

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informations circulent en continu entre ces deux pôles, l’environnement exerçant une pression sur l’individu afin qu’il crée des représentations correctes, dans le sens où il doit pouvoir rester en vie, mais aussi instituées, notamment dans le cadre de formations. Un second axe, correspondant à la démarche de conceptualisation, établit une relation entre la logique de la perception (processus / produit / processeur)1 et celle de la conception (signifiant / signifié / référent)2.

J.-Y. PIOT

Figure 9 : les quatre axes de complexité de la représentation

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Regroupée sous la triade processus/produit/processeur, elle signifie que chacun élabore (ou modifie) en permanence ses représentations de la réalité environnante (processus), à un instant t les contours d’une représentation peuvent être tracés à partir de sa description (produit), la représentation élaborée sert de guide pour déclencher des processus (processeur). J.-C. SALLABERRY, « Dynamique des représentations et construction des concepts scientifiques. Perspectives pour la didactique des sciences physiques », L’Harmattan, Paris, 2004, 183 pages, p. 32.

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Regroupée sous la triade signifiant/signifié/référent, elle correspond aux aspects de saisie perceptive (signifiant), à la production de sens (signifié) et à l’objet que désigne le mot décrivant la représentation (référent). J.-C. SALLABERRY, ibidem, p. 32.