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et met en œuvre des critères précis de validation » ; d’autre part, « elle élabore des méthodes qui lu

POSITIVISME CONSTRUCTIVISME Finalité

I.5. Former les acteurs à l’A.D.T.

I.5.1. L’individu dans le territoire

I.5.1.3. Des concepts évolutifs

Par un processus d’abstraction, un effet de retour sur les concepts peut se créer, ceux-ci devenant alors des objets de pensée ne faisant plus seulement référence à des objets du monde matériel3. Ce phénomène d’enrichissement permanent montre que le concept n’est pas un élément isolé.

Au niveau interne, dans le système cognitif, les connaissances sont structurées en réseaux et forment des trames conceptuelles évolutives4. Leur construction sert à représenter la connaissance et donner du sens à la pensée. Présentés souvent sous la forme de réseaux sémantiques, ils font appel aux théories associationnistes utilisées en intelligence artificielle et se réfèrent à trois métaphores : la première est spatiale

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Prendre un terme, le sortir du contexte scientifique dans lequel il a été élaboré pour l’intégrer dans un autre contexte scientifique présente un certain nombre de risques quant à la validité de son sens. Voir I. STENGERS dans « D’une science à l’autre. Les concepts nomades », Le Seuil, Paris, 1987, 388 pages et G. VERGNAUD, « Théorie et concepts fondamentaux » dans G. VERGNAUD (dir.) « Apprentissages et didactique, où en est-on ? », Hachette, Paris, 1994, 206 pages.

2

Avec le retour en force des sciences de la forme, on assiste en géographie à un renouvellement de concepts liés à des emprunts théoriques aux mathématiques (à travers la topologie, les fractals), à la physique (les structures dissipatives), à la biologie (les mutations en génétique) mais aussi à la complexité (théorie générale du système). Voir A. DAUPHINE, ibidem, pp. 23/24

3

« L’enfant doit être parvenu dans ses concepts spontanés jusqu’au seuil au-delà duquel de manière générale la prise de conscience devient possible », L. VYGOTSKY, « Pensée et langage », La Dispute, Paris, 1997 (3ème édition), 536 pages, p. 286.

4

« Les caractéristiques d’un concept sont à leur tour des concepts qui renvoient à d’autres concepts, et ainsi de suite ; ensemble, ils forment un réseau conceptuel », citation de B. M. BARTH dans P. CAMPY, C. ETEVE, « Dictionnaire encyclopédique de l’éducation et de la formation », RETZ, Paris, 2005 (3ème édition), 1104 pages.

pour représenter la distance entre les différents concepts ; la seconde est atomiste, le concept étant assimilé à une molécule assemblant des atomes de significations (comme dans la conception empiriste) ; la troisième est linguistique en référence à la syntaxe et à la sémantique1. Trois grands processus d’évolution de ces réseaux, utilisés inconsciemment et conjointement, peuvent être appréhendés. Le premier entraîne une complexification par la prise en compte de nouvelles propriétés et relations. Le second nécessite une meilleure cohérence par la coordination d’éléments auparavant séparés2. Le troisième entraîne une différenciation plus précise par

« la dissociation d’éléments perçus précédemment comme appartenant au même groupe »3.

C’est au cours de ce processus d’enrichissement que l’effort individuel doit être le plus important car la démarche induit un double conflit : d’une part, pour s’approprier un nouveau concept, le sujet devra s’opposer à ses conceptions initiales ; d’autre part, le passage d’un concept commun à un concept scientifique nécessite d’intégrer au moins un critère de rationalité, ce qui n’est pas inné. Les travaux de M. MASSON-VINCENT ont mis en évidence le processus de construction de notions géographiques chez des enfants et adolescents. Le vocabulaire analysé

« est à classer d’un niveau sensoriel à un niveau théorique »4.

J.-C. SALLABERRY, se référant aux travaux de J. PIAGET5, propose un modèle pour comprendre ce processus (figure 11). A un concept commun correspondent des

représentations image à bords flous (R1), c'est-à-dire que celui-ci a une signification

dans sa globalité et renvoie à des images, liées entre elles (une image fait toujours penser à une autre image). A un concept scientifique, correspond une représentation

rationnelle à bords affinés (R2) se distinguant de la précédente car elle peut être

justifiée par une argumentation scientifique. Changer de niveau d’abstraction (soit passer de R1 à R2) correspond, pour un individu, à l’affinement des bords de la

représentation initiale, ce qui entraîne une obligation de recadrage, de décentration par

1

D. KAYSER, ibidem, p. 235.

2

Enrichir les concepts revient alors à transformer un concept en attribut d’un autre concept plus abstrait (en relation avec la métaphore atomiste). Cela se réfère à une conception empiriste selon laquelle « les

concepts artificiels se caractérisent par des éléments ou attributs invariants. Former des concepts revient à extraire / identifier ces invariants sous la diversité des éléments ». A. WEIL BARAIS (dir), « L’homme

cognitif », P.U.F., Paris, 1996 (3ème édition), 576 pages, p. 440.

3

Citation de G. VERGNAUD dans J. PIAGET, P. MOUNOUD, J.-P. BRONCKART, « Psychologie », Encyclopédie de la Pléïade, Gallimard, Paris, 1987, 7 volumes, p. 828.

4

Le vocabulaire a été étudié à l’aide d’un logiciel d’analyse de discours et classé en six niveaux avec une progression dans l’abstraction : sensoriel (les impressions, l’affectif), commun d’identification (vocabulaire banalisé), géographique d’identification, générique explicatif (un mécanisme explicatif est implicitement associé), explicatif (mécanisme explicatif explicite), théorique (énonciation d’une règle théorique). M. MASSON-VINCENT, « L’enfant et la montagne. Savoirs géographiques et représentations spatiales sur la montagne », Anthropos, Paris, 1995, 330 pages, p. 84.

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rapport à ses perceptions et donc un changement de niveau logique. Le niveau R3 correspond à une pensée géométrique, c'est-à-dire que la réflexion ne porte alors que sur les concepts des sciences formelles ou empirico-formelles.

J.-Y. PIOT

Figure 11 : niveaux d’abstraction conceptuels

Les concepts se trouvent ainsi à l’interface entre le monde matériel dans lequel nous évoluons et le monde idéel que nous construisons1. Ils correspondent à un type de connaissances particulier, faisant appel aussi bien à la conscience perceptive qu’à la conscience réflexive2. Ces conceptions que nous construisons restent cependant, toujours auto-référencées et apparaissent dans la conscience sous la forme d’images de rappel :

1

« il est en devenir permanent ». A. BAILLY, « Les représentations en géographie », dans A. BAIILY, R. FERRAS, D. PUMAIN (dir.), ibidem, p. 369.

2

Les réflexions que nous venons de présenter tendent à valoriser ce qui constitue chez l’homme la pensée rationnelle, celle-ci étant un métissage entre des éléments matériels (perçus dans l’espace), ce que les philosophes appellent la conscience perceptive, et des éléments subjectifs (mémorisés par chaque individu), ce que les philosophes appellent la conscience réflexive. Une autre entité de notre système nerveux, la sphère affectivo-émotionnelle, interagit aussi avec la sphère cognitive. Les interactions entre les deux ne sont pas encore expliquées de façon satisfaisante, dans le sens où il n’existe pas actuellement de théorie cohérente pour le faire.

« la seule chose dont vous pouvez être bien certains est qu’elles [les images] sont réelles pour vous-mêmes, et que les autres humains élaborent des images comparables1 ».

I.5.2. La formation, comme démarche pour passer d’une représentation à