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Elle englobe un ensemble de caractéristiques individuelles pouvant influencer les bénéfices qu’un individu retire de sa formation. Burke et Hutchins (2007) estiment que les effets de ces caractéristiques sont les mieux connus et do- cumentés. Sur la base des différents modèles présentés précédemment, nous choisissons de classer ces variables en (1) variables liées à la motivation de la personne formée, (2) variables liées à sa capacité cognitive, (3) variables liées à ses attentes et (4) variables liées à sa personnalité.

4.3.1 La motivation à se former et à transférer

La motivation de la personne formée est une première variable reconnue pour son influence majeure sur les différents bénéfices qu’elle retire de sa formation (Colquitt et al., 2000 ; Noe, 1986). On la retrouve dans tous les principaux modèles d’évaluation de l’efficacité et du transfert (tableau 4). Les chercheurs distinguent habituellement la motivation à se former, qui intervient tout au long du processus de formation, de la motivation à transférer, dont les effets apparaissent en fin de processus.

La motivation à se former La motivation à se former (training motivation) fait référence à l’intensité et à la persistance des efforts que l’individu dé- ploie dans ses activités d’apprentissage avant, pendant et après la formation (Tannenbaum et Yukl, 1992 ; Colquitt et al., 2000). On retrouve parfois cette variable sous les termes de motivation pré-formation (Chiaburu et Marinova, 2005) ou de motivation à apprendre (Facteau, Dobbins, Russell, Ladd et Ku- disch, 1995). Elle reflète ainsi le réel désir de l’individu d’acquérir le contenu de sa formation, même lorsque cette dernière est exigeante (Noe, 1986).

La motivation à transférer Après la fin de la formation, les scientifiques pri- vilégient l’étude de la motivation à transférer (motivation to transfer). Elle correspond aux efforts que l’individu déploie pour utiliser les compétences et connaissances acquises en formation dans une situation de travail réelle. Concrètement, elle se caractérise par un sentiment de confiance dans le fait de pouvoir utiliser le contenu de la formation au travail, par une capacité à

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détecter les moments où il est possible de le faire et par le sentiment que cette utilisation débouchera sur une amélioration de la performance au travail et sur une résolution de certains problèmes (Noe, 1986). On peut retenir de ces deux définitions la notion d’effort. Les connaissances et compétences acquises peuvent rarement être utilisées telles quelles au travail. La personne formée doit donc s’efforcer de réfléchir à la meilleure manière de les adapter à son contexte professionnel et de prendre les mesures adéquates pour y arriver. Des études ont démontré l’effet positif et important des deux formes de mo- tivation sur les apprentissages, sur le transfert de ces apprentissages et sur la performance au travail de la personne formée (citons, p. ex., Delobbe, 2007 ; Machin et Fogarty, 2004 ; Ruona, Leimbach, Holton et Bates, 2002 ; Seyler, Holton, Bates, Burnett et Carvalho, 1998 ; Axtell, Maitis et Yearta, 1997). En effet, la motivation « catalyse » les effets de nombreuses variables individuelles, telles que le sentiment d’efficacité personnelle, l’attitude de la personne formée vis-à-vis de son travail ou l’utilité qu’elle espère retirer de sa formation. Les chercheurs pensent que les composantes intrinsèques de la motivation (p. ex., le simple goût d’apprendre ou le plaisir de construire de nouvelles relations) ont plus d’impact sur les résultats que ses composantes extrinsèques (p. ex., obtenir une augmentation de salaire) (Burke et Hutchins, 2007).

Cependant, les nombreuses interactions existant entre la variable motivation et les autres variables individuelles compliquent son évaluation. De plus, il est difficile de réaliser une mesure objective de cette variable par auto-évaluations des personnes formées ou par évaluations de leurs supérieurs hiérarchiques : les personnes formées hésiteront à avouer qu’elles ne sont pas motivées à suivre une formation et les supérieurs hiérarchiques auront sans doute du mal à évaluer cette dimension difficilement observable (Ford et Weissbein, 1997).

4.3.2 La capacité cognitive

Les effets de la capacité cognitive de la personne formée18 (cognitive ability)

sur les résultats de sa formation ne sont plus à démontrer (citons, p. ex., Col- quitt, LePine et Noe, 2000 ; Kanfer et Ackerman, 1989 ; Clark et Voogel, 1985). Plus cette capacité est développée et meilleurs sont les résultats d’apprentis- sage ainsi que la performance au travail de la personne formée (Alvarez et 18. Aussi exprimée en termes de niveau d’intelligence (Ree et Earles, 1991) ou de capacités mentales (Baldwin et Ford, 1988).

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al., 2004). Cette capacité joue aussi un rôle important dans le transfert des apprentissages, tout particulièrement lorsque celui-ci demande un effort parti- culier de la part de la personne formée. Elle influence ainsi le développement de certaines compétences complexes (Burke et Hutchins, 2007).

Il n’est pas toujours nécessaire d’évaluer l’influence de la capacité cognitive sur les résultats d’une formation. En effet, Holton (1996) estime que, lors- qu’un groupe de personnes formées est relativement homogène en matière de niveau hiérarchique et de niveau d’instruction, les capacités cognitives de ces personnes sont assez similaires. Ainsi, dans une telle situation, cette variable n’exerce que peu d’influence sur les résultats de la formation. En revanche, elle peut conditionner les résultats de groupes plus hétérogènes, par le biais de son impact sur la motivation des individus.

4.3.3 Les attentes

Les attentes de l’individu vis-à-vis de sa formation (expectancies) jouent un rôle sur sa motivation à se former, à transférer ses apprentissages et, par consé- quent, sur les résultats de sa formation (Noe, 1986). Lorsqu’il formule ses at- tentes, l’individu évalue deux dimensions : (1) la valeur des bénéfices qu’il retirera de sa formation et (2) l’effort qu’il devra fournir pour en maîtriser le contenu et l’utiliser dans son travail (Delobbe, 2007 ; Colquitt et al., 2000). Les bénéfices attendus peuvent prendre de nombreuses formes. Ils peuvent être immatériels tels qu’un gain de prestige, un gain de confiance en soi, un sentiment de réalisation de soi, ou matériels tels qu’une promotion ou une augmentation de salaire (Mathieu, Tannenbaum et Salas, 1992). Ils peuvent s’exprimer en termes de choix ou d’opportunités de carrière (career utility) (Kontoghiorghes, 2001). L’individu peut attendre de la formation qu’elle l’aide à développer certaines compétences nécessaires à l’occupation d’un futur poste ou le conforter dans son choix de carrière. Ces bénéfices peuvent aussi prendre la forme d’un gain de performance espéré au travail (perceived utility associa-

ted with training ou job utility) (Clark, Dobbins et Ladd, 1993). La personne

formée espère que ses nouvelles compétences et connaissances l’aideront à amé- liorer des dimensions importantes de sa performance au travail telles qu’une hausse de sa productivité, une réduction du nombre de ses erreurs ou un dé- veloppement de ses compétences de résolution de problèmes.

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Lorsque ces attentes sont élevées et que l’individu pense pouvoir y répondre par une formation, alors il perçoit celle-ci comme très utile, ce qui le pousse à développer ses compétences et à les transférer dans son travail (Burke et Hutchins, 2007). Néanmoins, cet effet n’a pas toujours été clairement démon- tré. Alors qu’Axtell, Maitlis et Yearta (1997) observent effectivement un effet positif sur le transfert des apprentissages, Ruona, Leimbach, Holton et Bates (2002) observent que l’utilité perçue de la formation a un impact faible sur la motivation à transférer. A notre avis, la nature diverse et variée des attentes et le fait que l’individu reformule sans cesse ses attentes tout au long de sa formation peuvent expliquer ces différences de résultats.

4.3.4 Les variables liées à sa personnalité

Colquitt, Lepine et Noe (2000) définissent la personnalité comme un ensemble de caractéristiques individuelles relativement stables pouvant influencer l’ac- quisition de connaissances et le comportement d’un individu. Par leurs effets sur la motivation, certains traits de personnalité (personality factors) peuvent avoir un impact sur les résultats d’un individu en formation (Kanfer et Acker- man, 1989). Nous passons ici en revue les traits ou variables de personnalité les plus étudiés dans le domaine du transfert de la formation, soit (1) le sentiment d’efficacité personnelle de la personne formée, (2) son locus de contrôle et (3) son implication au travail.

Le sentiment d’efficacité personnelle Le sentiment d’efficacité personnelle (self-

efficacy) se définit comme le jugement d’un individu sur sa capacité à mener

à bien certaines tâches clairement définies (Bandura, 1986 dans Laroche et Haccoun, 1999). Dans le cadre d’une formation, il renvoie à la croyance de la personne formée qu’elle va pouvoir appliquer correctement dans son travail une tâche ou un comportement acquis en formation (Gaudine et Saks, 2004 ; Tannenbaum et Yukl, 1992). Plusieurs études (p. ex., Salas et Cannon-Bowers, 2001) démontrent qu’un sentiment d’efficacité personnelle fort influence posi- tivement les résultats découlant d’une formation en termes d’apprentissages, de transfert de ces apprentissages et de performance individuelle au travail. Contrairement à d’autres caractéristiques personnelles, ce sentiment est assez facilement influençable et « malléable » (Laroche et Haccoun, 1999). Diffé- rentes interventions peuvent être mises en place pour augmenter ce sentiment chez la personne formée (Burke et Hutchins, 2007). Avant la formation, le

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supérieur peut essayer de lui fixer des objectifs d’apprentissage personnalisés. Durant la formation, le formateur peut tâcher de lui faire vivre des expériences de maîtrise des compétences enseignées et insérer, dans sa formation, des me- sures de management de soi. Après la formation, le supérieur peut lui donner régulièrement des feed-back de soutien. Ainsi, les actions entreprises par le supérieur hiérarchique de la personne formée, par ses collègues ou par le for- mateur ainsi que la manière dont la formation a été conçue peuvent jouer un rôle sur l’expression de ce sentiment.

Le locus de contrôle On peut définir le locus de contrôle (Locus of Control) comme la croyance d’un individu sur ce qui détermine les résultats de son travail (Noe, 1986). Un individu avec un locus de contrôle plutôt externe tend à penser qu’il n’a pas de contrôle sur sa manière de travailler : il ne contrôle pas l’utilisation de ses nouvelles compétences ni sa performance individuelle. Ces dernières dépendent essentiellement de facteurs environnementaux qu’il ne peut maîtriser (Laroche et Haccoun, 1999). Au contraire, un individu avec un locus de contrôle plutôt interne pense qu’il peut contrôler sa propre per- formance au travail ainsi que l’utilisation de ses nouvelles compétences. On peut trouver cette variable d’influence dans les modèles de Noe (1986) et de Colquitt, Lepine et Noe (2000). Il semble que le locus de contrôle joue un rôle sur la motivation d’un individu : une personne avec un locus de contrôle plu- tôt interne tend à être plus motivée à suivre une formation et à en retirer de bons résultats qu’une personne avec un locus de contrôle plutôt interne (Noe et Schmitt, 1986). Néanmoins, certaines études contredisent ces résultats : à titre d’exemple, Tziner et Falbe (1993) ne trouvent aucun lien entre le locus de contrôle et les différents résultats d’une formation.

L’implication au travail Mathieu, Tannenbaum et Salas (1992) décrivent l’im- plication au travail (job involvement) comme le degré d’identification de l’in- dividu à son travail, y prend activement part et considère sa performance au travail comme importante pour son estime de soi (Burke et Hutchins, 2007). On retrouve cette variable dans les modèles de Noe (1986) et de Colquitt, Lepine et Noe (2000). L’influence de cette variable sur les résultats est posi- tive et forte. Lorsque la personne formée se sent hautement impliquée dans son travail, elle cherche à utiliser de la meilleure manière qui soit les compé- tences qu’elle a développées en formation (Noe et Schmitt, 1986). Cet effet se vérifie également pour le degré d’identification à l’organisation (organization