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3.4 Les modèles d’analyse de l’utilité

3.4.1 Les principales caractéristiques des modèles d’analyse de

mière caractéristique des modèles d’analyse de l’utilité est leur double finalité. La première finalité est l’évaluation d’un effet car tout modèle d’analyse de l’utilité aboutit à une quantification des impacts d’une intervention en RH. La seconde finalité est l’aide à la décision car l’utilité permet de comparer les im- pacts des différentes variantes d’intervention (Boudreau, 1991). Par exemple, le modèle d’analyse de l’utilité BCG permet d’évaluer la valeur ajoutée produite par une intervention de recrutement du personnel. Il permet aussi d’optimiser le recrutement en comparant l’impact sur cette valeur ajoutée de diverses com- binaisons de moyens de recherche de candidats ou d’instruments de sélection.

Une évaluation basée sur des critères de décision Tout modèle d’analyse de l’utilité base l’évaluation sur un ensemble de critères de décision nommés at-

tributs. Ces critères de décision peuvent être de nature très diverse.

Tab. 5: Exemple de sélection d’une formation par analyse de l’utilité à plusieurs critères

Critères Formation A Formation B Pondération des critères

1.Volume de ventes supplémentaire 2.Coût total de formation 3.Impact sur la satisfaction

au travail Valeur de l’utilité CHF 100'000 CHF 130'000 1 CHF 10'000 CHF 30'000 -1 6.0 2.0 CHF 3'000 CHF 108'000 CHF 106'000

Source : tiré de Boudreau, 1991, p.625

Cronbach et Gleser (1965) les définissent comme étant n’importe quelles consé- quences d’une décision susceptibles d’intéresser la personne prenant cette dé- cision. A titre d’exemple, dans le cadre du choix d’une formation commerciale, de simples critères peuvent être (1) le coût de la formation, (2) le volume des ventes supplémentaires réalisées par les commerciaux formés et (3) l’impact de la formation sur leur satisfaction au travail. Si l’on suppose que l’on ait

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le choix entre deux programmes de formation, nous pouvons représenter un modèle d’analyse de l’utilité très simple au moyen du tableau 5.

Dans ce simple exemple, la formation A sera préférée à la formation B puisque, selon les critères choisis par le décideur, elle aboutira à une utilité plus grande. Cet exemple montre la grande diversité des critères de décision liés à une intervention de GRH et la nécessité de gérer des résultats mesurés sur des échelles très diverses comme des francs, des unités de temps, un nombre de plaintes, des notes ou des rangs (Boudreau, 1991). Dans l’évaluation de telles interventions, toute la difficulté réside donc dans le choix des critères, dans leur pondération ainsi que dans la manière de les agréger pour en dégager une utilité finale (Brogden et Taylor, 1950). Les modèles d’analyse de l’utilité répondent en partie à cette difficulté en proposant une liste réduite de critères préétablis, des pondérations souvent déjà fixées ainsi qu’une fonction d’estimation de l’utilité finale.

Une fonction d’estimation de l’utilité Chaque modèle d’analyse de l’utilité dé- finit une fonction qui permet d’estimer l’utilité d’une intervention de GRH à partir d’une série de critères. Habituellement cette fonction fixe la pondéra- tion de chacun des critères et définit la manière de les combiner. La fonction d’utilité qui a été appliquée dans l’exemple ci-dessus (tableau 3) spécifiait de pondérer le premier critère par 1, le deuxième par -1 et le troisième critère par 3’000 puis d’additionner l’ensemble des résultats pondérés. Les fonctions des modèles d’analyse de l’utilité les plus récents visent l’évaluation du rendement de l’intervention de GRH. Elles mettent ainsi en relation les bénéfices et les coûts de l’intervention de GRH et prennent habituellement la forme de la fonc- tion d’estimation de l’utilité nette ( U) que nous avons définie précédemment (équation 5).

Utilité Uou utilité nette U = bénéfices ≠ coûts de l’intervention (5) Cascio et Boudreau (2008) considèrent que, dans la majorité des équations des modèles d’analyse de l’utilité, les bénéfices s’évaluent au moyen de critères qui vont faire augmenter la valeur de l’utilité finale tels que, p. ex., une différence de productivité entre des individus sélectionnés et des individus non-sélectionnés ou un gain de compétences de personnes formées, alors que les coûts s’évaluent au moyen de critères qui vont la diminuer tels que, p. ex., le coût d’un test de

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sélection ou le coût de la formation par personne formée. Ils observent aussi que ces critères de décision peuvent être répartis en trois classes :

1. les critères de quantité qui se réfèrent habituellement au nombre de per-

sonnes touchées par l’intervention, comme le nombre d’employés sélec- tionnés, le nombre de candidats ou le nombre de personnes à former ;

2. les critères de qualité comme la valeur moyenne des compétences déte-

nues par un individu avant une formation ou la valeur moyenne de la productivité au travail d’une personne que l’on souhaite promouvoir ;

3. les critères de coûts comme le coût de sélection ou de formation d’une

personne.

Cette distinction est utile car, en règle générale, l’évaluation des critères de qualité est plus difficile à réaliser. En effet, elle nécessite l’estimation d’un gain de performance individuel moyen produit par l’intervention de GRH, ce qui est complexe à réaliser (Hoff Macan et Foster, 2004). C’est pourquoi plusieurs méthodes ont été développées en parallèle aux modèles d’analyse de l’utilité pour tenter d’estimer ce gain de performance.

Une complexité assez élevée Bien que selon Boudreau (1991), les modèles

d’analyse de l’utilité établissent un équilibre entre le besoin de simplicité et celui de réalisme, ces modèles restent relativement difficiles à appréhender pour les praticiens (Le Louarn et Wils, 2001). Cette difficulté s’explique par l’utilisa- tion de variables qui ne sont pas toujours très parlantes pour les praticiens (p. ex., un effet mesuré en nombre d’écarts types), par la complexité liée à l’éva- luation de certaines de ces variables (comme la variable SDy, p. ex.) et par

la trop grande sophistication de certains modèles (Hoff Macan et Highhouse, 1994). Néanmoins, les derniers travaux de recherche sur l’analyse de l’utilité (Cascio et Boudreau, 2008 ; Honneycut et al., 2001 ; Morrow et al., 1997) ont tenté de dépasser ces limites en trouvant des variables plus proches de la réalité des praticiens, en proposant des solutions pour calculer les variables les plus complexes et, lorsque cela était possible, en réduisant le nombre de variables à étudier. Ainsi, comme le rappelle Cronbach et Gleser (1965), le choix d’un modèle d’analyse de l’utilité ne devrait pas se baser sur son degré de sophisti- cation mais sur sa qualité, c’est-à-dire sa capacité à décrire, prédire, expliquer et améliorer les décisions de GRH compte tenu de l’information aisément dis- ponible.

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Nous passons maintenant en revue par ordre chronologique les cinq principaux modèles d’analyse de l’utilité développés jusqu’à aujourd’hui. En effet, il nous paraît nécessaire de réaliser cette revue des modèles pour la compréhension des deux modèles d’analyse de l’utilité de la formation SHP et RBN (Schmidt et al., 1982 ; Raju et al., 1990) car ces derniers ont été développés dans le but d’améliorer ou d’adapter les modèles précédents. Enfin, nous présentons les différentes méthodes existantes pour estimer la valeur monétaire du gain de performance produit par une intervention de GRH, la variable-clé de la plupart des modèles mais aussi la plus difficile à déterminer.