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LES EMPLOIS ADVERBIAU

FOYERS INDIGENES AU XVI E SIECLE

2.4.1 PROPOS LIMINAIRES

1) CHIRI : racine nominale : frío

2.4.5 LES EMPLOIS ADVERBIAU

2.4.5.1 L’EMPLOI DE « NOMÁS »

L’emploi de no más n’est pas inconnu de l’espagnol du Siècle d’Or, il survit même dans certains emplois contemporains avec un faible rendement fonctionnel, supplanté qu’il est par nada más.

Il est de plus général en Amérique Latine avec différents signifiés que nous retrouvons à Santiago.

Il peut avoir une simple valeur limitative et équivaut en ce cas à sólo, solamente, c’est d’ailleurs l’une des valeurs de -lla, suffixe et infixe indépendant de limitatif *1:

« Chay/lla/ta munani. »

« Quiero eso nomás. »*2

Il existe un second emploi qui semble résulter non plus d’une traduction inconsciente de -lla, mais plutôt d’un calque syntaxique sur le quichua, tant l’alignement d’orientateurs spatiaux, temporels ou notionnels avec nomás, toujours postposé, semble résulter d’une langue agglutinante comme le quichua. Cette impression est renforcée par l’emploi des diminutifs pour les différents déictiques spatiaux, y compris pour nomás > nomasito.

« Aquí nomas vive. »

« Kaypi/lla kausa/n. » « Acá nomás. » « Acasito nomás. » « Aquisito nomás. » « Ahicito nomás. » « Ahora nomás. »

« Ahí nomás se armó la gresca. »

« Así nomás. »*1

« Bien nomás. »

1 ALDERETES Jorge, El Quechua de Santiago, ibid, page 142

2 La graphie péninsulaire avec deux morphèmes séparés semble en voie de disparition dans le N.O.A : no más > nomás.

« Lindo nomás. »

Il a en ce cas une valeur emphatique que l’on retrouve en quichua, l’alignement sémantique entre la particule du quichua -lla et le limitatif de l’espagnol américain ne peut qu’attirer l’attention du chercheur.

C’est encore le cas dans l’exemple suivant où nomás, employé emphatiquement, sert d’atténuation à un impératif, cet emploi est connu de l’ensemble de l’Amérique Latine et en particulier des Andes Centrales de substrat quichua :

« ¡ Vení nomás lindo te va a ir ! » 1 2 3 5 4 « ¡ Amuy/lla sumaj ri/soncka ! » 1 2 3 4 5

Où l’on constate le parfait alignement entre les deux structures syntaxiques, avec dans les deux langues la volonté de la part du locuteur de prendre à partie son interlocuteur tout en atténuant l’emploi de l’impératif de façon affective.

On remarque aussi une valeur conclusive, dans ce cas nomás équivaudrait à pues, là encore sa traduction par -lla est tout à fait courante en quichua :

« Así nomás será ! »

« Jina/lla/tachus ! »

« Bueno, y se llamó Picarito nomás. »*2

« Resultó cornudo nomás ! »

Ce véritable rictus linguistique que constitue nomás, (dont la fréquence d’emploi est inversement proportionnelle à son signifié), en arrive à être dénué de sens véritable, tout à la fois limitatif, emphatique, atténuatif et conclusif. Il s’impose comme la cheville du discours idoine dans l’expression de l’affectivité, calqué qu’il est sans doute sur -lla.

1 Nomás à valeur notionnelle, réponse à la question : « ¿ Cómo estás ? »

KANY*1 lui-même admet que les emplois atténuatifs de nomás, en Equateur et au Pérou, peuvent assumer le rôle de la particule quichua -lla, il nous semble pour notre part que l’équivalence entre les deux morphènes, quel que soit le signifié de nomás, démontre qu’il s’agit bien de traductions inconscientes du limitatif affectif du quichua, intégrées avec la plus grande facilité à la syntaxe espagnole.

Quant aux autres emplois latino-américains, on peut supposer qu’un suffixe limitatif équivalent, a pu lui aussi servir à cristalliser l’emploi général de nomás.

La graphie avec deux morphèmes agglutinés semble d’ailleurs confirmer une influence indigène. On peut donc penser pour conclure, que cet emploi classique a suivi deux parcours diamétralement opposés, jusqu’à l’extinction, ou presque, dans la Péninsule, et jusqu’à se transformer en une muletilla vidée de sens véritable en Amérique latine, particulièrement dans les pays andins, où il fut cristallisé par le limitatif du quichua. Influence réciproque donc, et enrichissement réciproque des deux langues.*2

2.4.5.2 L’EMPLOI DE L’ADVERBE DE TEMPS « RECIÉN »

Selon ZAMORA VICENTE*3, l’emploi de recién est général en Amérique Latine, KANY*4 confirme d’ailleurs cette diffusion géographique.

Il est néanmoins beaucoup plus fréquent dans les Andes Centrales et le Cône Sud qu’en Amérique Centrale, et il est souvent considéré, à tort, comme un emploi strictement argentin.

Il est vrai qu’à Santiago, et d’ailleurs dans tout le N.O.A, son extension est telle qu’il serait difficile pour un locuteur de ces régions de trouver un substitut à celui-ci.

C’est devenu un véritable rictus linguistique, limitatif comme nomás, mais réservé au domaine temporel.

1Sintaxis, ibid page 371 : « Con facilidad pudo asumir el papel de la partícula quichua -lla. »

2 Il convient de rappeler en effet, voir supra page 180, que le suffixe subit l’influence phonétique de l’espagnol,

dépalatalisation : -lla > - la et qu’il permet sous cette forme la formation de nombreux hypocoristiques. On voit donc que la prégnance de -lla est telle en castilla qu’il apparaît à la fois comme suffixe altéré, emprunt morphologique, et comme traduction inconsciente de nomás, calque syntaxique.

3 Ibid, page 438

On sait qu’en espagnol standard, recién, apocope de recientemente, ne peut s’employer que comme modificateur d’un participe passé, et que la liste d’emplois possibles est assez figée : « recién nacido, recién casado, recién llegado,etc. »

On sait aussi que la langue classique a employé reciente, avec un signifié de limitateur temporel, mais que cette possibilité a disparu en castillan moderne. Il aura donc fallu l’intervention d’une langue de substrat, pour étendre cet emploi qui n’existait qu’à l’état embryonnaire, dans l’espagnol des Conquérants. C’est ce que nous allons nous appliquer à démontrer, en rappelant tout d’abord la palette des emplois de recien.