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Chapitre 4 : Présentation du corpus

2. Étude morphosyntaxique du corpus

2.4. Le jeu des plans énonciatifs

2.4.1. Les embrayeurs

Ces éléments ont pour fonction d’inscrire les énoncés-occurrences dans l’espace et le temps par rapport au point de repère que constitue l’énonciateur, de même qu’ils déterminent les différentes variations du rapport locuteur/interlocuteur. Nous pouvons par conséquence distinguer entre embrayeurs de personnes, déictiques spatiaux et temporels. Nous allons réserver l’étude du premier ensemble (les embrayeurs de personne) au développement qui suit.

Il est possible de repartir les déictiques spatiaux en plusieurs types. Les types démonstratifs constituent en effet, des éléments dynamisants à l’intérieur des énoncés comme nous pouvons le remarquer dans cet exemple :

124 Laissez- vous séduire par de délicieux mariage : le goût fruité de la framboise et la saveur du bon chocolat blanc.

Il ne faut pas perdre de vue que le déterminant démonstratif est ambigu hors contexte. Même si le geste de l’énonciateur n’est pas visible, ce morphème montre à l’allocutaire une image accompagnant le slogan ou figure le slogan.

Quant aux présentatifs, ils signalent à l’attention de l’allocutaire l’apparition de nouveaux référents, un évènement plus ou moins important. Il en est de la sorte dans ce slogan.

C’est une Banque qui vous accompagne C’est vous L’Maâllem

C’est surement le bon moment pour devenir propriétaire

Dans le premier cas, le locuteur indique une banque bien déterminée dont le nom figure au bas du slogan. La seconde formule présentative s’adresse à l’ensemble des clients d’une société bancaire en les individualisant, ce qui crée l’impression qu’elle s’adresse à chacun de façon personnelle.

Pour le troisième slogan, le présentatif parle d’un moment qui commence et qui permettra aux clients de devenir propriétaires grâce à certaines facilités bancaires. Les détails de cette offre ainsi que le nom de la banque en question sont indiqués en bas de la page publicitaire. Nous pouvons dire que pour interpréter efficacement un énoncé publicitaire, l’allocutaire a besoin de toutes les composantes de son environnement discursif même si elles ne font pas partie intégrante de l’énoncé de base (le slogan)

En outre, la présence des déictiques spatiaux facilite l’échange émetteur/récepteur en indiquant à ce dernier le comportement à suivre, qui n’est autre que le réflexe de consommateur.

Les déictiques temporels rentrent eux aussi dans la même logique publicitaire qui vise à séduire l’ensemble des récepteurs. Mais il faut définir d’abord le point de repère de ce type de déictique : c’est le moment ou l’énonciateur parle, c’est-à-dire le « T0 » de l’énonciation. Car « c’est par rapport à son propre acte d’énonciation que le locuteur ordonne la chronologie de son énoncé et l’impose à l’allocutaire » 225 D’autre part, ces éléments se présentent sous deux formes : les adverbes ou les syntagmes nominaux et les

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temps verbaux. Nous allons nous intéresser d’abord au premier ensemble (Adverbes et syntagmes). Considérons donc ces occurrences :

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Pour le premier exemple, nous savons que le locuteur parle en l’an 2007. De plus, celui qui tient en main le journal ou figure connait la date exacte du moment de l’énonciation. Le locuteur ancre son énoncé dans des repères très précis et absolument reconnaissables par le destinataire, afin de garantir la bonne réception du message publicitaire. On peut remarquer le même phénomène dans le second exemple. L’adverbe « immédiatement » est à mettre en rapport avec le moment où parle l’énonciateur et qui correspond à la date de parution du journal. C’est le point de repère à partir duquel l’offre devient valable. De la même manière, le destinataire ne sait ni de quel 31 Décembre ni de quel Automne on lui parle. Évidemment, plus un énoncé est ancré dans le présent immédiat de l’émetteur et des récepteurs, plus il est efficace. Étant des embrayeurs, les déictiques temporels remplissent la fonction qui consiste à inscrire la parole publicitaire dans une actualité vécue afin de servir les objectifs ultimes de ce discours c’est-à-dire la réaction d’adhésion des récepteurs.

Quant aux affixes temporels, nous avons déjà eu l’occasion de remarquer que la majorité écrasante était au présent de l’indicatif et à l’impératif présent. Les valeurs déictiques de ces temps verbaux renforcent la contextualisation des énoncés publicitaires et renforcent les possibilités d’une réponse favorable de la part des futurs consommateurs. Dans le slogan suivant :

Sortez de l’indifférence, passez à la couleur.

Les deux formes impératives installent une relation directe entre l’émetteur et le récepteur. L’énoncé est rendu dynamique grâce à la présence discursive de la deuxième personne du pluriel (vous). Ainsi pouvons-nous obtenir une actualisation maximale qui rend

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effective la présence de l’allocutaire dans le discours. De la même manière, le présent déictique dans ce slogan attire l’attention du destinataire sur une situation d’énonciation particulière :

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En fait, il ne s’agit pas du présent atemporel, dit gnomique, qui tend vers la généralisation. Au contraire, c’est le présent de l’« ici maintenant » qui expose les faits directement sous les yeux des destinataires et qui implique ces derniers dans l’acte d’énonciation. Le rôle des embrayeurs est de garantir un maximum d’interaction avec l’ensemble des récepteurs. En somme, il s’avère que ce que la langue encode ne constitue qu’un indice de ce que le locuteur cherche à communiquer. Lors de l’interprétation, le destinataire ne se borne donc plus à décoder la phrase, mais il effectue une série d’opérations déductives, d’ailleurs assez simples en général, dont le but est de récupérer, en confrontant la séquence linguistique à un contexte, ce que le locuteur cherche à communiquer. En effet « les approches discursives actuelles adoptent des positions variées face à ces théories, mais il faut admettre que le point de vue général ainsi posé sur l’objet d’étude traite la question de de la référence d’une manière qui considère que le référent n’est pas donné (extradiscursif) mais au plus un construit ».226