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Le changement dans les organisations : quelques repères

SECTION 4 O RIENTATION METHODOLOGIQUE

1.3.1 Le changement dans les organisations : quelques repères

Le changement désigne un état qui évolue, se modifie et qui ne reste pas identique. Il renvoie à un ensemble de notions difficiles à appréhender tels que la transformation, la mutation et la recherche de nouvel équilibre. Aussi, Guilhon (1998) propose-t-il de retenir la définition suivante : « le changement organisationnel désigne toute modification dans les structures et/ou les comportements des membres de l'organisation résultant d'une adaptation à l'environnement ou d'une action volontaire du dirigeant en vue d'assurer le maintien ou la croissance de l'entreprise dans son environnement ».

Le changement peut, en outre, être stratégique. En effet, il peut « toucher soit le contenu (objectifs, appréciation de l’environnement et nature et disponibilité des ressources et du savoir-faire), soit le processus (structure, systèmes, culture et valeurs), de manière à modifier de façon durable la performance de l’organisation » Hafsi et Fabi (1997).

Quant au processus de changement, celui-ci fait référence aux actions, réactions et interactions des différentes acteurs qui cherchent à déplacer l'entreprise de son état présent à un état futur désiré.

A l’instar de Van de Ven et Poole (1995), nous définissons le processus de changement comme une progression d’événements dans l'existence d'une entité à travers le temps, c’est-à-dire, un ensemble d’actions, d’activités, d’opérations qui conduisent à un certain état ou résultat (passage d’un état A à un état B). L’analyse de ces processus permet donc de décrire comment les choses changent au cours du temps (Van de Ven et Poole1995).

Ceci étant, le processus de changement peut prendre de multiples formes. Comme le souligne Bernoux (1995), « chaque changement ou mouvement est une combinaison toujours nouvelle jamais imaginée, voire imaginable dans ses conséquences […]. Ce qui a marché ici n'a eu aucun effet là. Il n'y a pas de modèles absolus ». Il peut en effet s’agir d’un changement de type incrémental100 ou radical101.

Cette typologie est notamment complétée par Vandangeon-Derumez (1998) qui, en regroupant les axes coercitif - formatif et émergent – planifié, identifie deux types de changements : le changement prescrit et le changement construit.

100 Le changement incrémental consiste à faire évoluer l’organisation par touches successives de façon volontariste.

101 Le changement radical touche un large domaine (structures, cultures et systèmes), suppose une implication forte de la direction et l’existence d’un projet global. Il s’impose lorsque l’organisation est en profond décalage avec son environnement, le changement apparaissant alors indispensable pour la survie de l’organisation.

Une division qui renvoie entre autre au changement réactif102 de type déterministe et au changement proactif de type volontariste. Autrement dit, au changement d’adaptation et au changement de transformation.

Loin d'être opposables, ces deux types de changements sont en fait complémentaires (Batiste , 2003). La typologie développée par Watzlawick, Weakland et Fisch (1975) s'inscrit tout à fait dans cette optique. Ces chercheurs de la Mental Research Institute de Palo Alto identifient en effet deux types de changements : un changement 1 (reproducteur) qui prend place à l’intérieur d’un système et résulte d’un déplacement par rapport à une norme de référence et le changement 2 (transformateur) qui provient de l’extérieur du système et qui consiste à modifier la norme elle-même.

Ainsi que nous le verrons dans la deuxième partie de ce travail de recherche, ces deux types de changement peuvent être rapprochés aux processus apprentissage en simple et double boucle développés par Argyris103 et Schön (1978).

Enfin, la dernière typologie relevée dans la littérature est celle proposée par Vas et Ingham (2002, 2004) ; Vas (2005). Elle semble plus complète que les typologies précédentes dans la mesure où elle permet d’avoir une vision globale du processus de changement. De nature multi-paradigmatique et intégrative, cette typologie est particulièrement pertinente pour comprendre les processus réalisés dans un contexte complexe et constitué de différents niveaux d’intervention, tel que c’est le cas dans le cadre de notre recherche.

Cette classification regroupe cinq modèles processuels génériques : le modèle planifié, politique, procédural, interprétatif et chaotique.

- le modèle planifié présente le changement comme le produit de l’action volontariste et délibérée des hommes en charge de le conduire ;

- le modèle politique présente le changement comme un processus qui évolue en fonction des jeux de pouvoir développés par les acteurs ;

- le modèle procédural présente le processus de changement comme un choix entre différentes routines organisationnelles existantes ;

- le modèle d’interprétation présente le changement comme un processus construit par les interactions entre les membres de l’organisation ;

102 Il s’agit d’une adaptation graduelle à une évolution de l’environnement plutôt que d’une véritable stratégie proactive et volontariste de transformation pilotée par le sommet.

103 Notons qu’Argyris (2000) détache son modèle de celui de Lewin (1951) qui suggère trois étapes dans le processus de changement : le dégel, le mouvement et le regel. En effet, Argyris souligne que le passage au modèle II (en double boucle) n’élimine pas le comportement de modèle I (en simple boucle) qui reste valable pour résoudre les problèmes routiniers non menaçants.

- le modèle chaotique présente le changement comme un processus imprévisible, incertain et surtout non maîtrisé par les acteurs du système.

Il est nécessaire de rappeler, par ailleurs, qu’il existe plusieurs démarches de conduite du changement. Aussi, peuvent-elles être :

- de type "top-down" : le sommet hiérarchique analyse les problèmes et décide du changement à mettre en place et applique sa décision de manière unilatérale.

- de type "bottom-up" : cette fois, ce sont les niveaux inférieurs de la hiérarchie qui se voient attribuer la responsabilité du processus, le sommet stratégique intégrant par la suite les changements définis.

- ou négociée (introduction par responsabilités partagées) : dans le cadre de cette démarche, le sommet hiérarchique et niveaux inférieurs (opérationnels) travaillent ensemble au diagnostic des problèmes et aux choix des changements à mettre en place104.

De même, le changement se trouve souvent confronté à une forme de résistance dont les sources peuvent être rattachées à deux niveaux : celui de l’individu et de l’organisation.

Face à l’incertitude et les désavantages éventuels de la situation future, les individus sont susceptibles de manifester une attitude de refus, ou du moins de méfiance, à l’égard de tout projet de changement105. Ce rejet est particulièrement accentué par la méconnaissance, le manque de confiance et par la crainte de ne pas pouvoir développer les compétences souhaitées.

Quant aux résistances organisationnelles, celles-ci renvoient aux "mauvaises" routines, au poids des règles et des procédures, à la culture, à l’histoire de l’entreprise, à la structure ainsi qu’à la stratégie qui ont, avec le temps, pris force de loi et empêchent l’entreprise de se développer en se dotant de caractéristiques cohérentes avec les exigences de l’environnement.

104 Au lieu de se focaliser exclusivement sur la cible organisationnelle, la direction crée ici une dynamique pour tenter de tirer parti de la diversité des motivations et des compétences disponibles.

105 Certains individus peuvent concevoir les transformations comme une sorte de menace pour leur stabilité au travail, voire même pour leurs croyances et valeurs. Ces résistances peuvent alors se manifester soit par l'inertie, la révolte, ou encore, par le sabotage.

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