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La complexité des formes organisationnelles et l’épuisement de la doctrine stratégie-structure

SECTION 4 O RIENTATION METHODOLOGIQUE

1.3.4 Le développement stratégique et organisationnel d’EDF : vers une articulation nécessaire

1.3.4.2 La complexité des formes organisationnelles et l’épuisement de la doctrine stratégie-structure

A l’instar de Rouleau (1997), nous n'avons identifié jusqu’à présent que très peu de travaux consacrés à l’étude des liens entre stratégie et structure. En effet, seuls quelques auteurs ont tenté, durant les années 90, de renouveler la manière de concevoir ce lien en s’appuyant sur certaines réflexions présentées par les auteurs précédents. Parmi eux, Rowlinson (1995) qui intègre la culture dans cette relation. Il explique à partir d'une étude de cas, comment, lors d’une fusion, la culture peut entraver l’ajustement des liens entre stratégie et structure. Ou encore, ceux de Ciborra (1996) qui propose une nouvelle représentation de l’organisation qui repose sur la capacité des dirigeants à inventer, voir à "bricoler" des liens entre stratégie et structure.

Quoiqu’il en soit, ces approches demeurent insuffisantes, et ce, pour plusieurs raisons, dont celles énumérées par Desreumaux (1996) :

- non prise en compte de la grande diversité des configurations structurelles ; - leur prétention à l'universalité ;

- non prise en compte de la dimension volontariste de l’organisation ;

- les relations de causalité entre l’une et l’autre ne sont pas toujours aussi directes et systématiques ;

- ces approches oublient un certain nombre de facteurs pouvant générer le changement ; - enfin, le changement n’est vu que comme réactif et non proactif .

Aussi, certains auteurs vont plus loin que la logique héritée de Chandler en annonçant l'épuisement de la doctrine stratégie-structure comme base d'explication et de prescription en matière de développement d'entreprise.

Ainsi que le note Desreumaux (1996), on rentre dans une logique d'analyse plus centrée sur les particularités des formes organisationnelles. Une logique qui tend à admettre, en l’occurrence, que ces formes peuvent être simultanément structure et stratégie.

C’est le cas notamment des travaux de Fulconis (2003), qui en s’appuyant sur l'analyse de Fréry (1998 et 2001) sur les structures en réseau, tente de présenter celles-ci comme des

« organisations stratégiques ».

Il constate en effet que « dans la mise en œuvre de stratégies de coopération interentreprises, il apparaît que le design organisationnel occupe une place centrale dans la recherche de nouvelles formes de coordination interentreprises. A ce titre, les structures en réseau constituent à la fois un modèle économique d'organisation spécifique et une forme organisationnelle " stratégique". D'une part, elles répondent à la crise actuelle des modèles économiques de référence en se rapprochant des relations purement marchandes et des relations hiérarchiques tout en représentant, non pas des formes transitoires, mais un modèle de référence à part entière. D'autre part, elles constituent une forme d'organisation particulière pouvant être considérée simultanément comme une structure et comme une stratégie ».

Il constate également que, dans un environnement fortement concurrentiel, « il est désormais coutume de retenir une approche dynamique et réciproque des relations entre stratégie et structure. Ainsi, l'approche séquentielle est le plus souvent délaissée au profit d'une démarche reposant sur la cohérence entre la stratégie et la structure. […] les structures en réseau sont peu à peu reconnues comme une forme organisationnelle "nouvelle" mais aussi

"stratégique" ».

L’origine du changement de paradigme dans la recherche, c’est-à-dire, le passage d’une analyse basée sur la relations stratégie - structure à celle qui examine les caractéristiques des configurations organisationnelles se situe donc dans les profondes transformations de l’environnement.

En effet, la complexité et la turbulence de l’environnement nécessitent l’émergence d’organisations flexibles, capables de s’adapter aux changements contextuels et de se transformer pour améliorer leur insertion présente et future.

Aujourd’hui, de nouvelles formes organisationnelles se sont donc développées pour répondre aux nouvelles contraintes et faciliter la proactivité de l’entreprise en lui donnant l’information utile à temps, pour agir sur son environnement et non plus le subir.

"De ce point de vue, elles s’assimilent à des formes organisationnelles stratégiques ".

Aussi, pour comprendre ces formes organisationnelles ainsi que leur évolution, cela nécessite désormais plusieurs approches théoriques explicatives.

Une multiplicité d’interprétations que le modèle-cadre d'évolution des entreprises présenté par le CLAREE141 structure autour de trois principes pour faire interagir.

Ces trois principes sont présentés par Louart (1996) de la façon suivante:

- Le gestaltisme, qui permet de concevoir l'entreprise comme une configuration complexe d'un ensemble de composants (stratégie, structure, système de contrôle, technologie, culture,…) dont l'évolution est multiforme et composite. Il y a une dynamique d'ensemble, avec ses cohérences et ses contradictions ;

- Le contextualisme, qui insiste sur le rôle dynamique des environnements internes et externes de l'action. Les acteurs organisationnels se servent des contextes qui les entourent pour leurs réalisations ;

- Le constructivisme, qui souligne les aspects téléologiques de tout système d’action collective. Même si l'évolution des entreprises est largement déterminée par des facteurs objectifs, leur impact varie selon le traitement subjectif qu'en font les décideurs.

Figure 23 : Trois principes d’interprétation : Le gestalisme, le contextualisme et constructivisme

141 CLARE, centre Lillois d'analyse et de recherche sur l'évolution des entreprises

Ce dernier principe, à savoir le constructivisme qui renvoie aux cartes cognitives des décideurs, nous conduit vers une approche théorique qui permet notamment de donner une toute nouvelle perspective à l'analyse classique de la stratégie.

Il s'agit de l'approche théorique qui cherche à mettre en évidence l’importance du gouvernement d’entreprise dans le contrôle des choix des décideurs. En effet, comme le démontre Gomez (2002) dans le tableau n° 9 ci-dessous, chaque élément du tripode qui compose le gouvernement des entreprises142 : « les actionnaires, qui détiennent la souveraineté et la délèguent aux administrateurs, qui contrôlent directement les dirigeants assurant finalement les décisions managériales effectives » peut influencer sur la nature de la stratégie et donc la trajectoire de développement de l'entreprise.

Tableau 9 : Système de gouvernance et impact potentiel sur la stratégie de développement

Source : Gomez (2002)

142 Selon Gomez (2002), ce tripode n'exclut pas que d'autres acteurs interviennent de manière indirecte sur le gouvernement des entreprises tels que les syndicats, puissances publiques, banquier, salariés actionnaires ou encore les collectivités publiques.

Les dirigeants peuvent privilégier les stratégies qui correspondent à des intérêts particuliers

Quel est l’intérêt des dirigeants au développement de l'entreprise (Gomez-Mejia, 1994), ou au choix d'une stratégie plutôt que est neutre ou est un élément de distorsion des attentes réciproques

Contrôlent-ils vraiment les dirigeants ? (Mintzberg, 1973; Baysinger et Hoskison, 1990; Goold, 1996)

Administrateurs

L'entreprise peut être la proie de raider, de concurrents

Quel est le niveau de fidélité de l'actionnariat, de protection de l'entreprise en cas de défection de certains actionnaires?

L'évolution du rapport de force peut modifier la priorité des attentes des actionnaires

Quel est le rapport de force entre eux, le degré d'activisme (Manne, 1965; Salancik et Pfeffer, 1980) et de concentration de l'actionnariat (Hill et Snell, 1988; Belkaoui et Pavlik, 1992)?

Les stratégies de développement peuvent servir des intérêts de court ou long terme

Les dirigeants peuvent privilégier les stratégies qui correspondent à des intérêts particuliers

Quel est l’intérêt des dirigeants au développement de l'entreprise (Gomez-Mejia, 1994), ou au choix d'une stratégie plutôt que est neutre ou est un élément de distorsion des attentes réciproques

Contrôlent-ils vraiment les dirigeants ? (Mintzberg, 1973; Baysinger et Hoskison, 1990; Goold, 1996)

Administrateurs

L'entreprise peut être la proie de raider, de concurrents

Quel est le niveau de fidélité de l'actionnariat, de protection de l'entreprise en cas de défection de certains actionnaires?

L'évolution du rapport de force peut modifier la priorité des attentes des actionnaires

Quel est le rapport de force entre eux, le degré d'activisme (Manne, 1965; Salancik et Pfeffer, 1980) et de concentration de l'actionnariat (Hill et Snell, 1988; Belkaoui et Pavlik, 1992)?

Les stratégies de développement peuvent servir des intérêts de court ou long terme

1.3.4.3 La stratégie et structure d’EDF, un tandem continuellement mis à l’épreuve

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