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Section 2. Le droit constitutionnel cantonal

E. Lajurisprudence

Au regard du degré limité de justiciabilité du droit des étrangers, la jurisprudence des tribunaux, en tout cas celle de notre Cour suprême, ne joue pas le rôle qui lui revient dans d'autres domaines du droit fédéral. En particulier, le législateur a exclu à l'art. 1 OO al. 1 let. b OJ la compétence du Tribunal fédéral de statuer en dernière instance dans de nombreux domaines du droit des étrangers. Il n'en demeure pas moins que plusieurs types de litiges peuvent tout de même être portés devant les juges de Mon Repos, notamment lorsque la vie familiale est en jeu. De son côté, quoique souvent peu accessible, la jurisprudence cantonale

n'est pas non plus à négliger.

Enfin, toujours au chapitre des décisions de justice, il faut encore relever l'impact croissant de la jurisprudence des organes de Strasbourg, qui n'est pas sans influencer la pratique des autorités administratives et judiciaires, tant can-tonales que fédérales.

43 ROLF SCHMID, p. 72, est à juste titre d'avis que les cantons sont même obligés de le faire, au vu de l'art. 25 al. 3 LSEE. VALENTIN ROSCHACHER, p. 11; NICOLAS W!SARD, Etrangers, p. 319.

44 Par exemple l'ait. 19 LSEE, l'art. 98a OJ ou les droits minimaux de procédure déduits de l'ait. 29 Cst. Cf. aussi TONI PFANNER, p. 215; RoLFSCHMID, pp. 238ss.

45 PETER KorruscH, Ermessen, p. 168; DANIEL THÜRER, Rechtsstellung, p. 1358; WALTER ScHLEGEL, pp. 31 s. Dans !' ATF 122 I 44, cons. 3.b.aa, le Tdbunal fédéral a confirmé que les cantons ne sont point obligés, dans leur pratique, d'épuiser toute la libe1té d'appréciation que l'ait. 4 LSEE leur reconnaît. Ils peuvent pai· exemple, et sous réserve de l'égalité de traitement, limiter l'octroi de certaines autorisations aux seuls resso1tissants des pays de l'UE et de!' AELE.

Section 2. Les autorités

L'art. 121 Cst. ne désigne pas les autorités appelées à appliquer le droit des étrangers. L'art. 69ter aCst. énonçait qu'il revenait aux cantons de décider du séjour et del' établissement des étrangers, tout en réservant un certain nombre de compétences à la Confédération. La nouvelle Constitution n'a rien changé à cela.

Ainsi, les cantons sont compétents pour réglementer le droit de procédure, notamment pour désigner les autorités, sous réserve du droit fédéral. Or, celui-ci contient bien quelques normes organiques impératives.

L'art. 15 al. 1 LSEE dispose que les cantons doivent organiser une autorité administrative à qui sont attribuées «toutes les fonctions relatives à la police des étrangers qui ne sont pas dévolues à une autorité fédérale ou que la législation cantonale n'attribue pas à une autre autorité». En particulier, la compétence de se prononcer sur les autorisations ou d'expulser l'étranger doit impérativement revenir à cette police cantonale des étrangers ou à une autorité supérieure (art. 15 al. 2 LSEE). Dans tous les cas où un recours de droit administratif au Tribunal fédéral s'avère possible, l'art. 98a OJ oblige les cantons à mettre sur pied un organe judiciaire statuant en dernière instance. Pour le reste, le droit fédéral dispose qu'une voie de recours doit au moins être prévue pour les décisions sur les autorisations qui ne seraient pas adoptées par le gouvernement cantonal ou par un chef de département et qui ne pourraient faire l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral (art. 19 al. 1 LSEE en lien avec l'art. 15 al. 2 LSEE). Au delà de ces obligations, le droit cantonal aménage souverainement ses voies de recours, dans le respect toutefois des règles fédérales de procédure.

Il faut encore noter qu'un rôle important revient aux offices cantonaux de l' em-ploi pour tout ce qui a trait aux conditions relatives au marché du travail. Le présent travail ne s'en occupera cependant pas.

Sur le plan fédéral, c'est l'Office fédéral des étrangers46 qui exerce toutes les fonctions non dévolues à d'autres autorités fédérales (art. 15 al. 3 LSEE).

Parmi ces dernières, il convient de mentionner l'Office fédéral de la police47, à qui revient la charge d'assurer la police politique relative aux étrangers (art. 11 al. 1 Ordonnance sur l'organisation du Département fédéral de justice et po-lice48). L'Office fédéral des réfugiés49 -1' autorité chargée de mettre en œuvre la législation sur l'asile - dispose également de quelques compétences en droit des étrangers, en particulier pour ordonner l'admission provisoire (ait. 15 al. 4 LSEE).

Enfin, le Département fédéral de justice et police50 joue le rôle d'autorité

hiérar-46 Ci-après: OFE.

47 Ci-après: OFP.

48 Du 17 novembre 1999, RS 172.213.l (ci-après: Org DFJP).

49 Ci-après: ODR.

so Ci-après: DFJP.

CHAPITRE 1 - GÉNÉRALITÉS

chique de recours. Ses décisions, généralement qualifiées de définitives (art. 20 al. 3 LSEE), ne peuvent être entreprises auprès du Conseil fédéral51. Le recours au Tribunal fédéral s'avère en revanche possible, quoique de manière limitée (art. 100 al. 1 let. b OJ).

51 Il pouvait très exceptionnellement y avoir recours au Conseil fédéral pour violation des traités rela-tifs à la libre circulation et à l'établissement, lorsqu'un droit à l'autorisation n'était pas enjeu. URS BoLZ, Rechtschutz, pp. 59s; NICOLAS WISARD, Renvois, p. 43. Mais ces cas étaient fort rares: PETER KüTTUSCH, Ermessen, p. 179; WALTER WüTHRJCH, p. 5. Par ex: JAAC 1986, n° 55. L'ait. 73 PA a cependant été récemment abrogé (RO 2000 416; FF 1999 7158ss), excluant désormais toute com-pétence du Conseil fédéral.

Chapitre 2. L'entrée sur le territoire

Al' exception des effets del' expulsion administrative (art. 11 al. 4 LSEE) et de l'interdiction d'entrée quel' autorité fédérale peut prononcer (art. 13 al. 1 LSEE), la LSEE ne contient aucune norme matérielle sur l'entrée des étrangers en Suisse.

En particulier, elle ne consacre nul droit de pénétrer sur le teffitoire helvétique52.

La compétence de réglementer l'entrée en Suisse, le contrôle à la frontière et le petit trafic frontalier est déléguée en bloc au Conseil fédéral (art. 25 al. 1 let. a LSEE). Ce dernier s'est acquitté de cette tâche en édictant !'Ordonnance concernant l'entrée et la déclaration d'arrivée des étrangers53.

Sous réserve des dispositions spéciales sur le petit trafic frontalier54, l'en-trée proprement dite ne peut se faire de manière régulière qu'à l'un des postes frontière, ports ou aérodromes désignés par le DFJP (art. 21 al. 1 OEArr). Le contrôle y est effectué par le corps des gardes-frontières, sauf aux gares et aéro-ports internationaux où la police cantonale est compétente55. S'il souhaite péné-trer en Suisse, l'étranger doit à ce stade obtenir l'accord de l'autorité compé-tente, qu'il recevra dès lors qu'il satisfait aux conditions posées par l'OEArr.

L'autorisation de passer la frontière constitue une véritable décision, générale-ment notifiée par un simple hochegénérale-ment de tête, qui permet le passage en Suisse en toute légalité.

Section 1. Les conditions à l'entrée

L'étranger doit satisfaire à deux sortes de conditions. Les premières doivent être appréciées par l'organe de contrôle des frontières au moment où l'étranger demande à pouvoir pénétrer en Suisse. Les secondes ne laissent en revanche à l'autorité que la faculté de constater ou de nier leur réalisation: ces exigences ont trait à la possession de certains documents et à l'absence de décision préalable interdisant le passage de la frontière.

52 URS BoLZ, Rechtschutz, p. 29. La LSEE ne consacre cependant pas non plus une absence de droit d'entrer en Suisse, à l'instarde l'absence de droità l'obtention d'un permis qui découle de !'rut. 4 LSEE. L'ensemble de la matière se trouve être délégué au Conseil fédéral, qui dispose donc de la faculté d'octroyer ou de refuser de manière générale et abstraite un droit au passage de la frontière.

53 Du 14 janvier 1998, RS 142.211. Ci-après: OEArr.

54 Voir

w

ALTER WÜTHRICH, p. 3.

55 PETER SULGER BOEL, pp. lOls; DANIEL THÜRER, Rechtsstellung, p. 1365; NICOLAS WISARD, Ren-vois p. 36. FF 1978 II 198.

CHAPITRE 2 - L'ENTRÉE SUR LE TERRITOIRE

§ 1. Les conditions conférant une latitude de jugement

L'étranger doit répondre à un certain nombre de conditions énoncées de manière très générale à l'art. 1 al. 2 OEArr: ne présenter de danger ni pour l'ordre et la sécurité publics ni pour les relations internationales de la Suisse (let. a); offrir les garanties nécessaires pour que la sortie du pays soit assurée (let. c); disposer des moyens financiers suffisants pour subvenir à ses besoins (let. d). Vu l'imprécision et la généralité des conditions énumérées, certains affirment qu'une très large marge d'appréciation a ainsi été placée entre les mains del' autorité de surveillance des frontières56.

La remarque est exacte mais mérite une petite précision: techniquement, il ne s'agit là que de notions juridiques indéterminées, qui ne laissent à l'autorité qu'une latitude de jugement, et non une liberté d'appréciation 57. La frontière entre les deux s'avère certes floue et parfois mince58 , notamment là où seul un recours à une autorité administrative hiérarchique se révèle possible, mais cette précision nous semble nécessaire afin de spécifier un point: sil' étranger remplit les conditions d'entrée, il a le droit de passer la frontière. L'autorité ne dispose pas d'une liberté d'appréciation pour lui refuser l'accès au territoire suisse.

§ 2. Les conditions objectives