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2.1.2.1 Au niveau des instances

 Les instances concernées Les instances qui ne se réunissent pas

[237] L’examen des résultats des opérations de contrôle réalisées fin 2016 par le service de déontologie fait ressortir une concentration des anomalies de publication/actualisation comme de complétude/cohérence sur les membres des groupes de travail, des comités scientifiques spécialisés temporaires (CSST) et des comités techniques.

[238] Les difficultés peuvent en partie s’expliquer par l’activité très inégale de ces instances. Ainsi, sur les 24 groupes de travail créés début 2016, seuls 16 se sont réunis (dont 3 à partir de 2017) ; de même, sur les 14 CSST constitués en 2016, 8 se sont effectivement réunis sur l’année (dont 3 une seule fois). Il peut être alors malaisé de convaincre de la nécessité d’une DPI actualisée et complète, des membres d’instances qui ne se réunissent pas ou peu.

[239] Ces difficultés pourraient être surmontées à la suite des réflexions en cours à l’agence sur l’amélioration du fonctionnement, actuellement peu satisfaisant, des trois grandes commissions consultatives (composition insuffisamment technique, missions parfois mal comprises, temporalité inadaptée)52. Cette amélioration devrait permettre de remédier au défaut de passage des dossiers en commission en réduisant la propension des directions de l’agence à privilégier l’examen de leurs dossiers par des groupes de travail ou des CSST : la prolifération, en partie inutile, de ces dernières instances pourrait alors être davantage maîtrisée, dans le prolongement des efforts engagés début 201653.

Les autres difficultés

[240] La mission a procédé à l’analyse des suites données aux constats d’anomalie faits par le service de déontologie à l’issue de ses opérations de contrôle réalisées fin 2016 (cf. infra partie 3 pour détail des résultats).

[241] En matière de publication et actualisation, des difficultés récurrentes de transmission des DPI affectent les différentes instances, avec des taux d’anomalies compris entre 10 et 20 %. Ces anomalies sont, lorsque l’instance concernée se réunit, rapidement corrigées à quelques exceptions près. Quelques situations aberrantes peuvent exister, comme ces deux DPI du comité de pharmacovigilance non actualisées depuis respectivement 2012 et 2013, correspondant vraisemblablement à des praticiens n’assistant plus à la commission pour l’un (remplacé par sa suppléante), ne paraissant plus en activité pour l’autre (cf. infra partie 3).

[242] Ponctuellement, le conseil d’administration peut rencontrer des difficultés à obtenir la production des DPI de ses administrateurs. Cela vaut notamment pour les représentants de l’Etat : lors du contrôle de la fin 2016, un représentant de l’Etat n’avait pas fait parvenir sa DPI ; ils étaient trois dans ce cas lors du contrôle ultérieur de la mi-2017.

52 Amélioration du fonctionnement des instances consultatives, Codir du 2 mai 2017 ; à noter qu’une quatrième commission consultative de prévention des risques liés à l’utilisation de catégories de produits a été supprimée fin 2015.

53 En 2016, le nombre de groupes de travail a été réduit de 32 à 24 (source Bilan social 2016).

[243] En matière de complétude et de cohérence des déclarations, le taux d’anomalie dépasse rarement les 5 % mais ce taux recouvre des situations problématiques car « le sujet des incompatibilités possible est le plus ennuyeux » (directeur général54). Parmi les 22 anomalies relevées fin 2016, le service déontologique visait en particulier plusieurs groupes de travail, avec des liens non déclarés ou omis, effectivement ou potentiellement incompatibles avec le mandat exercé : 5 de ces anomalies n’avaient pas depuis été corrigées à la faveur d’une actualisation des déclarations.

[244] En termes de cohérence, il convient également de relever le cas d’un membre du conseil d’administration dont la DPI ne comprenait pas deux conventions triennales de recherche figurant dans la base Transparence. Déjà signalée antérieurement au contrôle de 2016, cette discordance a été rappelée par la présidente du conseil d’administration à cet administrateur qui a invoqué une erreur dans la base Transparence. Cette discordance a persisté, ce qui est d’autant plus insatisfaisant que cet administrateur est membre du comité de déontologie.

 Les sanctions

[245] Au-delà des dispositions générales du code pénal relatives à la prise illégales d’intérêt55, la loi du 29 décembre 2011 a introduit le délit de déclaration d’intérêts mensongère : selon l’article L1454-2 du code de la santé publique, est puni de 30 000 € d'amende le fait d'omettre sciemment d'établir ou de modifier une déclaration d'intérêts afin d'actualiser les données qui y figurent ou de fournir une information mensongère qui porte atteinte à la sincérité de la déclaration.

[246] Une première procédure au titre de ces dispositions a été engagée par l’ANSM en septembre 2017 avec le signalement au procureur de la République de la situation d’un expert nommé auprès de l’ANSM. Après une première déclaration en 2013 mentionnant ses liens d’intérêts avec l’industrie pharmaceutique, cet expert a produit en 2016 une nouvelle DPI ne comportant plus aucun lien d’intérêts. Cette nouvelle DPI apparait contradictoire avec les déclarations faites par ailleurs soit par les laboratoires concernés, soit par l’expert lui-même à la demande des revues scientifiques dans lesquelles sont publiées les études auxquels il a participé.

[247] En l’absence de réponse à ses demandes réitérées d’explications, l’ANSM a pris plusieurs mesures : décision mettant fin au mandat de cet expert fin août 2017, examen par les services des travaux confiés à cet expert ou auquel il aurait pu participer afin d’identifier d’éventuelles situations de conflit d’intérêts relevant de la prise illégale d’intérêts, signalement au procureur de la République de la situation de cet expert au regard du délit de déclaration d’intérêts mensongère.

2.1.2.2 Au niveau des agents

 Les régularisations effectuées

[248] La plupart des anomalies constatées relèvent de la non-actualisation des DPI et nombre d’entre elles correspondent à des retards dans la transmission et la prise en compte des déclarations actualisées56. Ainsi, lors du contrôle de fin avril 2017, 27 des 69 DPI de plus d’un an dataient d’avril

54 Annotations portées sur le rapport de contrôle transmis à la direction générale par le déontologue le 12 décembre 2016

55 Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public […], de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 500 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l'infraction (article 432-12 du code pénal).

56 Cf. supra, note de bas de page n°2.

2016 (39 %), soit un dépassement de délai inférieur à un mois. Ces anomalies se corrigent avant même la transmission du rapport de contrôle.

[249] Les anomalies persistantes identifiées dans le rapport de contrôle du service de déontologie font l’objet d’une note de transmission aux directions concernées, signée par le directeur général.

Cette note :

○ demande la régularisation dans les meilleurs délais des anomalies constatées pour chacun de leurs agents, nominativement désignés,

○ décide l’exclusion, dans cette attente de régularisation, de toute participation des agents concernés à des instances collégiales ou à des processus d’évaluation,

○ annonce une nouvelle vérification sous un mois pouvant en cas de persistance de l’anomalie, entrainer une sanction disciplinaire pour faute professionnelle.

 L’absence de sanctions disciplinaires

[250] Selon la déontologue comme la DRH, il n’y a jamais eu de sanctions disciplinaires pour des DPI non mises à jour :

○ les régularisations des anomalies interviennent pour la pluparts très rapidement,

○ la consigne du directeur général en 2013 qui était de ne pas être trop tatillon pour ne pas

« désespérer » des équipes en tension, semble en pratique être toujours suivie.

[251] Toutefois l’analyse des opérations de contrôle des 14 octobre 2016 et 27 avril 2017 font ressortir quelques anomalies persistantes avec des dépassements importants du délai d’actualisation.

Dépassement des délais d’actualisation lors de deux contrôles des DPI des agents

Identité Fonction Date des contrôles

administration Ctrol 14/10/2016 22/04/2013 19/11/2015, 29/02/2016,

05/07/2016, 05/09/2017 B Evaluateur NEURHO 14/10/2016 28/11/2014 29/02/2016,

05/07/2016, 19/01/2017 C Evaluateur ONCOH 14/10/2016

27/04/2017 26/04/2013

logistique scientifique 27/04/2017 21/11/2014 29/02/2016, 05/07/2016,

F Evaluateur ONCOH 27/04/2017 03/11/2015 15/06/2017

G Inspecteur DI 27/04/2017 04/11/2015 04/08/2017

H Scientifique labo

Ctrol 27/04/2017 07/12/2015 07/12/2015

(absence longue durée) Source : ANSM, rapports de contrôle du service de déontologie en date des 23 novembre 2016 et 31 mai 2017

[252] Plusieurs de ces dépassements s’expliquent par des situations liées à des congés de longue durée pendant lesquels l’agent n’exerce plus d’activité pour l’ANSM. Une situation également particulière mais non satisfaisante, correspond à un évaluateur en télétravail « à temps complet » du fait d’un lourd handicap mais qui effectue son travail d’évaluation pour l’agence.

[253] D’autres dépassements très importants ont persisté en dépit de plusieurs signalements et contrôles restés sans suite, avant de faire l’objet d’une régularisation en 2017. L’exercice de fonctions sans DPI à jour a pu ainsi durer jusqu’à 40 mois.

[254] Même si elles sont marginales au regard des quelques 600 DPI des agents ANSM, ces situations anormales ne sont pas acceptables. Compte tenu de la portée relative des actions de formation des agents en matière de déontologie57, les préconisations du déontologue dans son rapport annuel 2016, méritent une attention particulière :

○ mentionner explicitement dans le contrat de travail de l’agent, son obligation de mise à jour de la DPI en cas de nouveau lien et une fois par an même sans modification ;

○ prévoir dans l’entretien d’évaluation de chaque agent, une question visant à s’assurer qu’il a procédé à la mise à jour de sa DPI.

[255] Ces préconisations pourraient utilement être suivies par la direction générale de l’ANSM58. Au-delà, les quelques situations anormales qui subsisteraient encore devraient faire l’objet de procédures disciplinaires : constituant une infraction aux obligations légales d’actualisation des DPI, correspondant à un refus d’appliquer les décisions du directeur général, ces situations relèvent de la faute professionnelle et sont de nature à porter atteinte à la crédibilité des efforts faits par l’agence en matière de déontologie.

Ces quelques situations anormales devraient également être prises en compte dans l’évaluation des managers, supérieurs hiérarchiques pas toujours conscients de leurs responsabilités dans la non-actualisation persistante des DPI de leurs agents.