• Aucun résultat trouvé

1.1.1 La diversité d’offre et des fabricants est très grande

[455] Le marché des DM est très vaste et le secteur très innovant. Il recouvre une gamme de produits extrêmement variés en termes de nature (pansements, matériels d’oxygénothérapie, stents, nutrition, prothèses, véhicules pour handicapés, etc.), d’usage (association ou non à un médicament, utilisation directe par le patient ou par un professionnel de santé) ou de complexité technologique.

Selon un précédent rapport de l’IGAS157, on comptait en 2010 en France entre 800 000 et deux millions de références de dispositifs médicaux différents.

153 Art. L.5212-2 du Code de la santé publique (CSP)

154 Définition ANSM – source : site internet

155 Art. L5211-1 du CSP

156 Art. L5312-1 du CSP

157 Annick Morel, Abdelkrim Kiour, Alain Garcia, Évolution et maîtrise de la dépense des dispositifs médicaux, IGAS, RAPPORT N°RM2010-154P novembre 2010, 171 pages

[456] Le secteur des DM se caractérise également par une très forte dominante de PME (92%), traduisant la spécialisation des entreprises autour de marchés de niche (prédominance de petites populations cibles de patients) pour chaque type de produit. Sur le seul territoire français, 1343 entreprises différentes ont été recensées en 2017158 et 27 000 en Europe159.

1.1.2 La catégorisation des DM en fonction des risques pour le patient peut poser des problèmes de frontières

[457] La réglementation européenne classe les dispositifs médicaux selon leur niveau de risque pour l’utilisateur (patient ou professionnel de santé). Cette classification (I, IIa, IIb, III) sous-tend la procédure de mise sur le marché. Il en résulte des évaluations préalables plus ou moins lourdes qui permettent de s’assurer de la qualité et de la sécurité des dispositifs médicaux.

Niveau de risque et type de certification par classe de DM

Classe Niveau de risque Exemples de DM Type de certification I Faible degré de risque

Fauteuils roulant, seringues (sans aiguille), scalpels, électrodes pour ECG, gants

d’examen… Auto-certification

IIa Degré moyen de risque

Lentilles de contact, aiguilles pour seringue, appareils d’aide auditive, tensiomètres, thermomètres…

Certification par un organisme notifié IIb Potentiel élevé de

risque

Machines de dialyse, couveuses pour nouveaux nés, systèmes de radiothérapie, respirateurs, préservatifs masculins, pompes à perfusion, implants dentaires…

III Potentiel très sérieux de risque

Stents coronaires actifs, pompes cardiaques, prothèses articulaires de hanche…

Source : ANSM

[458] Les dispositifs des classes II et III sont évalués et certifiés par un organisme notifié (ON), tandis que les dispositifs de classe I sont directement certifiés par le fabricant (auto-certification).

Les fabricants de DM de classe I sont tenus de se faire connaitre spontanément à l'ANSM. On peut donc à ce stade repérer 2 risques potentiels :

 Un fabricant estimant à tort que son produit n’est pas un dispositif médical. Dans ce cas, il ne se soumettra pas aux obligations de déclarations d’incidents liés à son produit à l’ANSM. Il ne procédera pas au marquage CE, et se soustraira aux exigences réglementaires de documentation technique (notice, étiquetage, système de gestion des risques, etc.) et de processus de surveillance de ses produits (cf. cas du drap de contention, encadrén°11 p 173).

158 Panorama de la filière industrielle des dispositifs médicaux en 2017 – Syndicat National de l’Industrie des Technologies Médicales (SNITEM)

159 Source : Commission Européenne

 Les produits dits « frontières », dont la définition entre DM et autre produit de santé est difficile à définir (par exemple les stents actifs enrobés d’une substance médicamenteuse ou les produits de comblement des rides cosmétiques). Un produit de santé doit suivre la réglementation du produit exerçant l’activité principale. La définition du statut d’un produit de santé détermine donc son régime juridique et les contraintes réglementaires associées. Les nouveaux règlements européens sont susceptibles de complexifier encore ces frontières, via l’annexe 16 du règlement UE 2017-745 qui introduit et soumet au même régime que les DM des produits à visée cosmétique qui se rapprochent des DM (par exemple les cabines de bronzage).

Encadré 10 : Le cas des logiciels et applications de santé Logiciels et applications de santé

Les logiciels et les applications mobiles dans le domaine de la santé connaissent actuellement un essor important. Leurs utilisations se multiplient et ces produits peuvent être très variés.

Sont considérés comme DM, « les logiciels destinés à une utilisation à des fins médicales au sens de la définition du DM ou du DM de diagnostic in vitro (permet par exemple un diagnostic, une aide au diagnostic, un traitement ou une aide au traitement, et répond à certains critères tels que fournir une information médicale nouvelle contribuant par exemple au diagnostic ou au traitement du patient, donner un résultat propre à un patient sur la base de données individuelles, analyser des données de signaux physiologiques propres à un patient associé à une fonctions d’alerte à finalité médicale,…) »160. La définition permettant une catégorisation d’une application ou d’un logiciel en tant que DM est donc soumise à interprétation. Certains fabricants peuvent profiter de cette ambiguïté réglementaire pour s’auto-certifier à tort en tant que DM, pour des raisons de marketing, ou, au contraire, se soustraire au marquage CE et aux contraintes qui y sont liées, alors que leur logiciel/produit devrait être considéré comme un DM.

Jusqu’à présent, d’après la DMDPT161 en charge de la surveillance des logiciels et applications, il n’y a pas eu d’incident majeur relevé avec des applications ou logiciels en santé en termes de MRV, mais principalement des questions et erreurs, volontaires ou non, liées au marquage CE.

Afin de répondre à l’importance prise par les logiciels dans les applications médicales, l’ANSM a commandé à un prestataire une étude sur leur sécurité. Réalisée entre août 2014 et novembre 2015, elle avait pour principaux objectifs de mesurer la pertinence et la suffisance de l’environnement normatif pour le développement logiciel et d’apporter des recommandations sur l’application des normes aux fabricants de logiciels.

Au vu des conclusions de cette étude et de l’expansion très forte du marché l’agence a tout intérêt à adopter une stratégie de surveillance à l’égard de ces produits et identifier les ressources qui lui sont allouées, et ce d’autant plus que la nouvelle réglementation européenne impose une procédure de certification plus exigeante aux applications et logiciels en santé.

Source : Mission IGAS

1.1.3 La mise sur le marché n’est pas soumise au contrôle préalable de l’ANSM

[459] A la différence des médicaments, les DM ne sont pas soumis à une procédure d’autorisation de mise sur le marché (AMM) préalable à leur commercialisation, mais à un marquage CE, attribué

160 Source : ANSM

161 direction des dispositifs médicaux de diagnostics et des plateaux techniques

par un organisme notifié (ON) européen (pour les DM en dehors de la classe I), lui-même désigné par l’autorité compétente du pays où cet organisme est installé (l’ANSM pour la France). Le fabricant effectue sa demande de certification auprès d’un ON du pays de son choix.

[460] L’ON attribue le marquage CE à un produit en évaluant sa conception, sa fabrication et sa conformité vis-à-vis des exigences européennes. Un nouveau DM n’est donc pas exempt d’évaluation du rapport bénéfice/risque et ne peut être mis sur le marché sans que le fabricant soit en mesure de démontrer qu’il satisfait aux exigences essentielles de conception dont il relève. Mais il n’est pas soumis à une autorisation préalable et peut-être mis sur le marché dès lors que le fabricant a accompli ces diligences.

[461] Les dispositifs médicaux et leurs accessoires bénéficient ainsi du principe de libre circulation des marchandises en raison de l’harmonisation des dispositions relatives à la mise sur le marché et à la mise en service sur le marché de l’UE.

1.1.4 Néanmoins, l’ANSM possède une certaine latitude décisionnelle en matière de police sanitaire envers les produits mis sur le marché

[462] Le fait que les DM ne soient pas encadrés par une procédure semblable à l’AMM des médicaments ne prive pas l’agence d’une certaine latitude dans les décisions qu’elle peut prendre sans l’aval préalable des autres autorités européennes. L’ANSM peut ainsi, sur sa propre initiative et sans nécessité d’un avis et d’une action commune des Etats Membres de l’UE, demander au fabricant un certain nombre de mesures : modification de la notice, mise en place de formation des utilisateurs du produit, modification de conception, etc… Si les mesures correctives mises en place par le fabricant sont insuffisantes et qu’elle estime que le produit présente un danger pour la santé humaine, l’agence peut suspendre sa fabrication, sa commercialisation et son exportation par une décision de police sanitaire (DPS) prise au titre de l’article L5312-1162 du code de la santé publique.

1.1.5 Les évolutions fortes de la réglementation sont bien anticipées par l’agence

[463] De nouveaux règlements européens parus en 2017163 modifient substantiellement le cadre de mise sur le marché et de surveillance des DM. Ils s’appliqueront pleinement en 2020. Un chapitre entier du règlement est consacré à la « surveillance après commercialisation, vigilance et surveillance du marché » des DM et introduit quelques obligations nouvelles. Est imposée notamment la tenue par le fabricant d’un rapport périodique actualisé de sécurité (PSUR) pour les DM de classe IIa, IIb et III, faisant la synthèse des résultats et des conclusions de l'analyse des données de surveillance après commercialisation (suivi clinique après commercialisation, éléments permettant la détermination du bénéfice/risque, données de vente et d’utilisation), exposant la justification de toute mesure préventive ou corrective prise et les décrivant.164

162 « L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé peut soumettre à des conditions particulières, restreindre ou suspendre les essais, la fabrication, la préparation, l'importation, l'exploitation, l'exportation, la distribution en gros, le conditionnement, la conservation, la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux, la détention en vue de la vente ou de la distribution à titre gratuit, la publicité, la mise en service, l'utilisation, la prescription, la délivrance ou l'administration d'un produit ou groupe de produits mentionné à l'article L. 5311-1, non soumis à une autorisation ou un enregistrement préalable à sa mise sur le marché, sa mise en service ou son utilisation, lorsque ce produit ou groupe de produits, soit présente ou est soupçonné de présenter, dans les conditions normales d'emploi ou dans des conditions raisonnablement prévisibles, un danger pour la santé humaine […] » - Art. 5312-1 du CSP

163 Règlements UE 2017-745 et 746

164 Art. 86 du règlement UE 2017-745

[464] De même, un « rapport de tendance »165oblige désormais les fabricants à notifier toute augmentation statistiquement significative de la fréquence ou de la sévérité des incidents qui ne sont pas des incidents graves ou qui constituent des effets secondaires indésirables attendus qui pourraient avoir une incidence significative sur le rapport bénéfice/risque. Cette augmentation significative est établie par comparaison avec la fréquence ou la sévérité de ces incidents prévue dans la documentation technique et les informations relatives au produit. Les autorités peuvent également proposer leur propre évaluation.

[465] Ces mesures ont été devancées par les directions en charge de la MRV à l’agence, qui avaient déjà intégré un système de détection automatique des signaux dans un projet global de refonte du système de réception et de traitement des signalements de MRV, qui sera mis en place à partir du mois de septembre 2018 (cf. infra – 2.4.1).

1.2 Le champ de la matériovigilance