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La coopération transfrontalière proprement dite

4. La coopération transfrontalière franco-valdo-genevoise

4.1 La coopération transfrontalière proprement dite

4.1.1 La définition de la notion de coopération transfrontalière

La coopération transfrontalière relève des problématiques de nature diverse (géographique, économique, urbaine, environnementale, etc.). Ces dernières résultent de l’écart entre l’interdépendance entre territoires frontaliers et l’absence des politiques transfrontalières. L’un des principaux objectifs de la coopération transfrontalière est de tisser des liens et des relations contractuelles entre collectivités frontalières afin de trouver des solutions à des problèmes communs. En Europe, la coopération transfrontalière est formalisée par la

Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales, dite Convention de Madrid (1980), signée par les Etats membres du

Conseil de l'Europe212. Cette convention constitue l’acte fondateur de la coopération transfrontalière en Europe.

Dans la Convention de Madrid (article 2), la coopération transfrontalière est définie comme

« [...] toute concertation visant à renforcer et à développer les rapports de voisinage entre collectivités ou autorités territoriales relevant de deux ou plusieurs Parties contractantes, ainsi que la conclusion des accords et des arrangements utiles à cette fin » 213.

La Mission opérationnelle transfrontalière (M.O.T.) 214 définit la coopération

transfrontalière comme « les relations de voisinages qu’entretiennent les collectivités et

autorités locales de part et d’autre des frontières terrestres et maritimes »215. En même

temps, la MOT précise que la coopération transfrontalière peut être qualifiée d’« une

démarche de coopération de proximité entre des entités publiques locales contiguës relevant d’ordres juridiques nationaux différents autour de problématiques communes (environnement, activités culturelles, économiques, équipements, migrations…) »216.

Selon la M.O.T., chaque cas de coopération transfrontalière est unique. Ceci renvoie d’abord à la grande diversité du contexte général dans lequel se développent les régions frontalières, comme le précise la M.O.T. :

«… il faut tenir compte de l’extrême diversité des démarches et des projets de coopération qui peuvent tout autant concerner des frontières multiséculaires que de frontières récentes, des vallées de montagnes isolées, peuplées par quelques milliers d’habitants et traversées par une frontière, que des conurbations urbaines transfrontalières de plusieurs millions d’habitants, des projets d’infrastructures

212

Le Conseil de l’Europe, dont le siège est à Strasbourg (France), regroupe aujourd’hui, avec ses 47 pays membres, la quasi-totalité du continent européen. Créé le 5 mai 1949 par 10 Etats fondateurs, le Conseil de l’Europe a pour objectif de favoriser en Europe un espace démocratique et juridique commun, organisé autour de la Convention européenne des droits de l’homme et d’autres textes de référence sur la protection de l’individu (Site d’internet du Conseil de l’Europe).

213

Le texte original : http://conventions.coe.int/Treaty/FR/treaties/html/106.htm

214

La M.O.T., créée en avril 1997 par le Comité Interministériel d’Aménagement et de Développement du Territoire (CIADT), a pour objectif de répondre aux besoins des porteurs de projets transfrontaliers en matière d’assistance opérationnelle et constate l’utilisation non optimale des fonds INTERREG. Elle est pilotée par la DIACT et associée à cinq sites pilotes candidats à l’expérimentation : Lille Métropole, l’Alsace (Saint-Louis/Bâle et Strasbourg/Kehl), l’Espace franco-genevois, la Métropole Côte d’Azur (Menton-Ventimiglia) et la conurbation Bayonne-San Sebastian (Site d’Internet de la M.O.T.).

215

M.O.T., 2006, Guide pratique de la coopération transfrontalière, pp.9.

216

structurants, routiers ou ferroviaires, que des coopérations informelles, simples relations de voisinages préfigurant une coopération plus organisée » 217.

A cette diversité s’ajoute le fait que les relations de voisinage ne résultent pas des mêmes héritages historiques. La coopération transfrontalière, devenant de plus en plus multi-thématique, ne relève guère tout à fait des mêmes acteurs. D’autant que la coopération transfrontalière peut concerner de multiples acteurs (collectivités territoriales, société civile, entreprises, associations, etc.). En outre, tous les acteurs ne disposent pas du même cadre juridique et ne rencontrent pas les mêmes difficultés pour coopérer (freins psychologiques, différences culturelles ou parfois linguistiques, administratifs et institutionnelles, financières, etc.). Notons aussi que les projets de coopération, comme tous types de projets complexes, sont en évolution constante conditionnée par des conjonctures économique et politique de chaque territoire frontalier. C’est pourquoi la coopération transfrontalière exige toujours des méthodes de travail expérimentales donc difficilement reproductibles en l’état d’un cas à l’autre.

4.1.2 Le développement de la coopération transfrontalière en Europe

La coopération transfrontalière est apparue dans des régions frontalières où les effets-frontière agissent de manière intensive sur les groupes humains. D’une manière générale, les premières formes de la coopération transfrontalière dans le Vieux Continent ont émergé à partir de l’immédiat après-guerre. Nous pouvons souligner l’aéroport de Bâle-Mulhouse qui est inauguré en 1946 et devient un aéroport trinational dénommé EuroAirport Basel-Mulhouse-Freiburg en 1987, l’accord signé entre le Land de Bade et le port autonome de Strasbourg en 1951, la création de la première eurorégion autour de la ville de Gronau en 1958, et la constitution de la Regio Basiliensis en 1963, etc. L’agglomération franco-valdo-genevoise constitue sans conteste une pionnière en la matière, puisque le rapprochement de part et

d’autre de la frontière débute très tôt dans son histoire (c.f. chapitre 2). Après la seconde

guerre mondiale, cette agglomération se situe toujours en avant-poste dans le domaine de coopération transfrontalière, avec notamment la mise en place de la compensation financière (c.f. 4.3.1), la création du Comité Régional franco-genevois (CRFG) (c.f. 4.3.2), ainsi que la

démarche du Projet d’agglomération franco-valdo-genevois (PAFVG) (c.f. 4.5).

217

Depuis les années 1960-1970, la globalisation de l’économie et la construction de l’Europe contribuent à un affaiblissement progressif des frontières nationales de la plupart des pays européens. Certains pays comme la Suisse ne peuvent échapper à ce mouvement. Malgré un esprit politique traditionnellement protectionniste visant à protéger son économie de la concurrence étrangère, la Suisse s’engage à négocier et à signer avec l’Union européenne des accords bilatéraux. Face à la métropolisation et à la concurrence entre villes, les régions frontalières voient s’affirmer leur importance stratégique en matière de développement territorial. La coopération transfrontalière est considérée comme l’un des nouveaux instruments de l’action politique permettant de diminuer les effets-frontière et de contribuer à l’intégration métropolitaine et européenne.

Il faut souligner que le Conseil de l’Europe joue un rôle essentiel dans l’évolution de la coopération transfrontalière. Depuis 1950, le Conseil de l’Europe est à l’origine de la rédaction de plus de 150 conventions internationales et protocoles qui sont autant d’instruments juridiques internationaux, dans le domaine de la sauvegarde des droits de l’Homme, des droits économiques et sociaux, de la culture, des pouvoirs locaux et régionaux,

etc.218 Dans la foulée, la Convention de Madrid est rédigée le 20 mai 1980.

4.2 Les grandes étapes de la coopération transfrontalière