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4.2 : L’urbanisation planifiée post-indépendance :

Dans le document Urbanisme et planification urbaine (Page 142-148)

Après l’indépendance, les colons partis, ils ont laissé libre un parc logements assez important, mais il n’a pas réussi à couvrir les besoins de la population issue de l’accroissement naturel. Surtout que Constantine n’abritait pas autant de colons qu’Alger, Oran ou Annaba, donc le parc des biens vacants était relativement faible. De plus elle avait accueilli les réfugiés rentrés des frontières Tunisiennes et une grande proportion de mal logés. Toute cette population exigeait logements, équipements et emplois que la ville ne pouvait leur offrir. Avec l’accroissement de la population ses besoins n’ont jamais pu être entièrement satisfaits. Ce qui a entretenu et compliqué les dysfonctionnements auxquels la ville n’arrivait plus à faire face.

Malgré un taux d’accroissement démographique très fort, longtemps après l’indépendance, il n’y avait pas eu de programmes de logements. Si on exclut la reprise des chantiers de logements entamés par la colonisation dans le cadre du «plan de Constantine ».

« Le département de Constantine avait bénéficié de 22.000 logements urbains. L’habitat rural et la résorption des bidonvilles devaient être pris en charge par des programmes spéciaux.»25. Mais le plan était quinquennal, seulement quelques milliers de logements étaient réalisés et d’autres lancés. Plusieurs chantiers laissés à l’arrêt étaient repris, par les entreprises de réalisation algériennes, dans le cadre «l’opération carcasse », dont l’actuelle cité Filali, ex Bellevue les jardins, les terrasses, et bien d’autres projets à travers la ville.

4.2.1 : Lotissements et grands ensembles outils de production urbaine :

Après l’indépendance, les autorités algériennes avaient compté sur le parc logements laissé par les colons et n’avaient pas prévu de programmes de logements, si on exclue les quelques centaines d’unités produites par leurs propriétaires, ce qui avait laissé les demandes s’accumuler jusqu’à se transformer en véritable crise. Après cela, l’Algérie avait entrepris la production de logements collectifs essentiellement sous forme de grands ensembles et secondairement en logements individuels : les lotissements.

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HAFIANE A. op cité p 66 25

4.2.1.1 : Les lotissements :

Jusqu’au milieu des années 80, la mairie proposait à intervalles assez éloignés quelques centaines de lots à l’acquisition, mais ils ne couvraient qu’une infime partie de la demande. En 1986, ont été créées les agences foncières à travers les wilayate du pays. Ainsi, dès sa création, l’agence foncière de Constantine avait loti de nombreux terrains à travers la commune de Constantine et les villes satellites pour offrir à l’acquisition de ses habitants 13.000 lots. Les logements sont produits par leurs propriétaires et c’est le seul type où le citoyen était sollicité financièrement et matériellement. Mais l’acquisition des lots de construction leur pose problèmes, car ils sont toujours en deçà de la demande, malgré les milliers de lots déjà fournis par le PDAU (23.387 promotionnels et

7.293 sociaux).

Les citoyens qui se sont rendus à l’évidence de ne pouvoir acquérir ni le logement social ni le lot, parce qu’ils ne remplissaient pas les conditions d’attribution ou bien ne possédaient pas les moyens pour cela, s’étaient orientés de ce fait, vers les constructions illicites, sur des terrains communaux, qu’ils occupaient illicitement ou bien sur des lotissements privés achetés en sous seing privé. Parallèlement à cela, des opérations d’auto construction étaient initiées par les communes, les acquéreurs recevaient les lots de terrain et une aide matérielle et devaient participer manuellement à la construction de leurs logements.

Avec le temps et l’accroissement de population, les besoins en logements se sont accrus, ce qui avait incité les autorités nationales et locales à opter pour la production des logements en masse. Parallèlement à cela, de nombreuses coopératives immobilières se sont constituées, de grands quartiers de lotissements individuels et logements évolutifs ont ainsi vu le jour à travers le territoire de la commune : planifiés (Ryadh, Mansourah, Gammas,…) et spontanés (Menchar, Benchergui…). Au problème du foncier s’est ajouté le problème des matériaux de construction, disponibilité, qualité, prix et celui non moins important de la main d’œuvre.

4.2.1.2 : Les grands ensembles :

Les grands ensembles tirent leur origine des ZUP, outil d’urbanisme utilisé essentiellement en France, pour les gros programmes de logements. Pour leur localisation, le site très chahuté de la ville a toujours imposé sa loi aux aménageurs, ainsi les unités de grands ensembles décidées par les plans d’urbanisme se sont organisées selon les disponibilités de terrains. Ces entités urbaines sont venues détachées les unes des autres formant un patchwork discontinu. Fragmentées, elles ne pouvaient profiter de ce que leur offrait leur voisinage même s’il était bien équipé et bien structuré.

Dans sa tentative d’éradication de la crise de logements, l’Algérie avait opté pour les grands ensembles utilisés par les pays européens pour la reconstruction après les destructions massives de la deuxième guerre mondiale. L’industrialisation lourde du bâtiment était choisie comme moyen de production pour couvrir la demande très importante, qui s’était transformée en crise aigue. Ainsi la situation imposée par le manque de terrains et la complexité du site, fait que les quartiers nouvellement construits se trouvent de plus en plus isolés du tissu urbain ancien. Ainsi physiquement détachés, ils rencontrent de réelles difficultés à fonctionner.

Longtemps après l’indépendance, les besoins de toutes sortes hantaient les responsables algériens, particulièrement celui du logement, du fait qu’une grande partie de la population vivait dans de graves conditions de précarité, aiguisées par un très fort croît démographique. Ce n’est qu’à partir des années 70 que le gouvernement algérien se décidât à prendre réellement en charge le problème du logement. De nombreux chantiers portant des centaines de logements étaient lancés à travers tout le territoire national pour répondre à la très forte demande. L’Algérie avait alors opté pour l’industrialisation lourde du logement collectif.

De par son option socialiste, l’Etat devait se charger de tous les besoins de la société. Le logement, ce besoin fondamental était en grande partie assuré à toutes les familles algériennes, quelque soient les moyens dont elles disposaient. Les bénéficiaires étaient totalement écartés de toute participation financière, ils ne payaient que les loyers, très modestes par ailleurs. Ainsi de nombreux grands ensembles sont réalisés à la périphérie des villes. Constantine étant une des villes qui souffrait le plus de la crise de logements, elle reçut un grand nombre de grands ensembles (20 Août 55, 5 Juillet 62, Boudjenana, …).

«…dresse ses grands ensembles stéréotypés, s’inspirant du modèle occidental qui masquent les vieux centres et banalisent la ville… »26

Ces quartiers « planifiés » construits à la périphérie de la ville, sont en majorité livrés sous équipés parce que, décidés sous la pression du besoin et de la crise de logements et pour une population non exigeante. Ainsi ces périphéries urbaines industrialisées, typifiées, à Constantine comme dans la plupart des villes algériennes, présentent le même aspect uniforme, très souvent lugubre et sans distinction des spécificités régionales ou locales, à tel point qu’il est difficile de reconnaître une ville d’une autre à partir de sa périphérie (fig. II-6)

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La production de nombreux grands ensembles s’était faite de façon hâtive sous la pression du croît démographique. Leurs promoteurs ne pouvaient livrer que les logements et les équipements éducatifs, les autres équipements et l’aménagement devaient attendre, parfois des décennies. Même, les sociétés étrangères chargées de la réalisation et de la finition de ces grands ensembles, pourtant « clé en main » n’avaient pas fait mieux. L’espace extérieur avait porté pendant longtemps les restes du chantier. En hiver, les habitants pataugent dans de véritables bourbiers et en été, ce sont de grandes étendues désertiques aux pieds des immeubles d’où s’élèvent des nuages de poussière, un autre aspect du cadre de vie.

4.2.1.2.1 : La cité du 20 Août 55

En 1970, fut lancé à Constantine le projet de la cité du 20 Août 1955, un grand ensemble totalisant 1039 logements, sur 15 hectares, situé au sud ouest de Constantine sur la route Constantine-Alger. La « SONATIBA » société nationale du bâtiment avait utilisé un système français le système pascal ou le système des panneaux sandwichs de préfabrication lourde. Les logements sont construits en immeubles de (R+4 et R+5) dont le module de base est de 14 m de long sur 10 m de large. Ils peuvent être montés en immeubles d’un seul bloc donc un seul module mais ils peuvent s’additionner à 2-3-4-5 et 6 modules pour faire de longues barres.

Les immeubles de cette cité ont deux appartements par palier de 2-3 4 et 5pièces et une densité brute de 69 logements à l’hectare (une densité supérieure à la moyenne nationale qui était de 49 logements à l’hectare). La pente du terrain, avait imposé la réalisation de plusieurs plates formes pour porter les immeubles par petits groupes. Ce qui a nécessité la réalisation d’un grand nombre d’escaliers et de rampes carrossables pour relier les différentes parties du quartier. Certaines poches vides restées longtemps inoccupées dans le quartier, ont reçu quelques équipements socio-culturels, les autres sont toujours non aménagées, elles servent de terrains de jeux aux enfants.

Les déplacements de la grue ont déterminé l’essentiel de l’aménagement de la cité. Le déplacement linéaire réalise de grands immeubles groupant entre 4 et 6 cages d’escaliers de 5 et 6 niveaux longent les grandes voies de communication ou limitent, avec d’autres immeubles, de grands terrains vagues. Avec le temps ces terrains ont pris certaines fonctions : terrains de jeux, parkings, espaces d’échange et de convivialité. Par sa position fixe, la grue dispose des bâtiments autour de ce centre, ce qui détermine des « espaces communautaires » plus ou moins grands selon la taille des immeubles qui les encadrent (selon nombre de cages d’escaliers).

Ces espaces sont occupés pendant la journée par les jeux des enfants, parfois aussi par des marchands ambulants de vaisselle, petit-lait, fruits et légumes… Le soir ils deviennent parkings payants pour les habitants des immeubles limitrophes. Bien que la cité soit habitée depuis plus de trente ans, ses espaces extérieurs, surtout ceux qui sont un peu excentrés, sont toujours nus et non aménagés. Sur le plan de masse, ces espaces étaient prévus espaces de jeux ou espaces verts, ils attendent toujours d’être aménagés. Même ceux qui étaient aménagés en espace de jeux, sont aujourd’hui nus, à part un ou deux éléments vestiges du mobilier rappelant qu’ils étaient un jour aménagés. Dans cette cité comme dans les autres, il y a de nombreux espaces résiduels dont l’aménagement et l’appropriation restent problématiques.

Concernant les équipements, seule une école et un collège de l’enseignement moyen étaient réceptionnés avec les logements en 1972/73 ainsi que deux barres d’un niveau chacune étaient destinées aux commerces. Elles étaient en éléments préfabriqués de 18m2 le module. La barre de locaux commerciaux située au sud de la cité, les modules sont jumelés dos à dos et offrent une grande variété de commerces quotidiens. L’autre, est une longue barre d’une rangée de locaux adossés à un talus, au centre de la cité. Ces commerces servent les habitants de la cité et ceux des autres dans un large rayon. Deux kiosques tabac-journaux préfabriqués constituent des points de repère dans la cité.

Plus de 15 ans après, avec l’accroissement de la population, la cité du 20 Août avait acquis trois écoles et deux collèges d’enseignement moyen ainsi que d’autres équipements publics : une mosquée, un hammam, une poste, le centre régional de l’enseignement général à distance (CNEG). Les quelques fonctions libérales et services installés au 20 Août, ont choisi les appartements, tels les cabinets médicaux, cybercafés, salons de coiffure, cabinet d’architecture, auto école et écoles de soutien pour les élèves en classes d’examens…

Pour leurs besoins quotidiens non satisfaits dans le quartier, les habitants se rabattent sur les équipements des quartiers voisins de construction antérieure : Filali, les terrasses. Pour tous les autres besoins de niveau supérieur (habillement, chaussures, tissus, bijoux, meubles…) ils sont inexistants dans la plupart des quartiers voisins, il faut aller au centre ville. Cette situation les maintient dans une grande dépendance et donc exige des déplacements nombreux, que facilite maintenant le transport en commun ou en taxi collectif.

4.2.1.2 .2 : La cité Daksi :

A Sidi Mabrouk, la cité Daksi est un deuxième grand ensemble réalisé après celui du 20 Août 1955 par la même société « SONATIBA » utilisant le système Pascal de préfabrication lourde. Ce quartier totalise 1499 logements dont 208 sont inoccupés ou à usage professionnel. Il abrite, selon le RGPH 1998, une population de 8880 personnes. Les immeubles de la première tranche de la cité Daksi étaient réalisés en 1974, les appartements sont identiques à ceux du 20 Août 1955 et présentent une certaine qualité. Les appartements des tranches réalisées entre 1977 et 90, sont construits avec le même système mais les surfaces habitables sont fortement réduites, pour en augmenter le nombre. Ils étaient attribués principalement aux habitants des bidonvilles qui occupaient le site d’édification du grand ensemble.

La cité Daksi ne renferme pas de locaux commerciaux spécialement conçus comme à la cité du 20 Août 1955. Malgré les problèmes que pose la transformation d’une structure en préfabrication lourde, cela n’a pas empêché certains audacieux à installer des commerces dans un grand nombre d’appartements du rez de chaussée (cyber café, taxiphone, épicerie, pharmacie, restaurant…). Pas loin de Daksi, un marché forain de réputation régionale a longtemps polarisé l’activité d’échange. Il a fait l’objet d’éradication en 2006, mais il a vite repris à quelques dizaines de mètres derrière la clinique rénale. Une grande surface d’étalage à l’extérieur du marché couvert Daksi-Oued el Had,

regroupe une grande variété de commerces et draine sa clientèle dans toute la ville. Pour des besoins spéciaux les habitants vont à la médina.

Les équipements scolaires sont les premiers réalisés, suivis plus tard des équipements de santé dont une polyclinique (en 1983), une clinique rénale (en 1987) et un grand nombre de cabinets médicaux spécialisés. Un centre culturel en 1982, une salle omnisport et un terrain de football en 1996, font de Daksi une cité relativement bien équipée, pour en arriver là, il a fallu attendre plus de 20 ans. Plus tard, d’autres équipements administratifs (antenne de mairie du secteur urbain) et financiers (banque CPA, le siège de la CNEP, l’assurance), réunis entre Sidi Mabrouk et Daksi, ils sont peut être les prémices d’une centralité secondaire, surtout si l’on tient compte des équipements en construction (la cité administrative, centre commercial…).

Dans le document Urbanisme et planification urbaine (Page 142-148)