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Chapitre 1. Perception stéréoscopique et disparités binoculaires

II.4 L’interaction entre les disparités horizontales et verticales

La disparité verticale ne donnerait pas une augmentation de la perception du relief directement, mais la présence de disparités verticales en un point va dégrader la perception du relief due aux disparités horizontales en ce point (Hering, 1864, cité par Tyler, 1991 ; Ogle, 1955). Pour un stimulus avec une disparité de 1°, l'interaction de la disparité verticale avec la disparité horizontale dans la perception de la profondeur montre que la disparité verticale ne produit généralement pas de relief (Friedman et al., 1978). De plus, l'atténuation du relief causée par un déplacement vertical du stimulus semble réduire autour de zéro le relief perçu pour une disparité horizontale seule. Cette atténuation serait proportionnelle à l'augmentation de la disparité verticale. Mais la disparité verticale peut également apporter une amélioration dans la perception tridimensionnelle. En effet, la disparité verticale serait utilisée pour estimer la disparité horizontale à de petites excentricités et des distances proches, ou pour estimer la réponse d'inclinaison produite par une disparité horizontale (Gillam et al., 1988a). Pour explication, quand la disparité verticale est éliminée, la réponse quantitative à une disparité horizontale est pauvre.

Les études sur la disparité verticale se sont ensuite intéressées à leur impact sur la disparité horizontale en fonction de la taille du champ visuel présentant des disparités. Pour Cumming et al. (1991), les modifications de la disparité verticale n’ont pas d’effet sur la perception des formes tridimensionnelles, et les disparités verticales ne permettent pas d’estimer la distance de fixation, qui est utilisée pour évaluer les disparités horizontales, sur des surfaces de 8-11° de champ visuel. Par contre, pour des présentations couvrant un champ visuel plus large (70-80°), les disparités verticales donnent une estimation de la distance absolue utilisée pour mesurer les disparités (Rogers et Bradshaw, 1993). L'information de ces disparités verticales semble être extraite globalement. Par ailleurs, en présence d'un large pourtour dans lequel la disparité verticale est nulle, la disparité verticale centrale n'est pas utilisée localement pour évaluer la disparité horizontale (Howard et Kaneko, 1994). Ces résultats montrent que les disparités verticales jouent un rôle plus important, dans la perception tridimensionnelle par les disparités horizontales, en périphérie du champ visuel binoculaire.

D’autre part, une méthode d'annulation de la disparité verticale par la disparité horizontale a été étudiée pour trois types de disparité verticale (gradient vertical, cisaillement et forme quadratique mixte : cf. Figure 18) (Berends et Erkelens, 2001). Le rapport entre

disparité horizontale et verticale qui évoque la perception d'un stimulus fronto-parallèle varie avec le type de disparité verticale, de plus il existe un conflit entre la disparité verticale et les signaux oculomoteurs.

Finalement, les manipulations de la disparité verticale peuvent produire des effets locaux sur la profondeur, alors que l'inverse n'est pas vrai : la disparité verticale est insensible aux variations de profondeur locales (Bishop, 1996). Les disparités horizontales et verticales peuvent s'ajouter ou s'annuler localement selon leur signe. Ces résultats s’appuient sur une théorie physiologique basée sur les champs récepteurs bidimensionnels des cellules du cortex visuel (Matthews et al., 2003). L’impression de relief par la disparité verticale seule n’est pas évidente, cependant elle peut être quantifiée, le système visuel ne tolère pas si facilement une petite quantité de disparité verticale (Ito, 2005).Ces dernières études suggèrent que les disparités verticales sont mesurées localement par le système visuel et elles s’ajoutent aux disparités horizontales.

II.4.1 L’interaction entre la disparité et la convergence

Lorsqu'un observateur fixe un point de l'espace, les deux yeux convergent vers ce point. La convergence binoculaire est mesurée par l'angle que font les deux axes de regard. On distingue deux types de convergence : une convergence symétrique (γF) quand le point de

fixation se trouve dans le plan médian, et une convergence asymétrique (γA) quand il est en

dehors du plan médian (cf. Figure 13). La convergence est proportionnelle à la distance absolue de l’objet fixé. La disparité horizontale (αG - αD) est liée à la variation de convergence

binoculaire (γA - γF) par la relation suivante :

(

) (

)

2 D d i F A D G ⋅ = − = −α γ γ α (cf. § I.3.4.1.1)

L’effort musculaire lié soit au maintien de la convergence pour une fixation donnée, soit au changement de convergence lorsque la fixation passe d'un point à un autre, peut être utilisé comme indice « oculomoteur » dans la perception de la profondeur et du relief.

Le mécanisme de convergence binoculaire est la résultante de quatre composantes que sont la vergence tonique, la vergence accommodative, la vergence proximale et la vergence fusionnelle, ou de disparité. La composante de vergence de disparité, ou convergence fusionnelle, est déclenchée par la présence de disparités qu’elle tend à réduire, provoquant ainsi la fusion.

D’autre part, la distance du point de fixation est spécifiée par l’angle de vergence des axes visuels. La connaissance de la position des yeux dans leur orbite suffit donc à localiser le point fixé dans l’espace égocentré. Les autres éléments de la scène peuvent également être localisés soit en déplaçant le regard vers eux par modification de la convergence, soit par les disparités binoculaires qui les positionnent par rapport au point fixé. Les disparités

binoculaires et la position des yeux dans leur orbite (par la convergence) permettent donc de reconstruire l’espace visuel (Gårding et al., 1995).

Enfin, lorsque l’on tourne le globe oculaire, l’image perçue d’un point ne tourne pas, alors que l’image rétinienne du point tourne sur la rétine. Cette stabilisation perceptive peut s’expliquer par l’utilisation de la décharge corollaire : la commande motrice est accompagnée d’une copie (appelée copie efférente ou décharge corollaire) utilisée par le système perceptif pour anticiper le résultat de l’action, permettant ainsi de stabiliser le monde perçu en modifiant l’information sensorielle en fonction de l’action en cours (Berthoz, 1997). Les décharges corollaires peuvent exister même en l’absence de tout mouvement. En effet, les forces internes (contractions des muscles extra-oculaires) nécessaires pour maintenir la fixation sur un point sont aussi accompagnées de décharges corollaires qui peuvent contribuer à la mesure de ces forces, de stabilisation de la convergence. La décharge corollaire des muscles extra-oculaires donne une information sur l’angle de vergence des yeux, permettant d’évaluer la distance égocentrique (Bishop, 1994).