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Partie 1: L’information du patient sur les effets indésirables de sa chimiotherapie

III. Amélioration de l’information et de la qualité de vie du patient sous chimiothérapie

1. Les besoins d’information du patient

1.2. L’information autour du patient : état des lieux

Le malade est le premier touché par la maladie et il a des intérêts qui pourront être mieux pris en compte s’ils sont exprimés aux soignants. De nombreuses études se sont penchées sur les besoins, les éléments de satisfaction, les problèmes rencontrés par les patients lors de l’accès à l’information.

1.2.1. Personnalisation de l’information

Certains patients n’expriment pas spontanément le besoin de recevoir des informations alors que d’autres demanderont le plus d’informations possible ou au contraire de plus amples informations sur un thème précis. Une plus faible proportion d’entre eux ne désire pas d’informations. Selon les études, les proportions de personnes désirant ou non des informations seront très variables (112–118). Les professionnels ont conscience que tous les patients n’ont pas les mêmes besoins d’information, ceci allant de la volonté de connaitre tous les détails du traitement au refus total d’informations. C’est une liberté de choix qu’il faut respecter. Les patients en ont également conscience puisque la majorité d’entre eux désire un accès à une information personnalisée (112).

Le patient est également en droit d’obtenir à n’importe quel moment des informations supplémentaires. Comme le démontre une étude réalisée en Turquie en 2012, 83% des patients présentant des effets indésirables dus à leur traitement désirent à nouveau des renseignements (119). Dans le cadre de la chimiothérapie, les informations supplémentaires désirées portent sur les médicaments anticancéreux et la prévention et la gestion des effets indésirables de façon spécifique en fonction de ceux qui sont rencontrés (49,64,118,120–122). Dans le cadre de la prise en charge globale, des informations nouvelles sur les aides sociales et financières et sur le mode de vie sont demandées (123). L’information a donc besoin d’être adaptée à l’évolution de la maladie et des traitements.

Les raisons de l’absence d’information sont d’une part la foi en l’équipe médicale empêchant le patient à rechercher plus d’informations par lui-même, l’espoir de conserver une vie normale en évitant toute information sur la maladie et enfin la charité du soignant croyant épargner le patient en le privant de certaines informations (42,112,124,125). A l’inverse, le désir de connaissance et surtout la volonté d’autonomisation du patient vont le pousser à s’informer (113). En règle générale, les

patients les plus pessimistes ont limité l’information reçue alors que les plus combatifs ont recherché l’information.

Les besoins en information ne dépendent ni du type de traitement ni du niveau de scolarité ni de la classe sociale du patient mais en revanche, les patients les plus jeunes semblent plus avides d’informations. A l’inverse, les patients en rechute, quelque soit leur âge, ainsi que les patients les plus déprimés sont moins demandeurs d’information (49,123,124). Certaines caractéristiques des

patients peuvent prédire les besoins d’informations.

En conclusion, chaque patient, quelque soit son statut social, ses traitements, son pronostic, ses peurs et ses espoirs, a besoin d’une information personnalisée et évoluant au fur et à mesure de sa prise en charge thérapeutique. Ainsi, l’information délivrée ne donnera jamais entière satisfaction et il faudra renouveler les interventions afin que le patient puisse recevoir à terme une information parfaitement adaptée à ses besoins.

1.2.2. Bénéfices de l’information

En règle générale, une information précoce sur les traitements et leurs effets indésirables contribue à diminuer la détresse et la peur ressenties par le patient cancéreux ainsi qu’à réduire les effets indésirables et améliorer la qualité de vie. De nombreuses études le démontrent (115,121,126–134) . Les professionnels de santé eux-mêmes ont bien conscience que l’information contribue à rassurer

le patient.

On l’a vu, l’information peut parfois être difficile à recevoir et à accepter. Mais si elle est délivrée

psychologiquement à cette épreuve et d’en anticiper les conséquences. D’autre part, une information

plus tardive, entrant en jeu à chaque fois qu’un nouvel évènement (comme la survenue d’un effet

indésirable) viendra perturber le déroulement de la chimiothérapie, permettra au patient de ne pas perdre pied et éventuellement de contribuer à la gestion de cet évènement.

Une information adaptée doit être dispensée au moment où l’effet indésirable se présente. En effet, « les paroles qui ne sont suivies d’aucun effet sont comptées pour rien » (Démosthène) alors que celles destinées à soulager un effet indésirable éprouvé par le patient engendrent l’écoute et l’intérêt. Du fait que les informations délivrées pourront être appliquées directement, elles présenteront tout leur intérêt aux yeux du patient. De plus, parler de l’effet indésirable à l’intéressé est un premier pas dans le combat mené par celui-ci contre les conséquences néfastes des chimiothérapies.

1.2.3. Disponibilité de l’information

Certains patients estiment que le médecin ne prend pas assez de temps pour répondre à leurs questions. Ils sont 38% à avoir cette opinion d’après une enquête réalisée sur les conditions de vie des patients cancéreux (45). Selon une autre étude, une mauvaise communication peut masquer la compréhension de la portée des traitements (124). Une autre étude européenne renforce cette idée : même si les femmes tirent un soutien considérable des professionnels de santé, une plus grande attention doit être accordée par les spécialistes et les infirmières aux problèmes psychologiques du patient (135). Plus de

temps devrait être consacré à l’écoute et l’information des malades.

Il est important pour le professionnel de procurer au patient des informations afin d’éviter qu’il

recherche d’autres sources d’informations (parfois non fiables, non adaptées ou incomplètes) ou

qu’il se détourne de son traitement. On a noté que plus de la moitié des patients confie avoir activement recherché des informations supplémentaires d’après une étude réalisée en Australie en 2006 (136).

De nombreuses sources d’information sont employées. Les plus fréquentes et les préférées restent l’entrevue avec un professionnel de santé suivie par la remise de brochures éducatives (124). En effet, selon une étude réalisée en 2007 aux Etats Unis, 86 % des patients sous chimiothérapie préféreraient recevoir des informations par une conversation avec un professionnel de santé et/ou des documents écrits (116). Internet et la télévision restent les médias les plus fréquemment utilisés après la lecture de documents ou brochures (137). La source qui s’est avérée être la plus utile est la rencontre avec d’autres patients (118).

Les patients ont affirmé leurs préférences pour certains types de brochures. Les plaquettes d’informations générales sont plus complètes et plus utiles aux patients que les plaquettes ciblées sur des thèmes précis mais elles peuvent aussi submerger le patient. Bien souvent, les livrets

personnalisés, plus instructifs que les brochures, sont préférés par les patients. De plus, ces informations personnalisées sont plus facilement partagées avec l’entourage que les générales. (138). La brochure s’est avérée un outil précieux pour diminuer l’isolement du patient de retour à domicile : la forme écrite lui permet un accès permanent à une information élaborée par des professionnels (139).

La qualité de l’information sur Internet varie considérablement d’une source à l’autre. Le plus souvent, les informations sont incomplètes, inexactes ou inappropriées. Les patients quant à eux estiment qu’elles sont difficiles à comprendre (à 33%) et doutent de leur qualité (à 50%) (140). La solution serait une utilisation d’Internet dirigée par les professionnels de santé (141). Dans cette optique, des logiciels multimédias (130) ou sites Internet (142) ont été créés donnant accès à une information personnalisée et validée par une équipe pluridisciplinaire.

Certains patients racontent qu’ils ne savent plus qui croire tant ils disposent de sources d’informations. D’autres désirent uniquement une information apportée par le médecin et n’iront pas rechercher d’autres sources (112).

1.2.4. L’information pour une meilleure gestion des effets

indésirables

Les patients se posent une multitude de questions concernant leur traitement par chimiothérapie. Elles sont le plus souvent simples et facilement abordables par le spécialiste : Qu’est ce qui se passe dans le corps ? Quels sont les effets indésirables attendus ? Pourquoi autant de cures ? (112) S’il faut retenir un thème principal à approfondir, à la fois pour le patient dans le but d’améliorer sa qualité de vie et pour le soignant afin d’augmenter les chances de réussite du traitement par une amélioration de l’observance, il s’agit de la gestion des effets indésirables. Cette gestion comprend une éducation du patient, une prémédication adaptée et la prescription de thérapies de soutien préventives et curatives au besoin.

En termes d’information sur les effets indésirables, la quantité d’informations désirée dépend là

aussi des patients. Une minorité préférera ne pas savoir par peur d’augmenter leur probabilité

d’apparition par exemple alors que la majorité des patients désirera connaitre l’ensemble des effets indésirables qu’elle risque de rencontrer afin de s’y préparer le mieux possible d’après une étude réalisée en 2004 aux Etats Unis (118). Ils seront moins mal supportés s’ils sont annoncés et attendus.

Informer le patient sur la disponibilité des thérapies préventives et curatives et sur les mesures hygiéno-diététiques atténuant les effets indésirables est un premier pas dans la prise en charge de

ces effets indésirables. L’infirmière du service peut y participer (48) mais concrètement, de nombreux professionnels peuvent s’impliquer : spécialiste, médecin traitant, pharmacien, infirmière libérale, …

L’effet de sensibilisation du patient pourra le pousser à collaborer aux soins de soutien et non plus à les subir. On le pousse ainsi à devenir acteur de sa prise en charge.

1.2.5. Les problèmes rencontrés

Paradoxalement, alors que beaucoup d’efforts sont faits pour améliorer l’information reçue, beaucoup de patients ne sont pas satisfaits de celle-ci (42,64,114,121,123,124,132,135,143–146) mais cet aspect négatif de la prise en charge est rarement exprimé ouvertement (42,114). Le défaut d’information est

le premier reproche adressé aux médecins dans les pays occidentaux et est la première cause de

procès intentés aux médecins en France. Daniel SERIN, Cancérologue-radiothérapeute précise : « La compétence médico-technique n’est plus considérée suffisante par les malades qui revendiquent clairement que les versants psychologiques et sociaux de leur prise en charge fassent partie des priorités des soignants ». Aujourd’hui, de nombreux ouvrages enseignent la communication avec le patient. Cet apprentissage sera détaillé ultérieurement mais il est indispensable au soignant, car « Le malade dit son besoin de parler, d’en parler. Ce ne sont plus les mots qui manquent mais les oreilles pour les entendre » (Philippe BATAILLE, Sociologue, 2001).

La continuité des soins lors du retour à domicile pose encore problème, en effet, entre deux consultations, le patient reste souvent avec des questions sans réponses, qui accentuent sa solitude face à la maladie et qu’il risque d’oublier au moment où il aura l’occasion de les poser. Il est important de noter que l’on parle de solitude au retour à domicile aussi bien entre deux cures pour une administration hospitalière que lors des chimiothérapies à domicile (orales ou injectables) même si elles sont plus encadrées par un système de soins de proximité. Une étude réalisée à Londres en 1999 décrit ce fait (132). Cependant, les efforts d’implication du médecin traitant, du pharmacien et des infirmiers libéraux dans la prise en charge du patient cancéreux tendent à faire disparaitre ce problème. Les brochures peuvent constituer un soutien au patient au cas où les professionnels de santé seraient indisponibles.