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Partie 1: L’information du patient sur les effets indésirables de sa chimiotherapie

II. Les effets indésirables des chimiothérapies

3. Prise en charge des effets indésirables

3.3. Troubles digestifs

3.3.3. Constipation

3.3.3.1. Généralités

La constipation associe un ralentissement du transit et une déshydratation des selles dont le poids sec est supérieur à 22% du poids total. Cliniquement, la personne constipée va à la selle moins de 3 fois par semaine. Le patient peut se plaindre également de plénitude, de distension abdominale, de flatulence, de nausées et de douleur. Physiologiquement, la constipation existe quand les résidus alimentaires progressent mal dans le gros intestin ou ne sont pas évacués dans l’intestin terminal. Les grades de toxicité selon le National Institut of Health s’échelonne à partir de symptômes occasionnels

ou intermittents nécessitant l’utilisation occasionnelle de laxatif (Grade1) à des conséquences mettant en jeu le pronostic vital : fécalome, obstruction intestinale, mégacôlon toxique (Grade 4). (39,88)

La constipation est un effet indésirable majeur entrainant une diminution de la nutrition et de la qualité de vie du patient. D’après deux études réalisées en 2012, la constipation est directement liée à la baisse de l’alimentation du patient : parmi les symptômes influençant la nutrition, la constipation est citée dans 19% des cas et d’après la deuxième étude, la perte de poids est associée à la constipation dans 31% des cas. (89,90)

3.3.3.2. Facteurs de risque

Le degré de la constipation dépend du patient et des perturbations constatées par rapport au rythme de défécation habituel. Certains patients sont plus sensibles que d’autres. La diminution de l’activité physique, l’alitement ou l’immobilisation, les vomissements, la déshydratation, les changements d’habitudes alimentaires favorisent cet effet indésirable.

Quand un patient reçoit des traitements par opioïdes pour la douleur, par antidiarrhéiques opiacés ralentisseurs du transit ainsi que par des antagonistes des récepteurs 5-HT3 contre les NVCI, il est plus sujet à la constipation. Le traitement par opioïde reste la cause majeure de la constipation chez le patient recevant une chimiothérapie. En prévention, le médecin doit prescrire systématiquement un laxatif osmotique en prise quotidienne. (18)

 Molécules en cause

Les molécules responsables sont peu nombreuses, on retrouve les alcaloïdes de la Pervenche ; Vinblastine, Vincristine et Vinorelbine ainsi que des immunomodulateurs : le Thalidomide et le Lénalidomide. (88)

3.3.3.3. Thérapies de soutien

Lorsque le patient débute une chimiothérapie réputée constipante, il est possible de lui prescrire, en complément des mesures hygiéno-diététiques, l’usage de laxatifs naturels (raisins, pruneaux, figues et dattes) ou doux en traitement de fond comme les laxatifs osmotiques ou de lest. En cas de constipation réfractaire, un laxatif d’une autre classe, tels les laxatifs stimulants, lubrifiants ou émollients, peut être ajouté. En dernier recours, des laxatifs administrés par voie rectale peuvent être administrés ponctuellement afin d’évacuer le contenu du bol fécal et relancer le transit. Ils doivent toutefois être évités chez les patients leucopéniques ou thrombopéniques car traumatisant pour la muqueuse rectale, ils font courir le risque d’une hémorragie et/ou d’une surinfection grave. (18)

Les laxatifs de lest, tels l’Ispaghul (SPAGULAX®), le Psyllium ou le Son de blé ou d’orge, sont des sucres complexes conservant l’eau dans la lumière intestinale et accélérant le transit. Les laxatifs

osmotiques salins comme FORLAX® ou MOVICOL®, ou sucrés comme le Lactulose, attirent l’eau dans l’intestin par osmolarité. Les laxatifs stimulants comme les Sennosides ou le Bisacodyl (DULCOLAX®) augmentent la motilité intestinale. Les laxatifs lubrifiants à base d’huiles de paraffine ou de vaseline forment un film hydrophobe autour des selles facilitant le transit. Enfin, les

laxatifs émollients représentés par le Docusate sodique (JAMYLENE®) ramollissent les selles par rétention hydrique. (87)

3.3.3.4. Conseils

Le pharmacien d’officine a un rôle à jouer dans la gestion de la constipation. Une prise en charge précoce permettra une meilleure gestion de ce problème aux conséquences graves.

o Favoriser l’observance du protocole de lutte contre la constipation

Le patient devra connaitre ses médicaments et leur rôle. Il devra distinguer les laxatifs de fond des

traitements occasionnels. En effet, certains patients peuvent être tentés de prendre des laxatifs

stimulants, lubrifiants ou par voie rectale à chaque fois que la constipation devient gênante ou douloureuse. Or, ces traitements peuvent entrainer pour les premiers une dépendance du transit intestinal tandis que les deuxièmes peuvent inhiber l’absorption des vitamines liposolubles en cas d’usage permanent et les troisièmes peuvent léser la muqueuse rectale. Il faut insister sur la prise quotidienne des laxatifs de fond. Au préalable, le pharmacien se sera assuré que le patient ne prend pas de traitements opiacés car les laxatifs de lest sont contre-indiqués dans ce cas. De même, les laxatifs osmotiques salins sont à éviter chez les patients hypertendus ou souffrants d’insuffisances rénale ou cardiaque.

Le pharmacien pourra analyser le dossier pharmaceutique du patient afin de vérifier qu’il ne prend pas d’autres médicaments potentiellement responsables de la constipation tels que ceux cités précédemment ou encore le Calcium, le Fer, les anticholinergiques, les antidépresseurs tricycliques, … Dans certains cas, des substitutions pourront être proposées au prescripteur.

Si les thérapies s’avèrent inefficaces, le patient doit en informer le pharmacien ou tout autre professionnel afin d’être dirigé vers une consultation.

o Soigner son alimentation

La base du traitement de la constipation passe en premier lieu par une modification du régime

alimentaire. Le patient devra enrichir son alimentation en fibres (fruits, légumes verts, céréales à

l’idéal, l’alimentation sera enrichie autant que possible et de manière progressive. Ces fibres augmentent le volume du bol fécal et facilitent son exonération. En cas d’apports trop rapides ou trop importants, des inconforts digestifs peuvent apparaitre (douleurs abdominales, ballonnements, flatulences…).

Attention, pour certaines personnes souffrant de cancers digestifs ou gynécologiques, ce régime comporte quelques restrictions. La consultation d’un diététicien est préférable.

Il est conseillé de boire au moins 2 litres d’eau minérale par jour et d’y associer de l’eau Hépar® de temps en temps. La prise d’un verre d’eau fraiche ou de jus le matin contribue à stimuler le transit intestinal. Attention toutefois aux insuffisants cardiaques ou rénaux chez qui la consommation d’eau doit rester modérée.

o Insister sur l’importance de l’hygiène de vie

L’exercice physique contribue largement à l’accélération du transit. Le patient devra toutefois le pratiquer en fonction de ses capacités physiques, de sa douleur et de ses envies. Il faut insister sur les bienfaits de la marche quotidienne stimulant l’ensemble du système digestif. Parfois, le massage du ventre dans le sens des aiguilles d’une montre est bénéfique.

Le patient doit trouver un rythme pour aller à la selle et ce moment ne doit pas être stressant pour lui. Pour se donner le temps d’aller aux toilettes, il doit choisir un moment où il ne sera pas dérangé et prévoir des moyens de distraction (lecture, musique…). Si le patient n’est pas autonome, il faut respecter au mieux son intimité. (18,88)

3.3.3.5. Traitements complémentaires

La phytothérapie est largement employée car un certain nombre de plantes ont des propriétés laxatives. On retrouve :

- Les laxatifs osmotiques : le Tamarin Tamarindus indica, le Pruneau Prunus domestica et la

Laminaire Laminaria digitata qu’il faut commencer par des petites quantités et les augmenter jusqu’à obtenir un transit satisfaisant. On trouve également le son de Blé Triticum,

d’Avoine Avena sativa et d’Orge Hordeum vulgare.

- Les laxatifs mécaniques : la graine de Lin Linum usitatissimum, de Psyllium Plantago afra ou encore d’Ispaghul Plantago ovata à la posologie de 10 à 30 g par jour de graines entières ou

broyées en 2 à 3 prises. (73)

- Opium : en cas de constipation causée par la morphine, ses dérivés et par les anti-nauséeux. En 9 CH, 3 granules 3 fois par jour.

- Alumina : en cas de constipation avec accumulation de matières dans le rectum. En 7 CH, 3 granules 3 fois par jour.

- Plumbum metallicum : en cas de selles petites, dures et noires. En 7 CH ou 9 CH, 3 granules 2 à 3 fois par jour.

- Platina : en cas de constipation lors des voyages. En 7 CH ou 9 CH, 3 granules 3 fois par jour. (65)