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Partie 1: L’information du patient sur les effets indésirables de sa chimiotherapie

III. Amélioration de l’information et de la qualité de vie du patient sous chimiothérapie

2. Les outils pour améliorer la qualité de vie des patients

2.2. Les bases d’une bonne communication

Nous l’avons vu, les patients ont besoin d’échanger des informations avec les professionnels participant à la prise en charge de leur maladie. Afin que ces échanges se déroulent dans des conditions optimales, l’interlocuteur doit avoir connaissance des outils permettant une bonne communication.

D’après l’enquête EPAC, les patients associent le cancer aux mots « chimiothérapie », « mort », « douleur » et « radiothérapie » ce qui n’est pas le cas des soignants qui connaissent les possibilités thérapeutiques et de guérison du cancer. Un des mots les plus encourageants est « traitement ». La communication entre soignant et soigné est le traitement adapté afin d’éloigner ses idées négatives.

Aujourd’hui, de nombreux ouvrages proposent l’apprentissage de la communication. Nous allons donc énumérer les quelques règles nécessaires à une bonne communication.

o Prendre conscience des difficultés dues au professionnel de santé

Le professionnel de santé a acquis un savoir médical qui lui a permis de remplir aisément la fonction que la population lui a donné : soigner. Aujourd’hui, les patients attendent plus de sa part, ils souhaitent retrouver en lui un appui solide face à la maladie. De ce fait, il devra adapter ses convictions aux positions du patient, sans les juger, sans jamais leur imposer son propre point de vue ce qui lui serait pourtant facile au vu de la vulnérabilité des malades et du crédit donné aux professionnels de santé. Il n’agira plus pour le malade mais avec le malade, abandonnant sa position de force pour se placer aux côtés de l’individu.

La manière de communiquer ne pourra venir sans attention ni effort aux professionnels. Elle nécessite

une analyse et un entrainement technique. Il ne faudra pas supposer, juger, présumer mais bien

écouter, questionner, comprendre. Eviter ses propres sentiments est une faute : il faut en avoir conscience afin de les rendre contributifs à la relation. Il s’agit de laisser aller la conversation librement, en s’appuyant sur le savoir des soignants.

La contribution du pharmacien se fait sous forme de recommandations, conseils et explications. A la fin de l’entretien, le pharmacien pourra évaluer la pertinence des échanges en se posant quelques questions simples : Dans quelle mesure les objectifs de l’entretien ont-ils été atteints ? D’autres objectifs sont-ils apparus ? L’entretien a-t-il aidé le malade à s’exprimer ? Y a-t-il eu écoute ou seulement délivrance d’informations ? … (110,111)

o Employer un vocabulaire adapté devant une maladie grave et potentiellement mortelle

Les mots du cancer sont indéniablement durs et choquants mais pour la plupart des patients, il ne faut pas les changer : le vocabulaire est adapté mais il demande à être expliqué et décrypté pour perdre son côté jargon médical. Il serait de toute manière difficile de parler d’une maladie dure avec des mots doux. La communication est là pour en faciliter l’acceptation et la compréhension sans en dénaturer le sens. Les informations doivent cependant rester claires et adaptées au patient et le jargon médical se limiter aux mots les plus courants comme « la perf », la « NF » ou les « neutrophiles » par exemple et seront expliqués avec un langage plus commun. (110)

Les patients apprécient une information délivrée en petite quantité. Dans le cas contraire, ils se sentent écrasés sous un flot d’informations qu’ils ne peuvent ni assimiler ni retenir. Il est donc nécessaire à l’interlocuteur de multiplier les interventions afin d’informer le patient au fur et à mesure de sa prise en charge, ceci peut être facilité par l’intervention de divers professionnels et par l’aménagement de temps pour communiquer, encore très peu programmés dans le système de soins actuel.

Ainsi, d’après une étude réalisée en France en 2006, 48% des patients cancéreux ont jugé que l’information était trop compliquée et 33% que l’information avait été donnée en trop grande quantité (45). D’autres pensent qu’elle est difficile à assimiler et à retenir (42,112,132).

o Adapter les échanges au cas par cas

Plusieurs études le démontrent, l’information doit être adaptée aux besoins individuels et

momentanés du patient. Ainsi, l’âge, l’état de santé, l’anxiété, l’autonomie dans la prise de décision

et la faculté de compréhension modifient les caractères d’une information considérée comme « de qualité » : quantité, intelligibilité, accessibilité, … (137,152,153)

Pour une situation pathologique donnée, il n’y aura donc pas de réponse stéréotype que le pharmacien pourra apporter à n’importe quel malade. Selon les cas, son comportement sera guidé

principalement par la maladie ou par le malade, qu’il faudra envisager ensemble. La

communication sera adaptée à chaque personne comme l’est son traitement médicamenteux, et évoluera avec ses réactions. L’officinal devra mesurer ses échanges, fragmenter l’information, proportionner les doses délivrées selon le moment, les réactions observées et l’évolution tumorale. (110)

L’information correspond donc aux besoins du malade à un moment donné. L’information par une

communication orale avec un professionnel est une information sûre et préférable aux autres formes

de communication. Elle peut être complétée par des brochures d’informations générales ou

spécifiques à un thème donné. S’il le souhaite, le patient peut avoir accès à son dossier médical.

Actuellement, certains centres hospitaliers ont mis en place des outils numériques sous forme de sites Internet ou de logiciels éducatifs ayant été validés par les patients. Toutes ces sources sont validées par des équipes compétentes et spécialisées. Malheureusement, un patient non satisfait de l’information reçue est fortement susceptible de consulter d’autres sources par lui-même (Sites Internet, ouvrages, discussion avec l’entourage). Le fait qu’elles s’avèrent inexactes ou incomplètes reste fréquent et relativement peu grave dans le cas où le patient fait part de ses recherches aux soignants qui peuvent rétablir le vrai et le faux mais le problème provient des informations inappropriées à son état de santé du patient, à son état psychologique et à sa prise en charge personnelle qui peuvent l’orienter vers des fausses croyances, des convictions infondées ou une perte de confiance en l’équipe soignante.

o La chimiothérapie : une communication délicate

La chimiothérapie est ressentie très négativement par le patient. En effet, tout laisse à croire qu’elle détruit la personne en même temps qu’elle détruit la tumeur. Le patient, très souvent en forme avant les débuts des cures, va accumuler petit à petit une fatigue physique et psychologique ainsi que des effets indésirables pour se retrouver brisé à la fin de la chimiothérapie alors que cette dernière devrait représenter la sortie d’une période de convalescence. Jean-Yves BOBIN, cancérologue, précise que la chimiothérapie est le traitement du cancer le plus redouté, elle entraine des dégradations physiques et psychiques pouvant apparaitre aux yeux du patient et de son entourage pire que la maladie elle-même. Il est possible que le patient se sente abandonné, voire trahit et qu’il détourne sa confiance du corps médical pour se tourner vers des médecines complémentaires voire alternatives ou même finir par refuser toute prise en charge thérapeutique.

D’après Annie HUBERT, anthropologue, la détresse provient des effets ressentis mais aussi du

manque d’information concernant le rôle de la chimiothérapie et les causes d’apparition de ses effets

(bénéfiques ou non). Pourtant, il est possible d’améliorer l’image de la chimiothérapie par des explications claires de ses mécanismes. Pour parler du mécanisme, il faut commencer par expliquer que la chimiothérapie vise à détruire les cellules qui se reproduisent vite comme celles de la tumeur, mais que de ce fait, elle touche également les autres cellules qui se renouvellent rapidement. Par exemple, si elle touche les cellules à l’origine des cheveux, le patient pourra perdre ses cheveux. Il faut parler du traitement comme un processus régénérant et non pas tueur (même des cellules cancéreuses). Les effets indésirables deviennent désirables dans le sens où ils sont un signe de l’efficacité du traitement. Les fausses images sont nombreuses, comme celle du « poison » détruisant l’Etre en même temps qu’il détruit la tumeur. Il appartient au soignant de les déceler et de les chasser par des explications simples et univoques. (109)