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L’emprunt financier et leurs garanties dans le secteur de l’édition

Partie I. De l’imprimerie à la constitution d’une pratique éditoriale

I. 2.2.1. « L’indépendance éditoriale »

I.4. Organisation et institutionnalisation de l’entreprise éditoriale

I.4.2. Sources de financement et les soutiens à l’activité éditoriale

I.4.2.3. L’emprunt financier et leurs garanties dans le secteur de l’édition

Faire un aperçu des sources de financement dans l’activité éditoriale consiste également à s’intéresser à l’apport financier externe. Les éditeurs ont recours aux financements externes à tout moment de leur activité, que ce soit dans la phase initiale ou pour un projet donné. Ainsi l’obtention des financements externes n’est-elle pas une finalité en soi, car leur bonne gestion reste une étape non négligeable. Pour cela, un rapport d’équilibrage reste nécessaire. En d’autres termes, la durée du financement doit correspondre à celle de l’actif financé.

Si un bien doit être utilisé sur trois années, alors on va rechercher un financement d’une durée équivalente. L’idée financière sous-jacente est la suivante : si l’on décide de se dessaisir d’une partie de son argent pour acquérir un actif quelconque, c’est que l’utilisation de celui-ci peut (…) rapporter sur sa durée d’utilisation plus que son coût.232

Le rapport d’équilibrage favorise non seulement la bonne gestion de l’emprunt sur l’activité, mais aussi l’accroissement de l’activité en lui permettant de générer des bénéfices. Par ailleurs, lorsque cet équilibrage n’est pas effectué avec rigueur, notamment dans les cas où la durée de financement est plus courte que celle de l’utilisation, le risque reste alors une mauvaise utilisation des fonds empruntés. Cette situation peut avoir un impact sur l’optimisation des ressources. De même, si la durée de financement est plus longue que celle de l’utilisation, il y a un risque d’endettement. L’équilibrage concerne ainsi la prise de risque et dépend des fonds de l’entreprise.

Equilibrer les risques consiste à effectuer au préalable (c’est-à-dire avant l’endettement) un ratio au niveau des finances propres de l’entreprise et le montant de l’emprunt. Pour cela, deux ratios qui servent d’indice aux financeurs sont souvent utilisés à savoir le ratio de l’endettement d’une part qui concerne le plus souvent des emprunts bancaires. Celui-ci doit être inférieur aux fonds propres dont dispose l’entreprise,

Autrement dit, les fonds empruntés doivent être inférieurs aux fonds propres. On est ici dans l’esprit même de l’équilibrage des risques. Un financeur, quel qu’il soit, sera capable d’investir dans un projet économique donné, mais pas plus que l’animateur de ce projet.233

Cela reste logique d’autant plus que tout projet économique, aussi attractif qu’il soit, ne garantit pas toujours un succès d’emblée. C’est face à ce risque que les financeurs restent assez

232 Bertrand Legendre et Corinne Abensour, Regards sur l’édition, « I- Les petits éditeurs. Situations et perspectives, op.cit, p.110.

233 Bertrand Legendre et Corinne Abensour, Regards sur l’édition, « I- Les petits éditeurs. Situations et perspectives, op. cit, p.111.

prudents dans les conditions de financement et emprunt. Le rapport d’équilibrage entre l’emprunt et l’actif financé implique également dans l’équilibrage de la prise de risque. D’autre part, il y a la capacité de remboursement, celle-ci concerne la division entre

le montant des emprunts non encore remboursés par la capacité d’autofinancement. Le résultat de cette division ne [doit] pas dépasser trois ou trois et demi. (…) Un financeur préfèrera que sa créance puisse être remboursée sur cet horizon court, théoriquement, même si la durée contractuelle de son soutien est supérieure. Ce n’est pas pour autant que le remboursement sera demandé sur cet horizon, mais il sera rassuré de voir que la société emprunteuse a cette capacité de remboursement.234

Hormis la capacité de remboursement, le souci d’équilibrage, qui sont à la fois garants et conditions dans l’obtention des financements, il y a la recherche des garanties qui favorisent l’accès au crédit.

Il existe plusieurs formes de garanties légales auxquelles les maisons d’édition emprunteuses peuvent avoir recours. La garantie est nécessaire en ce qu’elle permet à l’emprunteur de garantir sa créance et ainsi de rassurer son créancier si l’activité venait à connaître une situation de faillite. Le choix d’une garantie donnée est fait en fonction de l’actif économique pour lequel l’emprunt et la garantie sont faits. Parmi les garanties auxquelles l’emprunteur d’une entreprise éditoriale peut avoir recours, il y a le droit des suretés, notamment dans le cas de la France où celui-ci est intégré dans le Code civil (livre IV- art. 2284 et s). Ce droit stipule

[Que] quiconque s’est obligé personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir.235

Ainsi le débiteur peut-il plus aisément obtenir une ou des garanties auprès de ses créanciers. En effet, il peut avoir recours à plusieurs créanciers en même temps. Celles-ci sont de deux ordres dont les suretés personnelles et les suretés réelles. S’agissant de la première catégorie, elle est évoquée lorsqu’une personne s’engage à rembourser l’obligation contractée par une autre personne. La sureté personnelle se décline en trois types : le cautionnement, la garantie autonome, et la lettre d’intention. Pour ce qui est de la seconde catégorie, les suretés réelles, celles-ci consistent pour le débiteur à accorder un droit préférentiel à un de ses créanciers en mettant par exemple en gage un élément de son patrimoine. La sureté réelle se décline

234 Bertrand Legendre et Corinne Abensour, Regards sur l’édition, « I- Les petits éditeurs. Situations et perspectives, op. cit, p.111.

235 Bertrand Legendre et Corinne Abensour, Regards sur l’édition, « I- Les petits éditeurs. Situations et perspectives, op. cit, p.113.

également en trois principaux types : le gage, le nantissement, et la réserve de propriété. Dans le cas d’une maison d’édition, les débiteurs ont beaucoup plus recours aux suretés personnelles.

L’obtention des financements et leur investissement dans des projets éditoriaux permettent aux maisons d’édition de se faire un chiffre d’affaire. Celui-ci est le point déterminant qui permet d’accéder au fonctionnement de la maison et de connaître sa position par rapport au marché.

Le chiffre d’affaire s’obtient généralement par le niveau des ventes en librairie. Les librairies en ligne ne peuvent pas encore être déterminantes dans le chiffre d’affaire des petits éditeurs. De même, d’autres modes de ventes viennent se greffer au chiffre d’affaire réalisé par les librairies traditionnelles, il s’agit notamment de

La vente aux entreprises, la vente sous forme de pré-achats à des partenaires, la vente directe aux particuliers (…) aux bibliothèques.236

Le chiffre d’affaire renferme une composition d’activités différentes qui constitue sa rentabilité et permet également le remboursement des emprunts. Hormis les ventes en librairie, il y a des combinaisons de vente entre les activités de l’entreprise et bon nombre de ses partenaires qui se situent en aval de la production. Cependant, le chiffre d’affaire reste largement tributaire du type de production.

Selon son évolution et sa composition, le chiffre d’affaire peut être de trois types, d’abord, il y a des maisons d’édition qui sont caractérisées par une croissance régulière, une progression annuelle qui augmente le chiffre d’affaire. Puis il y a des maisons qui s’inscrivent plutôt dans un registre de stabilité maintenue volontairement par des responsables de production et commercialisation et par conséquent dans leur chiffre d’affaire. Enfin, il y a des maisons où l’activité est dite « en dents de scie » car elle varie fortement. Cette variation dans le chiffre d’affaire est due à la faible production et à la dépendance sur les ventes des nouveautés dont la rentabilité reste souvent incertaine.

236 Bertrand Legendre et Corinne Abensour, Regards sur l’édition, « I- Les petits éditeurs. Situations et perspectives, op. cit, p.38.