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Implication de l’Etat dans l’édition et la politique du livre

Partie I. De l’imprimerie à la constitution d’une pratique éditoriale

I. 2.2.1. « L’indépendance éditoriale »

I.2.3. Les différents modèles éditoriaux

I.2.3.3. Implication de l’Etat dans l’édition et la politique du livre

La structure éditoriale n’a plus toujours été la seule propriété de quelques familles, ou individus. L’Etat s’est également investi dans l’entreprise éditoriale non plus dans le seul but d’y contrôler les impressions et les publications comme nous l’avons évoqué dans le chapitre précèdent, mais plutôt comme garant d’une entreprise culturelle et économique. L’Etat intervient par un ensemble de dispositions financières, économique et la mise en place d’une règlementation juridique qui régule l’activité des éditeurs, des maisons d’édition et des auteurs, ce, par le biais de plusieurs ministères dont le ministère en charge de la culture. Aussi, en France, la Direction du livre et de la lecture du ministère de la culture exerce sa tutelle sur le livre et la lecture ainsi que le secteur de l’édition.

La loi fondamentale est celle du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, complétée au fil des années, qui stipule que l'imprimerie et la librairie sont libres. Liberté n'est pas licence : aussi sont passibles de poursuites les atteintes au chef de l'État, la diffamation et l'injure envers les particuliers, l'outrage aux bonnes mœurs, les écrits et les propos qui incitent aux crimes, en particulier ceux qui auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison

de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée délits. L'éditeur responsable de la diffusion d'écrits contrevenant aux dispositions de la loi est le principal accusé, l'auteur étant considéré comme complice.174

D’autres actions éditoriales sont également menées par l’Etat, telles que des éditions universitaires dont les travaux scientifiques bénéficient d’une aide financière. Il y a l’édition pédagogique, elle concerne la production des manuels scolaires. Les associations non lucratives sont souvent financées par les Etats et elles s’organisent autour des structures éditoriales pour promouvoir et soutenir certaines publications ou créer des réseaux entre éditeurs. L’Etat s’affirme également par des actions en faveur des bibliothèques, par l’application et l’élaboration de textes favorisant la pratique locale et régionale du livre et de l’édition. C’est ainsi que

La nationalisation des structures de certains établissements français [fut] réalisée. Les bibliothèques locales des instituts français d’Afrique noire furent transformées en bibliothèques nationales.175

La nationalisation apparaît ainsi comme une solution pour les pays nouvellement indépendants et à qui il est conseillé de mettre en place un Conseil National du Livre en vue d’établir un plan national du livre. Celui-ci se fera par les moyens de la lecture, du livre et de la pratique éditoriale. Cependant, la nationalisation des moyens éditoriaux ne pouvait pas être complète dans la mesure où la présence de la métropole restait néanmoins nécessaire, en ce qu’elle fournissait les moyens de production de la main d’œuvre qualifiée, en somme, une aide tout aussi importante pour la nationalisation des pratiques livresques et éditoriales. De même, l’UNESCO mène une action importante dans le processus de nationalisation du livre et de l’édition dans les pays d’Afrique noire d’expression française. Son but est d’apporter une assistance à la fois théorique, économique et technique.

Pour les pays en voie de développement, la période coloniale a laissé l’édition dans un état embryonnaire, ce sont donc les différents Etats qui ont pris le relais avec la création de diverses structures, l’édition pédagogique en est l’une des bases tel que nous le verrons dans la seconde partie qui traite de façon plus approfondie du cas du Gabon.

Ainsi, l’organisation de la vie du livre ne pouvait pas constituer une structure indépendante pour la plupart des pays ayant connu le cycle de la colonisation et celui de la décolonisation. L’Etat intervient sur les différents niveaux du livre à savoir l’imprimerie, l’édition, la librairie et

174 http://mediadix.parisnanterre.fr/cours/Edition/207EditionEtat.htm [consulté le le 25 octobre 2016]

les bibliothèques. Le degré d’intervention diffère d’une structure à une autre. Dans notre étude, nous allons nous appesantir sur l’intervention dans l’édition. L’implication des Etats dans le phénomène éditorial n’est cependant pas exclusive car des structures libérales y sont également assez investies.

Par son monopole, l’Etat a quelque peu gêné la mise en place de l’édition privée. Cette situation s’est d’autant plus accentuée dans la mesure où les Etats ont rencontré des difficultés à faire démarrer la pratique éditoriale. Cette situation de léthargie a favorisé la mise en place des petites maisons privées qui ont commencé à voir le jour. L’édition en Afrique francophone connaîtra à partir des années 70 un secteur privé et un secteur public. C’est l’édition publique qui après les indépendances va assurer les débuts de l’édition scolaire, parfois seule ou en partenariat avec les éditeurs de la métropole. Cela pour diverses raisons pouvant être d’ordre linguistique, logistique, culturel, financière, etc.

Cependant, la production éditoriale des Etats de l’Afrique noire francophone présentera souvent quelques faiblesses au niveau de ses productions qui seront souvent irrégulières et les diffusions pas assez pour l’ensemble du territoire. Ces insuffisances faisaient que les productions de l’Etat étaient qualifiées de déficientes, en ce qu’elles ne parvenaient pas à satisfaire la demande. C’est en renfort à cette faiblesse que des particuliers ont commencé à s’intéresser à l’édition et à en faire une activité sur des productions diverses.

Dès lors, à partir du tournant des années 1970 et le renforcement de l’option libérale, on voit une stimulation de l’édition privée.176

Plusieurs maisons d’édition privées vont voir le jour, elles vont apporter une dynamique nouvelle au secteur de l’édition, notamment en France où :

L'édition reste le premier marché culturel en France. Il produit deux fois plus de chiffre d'affaires que le cinéma, et quatre fois plus que la musique. C'est vrai que 20 à 40% des titres seulement sont rentables mais le livre survit.177

Ces structures privées vont intégrer le paysage éditorial de chaque Etat. De même, le livre et l’édition sont des secteurs qui présentent une ouverture, notamment dans les partenariats d’édition. Comment se manifestent ces ouvertures ?

176 Robert Estivals, Le livre dans le monde, introduction à la bibliologie internationale, op.cit, p.324.

177 https://www.franceculture.fr/emissions/le-billet-economique/ledition-premier-marche-culturel-en-france [consulté le 25 octobre 2016]