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2 L’efficacité de la banque universelle face à ses clients

145. Les partisans du modèle de banque universelle considèrent non seulement

qu’il s’agit de la structure la plus solide, mais en plus qu’elle est la mieux adaptée aux intérêts et aux besoins de la clientèle d’une banque. Ce modèle offre, en effet, la totalité des services bancaires et financiers que peut proposer une banque à ses clients. La banque universelle permet de présenter un service intégré aux clients qui souhaitent bénéficier des prestations de banque de dépôt et de banque d’affaires en même temps. Ainsi, le client n’aura pas à traiter avec plusieurs établissements bancaires et financiers, il s’agit du concept de one stop shopping, aussi appelé supermarché de la finance, ou encore guichet unique410. Il est effectivement vrai que l’ampleur des services que peut offrir une banque universelle est bien plus large que les prestations des banques spécialisées et qu’il permet au client de n’avoir qu’un seul interlocuteur pour l’ensemble de ses affaires. Toutefois, cet avantage du modèle de banque universelle doit être mis en perspective avec ses inconvénients, et particulièrement avec les risques qu’il génère.

146. L’autre avantage que présente le modèle de banque universelle pour ses

clients découle du premier. En offrant l’ensemble des services bancaires et financiers à ses clients, une banque diversifie son activité. Or, la diversification des activités d’une société, que ce soit une banque ou non, permet de limiter les risques. En effet, lorsqu’une société ne propose qu’un seul service, si cette activité perd sa rentabilité, elle sera en difficulté. À l’inverse, si une société propose de multiples services, lorsqu’une de ses activités est moins rentable, elle pourra compenser cette perte par

ses autres services. Ainsi, si l’activité de banque d’affaires génère des pertes importantes, celles-ci seront en principe contrebalancées par les gains de l’activité de banque de dépôt, et inversement. La diversification des activités permet donc en principe d’amortir les fluctuations d’un secteur économique411. Toutefois, cet argumentaire n’est juste que lorsque les pertes sont limitées. À l’inverse, lorsqu’elles sont trop importantes comme ce fut le cas pendant la crise de 2007, la diversification peut générer un effet de contagion sur l’ensemble des activités de la société. Ainsi, les activités de banque de dépôt en principe peu concernées par l’effondrement des marchés financiers ont subi les difficultés financières liées aux activités de banque d’affaires, qu’il s’agisse d’une banque universelle au sein d’une même entité juridique (auquel cas la transmission des difficultés financières est évidente) ou d’un groupe bancaire qui, par le biais des flux de trésorerie, a fait peser la crise financière sur l’activité de banque de dépôt412.

147. La multiplicité des activités d’une banque universelle a également une

conséquence indirecte qui est la baisse des coûts pour le client. En effet, le coût de financement d’une société est plus faible lorsque celle-ci est moins exposée aux risques. Or, ce coût de financement se répercute directement sur la valeur des taux d’intérêt que peuvent proposer les banques à leurs clients. Cette baisse des risques et des coûts est l’argument le plus éloquent de la force des banques universelles pour leurs partisans. Pourtant, la baisse des coûts n’est pas toujours avérée puisque les activités de banque d’affaires sont majoritairement risquées, ce qui contrebalance alors la diminution des risques due à la diversité des activités (lorsque les pertes sont faibles à moyennes, puisque lorsqu’elles sont élevées c’est l’effet inverse qui se produit). De plus, cette diversification rend le volume de crédit dépendant des marchés, celui-ci étant directement lié au montant des capitaux propres des banques413. Ainsi, si les activités de marché causent des pertes importantes, le niveau de capitaux propre va diminuer et la possibilité d’accorder des crédits aussi. À l’inverse, si les activités de

411 Sénat, La banalisation des intermédiaires : la banque universelle. Disponible sur : http://www.sen

at.fr/rap/r96-52/r96-5221.html.

412 V. supra, n° 64. 413 V. infra, n° 193 et s.

banque d’affaires génèrent des profits, cela permettra de soutenir la distribution de crédits. Le modèle de banque universelle est donc à l’origine d’une volatilité du volume de crédits offert par la banque414.

148. S’il faut reconnaître au modèle de banque universelle la simplification

apportée au client de pouvoir bénéficier d’une large palette de services et donc de ne pas avoir à multiplier les interlocuteurs bancaires, la diversification des activités ne doit pas être vue comme suffisant à contrebalancer les inconvénients de la banque universelle. Particulièrement, elle ne peut être invoquée comme un argument de force équivalente au fait que les activités de banque d’affaires sont génératrices d’instabilité dans la gestion des activités de banque de dépôt compte tenu de la transmission des risques du marché qui en résulte. Malgré les imperfections de ce modèle, ses partisans insistent non seulement sur ses avantages, mais aussi sur les difficultés de mise en œuvre d’une séparation des activités, et particulièrement quant à la délimitation des activités à cantonner.

Section 2 – Les conséquences néfastes d’une séparation

des activités bancaires

149. Les partisans du modèle de banque universelle considèrent qu’une séparation

des activités serait compliquée à effectuer compte tenu de la difficulté de distinguer certaines activités réalisées pour le compte de clients de celles réalisées pour compte propre. Ils estiment, par ailleurs, que la séparation des activités serait non seulement nuisible au financement de l’économie (§1), mais qu’en plus elle entraînerait le développement du shadow banking (§2). Par ailleurs, la mise en œuvre de cette réforme leur semble inopportune pour le moment car les banques doivent déjà faire face aux contraintes et dépenses supplémentaires impliquées par les exigences de l’accord de Bâle III, celles-ci pesant sur la capacité des banques à prêter et sur leur compétitivité415.