• Aucun résultat trouvé

Partie I. Revue de la littérature 29!

Section 2. Approches théoriques des comportements écologiques 36!

3. L’approche par l’habitude 54!

On relève dans la littérature une approche théorique supplémentaire en psychologie environnementale, quoique moins développée que les autres approches théoriques pour expliquer l’adoption de comportements écologiques : l’approche par l’habitude (théorie du comportement interpersonnel, Triandis, 1977). Au même titre que la théorie du comportement planifié, la théorie du comportement interpersonnel est une théorie généraliste du comportement social, et tente également d’expliquer l’intention du comportement. La différence entre les deux réside dans l’importance accordée au niveau de conscience expliquant un comportement. Alors que la théorie du comportement planifié considère que les individus adoptent des comportements consciemment, Triandis (1977) suggère quant à lui que le niveau de conscience décroît si l’habitude explique la performance du comportement. L’ajout du construit habitude est ainsi légitimé pour prédire des comportements individuels.

3.1. Définition et caractéristiques

Le concept d’habitude fait référence à plusieurs définitions dans la littérature (Polites et Karahanna, 2013) (tableau 1) : un comportement automatique ayant un but (Verplanken et Aarts, 1999) ; un comportement qui est répété dans un contexte stable (Ouellette et Wood, 1998) ; un comportement rapide et précis (Carvajal, 2002), un comportement fréquemment performé qui est automatiquement déclenché par des signaux cognitifs (Bamberg, 2006), un comportement routinier (Ohly, Sonnentag et Pluntke, 2006) ou encore un état mental (Triandis, 1977).

Définition théorique Domaines d’étude

Comportement automatique orienté vers un but

« séquences apprises d’actes qui deviennent des réponses automatiques aux situations, et qui sont fonctionnelles dans l’obtention de certains buts ou effets désirés!» (Verplanken et Aarts, 1999, p. 104)

« les habitudes sont représentées comme des liens entre un but et des actions qui sont instrumentaux dans l’atteinte de ce but » (Aarts et Dijksterhuis, 2000, p. 54)

Choix du mode de transport (Verplanken et Aarts, 1999 ; Aarts et Dijksterhuis, 2000) Utilisation du préservatif (van Empelen et Kok, 2006)

Consommation d’ecstasy (Orbell et al., 2001) Comportements quotidiens routiniers (Verplanken et Orbell, 2003)

Tri des déchets (Knussen et Yule, 2008)

Comportement répété dans un contexte stable

« tendances à répéter des réponses dans un contexte stable » (Ouellette et Wood, 1998, p. 55)

Méta-analyse (Ouellette et Wood, 1998)

Pratique sportive, lecture de journaux, regarder la télévision (Wood, Tam et Guerrero-Witt, 2005) Choix du mode de transport (Thøgersen, 2006)

« dispositions comportementales à répéter des actions dans des circonstances récurrentes » (Wood, Tam et Guerrero-Witt, 2005, p. 918)

Comportement rapide, précis et sans effort

« Une habitude est un comportement qui peut être performé rapidement, précisément et sans effort » (Carvajal, 2002, p. 10)

Tri de documents (Carvajal, 2002)

Comportements fréquemment performés, déclenchés par des signaux cognitifs

« des séquences situation-comportement qui sont devenues automatiques, de telle sorte qu’elles sont déclenchées sans instruction » (Triandis, 1980, p. 204)

L’habitude est « automatiquement activée par des signaux environnementaux sans aucune réflexion délibérée » (Bamberg, 2006, p. 823)

Choix du mode de transport (Bamberg, 2006) Consommation alimentaire (Saba et diNatale, 1999 ; Saba et al., 1988 ; Saba, Vassallo et Turrino, 2000)

Comportement routinier Tâches professionnelles fréquemment performées

(Ohly, Sonnentag et Pluntke, 2006)

Etat mental

« l’habitude est un état mental qui est conceptuellement distinct du comportement passé. Une personne pourrait performer un comportement de nombreuses fois et ne pas y penser comme une habitude, ou alors, elle pourrait performer le comportement seulement quelques fois et le considérer comme un rituel » (Triandis, 1980, p. 386)

Utilisation des préservatifs (Trafimow, 2000)

Tableau 1. Définitions conceptuelles de l’habitude (d’après Polites et Karahanna, 2013)

Verplanken et Aarts (1999, p. 104) définissent l’habitude comme des séquences apprises qui deviennent des réponses automatiques dans l’obtention de certains buts ou états. Pour Jager (2003), l’habitude est définie comme « des comportements qui sont performés avec le minimum d’effort cognitif » (Jager, 2003, p. 1). Le concept d’habitude comprend les actions qui sont performées de manière répétitive. Au-delà du caractère répétitif du comportement habituel, ce qui importe est que les habitudes déterminent automatiquement le comportement des individus, dans des situations stables, sous-tendant l’idée d’atteindre un but ou un état final (Ouellette et Wood, 1998 ; Jager, 2003). Trois caractéristiques majeures qualifient l’habitude : elle requiert un but pour être performée, l’action/ le comportement habituel est répété quand le résultat est satisfaisant et l’habitude est médiatisée par des processus cognitifs (Steg et Vlek, 2009). Il a été proposé par différents auteurs d’inclure dans le modèle du comportement planifié ce concept d’habitude, en y intégrant la variable de fréquence de

comportement (Triandis, 1980). Or, sur le plan conceptuel, il s’agit de différencier habitude et fréquence de comportement.

3.2. Habitude vs. fréquence de comportement et comportement passé

Ce concept d’habitude est bien souvent opérationnalisé par la fréquence de comportement et peut être ainsi entendu comme le nombre de fois que le comportement habituel a été performé par le passé (Triandis, 1980). Il a été montré dans la littérature que la mesure de la fréquence du comportement passé prédit l’adoption d’un comportement futur, et ce de manière plus fiable que les antécédents connus du comportement (attitude et intentions) (Ouellette et Wood, 1998). Mais, introduire la fréquence de comportement passé comme antécédent au comportement n’est pas pertinent car « la fréquence de comportement est un construit qui n’a aucune valeur explicative » (Verplanken et Orbell, 2003). Il existe en effet une variance résiduelle entre les mesures du comportement passé et futur, qui suggère l’influence d’autres variables non prises en considération dans le modèle. Ce point a été largement débattu : il est impossible de confondre fréquence de performance du comportement et habitude (Verplanken, 2006 ; Knussen et Yule, 2008 ; Steg et Vlek, 2009), renvoyant à deux concepts distincts. L’habitude renvoie à la notion d’objectif à atteindre, associée aux actions à réaliser pour atteindre ce but. Verplanken (2006) a également démontré empiriquement que l’habitude varie indépendamment de la fréquence de comportement ; l’auteur a en effet manipulé l’intensité de l’habitude en gardant constante la fréquence de comportement. Par contre, comme le souligne Jager (2003, p. 2), « Plus un comportement habituel est fréquemment performé, plus le processus de choix sera automatisé ». Les deux concepts, fréquence de comportement et habitude, sont donc bien liés, mais l’un ne saurait se substituer à l’autre. Enfin, il semble évident au vu des définitions des concepts que la fréquence de comportement va déterminer la formation de l’habitude. L’habitude se confond donc avec la fréquence du comportement passé, ne permettant pas de restituer conceptuellement le caractère habituel d’un comportement.

3.3. Opérationnalisation du concept

Concernant la question de la mesure du concept d’habitude, comme habitude et fréquence de comportement passé ont longtemps été confondus dans la littérature (Ouellette et Wood, 1998 ; Verplanken et Aarts, 1999), l’habitude a souvent été mesurée par la fréquence de comportement passé. Dans ce cas, les fréquences de comportements passés (sur base

déclarative des répondants) a été utilisée, par exemple sous la forme de l’item suivant : « Combien de fois par le passé avez-vous utilisé la ceinture de sécurité » ?

Par la suite et tenant compte des différences conceptuelles soulignées précédemment, une mesure de l’habitude, indépendamment de la fréquence du comportement passé, a été mise au point. La mesure de l’habitude se fait grâce à la méthode développée par Verplanken et al. (1994) et qui se nomme : « script-based habit measure ». Les scripts « réfèrent à des structures cognitives idiosyncratiques qui représentent les associations entre les comportements et les buts dans des contextes spécifiques » (Verplanken et Orbell, 2003, p. 7). Les répondants font concrètement face à des situations habituelles et doivent indiquer le plus rapidement possible le comportement qu’ils associent avec la situation donnée. Par exemple, cette mesure s’est effectuée dans le cas du transport et il a été demandé aux participants de choisir le plus rapidement possible le mode de transport qu’ils choisiraient en fonction de dix situations données (entre lieu de travail – domicile ; entre université – maison) (Bamberg et Schmidt, 2003). Cette mesure permet ainsi de mesurer la force de l’habitude. Cette mesure de l’habitude reste critiquable car fortement associée à une mesure de fréquence du comportement passé (Verplanken et Orbell, 2003).

D’autres mesures ont été mises au point, en demandant directement aux participants la force du caractère habituel de leur comportement. Mais ces mesures auto-déclarées posent de sérieuses limites : il est demandé aux participants de donner une estimation de fréquence de comportement et une indication de la force de l’habitude dans la même question, ce qui induit une confusion à nouveau entre les concepts de fréquence de comportement et habitude. Cette mesure s’avère peu fiable et imprécise sur le plan statistique (Verplanken et Orbell, 2003). De plus, elle est limitée compte tenu du phénomène de désirabilité sociale.

L’habitude a été étudiée par exemple dans le contexte du choix de mode de transport, qui est d’ailleurs le contexte le plus étudié en consommation environnementale (Aarts, Verplanken et Van Knippenberg, 1998 ; Aarts et Dijksterhuis, 2000 ; Gärling, Fujii et Boe, 2001 ; Bamberg et Schmidt, 2003). Mais les résultats ne s’avèrent que peu concluants, limités par une définition peu précise du concept même d’habitude.

Dans le contexte du tri des déchets, nous retenons la recherche de Knussen et Yule (2008). Ils concluent sur le fait que la mesure du comportement passé (Ouellette et Wood, 1998) ne permet pas d’expliquer le comportement routinier du tri des déchets. Les auteurs montrent par ailleurs qu’un manque d’habitude révèle une habitude alternative (comme par exemple jeter les déchets dans les containers publics de tri). Enfin, le tri des déchets faisant référence à différents comportements (trier, laver ou encore entreposer), il peut s’avérer difficile de

mesurer l’habitude de tri comme un comportement unique ; il faudrait plutôt démultiplier les mesures pour chaque étape concernée.

Nous présentons ci-après une synthèse du concept d’habitude développé en psychologie écologique.

Synthèse sur le concept d’habitude développé en psychologie écologique :

- Le concept d’habitude est réduit sur le plan empirique à la fréquence des comportements passés. Or, il existe une distinction théorique entre ces deux concepts.

- L’habitude est en conséquence bien souvent mesurée comme une fréquence de comportement, adoptant par-là la fréquence de comportement passé comme un proxy à l’habitude. Cette mesure ne reflète donc pas l’habitude à proprement parler sur le plan théorique.

- La notion de fréquence a peu d’intérêt dans notre contexte de recherche du tri des déchets, puisque ce comportement est par définition un comportement routinier, censé être performé de manière continue et régulière et non par intermittence. Mesurer une fréquence n’est donc que peu pertinent dans ce contexte particulier. Les contours tant théoriques que la question de la mesure de l’habitude telle que mise en avant dans les recherches en consommation environnementale semblent être encore flous. Pour les raisons mentionnées ci-dessus, nous n’aurons pas recours à ce courant de recherche théorique sur l’habitude pour expliquer le tri des déchets dans les familles. Par ailleurs, ce concept d’habitude fait face aux limites mentionnées précédemment dans les autres courants théoriques, et s’entend à nouveau sur le plan individuel, en excluant une perspective plus large de compréhension du phénomène. Sur le plan méthodologique, on se heurte à nouveau à un construit qui se mesure par des comportements auto-déclarés des individus. Enfin, dans le cadre du tri des déchets, une mesure de l’habitude est peu pertinente compte tenu du caractère routinier de ce comportement. Il serait par contre intéressant de mesurer la force de l’habitude par la mesure des fréquences de comportements passés.

Se pose dès lors la question d’autres disciplines ayant approché l’habitude ou la routine sur le plan académique.

Conclusion chapitre 1

Les comportements écologiques ont été largement étudiés dans une perspective individuelle, oubliant largement l’unité d’analyse collective ou d’autres approches comme la situation. Ainsi, on relève une prépondérance de l’étude des variables individuelles pour prédire l’adoption de comportements écologiques par l’individu. Par ailleurs, l’attitude environnementale (PPE) joue un rôle crucial dans l’étude de tels comportements (dont le tri des déchets) avec des résultats mitigés. Quatre points importants sont relevés dans la littérature sur la consommation écologique qui nous permettent de poursuivre notre réflexion théorique et d’effectuer les choix théoriques les plus à même de construire notre problématique.

1. L’individu et ses caractéristiques pour décrire/prédire le comportement de consommation environnemental

Nous concluons sur des recherches empiriques foisonnantes au niveau individuel. Nous avons vu le manque de consensus dans les recherches pour déterminer et caractériser le consommateur écologiquement responsable. Certains auteurs argumentent que pour réduire les risques environnementaux, via une consommation écologique, les individus se doivent d’être plus informés des dangers écologiques (Hansen et Schrader, 1997). Mais un consensus n’est pas trouvé entre les chercheurs, car certains doutent du fait qu’un consommateur averti et informé soit plus à même de réduire son impact environnemental (Van Dam et Apeldoorn, 1996).

Par ailleurs, les mesures de l’intention du comportement via la PPE sont pour le moins décevantes dans leurs prédictions et ne trouvent pas consensus au sein de la communauté scientifique (Kilbourne et Beckmann, 1998). Les théories cognitives ne semblent alors pas être les cadres d’analyses les plus pertinents, ou en tous cas complets, pour comprendre l’adoption de comportements écologiques par les individus-consommateurs au sein d’une société (Dolan, 2002), car trop restrictifs à l’individu dans leurs approches de compréhension des comportements écologiques. Certains avancent alors la nécessité de prendre conscience au niveau individuel des relations entre les actions menées par les institutions économiques et politiques et la dégradation environnementale (Kilbourne, McDonagh et Prothero, 1997). La nécessité d’étendre le cadre conceptuel au-delà des caractéristiques mêmes de l’individu semble se confirmer, comme l’avaient déjà suggérés Kilbourne et Beckmann en 1998.

Par ailleurs, certains comportements semblent plutôt relever d’un comportement collectif. Par exemple, le tri des déchets concerne un foyer tout entier et pas seulement des individus isolés.

Une prise en considération d’un niveau d’analyse collectif est alors à envisager en consommation environnementale.

Le cadre général du comportement est également à envisager. Dès 1981, le Journal of Consumer Research consacrait un numéro spécial aux préoccupations environnementales, et particulièrement à la consommation d’énergie dans le cadre de la consommation privée. Verhallen et Van Raaij (1981) partent du constat énoncé précédemment : le lien entre attitude et comportement demeure faible et il ne permet pas d’expliquer les comportements pro- environnementaux actuels dans les familles. Ce qui les amène à se pencher sur le comportement des ménages en vue d’expliquer l’adoption de comportements énergétiques durables. Les caractéristiques de la maison ainsi que les comportements en matière énergétique des membres de la famille sont les meilleurs prédicteurs dans l’adoption de tels comportements. En effet, le comportement des individus rapporté explique 26% de la variance de l’utilisation de l’énergie, les caractéristiques de la maison 24% tandis que les variables sociodémographiques n’ont pas d’effet et que les attitudes n’en ont que très peu. Il apparaît donc pertinent lors de l’étude des comportements environnementaux de tenir compte non seulement des comportements en tant que tels, mais également d’autres variables possibles, peu explorées jusqu'à présent dans la littérature, comme ici les caractéristiques de la maison. Ritchie, McDougall et Claxton (1981) ont quant à eux étudié la consommation énergétique des foyers canadiens mais également leur consommation de carburant. Outre les variables attitudinales et sociodémographiques, ils ont inclus dans leur modèle le comportement en matière de consommation énergétique et de carburant, ainsi que les caractéristiques des véhicules. Ils rejoignent les conclusions de Verhallen et Van Raaij (1981) en ce sens que les variables attitudinales et sociodémographiques sont de piètres explicatifs à la consommation. Ils soulignent par contre les corrélations positives fortes entre les caractéristiques des véhicules et la consommation de carburant, laissant ici entrevoir l’intérêt de prendre en compte les objets et plus largement l’espace et l’agencement de la maison dans l’étude des comportements environnementaux relevant de la sphère privée. Ces auteurs sont pionniers dans leur réflexion, en ce sens qu’un déplacement du focus de l’individu à la situation est envisagé conceptuellement et supporté empiriquement.

Alors que ces auteurs font état de la situation et non plus uniquement de l’individu, il est tout à fait possible d’envisager un élargissement du cadre d’analyse du tri à des variables situationnelles ou encore matérielles (caractéristiques de l’habitat, les objets du tri…).

2. Des comportements écologiques associés à des actes raisonnés.

Toutes ces recherches se focalisant sur les comportements des individus les considèrent comme des actes raisonnés, justifiant par-là le recours aux théories de l’action raisonnée et du comportement planifié. Or, il est également utile de comprendre les actes quotidiens et habituels au même titre que les actes raisonnés (Bagozzi, 1989). Selon le comportement écologique étudié, il s’agit de prendre en considération cet élément, car certains comportements écologiques relèvent d’une routine de consommation, et leur étude via le concept d’attitude est limitée : « le modèle [de l’attitude] explique les actions raisonnées (par exemple, la résolution de problèmes), mais pas les actions irraisonnées (par exemple, les achats habituels […]) » (Bagozzi, 1989, p. 71), suggérant ainsi le recours à d’autres cadres théoriques possibles. Steg et Vlek (2009) notent d’ailleurs la rareté des approches par l’habitude ou la routine. Ce concept semble à l’heure actuelle mal défini dans ses contours conceptuels et opérationnels et fait écho à plusieurs définitions différentes (Polites et Karahanna, 2013) : comportement automatique orienté vers un but, comportement répété dans un contexte stable, comportement rapide et précis, comportement pratiqué fréquemment qui est automatiquement déclenché par des signaux cognitifs, comportement routinier ou encore état mental.

3. Des recherches portant sur la consommation environnementale vs. un contexte spécifique Conceptuellement, une autre limite est liée aux comportements des individus eux-mêmes. Quels comportements sont expliqués? Précisons que ce ne sont pas les comportements qui sont expliqués, mais bien les intentions de comportements, dans la grande majorité des cas. Les modèles actuels « néglige(nt) les processus conduisant à la performance comportementale, à la réalisation d’un but ou aux conséquences d’un résultat » (Bagozzi, 1989, p. 71).

Par ailleurs, sur la nature même des comportements, des recherches empiriques mesurent plusieurs intentions de comportements simultanément. C’est le cas par exemple de la recherche de Zimmer, Stafford et Royne-Stafford (1994) qui s’intéressent autant aux préoccupations face aux déchets, à la santé, à la vie animale et végétale. Balderjahn (1988) a étudié de manière simultanée les comportements relatifs à l’isolation de la maison, les économies d’énergie, l’achat et l’utilisation de produits écologiques, et l’utilisation responsable de la voiture. Ses conclusions restent critiques sur un pouvoir prédictif de la PPE sur l’intention du comportement. Cette problématique avait déjà été soulevée par Van Liere et Dunlap (1981) qui notaient que la PPE ne pouvait pas expliquer une intention ou un

comportement environnemental général, considéré comme un tout indivisible. Ce résultat est confirmé par Stern (2000) ; ainsi mesurer la PPE doit se faire selon le comportement étudié. Sur le plan méthodologique, cette limite soulignée est essentielle puisqu’elle implique de limiter l’étude à un comportement écologique plutôt que plusieurs conjointement. En effet, si pour le chercheur certains comportements sont indéniablement liés à la protection de l’environnement (comme le tri des déchets) cela est parfois loin d’être évident pour certains individus consommateurs (Giannelloni, 1998). Les auteurs mettent donc en évidence le fait de n’étudier qu’un comportement écologique (Giannelloni, 1998 ; Stern, 2000). Cette recommandation fait particulièrement sens pour les recherches fondées sur les modèles théoriques de l’attitude. Il semble effectivement difficile de concevoir qu’un individu ait une mesure de l’attitude cohérente parmi plusieurs comportements de consommation écologique parfois très différents. Nous suivons cette recommandation et proposons dès lors de nous intéresser plus précisément au comportement de tri des déchets, qui, comme souligné en introduction, représente un enjeu majeur environnemental pour notre société.

4. La particularité du tri : son caractère imposé et collectif

Alors que les recherches présentées jusqu’ici tentent d’expliquer un comportement individuel ou plus précisément une intention de comportement, elles ne trouvent pas de consensus clair dans leurs résultats. Malgré tous les raffinements ou la multiplication des variables dans les modèles théoriques, beaucoup de contradictions sont relevées. Qui plus est, un décalage est exprimé en consommation environnementale entre l’intention et le comportement de l’individu (Kollmuss et Aygeman, 2002). Toutes les recherches posent la question de savoir pourquoi les individus trient ou non leurs déchets. Or cette question même est problématique dans le sens où le tri des déchets est imposé par les Pouvoirs Publics et non pas issu d’une