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PRESENTATION DES DONNEES ET APPROCHES THEORIQUES

I PRESENTATION DES DONNEES COLLECTEES

II- 3-2 L’action des sectoriels

Les sectoriels des différents ministères accompagnent les pygmées dans l’intégration à la modernité. Il a été question de se rapprocher des sectoriels afin de cerner leurs interventions auprès des pygmées. Il s’est agi des activités des Ministères du tourisme, de la culture, de la santé et des affaires sociales.

Premièrement, nous avons commencé par le ministère du tourisme à travers des agences touristiques. Il ressort que l’image du pygmée est une stratégie d’attrait des touristes qu’utilisent les agences de voyage contre une importante rémunération.

Sur le terrain, nous avons suivi un groupe de touristes espagnoles dans le village Ayéné où l’éco tourisme connait un important essor. Cette activité nous a permis d’identifier des activités culturelles baka proposées aux touristes et de voir les manières dont les nouvelles relations baka/bantou se tissent, obligeant les deux communautés à coopérer. Deuxièmement, le ministère de la culture utilise également l’image du pygmée dans ces différentes représentations à l’intérieur comme à l’extérieur du pays. Le patrimoine culturel des pygmées est largement représenté au musée de Yaoundé où on peut voir ça et là des objets comme, la hache, le harnais, la claie, le Mongulu, etc.… exposé dans les loges culturelles.

Par ailleurs, le ministère de la culture les intègre également dans les représentations internationales de la culture camerounaise. Mais d’après les mélomanes avertis et hommes de culture, le Cameroun devrait exploiter la culture des pygmées dans les sommets internationaux et cela participerait à leur visibilité. Seulement les domaines culturels camerounais souffrent de la mauvaise gérance, « rien ne va plus » comme le déclare l’ancien PCA de la Cameroon music corporation. Les musiciens pygmées ne

143 bénéficient pas de la pige107 encore moins ceux qui ont commis plus d’un album sur le marché discographique.

Troisièmement, les actions du ministère de la santé intègrent les pygmées dans les campagnes de vaccination des enfants et de dépistage des maladies sexuellement transmissibles. Plusieurs documents (cartes de vaccination, carte de mutuel) trouvés à la chefferie et à l’hôpital de Moangué attestent de la prise en charge des enfants et des femmes baka.

De plus, le ministère de la santé a mis sur pied une mutuelle de santé prenant en charge certaines maladies comme la hernie. Cette initiative est un partenariat de l’OMS et du ministère de la santé publique camerounaise. Les pygmées se font ainsi opérés gratuitement à l’hôpital départemental d’Abong Bang à la charge de l’établissement mutualiste.

Quatrièmement, le ministère de l’administration et de la décentralisation territoriale a approuvé la création des villages Baka et la prise en compte des chefs dans la rémunération des administrateurs des chefferies de troisième degré. Malgré cette intégration, il y a encore de grosses incompréhensions au niveau de la gestion des territoires ce qui a conduit à la suspension temporaire de création des chefferies pygmées. Cinquièmement, au ministère des forêts et de la faune, les relations avec les pygmées sont houleuses. Parfois les Baka sont souvent accusés par des agents des eaux et forêts de « braconner » des grands singes, des gorilles et d’éléphants. Nous avons observé une patrouille du service de la conservation dans la forêt du Dja dont la mission était de détruire les pièges des pygmées à l’intérieur de la réserve. Il s’est également observé des violences qui rentrent dans la cohorte d’exactions infligées au Baka. D’ailleurs, les rapports de Survival accablent un organisme de conservation WWF d’encourager les écogades à violenter les pygmées Baka au nom de la conservation.

Dans la même optique, la direction des aires protégées du MINFOF reste imprécise sur la cogestion qui avait pourtant été une résolution importante du programme ECOFAC. Sixièmement, le ministère des affaires sociales reste le plus sollicité malgré son budget

limité. Il regorge plusieurs entités sous le vocable de peuples vulnérables dans lequel on retrouve les pygmées, les handicapés, les orphelins, les femmes battues, etc., bref un

144 melting pot qui fait qu’on ne peut pas efficacement évaluer ses interventions. Entre 2010 et 2015, le MINAS a participé à plusieurs projets d’intégration des pygmées dans la modernité. Sa participation dans ces projets est passive. D’après des cadres de ce ministère, l’Etat du Cameroun n’alloue pas un budget conséquent à la hauteur des activités « on fait avec et on ne peut pas satisfaire toutes les couches en difficulté ». Il intervient dans les projets menés par la société civile et est considéré comme caution étatique des projets sociaux.

Par ailleurs, l’activité majeure en faveur des pygmées dans ce ministère reste la célébration de la journée autochtone le 09 août de chaque année. C’est pendant cette journée de commémoration qu’on observe quelques activités autour des pygmées.

Le Minas au-delà de ses moyens financiers limités assume peu ou prou le rôle que la société camerounaise lui concède. Au cours de l’année 2011, il a pesé de tout son poids dans le recrutement des 25000 diplômés à la fonction publique. Au cours de ce recrutement, le Minas a veillé au recrutement des pygmées diplômés.

En plus, le Minas veille très souvent au respect des quotas d’admission des pygmées aux concours d’intégration à la fonction publique. Ainsi donc, l’action du Minas se limite au suivi administratif, ce qui l’éloigne de la réalité des pygmées.

En outre, les relations entre le Minas et la société civile sont émaillées de manque de dialogue et parfois d’assujettissement, sachant que le Minas est la manifestation de la volonté étatique et que d’après la circulaire N°2365/089/1998, toutes les organisations de la société civile travaillant sur les pygmées devraient transmettre leurs rapports mensuels au Minas pour évaluation. Or, selon les responsables d’organisations de la société civile « le Minas devrait mener ses propres diagnostics auprès des pygmées. D’après ces derniers « il n’est pas question que nous donnons nos rapports ». Cette situation interpelle l’implémentation de la loi qui légifère des responsabilités au sujet de la situation des pygmées en général.

L'Etat du Cameroun a commencé la création de chefferies qu'il a suspendues aussitôt mais son action a continué auprès des pygmées par la construction d’écoles, de forages et de mesures de participation et d'implication dans les sphères gouvernementales.

D'après nos observations, les pygmées ont des pièces d'identité et sont représentés au sein des conseils municipaux. Même si les conseillers Baka ont affirmé qu’ils jouaient un rôle

145 figuratif, ils participent au tant faire ce peu dans les activités de la commune. Sur 16 membres que compte le conseil communal de Lomié seuls 3 représentants Baka y figurent contre 13 Bantous.

En outre, nous avons donné la parole aux Nzimé voisins des Baka. Il ressort de ces entretiens que les bantous restent encore perplexes sur le dialogue inter communautaire. Autant certains Nzimé acceptent les Baka, autant d’autres continuent encore de les rejeter, les réduisant à l’animalité.

Certains Nzimé se méfient de l’émancipation des Baka. Ils pensent que les pygmées se souviendront des atrocités commises en leur endroit et pourront se venger des Bantous. Pour cette catégorie de Bantou, il est hors de question d'accompagner les Baka dans l’émancipation.

L’assemblée nationale camerounaise demande l’implication des peuples autochtones sur l’accès au foncier. Grâce à l'honorable Zam, nous avons rencontré des députés et des sénateurs. Nos échanges se sont focalisés autour du dispositif législatif de préservation des forêts du bassin du Congo en général et du Cameroun en particulier. Il s’est avéré que les députés sont organisés autour du Réseau des Parlementaires pour la Gestion durable des Ecosystèmes de Forêts denses et Humides (REPAR).

En 2013, le REPAR a regroupé des personnalités et des experts d’horizons divers parmi lesquels : des sénateurs, des députés, des maires, des membres du corps diplomatique et représentants d’organisations internationales, des chefs traditionnels, des représentants de la société civile et des représentants des peuples autochtones, en provenance des dix régions du Cameroun.

Ce Dialogue a bénéficié du soutien de plusieurs Institutions nationales et Internationales au rang desquelles la GIZ, l’UICN, le RRI, afin d’accélérer les échanges sur la réforme foncière.

L’Honorable ZAM, coordinateur du REPAR a indiqué que l’initiative d’organiser un dialogue sur la réforme foncière, est née d’une décision prise en juin 2012 par l’assemblée générale des parlementaires membres du REPAR-Cameroun, soucieux d’accompagner les peuples autochtones dans l’accès au foncier.

Il a émis le vœu que ce dialogue soit le canevas des échanges inclusifs, constructifs et fructueux pour le plein succès de la réforme foncière au Cameroun.

146 Plus loin, Madame KOUNG A BESSIKE, Ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières a indiqué que les ordonnances de 1974 intervenues au lendemain de la réunification avaient notamment pour vocation d’unifier le régime foncier et domanial camerounais, précédemment régis par des systèmes législatifs différents, avant l’unification du Cameroun intervenu le 20 mai 1972, ainsi que de rationaliser la gestion des terres, par la mise en place de mécanismes et d’institutions susceptibles non seulement d’assurer le développement et la croissance de notre économie essentiellement fondée sur l’agriculture, mais aussi de garantir l’accès à la terre pour tous. Elle a relevé divers enjeux,notamment démographiques, sociaux, environnementaux et économiques, qui rendent nécessaires des adaptations au cadre juridique et institutionnel actuel, en insistant sur le fait que ce défi ne concerne pas le seul Ministère des domaines, du cadastre et des affaires foncières, mais le gouvernement et le corps social dans son ensemble, pour accompagner les peuples autochtones versl’autodétermination.