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collectivités locales et employeurs : la Commission 3T (Trajet, Trafic, Temporalités)

1.2.1. l’Île de France et la question choix des horaires de travail

Selon une première échelle distinctive nous devons d’abord considérer que notre terrain de recherche se situe en Île-de-France et qu’il possède certaines particularités propres à ce territoire. L’Île-de-France fait partie des dix-huit régions administratives françaises. Elle est elle-même découpée administrativement en huit départements qui sont fréquemment regroupés selon leur proximité à la Ville de Paris1 (75). La grande couronne est composée de la Seine-et-Marne (77), les Yvelines (78), l’Essonne (91) et le Val-d’Oise (95). La petite couronne rassemble les Hauts-de-Seine (92), la Seine-Saint-Denis (93) dans lequel se trouve notre terrain de recherche, et le Val-de-Marne (94).

CARTE 3.3 - La région Île-de-France et son découpage administratif

Réalisation : François Adoue (2016)

Mais plus que son découpage administratif, ce sont les caractéristiques socioéconomiques1 de la région qui vont avoir un impact sur la façon dont ses actifs occupés travaillent, se déplacent et a fortiori sont concernés par la question des horaires de travail. En Île-de-France, on comptabilise plus de 6,2 millions d’emplois2 soit plus de 23 % des emplois du pays regroupés sur 2 % du territoire de la France métropolitaine. La région capitale est donc un territoire extrêmement dense économiquement. le dynamisme économique de la région

La vie quotidienne en région parisienne est plus orientée vers le travail que dans les autres régions françaises. Le taux d’activité de la population francilienne s’élève à 61,3 % alors qu’il n’est en Province que de 55 % (population de 15 ans et plus)3. Les actifs occupés franciliens créent plus de richesses et bénéficient de revenus plus élevés que la moyenne des actifs français sur l’ensemble du pays. Le revenu disponible mensuel médian par ménage est de 1 865 euros en Île-de-France contre 1 682 euros en moyenne en France métropolitaine4.

1. La très grande majorité des statistiques socioéconomiques franciliennes qui seront exposées par la suite proviennent d’un document édité par la Chambre de Commerce et d’Industrie d’Île-de-France : « Les chiffres clés de la région Île-de-France 2017 ». 2. Source : Insee Enquête Emploi en continu 2015.

3. Source : Insee Enquête Emploi en continu 2015.

4. Le revenu disponible d’un ménage comprend les revenus d’activité (nets des cotisations sociales), les revenus du patrimoine, les transferts en provenance d’autres ménages et les prestations sociales (y compris les pensions de retraite et les indemnités de chômage), nets des impôts directs.

Champ : revenus fiscaux déclarés par les ménages.

Les emplois franciliens sont donc naturellement plus spécialisés dans des secteurs d’activité hautement rémunérateurs : 41 % des entreprises franciliennes relèvent d’activités tertiaires immatérielles1 alors que dans l’ensemble de la France Métropolitaine, seules 29 % des entreprises s’insèrent dans cette catégorie d’activités en 20152. Les actifs occupés franciliens sont aussi plus diplômés que leurs homologues provinciaux : 33 % des actifs occupés franciliens ont un diplôme universitaire du 2nd degré, quand en Province ce ne sont que 19 % des actifs occupés qui ont obtenu un diplôme de second cycle universitaire. Les franciliens bénéficient également de plus d’emplois salariés puisque 91,2 % des actifs occupés franciliens sont salariés.

l’Île-de-France : la région des cadres

Enfin, et c’est certainement l’indicateur qui résume le mieux les particularités socioprofessionnelles de la région, l’Île-de-France compte en part relative deux fois plus de cadres et de professions intellectuelles supérieures que la Province. Les cadres franciliens occupent la première position des catégories socioprofessionnelle représentées dans la région avec 28 % des effectifs en emploi. En Province, ce sont les employés qui sont majoritaires et les cadres ne représentent que 14 % de la population active occupée. En tant que région et capitale économique, l’Île-de-France est donc un terrain concentrant un grand nombre de professions intellectuelles et d’encadrement. Cette surreprésentation des cadres n’est pas sans conséquence du point de vue de notre question de recherche. En effet, la catégorie des cadres et des professions intellectuelles supérieures est classiquement le groupe de salariés qui bénéficie le plus d’horaires de travail flexibles. Comme nous l’avons vu dans le Chapitre 1, en Île-de-France 43 % des cadres peuvent décider de leurs horaires de travail, alors que pour l’ensemble des actifs occupés franciliens ce ne sont que 23 % des personnes qui bénéficient de marges de manœuvre pour choisir leurs horaires (Bouleau & Leroi, 2016). Ainsi l’Île-de-France, en offrant un terrain densément peuplé par des populations cadres, nous permet d’observer plus aisément des catégories de salariés qui vont être plus susceptibles de nous apporter des éléments de réponse sur les logiques d’action justifiant un choix d’horaire d’arrivée au travail.

D’autre part et vis-à-vis de l’intérêt social de notre recherche, il se trouve que les cadres franciliens sont une catégorie de population particulièrement sensible à la question de la coordination temporelle de leurs activités quotidiennes et demandeur d’une meilleure organisation des temps sociaux (Godard, 2003). Les cadres sont fréquemment aussi bien des « sur-occupés » professionnellement que dans

1. On retrouve dans cette catégorie les activités d’information et de communication, financière et d’assurance, immobilières, scientifiques, techniques, administratives et de soutien

la vie sociale en dehors du travail. Ils développent alors des stratégies de synchronisation entre leurs diverses activités quotidiennes qui sont souvent très élaborées (Thoemmes, 2012 ; Tremblay & Génin, 2009) : planifier des sorties, des réunions associatives ou des soirées au spectacle demande une bonne organisation temporelle.

De plus, les temps de trajet entre le domicile et le travail sont perçus par ces catégories d’actifs comme des « temps interstitiels » qui sont particulièrement désagréables. En effet, d’après les « carnets Stiglitz » de l’Enquête Emploi du Temps 2010, les cadres et professions intellectuelles sont les seuls professionnels qui classent le trajet du matin vers le travail parmi les trois activités les plus désagréables de la journée (Ricroch, 2011). Cela peut aussi se comprendre dans la mesure où les cadres sont très peu nombreux à avoir des trajets domicile-travail courts : seuls 12 % y consacrent 15 minutes ou moins (OMNIL, 2013a).

En nous intéressant aux horaires de travail des Franciliens et à leur déplacement durant l’heure de pointe, nous nous intéressons donc à une population qui, au travers de sa surreprésentation de cadres, paraît plus fortement concernée par la problématique de l’heure de pointe.

Des trajets domicile-travail plus longs et plus fréquents en transport collectif

De façon plus générale, les Franciliens font figure d’exception en France : la part modale des transports collectifs est de 20 % (OMNIL, 2013b) tandis qu’elle ne vaut que 8 % au niveau national (CGDD, 2010). D’autre part la durée des déplacements domicile-travail est singulièrement plus longue en Île-de-France que dans le reste de la France métropolitaine. Ces derniers durent en effet 41 minutes en moyenne en Île-de-France (OMNIL, 2015b) contre 20 minutes en moyenne en France (CGDD, 2010). Les salariés franciliens sont confrontés à des durées de déplacement singulièrement élevées et à un usage plus important des transports collectifs. L’Île-de-France constitue donc une cible pertinente de l’étude des comportements des salariés usagers des transports collectifs.

1.2.2. le pôle d’activité de la Plaine Saint-Denis : un catalyseur des

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