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I.3. Les dominantes intérieures d'Ivan !mel"v

I.3.4. La joie de vivre et la lumière

En effet, un des sentiments dominants chez les personnages "mel'viens et chez l’écrivain lui-même est la joie. Il s’agit avant tout de la joie que procurent la religion et la foi en Dieu. Les ouvrages de )mel'v comme L’Inépuisable coupe, Les Adieux, La Fièvre et le diptyque sont une sorte de cantique couronné par la salutation « radujsja ! (réjouis-toi) ! » (du mot grec )*+,-). Ces salutations sont connues dans les études orthodoxes sur le nom de xajretiz, une ligne de l’acathiste1 qui représente une interjection commençant toujours par « Radujsja ! ». Tout au long des œuvres ci-dessus d’Ivan )mel'v l’appellation en question accompagne l’image de la religion orthodoxe et le thème de la Sainte Russie, si chère à l’écrivain. Après de longues errances, les personnages se tournent vers la religion et éprouvent, pour la première fois, une véritable joie dans la vie. En livrant au lecteur « ses solutions » pour atteindre le bonheur et la joie )mel'v fait écho de la réflexion d'I. A. Il'in sur la mission de la chrétienté : « la Chrétienté ne bénit pas les "tortures" [...]. Elle bénit les souffrances et incite à la joie et à la lumière »2. Et en même temps, selon l’auteur, la croyance ne doit pas toujours être solennelle. Ce genre de comportement était propre à )mel'v ; sa croyance, très profonde lors de certaines périodes de sa vie3, ne l’empêchait jamais de profiter de la vie mondaine. Il savait apprécier les moments que la vie dans la société offrait à l’homme et il n’était pas fait pour devenir moine et passer ses jours à prier. Nous ressentons cela à travers ses œuvres, y compris L’Année du Seigneur et Le

Pèlerinage. Ces ouvrages sont, en effet, non seulement un hymne à la religion orthodoxe,

mais également un hymne à la vie.

Les sentiments religieux qui habitent les personnages de L'Année de Seigneur et Le

Pèlerinage respirent la joie.

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1 L'acathiste est un hymne religieux que l'on écoute debout.

2 I. A. Il'in, La lettre du 10 avril 1938, in I.Il’in, I. )mel'v, Perepiska dvux Ivanov (1935-1946), sost. Ju. T. Lisica, M., Russkaja kniga, 2000, p. 317.

3 N'oublions pas que l'écrivain, comme la plupart de ses contemporains, est passé par plusieurs étapes dans sa croyance : la profonde croyance de sa jeunesse a fait la place aux idées influencées par Nietzsche pour revenir de nouveau au sein de la religion orthodoxe à la fin de sa vie.

À quoi bon avoir peur, tout est bien pensé et bien fait chez Dieu… tu seras bien traité, ce sera de la joie-lumière.

Le petit Vanja, tout en adorant Dieu, profite de chaque minute de la vie. Dieu et les rites orthodoxes, les histoires des saints le fascinent tout autant que l’habileté des charpentiers ou d’autres ouvriers travaillant pour le compte de son père. C’est pour la même raison que les pages du diptyque superposent des images sublimes et admirables à caractère religieux, dans le registre du « sacré », et des détails beaucoup plus triviaux et ordinaires. Aussi, dès les premières lignes, l’admiration devant des objets de culte, les souvenirs de la maslenica et du carême sont concurrencés par la description des plats qui étaient alors servis à table dans la Russie d’avant la Révolution ou encore, le tableau solennel des fêtes religieuses est constamment suivi des images de rituels beaucoup plus prosaïques comme hacher des choux.

S -;1 4 ></E#N ,-+&./0 : 6#@/01/ </248! 1 Et voilà une autre joie – nous hachons le chou.

De ce fait, la joie est un sentiment plus humain, plus terrestre que, par exemple l’admiration. La joie de vivre (radostnost’) devient ainsi une autre dominante de l’idiostyle de l’écrivain. Cette perception du monde se ressent au niveau lexical et au niveau idéologique du texte. Tout d’abord, il faut noter que les champs lexicaux qui tournent autour de la joie sont très présents dans le cycle. En guise d’exemple, nous pouvons compter six mots ayant la racine radost’ seulement dans le chapitre « Fistyj ponedel'nik » (« Le Lundi propre » ). D'ailleurs, une des interprétations du titre original

L’Année du Seigneur est la joie de vivre car l’été est associé à la période de fêtes, du soleil

et des beaux jours, et la deuxième partie de L’Année du Seigneur comporte ce nom dans son titre, « Prazdniki-Radosti » ( « les Fêtes-Joies » ).2 La joie rapproche les personnes de Dieu, et, en même temps, elles gardent les pieds sur terre. Ce sentiment remplit notre vie quotidienne et « au cœur de cette joie est la joie en Dieu, le motif le plus important de

1 Ibid., p. 177.

toute la littérature chrétienne »1.

Il y a des raisons de penser que la joie de vivre des personnages "mel'viens trouve sa source dans la perception de la proximité réelle de Dieu. Même lorsque le héros se réjouit à propos des choses terrestres, par exemple, du marché de jeûne (postnyj rynok), des jouets, etc. – le sentiment religieux brille tout au fond de cette joie : « tout est ici illuminé et béni ».2

La lumière qui émane de la description des événements religieux ou des personnages positifs de l’auteur du cycle occupe une place considérable dans la perception du monde de l’écrivain. Il s’agit presque de la lumière du paradis, ce qui reflète l’idée de )mel'v selon laquelle notre monde est le paradis terrestre et qu’il faut donc profiter de chaque moment qui nous est donné sur terre. Tout d’abord, l’idée de la lumière est véhiculée par les idées sophiologiques dont l’écrivain se sentait proche dans les années 1910. Nous pouvons apercevoir la lumière divine de la Sainte Vierge dans L’Inépuisable coupe. En abandonnant par la suite la théorie de la Sophia, l'écrivain garde néanmoins l'image de la lumière divine. En 2001, Denis Makarov a rédigé une thèse intitulée Notions chrétiennes

et leurs perceptions dans l’œuvre d’I. S. (mel'v ( Xristianskie ponjatija i ix xudo%estvennoe voplo#enie v tvor!estve I. S. (mel'va ) consacrée à cette problématique.

Dans son travail, le chercheur russe en développant le rôle de la lumière dans les œuvres de )mel'v écrit la chose suivante à ce sujet :

L’écrivain dote ses personnages justes et chrétiens d’un signe distinctif : le rayonnement de lumière qu’ils émettent de l’auréole en quelque sorte. Ce phénomène peut être appelé phosphorescence (svetonostnost’) ou irradiation lumineuse (svetozarnost’). On a l’impression d’avoir devant nous non pas une personne vivante en chair et en os (Gorkin, le vieux sage Varnava) mais une image lumineuse – l’icône : le visage, entouré par le rayonnement de la sainteté.3

D. V. Makarov précise, par ailleurs, que cette luminescence fera également partie des dominantes principales de l’idiostyle de )mel'v. Ces renvois constants à la lumière nous font penser à la doctrine de la nécessité de la transfiguration de l’homme ainsi qu’à la doctrine de la lumière du Thabor.

1 D. V. Makarov, Xristianskie ponjatija i ix xudo%estvennoe voplo#enie v tvor!estve I. S. (mel'va, avtoreferat

dissertacii, Ul'janovsk, 2001, p. 14.

2 Id. 3 Ibid., p. 9.

De surcroît, une fois de plus, nous retrouvons l’idée propre à )mel'v sur le caractère simple, abordable et humain de la religion. Nous sommes donc en présence de la désacralisation de la religion et de tout ce qui est en rapport avec elle. Tout au long de

L’Année du Seigneur et du Pèlerinage, l'écrivain s’en tient à la philosophie de V. S.

Solov'ëv, en désacralisant l’Église, mais en affirmant en même temps l’importance primordiale de la foi chrétienne dans la vie de l’Homme. Aussi, prétend-il que les simples hommes, s'ils se comportent en croyants pendant toute leur vie sur terre, peuvent prétendre à la sainteté. L'auteur du diptyque fait ainsi un rapprochement sémantique entre les noms qui, en russe, désignent la lumière (svet) et le monde (svet).1 Notre perception rejoint celle de M. M. Dunaev qui a consacré un nombre important d'articles et un chapitre de sa monographie L'Orthodoxie et la littérature russe (Pravoslavie i russkaja literatura) à la description de la vie et de l’œuvre de )mel'v. L'héritage de )mel'v est perçu par M. M. Dunaev comme solution « du problème le plus complexe : véhiculer à travers son art la Lumière Divine dans l'homme. Mais non pas dans l'homme saint – dans l'homme ordinaire»2.

I.3.5. La mémoire

La mémoire est au cœur de l’exil. (Georges Nivat)3

Une autre dominante importante de l'idiostyle de l'écrivain est la mémoire. La dominante en question prend une importance considérable dans le cycle L’Année du

Seigneur et Le Pèlerinage. En effet, le ton est donné dès le début par l'épigraphe de L’Année du Seigneur. Le choix de l'épigraphe est dicté par le besoin de )mel'v d’insister

sur le lien nécessaire et vital entre le passé et le présent. Selon )mel'v, l’expérience de nos ancêtres a une valeur inestimable et l’homme nouveau peut se reconstruire uniquement à partir des règles de vie établies dans le passé. Respecter ces règles et ne pas oublier que

1 En effet, en russe le nom « svet » désigne à la fois la lumière (dans l'interprétation d'Ivan )mel'v il s’agit plutôt de la lumière divine) et le monde (ici l’écrivain va accentuer plus l’aspect laïc et non le monde dans sa globalité).

2 M. M. Dunaev, Vera v gornile somnenija : Pravoslavie i russkaja literatura v XVII-XX vekax, op. cit., p. 577.

notre existence sur terre est limitée dans le temps sont les principes de base qui mèneront vers le bonheur.

La mémoire dans le cycle relève aussi de la catégorie esthétique, car tout l’ouvrage est construit sur les souvenirs spirituels :

)mel'v n’était pas en train de se rappeler les événements. Il était en train de créer l’image de la mémoire, ses sons, ses odeurs, la mémoire dans L’Année du Seigneur est vivante, elle respire, prend peur, se cache, goûte, reconnaît.1

La mémoire "mel'vienne est très singulière : d’une part, la description de tous les événements passe par un grand nombre de détails, mais d’autre part, il n’y a rien en trop, rien d’encombrant. La langue et l’ambiance générale du cycle restent légères et même les choses tout à fait ordinaires, terrestres prennent de la hauteur et de la légèreté dans L’Année

du Seigneur et Le Pèlerinage. La mémoire est étroitement liée au respect des traditions,

car, selon l’écrivain, le respect des rites et des traditions formés depuis des siècles et des siècles permet de préserver le monde du chaos. L’ouvrage de souvenirs d’Ivan )mel'v n’est pas uniquement un hommage profond à son père, sur qui il pouvait écrire sans cesse,

mais un hommage à la culture russe.2 A. M. Vaxovskaja emploie le terme de prapamjat’3

(l’arrière-mémoire) pour qualifier les souvenirs de Vanja. Nous pensons qu’il est difficile de trouver un mot plus juste. Le préfixe « pra- » dans « prapamjat’ » est un porteur d’une grande valeur sémantique. En russe il est utilisé dans la formation des mots comme

prababu$ka (une arrière-grand-mère), pradedu$ka (un arrière-grand-père), pradedy (des

ancêtres). L'arrière-mémoire de Vanja tisse les liens avec la vielle Russie et fait ressurgir des idées métaphysiques, et plus particulièrement ontologiques, de l'écrivain qui visent à expliquer de l'univers et de l'interaction de l'Homme avec cet univers. En même temps il s'agit d'une mémoire propre à l'enfant, car le narrateur Vanja fixe l'attention du lecteur sur des détails qui ne sont pas dominants dans le cerveau d'un adulte. En reflétant les évènements autobiographiques de sa vie, l’auteur a tendance à s'arrêter sur les modalités insignifiantes pour un adulte comme le goût, le bruit, l'odeur. L’Année du Seigneur et Le

Pèlerinage se distinguent justement par l'abondance de ce genre de « matériel sensoriel »

dans ses pages.

1

N. M. Solnceva, op. cit., p. 288.

2 Cf. La lettre du 06.12.1941, in I. S. (mel'v et O. A. Bredius-Subbotina, op. cit., vol. 1., p. 320. 3 A. M. Vaxovskaja, op. cit., p. 210.

La mémoire dans L’Année du Seigneur et Le Pèlerinage se révèle d'être une substance extrêmement complexe. Dans le diptyque nous sommes en présence de deux types de mémoire.

En premier lieu, il s'agit d'une mémoire autobiographique qui désigne le processus par lequel on se souvient des événements vécus avec leur contexte. L'analyse des mécanismes de la mémoire autobiographique permet de faire un pas en avant dans l'étude de la personnalité. Ce type particulier de la mémoire est étudié dans le contexte individuel de l'Homme ainsi que dans le contexte existentiel de sa vie. Les données sont recherchées au niveau de la conscience et de la subconscience. Ce retour vers le passé offre la possibilité de mieux comprendre les différents aspects de la dynamique d'un événement autobiographique, une unité adéquate de l'analyse structurale et fonctionnelle de cette mémoire, dans le cerveau humain. L'étude de la mémoire en question permet également de nommer les composants de l'attitude ou de la réaction du sujet envers son passé. L'actualisation de l'évènement autobiographique, son importance dans la vie de l'individu sont déterminées par les objectifs et les conditions du processus de remémorage. De cette façon, le sujet peut classer les évènements autobiographiques selon leurs formes phénoménales, une représentation caractérisée de la valeur émotionnelle contenue dans ces évènements.

I. S. )mel'v se sert de mémoire autobiographique comme pilier du sujet de ces deux ouvrages. En se rappelant les événements de son enfance, l'auteur matérialise ses souvenirs tout en ayant un objectif précis de cette activité. Il tient à établir le lien entre le présent et le passé.

En deuxième lieu, la mémoire autobiographique côtoie la mémoire épisodique, dont la mission principale est non seulement de récupérer des informations personnellement vécues, mais aussi d'encoder les émotions provoquées par les évènements et enfin de se souvenir de tous les détails perceptivo-sensoriels et phénoménologiques. La mémoire épisodique offre à l'écrivain la possibilité d'effectuer un voyage dans le temps afin d'intégrer son expérience du passé à un projet dans l'avenir.1

1 Cf. M. Van der Linden, « Une approche cognitive du fonctionnement de la mémoire épisodique et de la mémoire autobiographique », Cliniques méditerranéennes, no 67 2003/1,

L’objectif de départ de l’écrivain pour la reconstruction de la mémoire sous la forme du skaz conditionne la dominance de la langue oralisée en tant que paradigme langagier et stylistique de L’Année du Seigneur et du Pèlerinage. La restitution des événements se déroule à vif, copiant le processus de la mémorisation orale. Cela, non seulement contribue à l’effet de la stylisation de l’œuvre, mais le procédé en question rend le texte plus émotif et plus proche du lecteur.

Tout ceci nous permet de dire que la mémoire telle qu’elle est conçue par )mel'v est un moyen permettant l’interconnexion du corps et de l’esprit ainsi que l'interconnexion des différentes générations du peuple. La mémoire est à l'origine de l'immortalisation de la culture et des traditions populaires et c'est elle qui permet à l'homme d'avancer dans ses projets futurs.

I. 4. Bilan

1. Pour conclure cette première partie, nous pouvons dire que la transposition de la langue orale à l’écrit, dont l’introduction dans la littérature s’est surtout intensifiée depuis le début du XXe siècle, est un hybride entre la forme écrite et la forme orale de la langue. Les procédés d’oralisation sont multiples à tous les niveaux langagiers. Cependant, ce simulacre de l’oral ne sera jamais la réplique exacte du discours oral en raison des contraintes de l’écrit.

2. L'attitude envers la langue parlée a complètement changé à partir du début du XXe siècle. La période de l'essor économique et social du pays, de la renaissance des idées philosophiques, connue sous le nom de Siècle d'Argent, fut à l'origine d'un développement fulgurant de la culture russe, y compris de la littérature. Les divergences d'opinions existant au tournant des deux siècles ont donné naissance à tout un éventail de courants littéraires dont le but principal était de renouveler le contenu et la forme des oeuvres littéraires. Malgré la courte durée du Siècle d'Argent, son apport fut immense et il a eu un grand impact sur le développement de la littérature russe en Russie, mais surtout dans le milieu des émigrés russes. Les tendances fortes que nous allons retenir de cette période sont le synthétisme, la musicalité des oeuvres, la technique de montage et une nouvelle perception du mot à l'intérieur du texte littéraire. Grâce au procédé du synthétisme, les textes littéraires ne seront donc plus seulement des concentrations de mots servant à matérialiser la pensée ; de la périphérie, le mot passe au premier plan en suggérant une infinité de correspondances, de relations des uns avec les autres.

3. La pénétration de la langue oralisée dans la langue littéraire s'est considérablement accélérée à partir de cette période. Beaucoup d’écrivains voient désormais dans la langue parlée un matériel linguistique pour la description d’un village ou d’un quartier populaire d’autrefois (d’avant la révolution). On recourt aux éléments de la langue parlée afin de recréer le discours russe authentique avec des accents

populaires et paysans. Afin de coller au plus près à cette langue et refléter ainsi la conscience populaire, les écrivains du début du XXe siècle se passionnent pour la stylisation. Dès lors, la stylisation fut à l'origine de la renaissance des genres populaires, considérés comme « bas » par leurs prédécesseurs. Il s’agit des genres comme les contes, les légendes, les paraboles ou le skaz.

4. L'existence parallèle de deux cultures, d'élite et de masse, marque également le début du XXe siècle. Or les événements socio-politiques mettront petit à petit fin à cette coexistence. La culture de masse deviendra le courant largement dominant et bénéficiera de la protection et du soutien du régime soviétique. Les représentants de la culture élitaire, dont le nombre était restreint, n'acceptaient pas la culture de masse dont ils critiquaient la standardisation, lui opposant une idéologie de sauvegarde de la culture russe : ils se prononçaient pour la diversité artistique et le droit à l'individualisme et à l'originalité en affirmant que le rapprochement de la culture avec les couches illettrées de la population serait fatal à la culture russe. Les représentants de la culture d'élite, ne désirant pas à se plier aux règles de jeu imposées par les bolcheviks, seront amenés à quitter la Russie. Ils formeront le groupe de « la littérature russe à l'étranger ». Les écrivains et les poètes émigrés russes se proclameront gardiens de l'héritage du Siècle d'Argent. Ils oeuvreront dans les traditions de cette période, tout en développant leurs propres voies. Le genre autobiographique dont le principal motif sera les souvenirs de la Russie d'avant la Révolution deviendra extrêmement populaire chez les écrivains en exil. En écrivant ces mémoires sur la Russie, leurs auteurs ne se contentent pas d'aligner les faits de la vie antérieure, ils chargent les mémoires d'une mission plus importante : en effet, les souvenirs de leur patrie serviront à surmonter le mal du pays chez les représentants de la première génération et à faire perdurer la culture russe à l'étranger.

5. Concernant les dominantes d’Ivan )mel'v, nous pouvons dire que l’écrivain attachait une grande importance au rôle de la religion orthodoxe dans le fonctionnement de la société. L'orthodoxie était pour lui un pivot du monde humain qui donne son sens à la vie de l'homme et qui protège la société de tout débordement, de la situation « hors-limite » et « hors-contrôle ». En même temps, la religion et les