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Le Jeu de Rôles ludique146 (JdR ou RPG : Role-Playing Game) n’est lui-même

qu’une variation du jeu libre de l’enfant adaptée à l’univers de l’adulte. Il propose aux joueurs d'interpréter un personnage imaginaire, au sein d’une équipe d’investigateurs, dans un contexte évolutif. Comme le précise la Fédération Française de Jeux de Rôle : Le jeu de rôle est un jeu de société (...) Les spectateurs participent au conte en imaginant les actions des personnages. Le conteur mène le jeu en tenant compte de ces actions dans la suite de son récit. Ainsi l'histoire se construit grâce à l'imagination de l'ensemble des participants, c'est donc une sorte de conte interactif. Le but de notre loisir : l’amusement147. Il s’adresse généralement à des groupes restreints, comprenant un Meneur de Jeu (MJ), garant de la réactivité du scénario et de la progression de l’ambiance, et de 2 à 6 joueurs, chacun d’eux interprétant un Personnage Joué (PJ). Assis autour d’une table durant de longues heures, ils vivent, par l’intermédiaire d’une intense expérience imaginaire groupale, de palpitantes aventures, durant lesquelles ils peuvent découvrir un nouvel univers, résoudre collectivement une énigme, multiplier les rencontres, se sentir utiles socialement, développer leur amitié, prendre conscience de différents aspects de la réalité, etc. Cette activité ne nécessite pas vraiment de préparatifs : avec un peu d’expérience, il est possible d’improviser des dizaines d’heures durant en s’appuyant sur les idées émergeant du groupe

146 Pour une description approfondie du JdR ludique, se reporter à GUISERIX Didier (1997), Le livre des

ou sur les innombrables scénarios édités. Les JdR ludiques explorent une grande variété d’univers, dont les thèmes vont du médiéval-fantastique, inspirés plus ou moins des récits de J.R.R. Tolkien et de ses “ successeurs ”, à la science-fiction, en passant par les historico-réalistes ou les humoristico-déjantés148. Si l’action héroïque qui anime certains jeux est plus adaptée aux âmes d’adolescents, l’investigation et le suspens tendent à attirer les plus âgés.

Le JdR Grandeur Nature (GN ou LARP : Live-Action Role-Playing) peut

rassembler plusieurs centaines de personnes sur des sites aménagés pour l'occasion (bâtiment, village, bois, etc.). Les joueurs, déguisés, participent généralement à des enquêtes au cours de reconstitutions imaginaires. De nombreux meneurs de jeu et intervenants (dans la proportion d’environ un pour six participants) veillent au bon déroulement du scénario et au réalisme des rencontres. L’aspect organisationnel est primordial. Le scénario, les personnages, les lieux, la logistique, etc. tout doit être prêt bien avant le démarrage du GN. Cette activité a déjà été utilisée dans le cadre de formations aux relations humaines, notamment par l’importation des règles de chevalerie dans le fonctionnement d’équipes de projet.

Les JdR vidéo ont ceci de particulier qu’ils ne nécessitent pas toujours la présence

physique des différents protagonistes. En effet, soit le joueur de trouve seul face à son medium technologique, soit il joue en réseau avec d’autres personnes dans un même espace, chacun disposant d’un ordinateur, soit encore il a accès à un univers virtuel persistant dans lequel il ne peut rencontrer que les incarnations ludiques des autres joueurs. Ces jeux de rôle massivement multi-joueurs en ligne (MMORPG : Massive Multiplayer Online Role Playing Game), qui se sont développés à partir du milieu des années 1990, peuvent rassembler jusqu’à plusieurs centaines de milliers d’individus. On y observe déjà de multiples déviances : programmeurs payés pour concevoir des robots-joueurs, individus au comportement addictif, joueurs payés pour faire progresser des personnages virtuels destinés à être vendus par la suite, etc. Cependant, le JdR vidéo se distingue nettement du JdR ludique du fait que, d’une part, les traits de personnalité et les caractéristiques du personnage joué étant limités, on ne peut véritablement parler d’une prise de rôle. D’autre part, le programme définissant le jeu, en l’absence d’une réelle intelligence artificielle, ne peut encore remplacer les qualités humaines du meneur de jeu (émotions, ressenti,

147 Cf. Lexique : Jeu de rôles ludiques

spontanéité, etc.). Les JdR vidéo ont beau tendre vers toujours plus de complexité et de réalisme, ils restent soumis à la qualité des communications homme-machine. C’est cependant un domaine en plein essor, notamment chez les praticiens-chercheurs de l’Interactive Learning.

Les jeux de plateaux, ou de stratégies, dont les thèmes sont très variés, peuvent,

par exemple, permettre d’interpréter succinctement certains facettes de personnages fictifs149 ou encore de participer à la reconstitution de scènes historiques (cas des wargames). Ils se distinguent néanmoins des JdR ludiques du fait, notamment, des contraintes imposées par l’existence d’un univers figé, représenté par le support de jeu, et d’une tendance à aiguiser l’esprit de compétition et l’envie de victoire. Nous sommes nombreux à penser que la pratique des jeux de simulation n'est pas uniquement une pratique ludique et distrayante - bien que cela reste, sans conteste, son but premier - mais encore une activité intellectuelle de haut niveau pour tous les passionnés d'histoire et de stratégie. Activité entièrement nouvelle puisqu'elle permet d'aborder ces domaines de la pensée de façon dynamique et non plus statique, comme les formes traditionnelles du savoir (livres, etc.) l'étaient jusqu'alors (...) il est possible - et même nécessaire - de pratiquer un jeu de simulation et de se poser, dans le même temps, des problèmes dignes de ceux qui font le quotidien des universitaires, des chercheurs, des officiers supérieurs et des hommes d'État150. Si certains de ces jeux sont utilisés tel quels dans le cadre de la formation, d’autres ont dû faire l’objet de modifications substantielles pour s’adapter aux exigences extérieures. Beaucoup ont été créé sur mesure, pour un ou plusieurs types d’interventions, par des ludopédagogues, eux-mêmes souvent créateurs de jeux.

Les livres dont vous êtes le héros et les jeux de cartes qui s’inspirent de l’univers

des JdR ludiques n’ont pas grand chose à voir avec cette pratique. Si ce n’est qu’ils font perdurer, sous une autre forme et le temps d’une partie, l’imaginaire collectif lié à la maîtrise d’un univers virtuel. Les premiers placent le lecteur en situation d’interférer sur le déroulement du scénario en lui proposant de se mettre à la place du héros et de prendre des décisions quant aux pistes qu’il lui faut explorer pour arriver à ses fins. Les seconds, plus interactifs, placent les individus en situation de confrontation, autour d’un enjeu de domination, par l’usage de cartes possédant chacune des caractéristiques particulières. Les

149 Je citerai pour exemple, parmi une foule de possibilités, Aristo, un jeu qui incite les joueurs à user d’un langage châtié.

150 Laurent Henninger, rédacteur de la rubrique wargame de Casus Belli - cité par TREMEL Laurent (2001),

uns comme les autres ne sont que des succédanés du JdR ludique, certes sans grandes saveurs, mais susceptibles cependant d’aider à renouer avec le plaisir de la lecture, de satisfaire l’envie d’aventure, ou de ranimer la flamme ludique et l’intérêt pour les pratiques “ rôlistiques ”.