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Bio : conditions et logistiques

Le JdRF est entièrement construit à partir des caractéristiques du JdR ludique. Seul l’en différencie l’ajout d’un débriefing final. Etant donnée l’extrême diversité des pratiques en ce domaine165, je me contenterai de présenter celle que j’ai fait mienne après plus d’un millier “ d’heures de vol ” cumulées au cours de mes vingt dernières années de jeu. Si elle n’est pas parfaite, elle a au moins le mérite de ne pas être figée définitivement en l’état et de rester ouverte à de probables modifications ultérieures. De toute façon, une fois dans le feu de l’action, le MJ ne pourra compter que sur ses qualités d’improvisateur pour faire face et s’adapter aux différentes contraintes contextuelles.

Conditions spatio-temporelles

Le lieu, qu’il soit imposé au MJ, ou choisi par celui-ci, doit être aménagé de façon

à provoquer un effet de décentration chez les participants et à encourager l’émergence d’un imaginaire groupal. Pour ce faire, l’animateur se doit d’en exploiter au maximum les potentialités (cadre inhabituel, atemporel, compartimenté, douillet, etc.), en tentant, autant que possible, de les intégrer comme des composantes du jeu (cas de la rencontre d’un personnage au coin d’un feu de cheminée). Le minimum requis étant un espace bien chauffé (la sensation de froid, comme toute autre contrainte physique, peut faire sortir le joueur de son personnage), isolé de toute ingérence extérieure, partiellement insonorisé… et doté d’une table et d’autant de chaises que de participants. Un simple couloir peut suffire pour procéder aux différents entretiens individuels. Il est toujours préférable de vérifier le bon fonctionnement des divers services à disposition : toilettes, électricité, cuisinière, matériel de sonorisation, etc. Une fois ces derniers détails techniques et logistiques réglés, on dispose le mobilier, en veillant à laisser un espace de circulation pour le MJ et de façon à ce que les joueurs se sentent à l’aise. On masque du mieux possible les signes ostensibles

165 Pour une présentation plus classique du JdR ludique, cf. GUISERIX Didier (1997), Le livre des jeux de

de la société réelle (horloge, téléphones, ordinateurs, Hi-Fi, etc.), en fonction des places qui seront occupées par les joueurs autour de la table.

On use de quelques artifices afin de soustraire ce lieu des représentations que pourraient en avoir les participants, surtout s’ils se le sont déjà approprié à d’autres occasions, et pour faciliter l’émergence d’une illusion groupale : des tentures et autres éléments décoratifs peuvent être disposés de façon à modifier l’aspect général de la pièce ; les participants peuvent être invités à se déguiser, même sommairement, afin de les encourager à se glisser dans leur rôle ; l’utilisation du support musical, en tant qu’élément d’ambiance, favorise la concentration des participants ; l’éclairage, tamisé, doit pouvoir être modifié facilement (en soufflant des bougies, par exemple) car il ne faut pas négliger le fait que l’imaginaire s’enflamme plus librement dans l’obscurité ; etc. Bien évidemment, il ne s’agit là que d’artifices dont on peut parfaitement se passer. Néanmoins, ils participent pleinement à déstabiliser les participants et à renforcer leur implication dans l’univers virtuel du jeu.

Table de jeu côté PJ

La durée du JdR formatif est très variable. Sachant qu’il faut parfois deux à trois

heures de jeu (ce délai peut être très nettement raccourci dans le cas de joueurs expérimentés ou particulièrement motivés) pour mettre en place un imaginaire groupal cohérent, et qu’il faut ménager un temps suffisant pour le débriefing, il faut compter envisager quatre à cinq heures de rencontre pour un JdRF de sensibilisation. Mais ce temps est trop court pour dévoiler certaines subtilités de cette pratique. C’est pourquoi il peut se révéler nécessaire d’envisager de dépasser la dizaine d’heures. De quoi en décourager plus

d’un. Sauf pour ceux qui ont déjà l’expérience du JdR ludique. C’est pourquoi je recommande de ne pas fixer à l’avance la durée du scénario. On évitera aussi de placer en évidence une horloge, ceci afin de favoriser une perte des repères temporels, condition essentielle pour renforcer la construction onirique en cours. Si le JdRF “ prend ”, ce sont les joueurs qui demanderont à poursuivre. La durée du JdRF dépend donc surtout de la motivation et de la disponibilité des participants : de quelques heures à plusieurs jours, entrecoupés de pauses allant du temps d'un repas… à plusieurs mois. Et tant mieux, car l’accompagnement à cet apprentissage expérientiel de la co-recherche-action-formation, qui prend environ un centaine d’heures, doit se faire sur le moyen terme (de quelques mois, en intensif, à quelques années). Il n’y a pas vraiment de durée limite pour les séquences de jeu, si ce n’est celle imposée par la fatigue physique, cet état modifié de conscience propice à nourrir les illusions perceptives. L’idéal est de pouvoir débuter le scénario dans la matinée, d’y intégrer les différents repas et la convivialité qui les accompagne, et de s’arrêter parfois tard dans la nuit à la demande des joueurs. Le MJ est alors dans un état de tension tel qu’il est rarement le premier fatigué et qu’il lui est parfois difficile de trouver le sommeil.

Table de jeu côté MJ Logistique et organisation

Le matériel, rudimentaire, se compose de quelques feuilles et crayons disposés sur

la table et laissés à l'intention des joueurs. C’est suffisant pour rédiger la biographie d’un personnage, noter les éléments de recherches, esquisser des plans, schémas ou dessins, et

répertorier les pistes envisagées. Les participants doivent prévoir d’emporter avec eux le ravitaillement : repas, boissons, etc. et leur éventuel déguisement. Côté meneur, il faut ajouter les éléments de décor, les dés, les bougies, l’encens, etc., sans oublier le scénario. Je préconise aussi l’utilisation d’un cache, permettant de subtiliser au regard des joueurs les éléments du scénario, et l’emploi d’un matériel de sonorisation, comme un ordinateur portable truffé d’éléments d’ambiance (musique de films, folkloriques ou expérimentales, sons, dialogues, etc.), pouvant aussi servir d’appareil enregistreur, en vue des débriefings à suivre, ainsi que divers accessoires (micro, enceintes, etc.). Il peut être utile de disposer d’un sac contenant divers accessoires (chapeaux, chemises, vestes, gilets, pipes, flasques, bougeoirs, etc.) permettant, au gré des improvisations, tant de caractériser certains Personnages Non Joués (PNJ) que d’ajouter du réalisme à l’imaginaire groupal.

Quelques accessoires

Les règles du jeu166 sont semblables à celles régissant la vie réelle. C’est-à-dire que les joueurs interprètent leur personnage comme s’il était vivant, doté de caractéristiques physiques et de certaines qualités, et soucieux de sa santé. Quand une situation litigieuse se présente, il est possible de faire appel au truchement du hasard pour établir quelle sera la suite des événements. C’est le cas lorsque les joueurs prennent des risques de façon inconsidérée, lorsqu’ils sortent du cadre de leur interprétation et agissent à l’opposé des principes de leur PJ, lorsqu’un événement extérieur influe directement sur

166 Les règles sont une sorte de langage commun, qui permet, alors que chacun arrive avec son imaginaire, de rêver ensemble et que cela reste cohérent. Elles font parties de l’univers du jeu, reflet de l’esprit du concepteur, et sont appréciées à ce titre par les joueurs - GUISERIX Didier (1997), Le livre des jeux de rôle

leur existence, où encore lorsqu’il y a désaccord entre le MJ et un ou plusieurs PJ à propos d’une description imprécise d’une situation. La résolution du problème passe généralement par un jet de dés qui détermine, en fonction de la difficulté de l’action entreprise, sa réussite ou non. Si pour Vygotski, c’est la règle du jeu qui génère la possibilité de créer un univers imaginaire, dans le cadre du JdRF, il faut garder à l’esprit que les règles employées peuvent aussi évoluer au cours de l’exploration de l’univers proposé par le MJ.

Le groupe de participants167 impliquées dans un JdRF comprend un MJ et de trois à cinq joueurs. Ce nombre peux varier au cours du jeu, notamment lorsque le MJ prend à part un ou deux PJ, mais aussi entre deux scénarios. Il ne peut guère être revu à la baisse, sous peine de tomber dans les travers de la domination du groupe par le MJ, ni à la hausse, du fait d’un phénomène de dispersion inhérent au groupes de plus de six individus. Plus le groupe est petit, plus il est aisé, pour le MJ, de mettre en place et de développer un imaginaire groupal cohérent. Ceci convient assez à des scénarios visant à déstabiliser des joueurs : intrigues, enquêtes, suspense, etc. Lorsque la taille du groupe augmente, il devient difficile, pour le MJ, de maintenir la cohésion de cet imaginaire groupal. Le groupe ayant alors tendance à se disperser, le MJ doit compter sur la seule motivation des joueurs pour poursuivre son action. Cette disposition correspond mieux à des scénarios conçus pour défouler les joueurs : missions, quêtes, confrontations, etc.

L’âge des joueurs168 est déterminé par le fait qu’il s’agit, ici, d’une activité à

destination des individus adultes (notion on ne peut plus subjective), où du moins considérés comme tels du point de vue de leur développement physiologique et de leur expérience existentielle : d’environ 20 ans à… pas de limites. Il serait bien évidemment très intéressant d’évaluer l’effet de ce type de pratique sur un public plus jeune. Mais ça n’est pas le sujet de cette thèse et je laisse, pour l’instant, cet aspect de la recherche sur les JdRF à d’autres, qui y trouveront certainement matière à s’y impliquer avec passion. Je ne citerai que deux exemples extrêmes : l’excellente étude de J.L. Moreno sur la famille thérapeutique dans l’accompagnement de son enfant de deux à trois ans169 et le cas

167 Pour une approche détaillée par le JdRF des spécificités des différents groupes restreints - Cf. Partie II.C.2.b. Les groupes

168 L’âge des joueurs détermine la forme et l’ambiance du JdR répondant à l’attente des participants : Les

plus jeunes jouent surtout pour se défouler (découverte entre amis) Autour de 14/16 ans, les joueurs

commencent à rechercher les éléments qui enrichissent le jeu (pratique en groupe) Entre 17 et 20 ans, on

apprécie déjà plus l’enquête, la négociation avec les PNJ (création de clubs) Après 20 ans, on commence à

rechercher le plaisir du récit, des personnages plus fouillés (fréquence moindre). A partir de 25 ans, la proportion de femmes chez les rôlistes tend à augmenter mais rares sont celles qui deviennent MJ (groupes d’amis) - GUISERIX Didier (1997), Le livre des jeux de rôle

particulier d’une personne initiée à la pratique des JdR ludiques dès l’âge de 3 ans, dont je n’ai malheureusement pas pu recueillir l’intégralité du témoignage.

L’approche ergonomique du JdRF consiste à assurer la satisfaction des besoins

des participants : une bonne oxygénation du cerveau (volume de la pièce, odeurs, etc.), le confort corporel (disposition du matériel, alimentation, etc.), un apprentissage rythmé (actions, détente, réflexions, stress, etc.) ; une perte des repères temporels. Perçu par les cinq sens, l’environnement doit être agréable et propice à la décentration. Modulable (éclairage, sons, etc.), il est utilisé pour rompre avec la monotonie et pour instaurer une ambiance susceptible de renforcer la cohésion du groupe. La perception, stimulée par l’environnement170, peut alors être sublimée par l’imaginaire. Tous les ingrédients sont alors réunis pour favoriser la mise en place d’une démarche maturationnelle.

Conditions de jeu Support du JdRF

Le scénario proposé sert de lien entre l’individu et le groupe et doit favoriser la

création d’un imaginaire groupal. Il peut prendre la forme d’un huis clos, de la résolution d’une énigme, de la conduite d’une mission diplomatique, de l’accomplissement d’une quête, d’une épopée héroïque… ou même combiner plusieurs de ces formes. Seul le MJ en

170 Le toucher : écriture, facs-similés, position, etc. ; La vue : aménagements, éclairage, objets, etc. ; L’audition : parole, musique, rythme, etc. ; L’odorat : café, bougie, encens, etc. ; Le goût : repas, boissons, crayon, etc.

a connaissance. Il peut comprendre une trame plus ou moins développée, la description des principaux PNJ, le descriptif des différentes pistes pouvant être explorées par les personnages ainsi que les informations disponibles sur leur environnement, et éventuellement une chronologie des événements prévus. Le scénario peut aussi être improvisé à partir d’un simple mot, d’une idée d'intrigue, de l'envie de reconstituer une scène rêvée, ou encore naître progressivement au cours d'une improvisation en s'appuyant tant sur l'expérience du meneur que sur l'écoute sensible171. Le scénario doit être souple et laisser suffisamment de place à l’improvisation pour que les participants n’aient pas l’impression de jouer une partition figée. Le meneur peut, en restant attentif à son auditoire, détourner le scénario afin de l’adapter aux initiatives collectives les plus enrichissantes. Ainsi, les interventions des joueurs interfèrent tant sur sa forme que sur son fond et leur permettent de développer et de s’approprier le scénario.

Le MJ doit rompre avec le sentiment de sécurité trompeur suscité par un scénario particulièrement bien ficelé, mais parfois trop directif, et faire confiance en ses qualités d’improvisateur. Cependant, il ne doit pas pour autant négliger ce temps de préparation. Car ce dernier permet de mieux appréhender son propre mode de fonctionnement cognitif et, par là même, de respecter ses propres exigences. Pour ma part, animé d’un mode d’improvisation172 plutôt contextuel (nécessitant une bonne appréhension du contexte pour y faire évoluer librement les PJ), je privilégie, dans le cadre des JdRF historiques, l’utilisation de quelques dates clefs et d’une liste de noms : ceux des personnages principaux et d’autres, qui serviront au fil des rencontres. Il m’arrive aussi de m’appuyer sur une idée d’introduction ou un scénario préalablement écrit, selon qu’il s’agit d’une simple sensibilisation au JdRF ou d’une exploration plus poussée de ces qualités intrinsèques. Le tout étant de laisser planer le doute quant à ce qui a été réellement prévu en veillant à maintenir la cohérence de l’ensemble. Même si le contexte du scénario et les règles du jeu sont connues par les participants, le meneur est le seul à en connaître la trame. De mon point de vue, l’acte créatif se situe davantage dans le déroulement du jeu que dans la rédaction préalable d’un scénario, même s’il ne faut pas négliger la satisfaction personnelle que l’on peut retirer en produisant un tel écrit. Les MJ sans expérience auront tendance, pour se rassurer, à accomplir ce genre de démarche, au risque de limiter ainsi leur potentiel d’improvisation à ce qui a été prévu. Cependant, en adoptant cette position confortable, ils réduisent d’autant la place de la créativité du groupe, point fort du JdRF.

171 BARBIER René ( 1997), L'approche transversale - l'écoute sensible en sciences humaines

172 Chaque MJ a son propre mode d’improvisation - Cf. III.B.2.c. Conception conceptuel – De l’imaginaire à la création

Néanmoins, dans le cadre de commandes, il est possible d’envisager de produire des scénarios originaux tenant compte plus particulièrement des préoccupations, tant individuelles que collectives, ou du degré d’hétérogénéité du groupe173. Son fond comme sa forme peuvent être adaptés à un grand nombre d’objectifs de formation.

L’univers dans lequel se déroule le scénario doit convenir tant au MJ, qu’aux

participants qui sont amenés au cours du jeu à l’explorer, puis à se l’approprier. Leur diversité et leur transversalité permettent d’envisager d’innombrables formes :

- Médiéval-Fantastique : mythologique (légendes) ; surnaturel (merveilleux) ; spirituel (sacré) ; etc.

- Réaliste : historique (faits), dynastique (généalogie), psychologique (épouvante) ; etc. - Science-Fiction : utopique (idéologie), futuriste (technologie), post-apocalyptique

(survie) ; etc.

- Délirant : écologique (animaux), contemporain (marvels), délirant (toons) ; etc.

Pour ma part, je préfère, dans le cadre de la formation des adultes, m’appuyer sur des univers faisant appel à des références historiques communes, plutôt que de développer des univers totalement imaginaires, qui restent parfois un peu hermétiques au tout venant. Au demeurant, il est plus facile, pour un néophyte, d’interpréter un personnage en parvenant à se faire une idée des préoccupations de l’époque dans laquelle il est plongé. Il faut donc s’accorder, au préalable (avant la création du PJ) et par une mise en commun des représentations individuelles, sur le contexte baignant les PJ et sur leurs conditions de vie (environnements, besoins, croyances et technologies). Ce choix permet aussi, aux joueurs qui le souhaitent, de compléter leur connaissance du contexte en procédant, selon leurs centres d’intérêts respectifs, à des recherches d’informations (premiers pas vers l’autoformation). Les univers historiques présentent l’avantage d’ouvrir les portes à de multiples sources d’inspiration. La collecte d’informations sur le contexte peut s'appuyer sur des témoignages de l’époque (journaux, revues et ouvrages) comme sur des enquêtes postérieures à celles-ci (travaux d'historiens, revues, ouvrages et documentaires), sujettes tant à l'interprétation des auteurs qu'à une certaine censure moraliste174.

173 Ainsi, lors d’une séance de sensibilisation au siège de la Fédération Nationale des Foyers Ruraux : un groupe de femmes a été amené à interpréter, au sortir de la première guerre mondiale, le rôle de femmes émancipées, vivant en Nouvelle-Angleterre et confrontées à une forme de ségrégation sexiste (Cf. II.B.1.b. Constitution des groupes – Les groupes de sensibilisation (GS1)) – DANIAU Stéphane (2001), Utilisation

des JdRF dans la formation professionnelle

Exemple de fac-similé

Le MJ peut aussi tirer de ses recherches des fac-similés (reconstitution ou copie de journaux d’époque, notes manuscrites, plans, objets matérialisant une vision onirique, etc.) qui sont destinés à faciliter l'accès à l'information aux participants. Tout en ajoutant un certain réalisme au monde virtuel en cours d’élaboration, ils renforcent l’illusion groupale en créant un lien matériel entre le jeu et la réalité. Pour ma part, je propose actuellement des scénarios s’inspirant de l’univers onirique développé par H.P. Lovecraft et se déroulant durant les années 1920-1930. Pourquoi ce choix ? Pour trois raisons principales :

- la première est que cet univers est favorable à l’éclosion d’une réflexion sur l’existence humaine. Car, selon H.P. Lovecraft, l’inhumain n’est pas une menace extérieure ; il est présent dans l’humain175. Il nous projette dans les préoccupations de nos prédécesseurs, ceux-là même qui ont contribué, en partie, à façonner le visage de notre société.

175 Ce n'est pas par simple goût du décor que Lovecraft accumule les notations à propos d'architectures non

-euclidiennes. Il veut dire que l'espace et le temps “ordinaires” sont des illusions forgées par l'Histoire humaine, c'est à dire par l'Histoire libérale. La dissipation de ces illusions ôte toute importance à cette Histoire qui n'a de sens que par rapport à des cadres de référence qu'elle a elle-même secrétés. Il résulte de cette révélation que les individus prennent désormais conscience de se trouver réduits à l'état d'objets soumis à des déterminismes qu'ils ignoraient. Ce sera, bien plus tard, la leçon des “structuralismes” de Lévi-Strauss, Lacan et Michel Foucault qui déplorent, annoncent ou célèbrent la fin de l'homme, ou plutôt de l'individu libéral (…) Ce ne sont pas, à eux seuls, l'immensité du temps et les bizarreries de l'espace,

empruntées à la science, qui suscitent l'horreur dans l'œuvre de Lovecraft, mais c'est la relation entre les personnages, cette immensité et ces bizarreries, qui les définit comme des objets insignifiants et impuissants, et qui est homologue à la relation du groupe social auquel appartient Lovecraft et à la société des monopoles dans laquelle l'individu libéral se dissout - KLEIN Gérard (1986), “ Trames et moirées – H.P. Lovecraft ”, dans Science-fiction et psychanalyse.

- la deuxième est qu’il est facile pour les joueurs, comme pour le MJ, de se faire une idée du contexte qui baigne leur personnage, en puisant dans la vaste documentation traitant de cette époque, ou dans les souvenirs familiaux. Qui n’a jamais regardé de films réalisés par Chaplin, ou traitant de la période de la prohibition et des Années Folles ? Les PJ sont donc des contemporains, parfois même des compatriotes, d’H.P. Lovecraft.