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Un investissement contrasté voire faible des associations pour les EANA Globalement, on constate une faible présence des structures associatives dans l’accueil

Les trajectoires d’affectation scolaire

1. L ES MODALITÉS D ’ ACCUEIL ET D ’ AFFECTATION

1.3. Le rôle des intermédiaires pour la scolarisation de l’enfant

1.3.1. Un investissement contrasté voire faible des associations pour les EANA Globalement, on constate une faible présence des structures associatives dans l’accueil

scolaire. Les municipalités, les CIO et les CASNAV (ne) travaillent peu / pas en lien avec les associations. Des initiatives existent, mais demeurent isolées et souvent liées aux contacts personnels noués en dehors du cadre scolaire. Certains enseignants en UPE2A font occasionnellement appel à des interprètes issus du milieu associatif, notamment lorsqu’ils reçoivent les familles. Certains enseignants en UPS ou en camion-école travaillent en lien plus ou moins étroit avec le tissu associatif spécialisé sur les gens du voyage. Certaines associations en lien avec les migrants accompagnent de manière exceptionnelle des familles primo-arrivantes pour l’inscription des enfants à l’école. Des bénévoles du RESF interviennent également, mais principalement lorsqu’il s’agit de défendre le droit à l’éducation. Très peu d’associations sont spécialement positionnées sur l’accueil, le soutien ou le suivi des familles primo-arrivantes et de la scolarité des enfants / jeunes – celles qui

existent sont plutôt communautaires, comme l’association des parents d’élèves turcs à Bordeaux. Ainsi, l’accueil des familles primo-arrivantes, en ce qui concerne la scolarité des enfants, ne passe principalement pas par le tissu associatif, mais directement par les services municipaux et de l’Éducation nationale.

Sur certains territoires cependant, les associations sont présentes à différents niveaux.

Leur engagement est souvent lié à un public. Depuis les circulaires de 2012, dans certaines villes de l’académie de Montpellier, des associations pour l’accompagnement des migrants roms roumains, par exemple, ont été créées, ou ont créé des postes et sont en lien avec le CASNAV et les écoles. À Montpellier, le conseil départemental a favorisé le milieu associatif et un partenariat a été établi entre la ligue des droits de l’homme (LDH) et le conseil départemental. Une somme a été versée à la LDH afin que l’association gère l’achat des cartes de transport des migrants roms roumains, étant donné que cet engagement participe de la politique d’aide à l’enfance. À l’école, les enseignants en UPE2A indiquent souvent être en lien avec des bénévoles associatifs qu’ils contactent régulièrement pour le suivi de la scolarité et le lien avec les parents. Les collaborations ne sont pas menées avec les seules associations d’aide et de soutien aux migrants ou aux populations minorisées, mais également avec celles qui, comme les missions locales (comme dans le Gard), ont un statut associatif avec une mission de service public sans être spécialisées sur une origine donnée.

Quelles que soient l’identité et les missions des associations, se pose la question de l’institutionnalisation de la fonction d’intermédiaire, via la création de postes de médiation au sein de structures associatives ou de l’Éducation nationale (Bordeaux et Montpellier).

Concernant les Roms bulgares vivant dans des squats / bidonvilles, les deux médiateurs de Bordeaux Métropole de la mission « médiation squats » interviennent largement dans la scolarisation des enfants et des jeunes, dans le cadre de leur mission d’accompagnement dans l’accès aux droits de ces populations, de différentes manières : en effectuant le lien avec le CASNAV pour les bilans de positionnement, avec les établissements pour accompagner les enfants / jeunes et leurs familles au début de leur scolarité. Ces médiateurs soulignent également, dans leur rapport d’activité de l’année 2016, que : « Les actes de médiation entre les écoles et les familles ont eu pour objectif de travailler autour de l’assiduité et du comportement des élèves ainsi que des activités périscolaires et de la réussite du parcours scolaire dans son ensemble ». Certains de ces postes peuvent être rattachés à des établissements ou à des dispositifs, mais aussi pensés de manière thématique « enfants des bidonvilles » pour ne pas dire « roms ».

Dans l’académie de Créteil, la situation est assez contrastée. Une partie des associations rencontrées s’avouent perdues dans la procédure administrative et ne constituent pas vraiment un soutien pour les enfants et leurs familles. RESF 93 accompagne des familles lorsqu’il y a des problèmes lors des inscriptions en mairie. Mais il existe aussi des associations spécialisées sur l’accompagnement de publics dits spécifiques, à l’instar de l’ASET 93 qui intervient auprès des familles roms (et dans une moindre mesure, itinérantes) vivant sur des lieux non stabilisés en grande précarité. De nombreuses associations interviennent auprès d’eux, à l’instar de Romeurope ou du réseau des associations de la FNASAT-GDV198, qui sont cependant spécialisées surtout pour les EFIV, à l’instar du pôle de médiation scolarisation auprès duquel nous avons enquêté en Seine-et-Marne.

198 Fédération nationale des associations solidaires d’action avec les Tsiganes et les Gens du voyage.

À Strasbourg, le rapport aux associations se résume souvent aux questions d’interprétariat qui ne parvient pas à être financé199. Une CPE explique :

« Parfois on fait appel à des associations, mais c’est plutôt difficile à avoir, honnêtement, je veux dire des interprètes. […] [Ce sont] des interprètes qu’il faut payer, des associations de ce type-là, mais c’est plutôt difficile à avoir. Il n’y a pas de financements, absolument. Et donc on s’appuie essentiellement sur la ressource interne, donc là on a de la chance d’avoir un AVS [auxiliaire de vie scolaire] qui parle russe, j’ai des assistantes d’éducation qui parlent arabe, un professeur qui parle italien ».

Dès leur arrivée jusqu’à l’entrée en dispositif, les élèves et leurs familles peuvent s’appuyer sur des réseaux de soutien plus ou moins informels. Il n’est pas rare que des parents d’élèves prennent le premier contact avec l’établissement d’affectation de leurs enfants, avec l’aide d’un parent déjà installé en France depuis quelque temps, qui connaît la langue et le système scolaire. Parfois, c’est un membre de la communauté linguistique, culturelle ou religieuse qui joue le rôle de médiateur. Il arrive que le CPE ou l’enseignant en UPE2A aient eux-mêmes recours aux ressources d’interprètes non professionnels :

« […] des membres de la famille ou amis déjà installés et en France depuis quelques années. Des fois j’ai refait appel à des interprètes qui étaient venus parce que connaissant la famille, et je n’avais personne, et ils m’avaient laissé leur numéro de téléphone et, très gentiment, ils sont venus pour d’autres familles qu’ils ne connaissaient pas. Ça m’arrive aussi de faire par téléphone parce que l’interprète travaille et ne peut pas se déplacer, avec le haut-parleur. Pour les inscriptions, c’est toujours un adulte, mais arriver, prendre les bulletins… une situation complètement ubuesque où c’est la petite fille de 6 ans qui a fait la traduction ou du coup, je n’ai quasiment rien dit parce que ce n’était pas à elle de… et puis déjà au niveau vocabulaire, la pauvre ! Elle n’avait pas la maturité pour gérer une conversation sur les problèmes scolaires » (un enseignant).

Un CPE fournit un autre exemple :

« Là, j’ai eu le cas d’une famille syrienne, qui s’est inscrite récemment, et là c’était un prêtre, parce qu’ils sont coptes, et c’est le prêtre qui les a accueillis en France, à Strasbourg, et qui a servi d’interprète. Donc parfois il y a des réseaux. […] J’ai le numéro de téléphone d’ailleurs, parce qu’à un moment donné, on me donne le numéro de téléphone, parce que comme disait ma collègue, c’est nous qui prenons contact avec eux, alors j’appelle le papa et on a échangé deux mots au téléphone et après il a arrêté et puis il m’a dit : “Je vous passe l’interprète”, et moi je pensais l’interprète, mais c’était le prêtre ! »

Paradoxalement, le cas des mineurs non accompagnés suivis apparaît un peu plus simple aux yeux des CPE d’un collège strasbourgeois : « C’est plus simple en termes de contact, parce que c’est plus simple de joindre des gens qui ont des tuteurs, une institution, que les parents » (un CPE).

En général, le CASNAV, le CIO et les établissements se révèlent souvent démunis du point de vue linguistique lors du premier contact avec les familles des élèves affectés à une UPE2A. Les acteurs scolaires recourent le plus possibles aux ressources internes (AVS,

199 Il semblerait que Migrations Santé Alsace ait pu progressivement détricoter un financement à l’académie pour mettre en place une ligne budgétaire pour ses interprètes, déjà très actifs avec les acteurs du social et les professionnels de la santé. Voir Migrations Santé Alsace (2018), Coopération professionnelle entre les interprètes et les acteurs de la santé ou du social [en ligne], 20 juin, <www.migrationssante.org/axes-dintervention/interpretariat/cooperation-professionnelle/>, consulté le 11 novembre 2017.

enseignants, parfois élèves) ou à leurs réseaux hors école (associations, interprètes). De la même manière, les familles peuvent s’appuyer sur des réseaux formels ou informels pour prendre contact avec les différentes institutions liées à la scolarisation des enfants. Le décalage linguistique peut, toutefois, amener à des malentendus par rapport à la compréhension de certaines questions qui sont sans doute cruciales : l’origine et la nationalité, la définition de l’âge et du niveau de scolarisation (pour les MNA surtout) et la reconnaissance de besoins particuliers, de syndromes spécifiques ou de souffrances liées à la trajectoire migratoire. Ces malentendus sont souvent à l’origine de plusieurs dysfonctionnements qui peuvent se manifester ensuite en classe : manque d’intégration des élèves en dispositif et dans l’établissement, création de petits groupes homogènes (du point de vue national, linguistique, de l’âge et du genre notamment) et fermés, parfois en conflits avec autres groupes (par exemple : Serbes et Kosovars, Turcs et Kurdes, Syriens et Iraniens, etc.) ; retards dans la reconnaissance de problématiques spécifiques.

1.3.2. L’incontournable médiation pour les EFIV et pour les EANA en situation

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