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Les élèves migrants ou de familles itinérantes au prisme des institutions scolaires

1. D ES CATÉGORISATIONS PERTINENTES OU IMPERTINENTES ?

1.1. Les catégorisations institutionnelles « EANA » et « EFIV »

1.1.2. Ceux que la circulaire de 2012 nomme « EFIV »

Il est question ici des enfants récemment catégorisés par l’administration comme

« enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs » (EFIV)124. La circulaire de 2012 réglementant la « scolarisation et scolarité des enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs », introduit donc la catégorie EFIV et définit ainsi le public en question et les dispositifs que sont les unités pédagogiques spécifiques conçues pour leur scolarisation :

- Le public « EFIV » : « les élèves issus de familles itinérantes et de familles sédentarisées depuis peu, ayant un mode de relation discontinu à l’école ».

- Les UPS : « dans certaines écoles et collèges de référence [...] conçues comme dispositifs d’accompagnement à la scolarité, animées par des personnels spécifiquement formés à ce public ».

En s’interrogeant sur la catégorisation des EFIV125, il s’agit plus généralement de s’intéresser à la manière dont se construit une catégorie par rapport à une autre. Cécile Goï et Emmanuelle Huver écrivent :

« S’attacher aux catégorisations opérées suppose donc de situer les catégories les unes par rapport aux autres (et non plus de les définir “en elles-mêmes et pour elles-mêmes”), de questionner la manière dont les acteurs s’en emparent (Pourquoi ? Pour qui ? Pour quoi ? Etc.), d’interroger les convergences / divergences / dynamiques liées à la coprésence des acteurs (chercheurs, enseignants, décideurs  ces catégories étant elles-mêmes poreuses) et à la co-construction de leurs positionnements (collectifs et / ou individuels) »126.

Ainsi, en comparant la construction progressive de la catégorie des EANA à celle des EFIV, il nous semble intéressant de relever le manque de clarté de cette dernière, de s’interroger sur le positionnement institutionnel, les politiques publiques quant à la prise en compte et le traitement de ces populations. Enfin les amalgames et l’ethnicisation autour des populations constituant cette catégorie, nous amène à nous questionner sur la construction de cette dernière.

De surcroît, dans la circulaire précitée, il est fait mention de « campements » (avec référence à la circulaire interministérielle du 26 août 2012 précisant la marche à suivre lorsque des campements illicites se trouvent sur une commune  directement liée à la présence de squats et bidonvilles de migrants roms bulgares et roumains). Il est également précisé que « les enfants concernés sont souvent de nationalité étrangère ». Ces deux points induisent une confusion dans la catégorisation EFIV qui semble donc regrouper également les migrants roms, de façon assez claire mais sans jamais les nommer. Ces enfants de familles strictement migrantes  Roms ou non  relèvent-ils alors de la catégorie EANA ou de celle d’EFIV ?

124 Ministère de l’Éducation nationale (2012), « Circulaire n° 2012-142 du 2-10-2012… », op. cit.

125 Cette section a été conçue par deux étudiantes de l’UPEC dans le cadre d’EVASCOL. Voir FICHOU M., HUGUON F. (2014-2015), Les catégorisations des EANA et EFIV pensées par l’institution, mémoire de master 1, « Intervention et Politiques sociales », UPEC.

126 GOÏ C., HUVER E. (2013), « Accueil des élèves migrants à l’école française : postures, représentations, pratiques ségrégatives et/ou inclusives ? » [en ligne], in Bertucci M. M. (dir.), « Lieux de ségrégation sociale et urbaine : tensions linguistiques et didactiques ? », Glottopol, n° 21, janvier, p. 117-137, <www.univ-rouen.fr/dyalang/glottopol/telecharger/numero_21/gpl21_08goi_huver.pdf>, consulté en janvier 2018.

À travers les textes officiels depuis la fin des années 1960127, on note un changement dans la terminologie utilisée pour désigner ces enfants. Au fil du temps, il est alors question des « nomades », des « gens du voyage », des « sans domicile fixe », des « non-sédentaires »,

« familles itinérantes », autant d’appellations qui élargissent les profils et complexifient cette catégorie. C’est donc avant tout le critère de l’itinérance (réelle ou supposée) qui regroupe l’ensemble de ces enfants dans une seule catégorie au sein de l’école.

Il est intéressant de s’interroger sur le terme « enfants » qui reste dans toutes les désignations (contrairement aux EANA) alors qu’il s’agit de textes officiels sur la scolarisation.

Et pourquoi pas élèves ? Une question se pose alors : pourquoi dans la circulaire de 2012 réglementant à la fois la scolarisation des EANA et des EFIV, nous parlons d’élèves pour les EANA et d’enfants pour les EFIV ? Cette distinction est-elle porteuse de sens ? Traduit-elle une manière différente de penser deux populations au sein du système scolaire ? Pour cela, il aurait fallu, tout comme pour la catégorie des EANA, replacer l’analyse de ces instructions officielles dans leur contexte politique en analysant la manière dont les pouvoirs publics pensent cette catégorie. Peu d’études existent sur la catégorisation de ceux qui sont dits

« EFIV » aujourd’hui, mais le traitement catégoriel des « gens du voyage » est bel et bien présent.

Nous nous sommes interrogées sur la pertinence encore actuelle de cette catégorie (donc indirectement sur la mise en place des dispositifs spécifiques) quelque peu ambivalente. En effet, nous parlons encore aujourd’hui d’enfants itinérants et voyageurs, bien que certains voyagent effectivement (pour des travaux saisonniers par exemple), alors que d’autres ne voyagent plus du tout. C’est ce qui aujourd’hui nous amène à questionner cette catégorie floue. Certains acteurs institutionnels sont d’ailleurs tout à fait conscients de ses limites : comme l’explique un référent institutionnel en charge des EFIV, la catégorie

« désigne une population qui derrière le mot voyageur peut très bien être une population qui en fait ne voyage pas » (entretien avec un référent institutionnel en charge des élèves itinérants). Le critère même de l’« itinérance » qui fonde cette catégorie n’est ainsi, à l’heure actuelle, que le reflet partiel d’une réalité :

« On a fait du nomadisme des conditions de vie particulières, qui fait qu’on apporte un traitement particulier du point de vue pédagogique aux élèves mais au final, ce n’est pas tant le nomadisme qui pose problème mais les replis identitaires et communautaires avec le refus de l’inscription scolaire, qui pose problème. Du coup est-ce que cette catégorie est vraiment pertinente, je pose la question ? » (idem).

Cet acteur institutionnel relève ici deux hypothèses pouvant expliquer les difficultés d’accès à la scolarisation des EFIV, l’une plutôt construite comme relevant des familles elles-mêmes, l’autre relevant des discriminations. Ainsi, la catégorie d’EFIV est quelque peu délicate à manipuler avec cette difficulté de réunir sous un même critère des populations très hétérogènes.

Le rapport du CASNAV 2015-2016 de Montpellier128 met notamment en garde, dès sa première page ; sur la définition de la catégorie EFIV et la distinction entre les publics des

127 Ministère de l’Éducation nationale (1966), « Circulaire du 8-08-1966… », op. cit.

128 Ministère de l’Éducation nationale (2016), CASNAV de l’académie de Montpellier, Scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés et des enfants issus de familles Itinérantes et de Voyageurs dans l’académie de Montpellier. Année scolaire 2015-2016. Enquête réalisée par le CASNAV, juillet.

établissements scolaires trop souvent assimilés à cette catégorie, alors qu’ils n’en relèvent pas. Le rapport stipule notamment le cas de familles gitanes. Le terme « itinérance » a ainsi été privilégié pour définir cette catégorie, tout en considérant que ce mode de vie peut également varier (des familles peuvent être sédentaires). C’est à cet effet et notamment à l’initiative « expresse et répétée » d’un cadre de l’Éducation nationale et d’un référent institutionnel CASNAV de l’académie de Montpellier, que la notion d’itinérance a été introduite dans la circulaire de 2012 : « pour être sûr qu’on ne parle pas de familles sédentaires, on a bataillé longtemps » (entretien avec un cadre de l’Éducation nationale, académie de Montpellier, juin 2015). Aussi, un deuxième critère entre en compte pour ces acteurs, celui du « rapport à l’institution scolaire » :

Définition : « Enfant du voyage » correspond à une réalité multiple, prenant en compte autant le mode de vie que, pour ce qui nous concerne, le rapport à l’institution scolaire. Dans notre académie, la précision relative à l’itinérance prend tout son sens si l’on considère le grand nombre de familles gitanes, sédentaires depuis longtemps. La circulaire d’octobre 2012 a introduit cette notion dans l’appellation des publics.Toute définition proposée sera donc à interpréter avec prudence.

Nous avons retenu, dans le cadre des appels à renseignements auprès des écoles et établissements, la formulation suivante : “Tout élève est à considérer comme enfant du voyage s’il est issu d’une famille itinérante (voyageurs, forains) mais aussi si celle-ci est sédentarisée depuis peu tout en ayant conservé un mode de relation discontinu à l’école”.

Cette définition, bien qu’imparfaite cerne bien la difficulté de scolarisation d’enfants dont la fréquentation scolaire est, parfois, erratique, en tout état de cause difficile en raison même du mode de vie familial.

Cette définition a fait l’objet d’interprétations dans l’académie ; en certains lieux, des acteurs du système ont pu considérer que des familles gitanes sédentarisées relevaient de cette définition ».

On retrouve cependant, à travers ces « mises en garde » des acteurs institutionnels, cette nécessité de devoir catégoriser, comme le rappelle un autre référent institutionnel en charge des EFIV, pour « nommer des types d’élèves [...], les désigner aussi pour pouvoir les compter et pour pouvoir, du coup, déployer les dispositifs adéquats [...] » (idem).

Cependant, à travers cette analyse, il ne paraît pas si simple de nommer ces élèves.

Cette ambiguïté se ressent également dans les entretiens des référents institutionnels CASNAV de l’académie de Montpellier, qui mobilisent différents registres pour désigner ce public. Sont mobilisées les catégorisations suivantes : « les familles » (des noms étant parfois précisés), souvent associées à un type d’habitat comme « aire d’accueil », « camp sauvage »,

« terrains privés », « terrains familiaux » ; mais aussi des catégories de l’action publique

« grands passages » ; la terminologie juridique « gens du voyage » et enfin la catégorie

« voyageurs », employée avec des guillemets car elle regroupe des réalités diverses, selon le type de mobilité et la régularité de leur passage dans la ville. Le dispositif est, lui, désigné comme tel, « UPS », sauf quand il fonctionne en « classe fermée ». Dans ce cas, c’est l’expression « classe fermée » qui est utilisée, ou alors le qualificatif ethnique « classe gitane ».

Ces difficultés de nomination s’accompagnent de difficultés dans l’identification de leurs besoins précisément. Contrairement aux EANA dont la maîtrise de la langue française (quoiqu’en réalité, nous identifiions d’autres problématiques) constitue le besoin même de cette catégorie et donc, son critère de construction, cela n’est pas aussi identifiable pour les

EFIV. En effet, enfants français, ne voyageant pas forcément et n’ayant pas un besoin particulier car maîtrisant, plus ou moins selon les élèves, la langue française, nous nous interrogeons sur le besoin même de ces EFIV, qui paraissent avoir des difficultés scolaires comme d’autres enfants français. Sur ce même point, un référent institutionnel / académique élève itinérant se questionne :

« On les [EFIV] repère non pas parce qu’ils sont voyageurs mais parce qu’ils présentent des difficultés scolaires. En fait, c’est pour ça que je vous disais que la catégorie EFIV n’est peut-être pas pertinente d’un point de vue pédagogique. Parce que, si ce qui nous intéresse le plus, c’est le fait qu’un gamin ne sache toujours par lire à son entrée en 6e et bien ça, il n’y a pas que les EFIV qui sont dans cette situation-là au final » (idem).

Par ailleurs, il est intéressant de relever l’utilisation du qualificatif « voyageurs » à l’intérieur de la catégorie EFIV. En effet, il s’agit plutôt d’un nom que les personnes s’attribuent elles-mêmes. Ainsi en France, parmi les autonymes génériques, celui de

« Voyageur(s) / Voyageuse(s) »129 est employé le plus volontiers par la majorité des groupes afin de s’auto-désigner indistinctement, qu’ils perpétuent réellement ou non un mode de vie itinérant. Cet usage l’amène à jouer alors le rôle d’une auto-désignation ethnicisée. C’est ce qui explique qu’un individu qui se sédentarise reste considéré comme Voyageur, il ne devient pas pour autant Gadjo.

La circulaire de l’académie de Bordeaux (1/09/2015) ayant pour objet « les modalités d’accueil des EFIV » prend appui sur la circulaire nationale pour « harmoniser la politique académique de scolarisation des EFIV », en commençant par un préambule mettant en avant les « profils et rapports à la scolarité “hétérogènes” ; puis en caractérisant les EFIV par un

“mode de relation discontinu à l’école qui prévaut” ».

Il est intéressant d’interroger les catégorisations que recouvrent ces définitions et la création de ce dispositif de scolarisation spécifique, ainsi que les pratiques qui en découlent.

Si la définition académique est donc basée sur les mêmes ressorts que la circulaire nationale, on constate qu’au sein des interprétations institutionnelles empiriques, la marge de manœuvre demeure relativement importante et implique parfois l’entrée ethnique.

On observe donc une certaine confusion dans les catégorisations et les pratiques locales, même si à l’échelle nationale et académique, seuls, les enfants de familles véritablement itinérantes ou « sédentarisées depuis peu » sont officiellement considérés comme EFIV, sans entrée ethnique explicite. Ce constat est également valable pour les publics scolarisés en UPS.

129 Ce constat explique le choix des majuscules pour le terme « Voyageur » à certaines reprises dans ce rapport : il est alors employé comme référence à une appartenance moins qu’à un mode de vie réel. De même que le terme « Sédentaire » peut désigner une catégorie du point de vue des Voyageurs, c’est-à-dire l’Autre, le Gadjo. Le « S » majuscule permet de différencier deux emplois différents de ce terme : sédentaire comme mode de vie et « Sédentaire » comme catégorie. Dans le discours des Voyageurs, l’étranger est indistinctement appelé « Gadjo » ou « Sédentaire ». Voir COSSÉE C. (2010), « L’impossible neutralité des sciences sociales face aux catégorisations militantes : “Tsiganes”, “Gens du voyage”, “Rroms”, ou autres ethnonymes ? », Migrations Société, vol. 22, n° 128, mars-avril, pp. 159-176.

Quel public est scolarisé en UPS ?

Pour rappel, l’académie de Bordeaux est surreprésentée en UPS, comparativement aux autres académies de l’étude. De plus, la plupart des observations réalisées en UPS concernent cette académie. Dans les faits, les UPS de la commune étudiée recouvrent une multiplicité de publics : familles du cirque, plus ou moins mobiles, Voyageurs130, sédentaires et mobiles, Gitans espagnols, sédentaires et mobiles, migrants et même parfois des migrants roms bulgares et roumains sédentaires (effectuant des périodes de séjour au pays d’origine pour certains). La majorité des Circassiens et Voyageurs sont propriétaires de terrains, les Gitans et Roms locataires. Les Gitans louent souvent à des propriétaires circassiens ou / et manouches.

Certaines familles sont donc sédentaires, d’autres sont itinérantes une partie de l’année : ces différences de modes de vie n’entrent pas en considération pour une scolarisation dans les dispositifs UPS.

Les migrants roms bulgares et roumains allophones qui sont scolarisés en UPS le sont

« par défaut », les enseignants mettant en avant le fait qu’il n’y a pas, sur la commune, de possibilité de prise en charge de type UPE2A pour apprendre le français. Pour certains enseignants, il s’agit d’une même « culture tsigane » et la prise en charge en UPS fait donc sens ainsi. Mais cela suscite des positionnements et des réactions divers, comme cela a été observé lors d’une réunion d’enseignants UPS dialoguant avec l’IEN en charge des EFIV : une enseignante UPS n’y voit pas de problème, les modes de vie « sont les mêmes » selon elle.

Un autre enseignant UPS déclare : « attention à ne pas diluer notre identité de prof en UPS ! » L’IEN en charge du dossier intervient alors : « oui, mais il faut de la souplesse, on ne peut pas vous coller l’étiquette d’expert ».

La spécificité « ethnique » ou « culturelle » du public de ces enseignants fait donc débat, au sein même de l’Éducation nationale. Comme expliqué précédemment, la circulaire EFIV et les pratiques empiriques institutionnelles induisent une confusion dans la catégorisation EFIV qui semble donc regrouper également les migrants roms, de façon assez claire mais sans jamais les nommer. Cette confusion peut, au niveau institutionnel, être également justifiée par la « discontinuité » dans la scolarité, qui est de fait existante pour ces enfants et qui constitue un critère pour la prise en charge en UPS ; or ce critère est rarement mis en avant sur le terrain. In fine, c’est plus la « culture tsigane » que la discontinuité de la scolarité qui est mobilisée par les acteurs de terrain pour faire entrer les élèves dans le dispositif UPS.

A priori, les points communs des élèves scolarisés en UPS concernent des difficultés avec la langue française peu ou pas maîtrisée, une faible culture scolaire, ainsi qu’un fort absentéisme. Or, selon des enseignants, certains élèves « percutent », « sont très scolaires » : « il y a de tout » comme élèves en UPS, résume une enseignante. Cette diversité existante dans les profils scolaires des élèves scolarisés en UPS induit un questionnement central : le dispositif UPS aurait-il un effet d’assignation, en y scolarisant de fait tous les enfants identifiés comme « EFIV » ? Ou bien ce constat de diversité serait-il la conséquence d’une baisse du niveau d’attente au sein de ce dispositif (qui relèverait plutôt du primaire que du collège) ? Une question centrale est soulevée par plusieurs enseignants d’UPS :

130 Pour rappel, Voyageur est ici utilisé avec un V majuscule en tant qu’autonyme soulignant une appartenance communautaire, ce qui autorise l’utilisation de l’oxymore « Voyageur sédentaire ».

Jusqu’à quand est-on EFIV ? Surtout lorsque l’on est sédentarisé…

Dans une autre commune de l’agglomération bordelaise qui regroupe beaucoup de Voyageurs, les enseignantes d’UPS expliquent qu’il y a 45 EFIV dans leur école mais que seulement une partie (environ vingt) est scolarisée en UPS : « on privilégie le cycle 2, à la demande de l’inspecteur ». L’une d’elles ajoute que « si des élèves en difficulté en ont besoin, ils rejoignent le groupe EFIV car [sinon] on travaille directement en classe, avec les enseignants en classe ordinaire. ». L’IEN en charge du dossier acquiesce « c’est le propre d’un dispositif : ça doit rester souple ». En effet, comme nous le montrerons dans la rubrique

« Organisations structurelles / diversité des dispositifs » dans le chapitre 4, le rôle des IEN de circonscription est prépondérant dans le choix des profils d’élèves qui sont effectivement scolarisés en UPS ou non, tout en étant identifié comme EFIV.

Au final, la catégorie EFIV est très ambivalente ; aux contours flous, elle mêle

« assignation ethnique » et rapport à l’école, sans que l’une de ces caractéristiques prenne systématiquement le dessus sur l’autre  de grandes variations pouvant exister en fonction des contextes, mais également des périodes et des acteurs.

Dans l’académie de Montpellier, au désarroi des responsables académiques et CASNAV qui le déplorent dans leurs entretiens, des Gitans sédentaires sont scolarisés dans les dispositifs UPS. Ce désarroi transparaît dans les propos du responsable académique : « Dans cette académie, nous sommes très vigilants sur cette distinction entre les deux [Voyageurs et Gitans] ». Ce désarroi transparaît aussi dans l’enquête sur la scolarisation des EANA et EFIV réalisée par le CASNAV131 :

« On constate que des écoles et établissements, chaque année, continuent à considérer comme voyageurs des enfants inscrits de manière continue depuis plus de deux ans ; il s’agit souvent de familles gitanes sédentarisées dont les enfants fréquentent l’école de manière erratique.La définition utilisée est donc trompeuse mais un travail de proximité avec les écoles concernées permet d’affiner l’observation d’année en année. Par ailleurs, la catégorisation reste artificielle, les situations sont très variables d’une famille à l’autre, il existe, pour les seuls Gitans cités en exemple, des sédentaires, des voyageurs et des semi-sédentaires. Seules, les dates peuvent nous fournir des éléments d’appréciation, toute relative. […] ».

Cette vigilance se traduit par des interventions des référents institutionnels CASNAV et cadre de l’Éducation nationale auprès des acteurs éducatifs (tels que directeurs d’établissement et / ou enseignants) pour clarifier les catégorisations sur ces publics. Dans les UPS, de nombreux efforts sont faits par les cadres et référents CASNAV académiques afin que les Gitans sédentaires n’y soient pas scolarisés. Afin de faire respecter en pratique cette donne académique, l’académie prévoit des moyens financiers alloués et spécifiques au public « Gitans sédentaires » lorsque dans un établissement scolaire, une majorité des élèves scolarisés sont Gitans.

La question du type de public scolarisé dans les UPS soulève aussi la question des lieux

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