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Barthes affirme que le langage serait le propre de l'homme. Mais qu'entend-il par « langage » ? Un moyen d'expression composé de signes vocaux ou graphiques ou une manière de communiquer avec l'autre ? Certes, l'homme est le seul à pouvoir user de la parole pour communiquer avec ses semblables, mais les autres espèces vivantes n'ont-elles aucun moyen d'échanger des informations avec autrui ? Des animaux vivant en communauté organisée, tels les abeilles ou les fourmis, possèdent, à n'en pas douter, une certaine forme de langage leur permettant de se répartir les tâches et de vivre ensemble. Les animaux, s'ils peuvent communiquer au sein de leur propre communauté, peuvent également communiquer avec d'autres espèces, y compris l'homme. Ainsi, un chien fait facilement comprendre quand il est heureux (il remue la queue) ou quand il ne souhaite pas que l'on s'approche de lui (il grogne).

Le langage humain, qui diffère en partie de celui des autres espèces vivantes de par les signes vocaux et graphiques qui le composent, permet, comme le disent Morin et Reeves, de communiquer du sens à autrui.

Dès lors que la communication entre plusieurs individus est évoquée, on pense, presque instantanément, à la communication verbale7. Sans doute parce que le langage est considéré par la plupart des gens comme étant le moyen le plus simple de communiquer avec autrui. Lorsqu'on communique verbalement, on cherche à transmettre des informations à un auditoire. Mais, dès lors que l'on tente d'influencer l'autre, il y a interaction.

L'emploi des termes d'adresse se fait surtout dans le cadre d'une interaction entre au moins deux personnes. L'interaction a été définie à plusieurs reprises, et les définitions varient d'une personne à l'autre. En voici trois exemples. Goffman (1973 : 23) entend l'interaction comme :

[…] l'influence réciproque que les participants exercent sur leurs actions respectives lorsqu'ils sont en présence physique immédiate les uns des autres ; par une interaction, on entend l'ensemble de l'interaction qui se produit en une occasion quelconque quand les membres d'un ensemble donné se trouvent en présence continue les uns des autres ; le terme de « rencontre » pourrait convenir aussi.

L'interaction est ici envisagée comme ayant lieu lorsque plusieurs personnes se font face et s'influencent les unes les autres, seulement dans un groupe donné. Seuls des individus « en présence physique immédiate les uns des autres » sont concernés. Mais qu'en est-il des interactions ayant lieu même lorsque les interlocuteurs ne sont pas en présence immédiate les uns des autres, comme les conversations téléphoniques, par exemple ? Vion (1992 : 17) adopte une autre définition et conçoit l'interaction comme :

toute action conjointe, conflictuelle ou coopérative, mettant en présence deux ou plus de deux acteurs. À ce titre, le concept recouvre aussi bien les échanges conversationnels que les transactions financières, les jeux amoureux que les matchs de boxe.

7. Par opposition à la communication non-verbale, fondée sur l'importance des gestes, des mimiques, des attitudes, etc.

La simple action conjointe d'au moins deux individus, en présence les uns avec les autres, suffirait donc à qualifier la situation d'interaction. Selon Maingueneau (1998 : 40) :

[…] toute énonciation, même produite sans la présence d'un destinataire, est en faite prise dans une interactivité constitutive, elle est en fait un échange, explicite ou implicite, avec d'autres énonciateurs, virtuels ou réels, elle suppose toujours la présence d'une autre instance d'énonciation à laquelle s'adresse l'énonciateur et rapport à laquelle il construit son propre discours.

Ici, l'interaction est envisagée comme une énonciation, nécessairement interactive car, elle suppose la présence, réelle ou pas, d'un autre énonciateur auquel est destiné le discours et avec lequel interagit le premier énonciateur. Dans Le Petit

Robert (2013 : 1351), l'interaction est définie très simplement comme étant une

« action réciproque ». En fin de compte, peut-être est-ce là la définition la plus pertinente. Le terme « réciproque » implique nécessairement un échange entre au moins deux personnes, qu'il soit physique ou langagier. Le terme « action » signifie que les acteurs de cet échange tentent de s'influencer les uns les autres : qu'ils interagissent. Cette brève définition n'est pas sans rappeler celle de Gumperz (1982 : 29) : « speaking is interacting » (« parler, c'est interagir ») supposant, d'une part, que parler est une activité langagière impliquant plusieurs participants et, d'autre part, que ces mêmes participants essaient d'exercer une influence les uns sur les autres.

Dans les années 1960 sont apparus, particulièrement en Europe occidentale et aux États-Unis, des courants linguistiques divers et totalement indépendants les uns des autres, ayant pour principal objet d'étude le langage et les textes. Ces différents courants se proposent de mener à bien leur projet de façon inédite, en adoptant un point de vue radicalement différent de celui, classique, adopté par la linguistique. La sociolinguistique, l'analyse conversationnelle et la pragmatique examinent toutes le langage en rapport avec d'autres facteurs, qu'ils soient sociaux, culturels ou textuels.

2. Sociolinguistique

2.1. Définition

L'étude des termes d'adresse est souvent associée à la sociolinguistique, dans le sens où cette discipline vise à établir une relation de cause à effet entre les phénomènes

sociaux et linguistiques. Dubois et al. (1994 : 435) définissent cette science comme suit :

La sociolinguistique est une partie de la linguistique dont le domaine se recoupe avec ceux de l'ethnolinguistique, de la sociologie du langage, de la géographie linguistique et de la dialectologie. La sociolinguistique se fixe comme tâche de faire apparaître dans la mesure du possible la covariance des phénomènes linguistiques et sociaux et, éventuellement, d'établir une relation de cause à effet.

D'après cette définition, le sociolinguiste considère la langue dans son hétérogénéité ; il étudie donc les différentes particularités langagières propres à un groupe, qu'il s'agisse d'une communauté, d'une région, d'un pays, etc. Son but est de comprendre et d'analyser le langage le plus objectivement possible, en tenant compte de facteurs sociaux, géographiques, politiques et démographiques.

La sociolinguistique est apparue dans les années 1960 comme réaction à la linguistique structurale saussurienne ne s'intéressant qu'à la langue (envisagée comme système de signes, au détriment de la parole) ainsi qu'à la grammaire générative chomskyenne reposant sur l'opposition compétence/performance. Pour mémoire, la compétence est « le système de règles intériorisé par les sujets parlants et constituant leur savoir linguistique, grâce auquel ils sont capables de prononcer ou de comprendre un nombre infini de phrases inédites » (Id., p. 100). La performance, quant à elle, constitue « la manifestation de la compétence des sujets parlants dans leurs multiples actes de parole ». Il s'agit donc des « phrases réalisées dans les situations diverses de communication » formant « les données observables qui constituent le corpus de l'analyse linguistique » (Id., p. 354).

L'objet d'étude principal de la sociolinguistique est le rapport entre le langage et la société, ou le fonctionnement social du langage. Le but du sociolinguiste est d'examiner, en étant le plus objectif possible, les variations sociales du langage à partir d'éléments tels que l'âge, le sexe, la classe sociale, la profession, etc. Par l'observation des interactions sociales, il espère pouvoir dégager les raisons conduisant à telle ou telle pratique langagière. Le second champ d'investigation de la sociolinguistique est l'examen des relations entre les divers dialectes au sein d'une communauté plurilingue (gestion de la diversité linguistique, mort d'une langue, etc.).

2.2. Les différents types de sociolinguistique

Deux types de sociolinguistiques ont vu le jour : la sociolinguistique variationniste ou quantitative, représentée par Labov, et la sociolinguistique interactionniste ou interactionnelle, plus récente, représentée par Gumperz.

2.2.1. La sociolinguistique variationniste ou quantitative

La sociolinguistique variationniste ou quantitative élaborée par William Labov tend à s'opposer à la linguistique philologique consistant à décrire des faits de langue inventés ou étudiés hors de tout contexte qui ne peut rendre compte des changements occasionnés et de la variation des formes utilisées. Pour Labov, considéré comme l'un des fondateurs de la sociolinguistique moderne avec Uriel Weinrich et Marvin Herzog, les variations présentes dans les pratiques langagières sont le résultat de plusieurs facteurs sociaux (âge, sexe, position sociale, profession, appartenance ethnique, etc.) et stylistiques (niveau de langue, expression orale ou écrite, etc.). Une observation rigoureuse des comportements langagiers peut permettre de comprendre ces changements et variations. L'évolution linguistique serait le reflet d'un changement des rapports sociaux.

La sociolinguistique variationniste est fondée sur le changement, l'hétérogénéité et la variation. L'attention est portée ici sur l'hétérogénéité de la langue et sur la diversité des pratiques langagières observables à partir d'enquêtes ou d'examens minutieux des activités linguistiques. Il convient non seulement de décrire les changements observés, mais aussi de les expliquer et de les modéliser.

2.2.2. La sociolinguistique interactionniste ou interactionnelle

(i) Les origines : l'ethnographie de la communication

L'ethnographie de la communication, souvent considérée comme une branche de la sociolinguistique et introduite par les anthropologues Gumperz et Hymes dans les années cinquante et soixante, étudie l'importance du langage d'un point de vue culturel et sociétal. En d'autres termes, elle tend à décrire les formes et les fonctions du comportement communicatif verbal et non-verbal en rapport avec la culture et la société. Par opposition au structuralisme et à la grammaire

transformationnelle, cette discipline part du principe que la compréhension d'une phrase se fait uniquement en fonction de l'acte de communication dont elle fait partie. Plutôt que de se focaliser exclusivement sur les règles grammaticales ou l'éventuelle grammaticalité des phrases, cette discipline cherche à mettre en évidence les divers usages du langage par le biais d'enquêtes minutieuses au sein de la communauté linguistique étudiée.

Même si Gumperz a tenu un rôle important dans le développement de l'ethnographie de la communication, cette discipline a véritablement été créée par Hymes. C'est en 1962 dans son article « The Ethnography of Speaking » qu'il l'évoque pour la première fois. Deux ans plus tard, dans un autre article intitulé « Introduction: Toward Ethnographies of Communication », il ne parle plus d'« ethnographie de la parole »8 mais d'« ethnographie de la communication », dénomination qui sera conservée par la suite. À cette époque, l'objectif de Hymes est d'élaborer une nouvelle approche de la compréhension du langage en usage. La parole doit être envisagée comme un processus de communication à examiner dans son contexte social. Il considère que :

[…] l'étude du langage doit s'intéresser à la description et à l'analyse de la capacité de chaque autochtone à employer la langue afin de communiquer dans des situations réelles (compétence de communication9 ou « communicative competence ») plutôt que de se limiter à la description de l'éventuelle capacité du locuteur ou de l'allocutaire idéal à formuler des phrases grammaticalement correctes (compétence linguistique ou « linguistic competence »). Dans des communautés en particulier, les locuteurs sont capables de communiquer avec l'autre d'une façon non seulement correcte mais aussi appropriée au contexte socio-culturel. Cette capacité implique un savoir partagé du code linguistique et des règles, normes et valeurs socio-culturelles qui guident la conduite et l'interprétation du langage ainsi que d'autres chaînes de communication au sein d'une communauté […]. L'ethnographie de la parole ou l'ethnographie de la communication, comme elle sera nommée plus tard, se préoccupe de savoir ce qu'une personne connaît des modèles appropriés de l'emploi du langage de sa communauté et comment elle les apprend10. (Iffat, 1997 : 125)

8. Le terme « parole » est entendu ici non pas comme la production individuelle (définition de Saussure) mais comme l'activité langagière.

9. Également appelée « compétence communicative ». 10. Traduction personnelle. Texte original :

Gumperz (1972 : 205) parle à son tour de ces deux types de compétence que sont la « compétence linguistique » et la « compétence de communication » :

Alors que la compétence linguistique recouvre la capacité du locuteur à formuler des phrases grammaticalement correctes, la compétence de communication décrit sa capacité à sélectionner, parmi toutes les expressions grammaticalement correctes qui lui sont accessibles, les formes qui reflètent de façon appropriée les normes sociales régissant le comportement dans des rencontres spécifiques11.

Hymes introduit donc la notion de « compétence de communication » caractérisant la capacité de l'individu à employer la langue de façon adéquate quel que soit le contexte. En d'autres termes, il s'agit des règles sociales déterminant la façon dont les interlocuteurs (inter-)agissent.

Hymes considère que pour parler une langue correctement, il est indispensable, non seulement d'en apprendre le vocabulaire et la grammaire, mais aussi le contexte dans lequel les mots sont prononcés. Un enfant souhaitant produire une phrase sans prendre en compte le contexte, qu'il soit linguistique ou social, serait un « monstre social » (« social monster » ; Hymes, 1989 : 75). Le linguiste se préoccupe non seulement de la production de phrases mais aussi des aspects sociaux comme la convenance du langage, la pertinence du silence dans l'interaction, les règles conversationnelles, etc. D'après Hymes, seul l'examen minutieux de la structure d'un acte de communication peut donner lieu à la mise en évidence des fonctions du langage dans cette situation. C'est ainsi qu'il met au point une liste mnémotechnique, appelé modèle

“[…] the study of language must concern itself with describing and analyzing the ability of the native speakers to use language for communication in real situations (communicative competence) rather than limiting itself to describing the potential ability of the ideal speaker/listener to produce grammatically correct sentences (linguistic competence). Speakers of a language in particular communities are able to communicate with each other in a manner which is not only correct but also appropriate to the socio-cultural context. This ability involves a shared knowledge of the linguistic code as well as of the socio-cultural rules, norms and values which guide the conduct and interpretation of speech and other channels of communication in a community. The ethnography of speaking or the ethnography of communication, as it was later referred to, is concerned with the questions of what a person knows about appropriate patterns of language use in his or her community and how he or she learns about it.”

11. Traduction personnelle. Texte original :

“Whereas linguistic competence covers the speaker's ability to produce grammatically correct sentences, communicative competence describes his ability to select, from the totality of grammatically correct expressions available to him, forms which appropriately reflect the social norms governing behavior in specific encounters.”

« S.P.E.A.K.I.N.G. », des huit composantes à l’œuvre dans la compétence de communication12, à savoir :

(1) Settings : le lieu, le moment et l'ambiance. Il s'agit non seulement du cadre physique (lieu et moment) mais aussi du cadre psychologique (ambiance). Par exemple, le salon de grands-parents peut être le lieu d'une histoire de famille. La « scène » constitue pour Hymes le « lieu psychologique » ou la « définition culturelle » d'un lieu, comprenant certaines caractéristiques comme le degré de formalité et le ton employé (amusement ou sérieux).

(2) Participants : interlocuteurs. Il s'agit ici non seulement des interlocuteurs mais aussi des auditeurs ne participant pas directement à l'interaction.

(3) Ends : objectifs ou finalités. Il s'agit ici du but et du résultat de l'acte de communication.

(4) Acts : actes. Il est question ici du contenu et de la forme du message.

(5) Keys : tonalité (ton de la voix, accent, intonation, etc.) ; les indices établissant

le ton, la manière et l'esprit de l'acte de communication. L'analyse de la tonalité peut également conduire à étudier les variations langagières, les propriétés paralinguistiques ou les formes de communication non-verbales.

(6) Instrumentalities : instruments de communication. Il est question ici des formes

(ou canaux : langage parlé, écrit, chanté, etc.) et des styles de langage (ou codes : dialectes, niveaux de langue, etc.).

(7) Norms : normes. Les normes sociales et d'interaction régissant la

communication ainsi que les actions et les réactions des participants.

(8) Genres : genres (conte, drame, histoire drôle, poème, chant, etc.).

L'utilisation de ce modèle ne peut se faire qu'après avoir ciblé une communauté linguistique13, puis ses pratiques langagières. Il est alors nécessaire de s'attacher à décrire un acte de communication à la fois. Une situation de communication (« speech

12. Ces fonctions ne sont pas universelles et peuvent varier en fonction des situations.

13. Dubois et al. (1994 : 93) définissent la communauté linguistique comme « un groupe d'êtres humains utilisant la même langue ou le même dialecte à un moment donné et pouvant communiquer entre eux. […] Mais une communauté linguistique n'est pas homogène ; elle se compose toujours d'un grand nombre de groupes ayant des comportements linguistiques différents […] ».

situation ») peut se découper en plusieurs événements (« speech event ») d'où il faut

dégager l'unité minimale, à savoir l'acte de parole (« speech act »). (ii) Concept et méthode

La sociolinguistique interactionniste ou interactionnelle, issue de l'ethnographie de la communication ainsi que de la sociolinguistique variationniste, et représentée par Gumperz, l'un de ses fondateurs, prône une observation du locuteur en interaction et un relevé des éléments pouvant influencer sa production langagière – soit le statut social et l'environnement culturel et contextuel de l'interaction. Elle s'oppose à toute corrélation entre les comportements extralinguistiques et linguistiques, ces derniers étant eux aussi des outils de catégorisation sociale dont peut jouir le locuteur. Reprenant les travaux de Hymes, Gumperz relie l'opération cognitive d'inférence à l'activité socioculturelle qu'est la conversation.

Les travaux de Gumperz, anthropologue et linguiste, dans les années soixante et soixante-dix, lui ont permis de se rendre compte de l'immense diversité linguistique et culturelle présente dans le langage quotidien. Ses études l'ont conduit à imaginer une méthode permettant d'analyser et de comprendre cette hétérogénéité, et à vérifier les hypothèses formulées au cours de ses recherches ethnographiques en collectant et en analysant des textes contemporains.

Gumperz définit la contextualisation comme le procédé auquel ont recours les participants à une interaction afin de « mettre en évidence ou de rendre pertinents certains aspects du contexte et d'en minimiser d'autres14 » (1982 : 131). Il n'existe pas de contexte unique mais une multiplicité de contextes créés par les participants au cours de l'interaction.

Les « indices de contextualisation » (« contextualization cues ») permettent d'identifier ce qui est perçu comme pertinent par les interlocuteurs. Gumperz souhaite expliquer l'emploi d'indices de contextualisation, de nature souvent prosodiques ou paralinguistiques, par les locuteurs ; comment ces derniers rendent compte de ce qu'ils veulent dire ; et comment leurs interlocuteurs, à travers le

14. Traduction personnelle. Texte original :

“[…] foreground or make relevant certain aspects of background knowledge and underplay others.”

processus d'« inférence conversationnelle » (« conversational inference »), reconnaissent et interprètent ces indices de contextualisation grâce à leur savoir culturel.

Le linguiste définit l'indice de contextualisation comme « tout élément de forme linguistique qui contribue à attirer l'attention sur des présuppositions contextuelles »15 (Ibid.). Cela peut, par exemple, se traduire par l'emploi d'une intonation ascendante afin de souligner un désir d'encouragement (Id., p. 147). Mais un indice de contextualisation peut également apparaître sous la forme d'un comportement non-verbal, comme le souligne Levinson qui définit cette notion comme « un rappel encodé ou conventionnel, comme un nœud fait à un mouchoir, où le contexte du rappel est déterminé inférentiellement »16 (2003 : 35), ce qui permet aux interlocuteurs de recourir à des inférences concernant l'interprétation la plus probable d'un énoncé. L'inférence conversationnelle, ou l'interprétation du message grâce au contexte immédiat et au contexte social, entre donc en jeu. Les indices de contextualisation sont visibles à plusieurs niveaux : dans certaines tournures lexicales ou

syntaxiques, dans des formules de politesse, dans la prosodie (intonation, pause, etc.), dans

des mécanismes conversationnels (tours de parole, début ou fin de la conversation, etc.), etc. (Lindelfeld, 1984 : 134). Ils ont pour but d'activer et d'extraire le contexte nécessaire à l'emploi d'inférences. Lorsque les participants à une interaction parviennent à comprendre les indices de chacun, alors les conversations se déroulent naturellement, sans heurt. En revanche, lorsqu'il y a incompréhension de ces éléments, les interlocuteurs peuvent être amenés à se juger les uns les autres comme rustres, maladroits, déconcertants, etc.

L'étude de Gumperz met également en évidence les façons dont les membres de divers groupes culturels se comprennent et les divers emplois de ces indices. Lorsque les participants de l'interaction possèdent des « conventions de

15. Traduction personnelle. Texte original :

“[…] any feature of linguistic form that contributes to the signaling of contextual