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Critères fonctionnels

4. Les termes d'adresse : critères et emplois

4.1. Quels critères pour les termes d'adresse ?

4.1.3. Critères fonctionnels

Lorsqu'on s'adresse à quelqu'un, on (re)définit la relation qui nous lie à cette personne (Lagorgette : 2003). Chaque locuteur sélectionne un terme d'adresse parmi

un large choix de termes qui lui est propre, en fonction de plusieurs facteurs comme l'âge, le sexe, la classe sociale, etc. On ne peut réellement dire comment doit être interprété un terme d'adresse uniquement si l'on connaît la relation qui unit le locuteur à son allocutaire, en général, mais aussi au moment où est il est prononcé. Pour reprendre un exemple de Dunkling (1990 : 12), dans des relations de longue date, amoureuses ou amicales, des expressions insultantes comme « you dirty bastard » peuvent être converties en expressions amicales, voire flatteuses. Un homme s'adressant en ces termes à un ami peut éventuellement le complimenter sur ses prouesses sexuelles, comme l'indiqueront le ton de sa voix et ses mimiques faciales. Il peut également s'agir d'une expression employée entre eux, comme une sorte de plaisanterie.

Mais, comme le dit Dunkling (Ibid.), l'emploi de telles expressions peut s'avérer dangereux. Dans The Philanderer de Stanley Kauffmann, l'auteur décrit deux amis, dont l'un a une liaison avec la femme de l'autre : « Dorénavant, chaque fois que Perry le traitait de connard, de salaud ou de fils de pute – comme il l'avait fait des milliers de fois auparavant – […] il ne pouvait s'empêcher de s'imaginer que derrière la plaisanterie se cachait la connaissance de la vérité35 ». Inversement, un terme à première vue amical, comme un prénom, peut traduire une changement d'attitude du locuteur à l'égard de son allocutaire. Si une femme appelle habituellement son mari « darling », l'emploi soudain de son prénom peut indiquer une certaine froideur de sa part.

L'emploi d'un terme d'adresse indique toujours l'attitude du locuteur à l'égard de son allocutaire au moment où il est prononcé, même s'il peut avoir été utilisé de façon inconsciente. La personne à qui l'on s'adresse interprète toujours le terme d'adresse employé en se fondant sur le ton de la voix et les gestes du locuteur36. Les auteurs des romans constituant le corpus utilisé par Dunkling indiquent souvent de

35. Traduction personnelle. Texte original :

Every time Perry called him a bastard or stinker or son of bitch these days – as he had done jokingly thousands of times before – […] he kept imagining that he heard a serious note underneath the joke.

quelle manière est prononcé un mot ou une phrase, de façon à ce que le lecteur comprenne clairement les intentions du locuteur. Cela n'est pas toujours nécessaire, car on peut le comprendre grâce au contexte (discussion amicale ou dispute). Le verbe neutre « said » utilisé par le romancier peut très bien être remplacé par un verbe chargé d'informations. De tels substituts sont nombreux en anglais : « acknowledged »37, « coaxed », « frowned », « implored », « threatened », etc.

La sélection d'un terme d'adresse est un processus beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. Ce choix n'est pas seulement déterminé par une combinaison de la nationalité du locuteur, de sa langue, de son dialecte, de son âge, de sa profession, de son éducation, de sa classe sociale, etc., et d'autres aspects de sa personnalité ; la nationalité du locuteur, sa langue, son dialecte, son âge, etc., ont également leur propre rôle à jouer.

Zwicky (1974 : 787) affirme que les vocatifs ont une double fonction : celle d'appel et celle d'adresse. Soit les exemples suivants, tous deux extraits de Daniel

Deronda, de George Eliot :

(1) But need you set off in this way, Gwendolen?38

(2) Now, mamma, don't interfere with me.39

Dans l'exemple (1), Lady Rowley tente de faire entendre raison à sa fille Nora, qui souhaite épouser un homme n'ayant peut-être pas les moyens de subvenir à ses besoins. Elle souhaite attirer l'attention de Nora sur l'absurdité de la chose. Dans l'exemple (2), Nora répond à sa mère que la situation de son prétendant lui convient parfaitement Ici, le terme d'adresse est utilisé pour maintenir le dialogue. Dans les deux cas, le terme d'adresse est référentiel ; il nomme un référent du discours ayant

37. Autres exemples : « allowed », « apologized », « babbled », « bemoaned », « breathed », « cautioned », « commanded », « complained », « confessed », « congratulated », « contradicted », « criticized », « cut in », « denied », « exclaimed », « gasped », « groaned », « grumbled », « hailed », « jabbered », « leered », « mumbled », « objected », « promised », « reproached », « screamed », « sneered », « squawked », « warned », « yelled ». Pour une liste complète de ces substituts, voir Dunkling (1990), p. 13-14. 38. Chapitre 14, p. 127. Traduction personnelle :

Mais est-il utile de partir de cette manière ? 39. Ibid. Traduction personnelle :

une relation pragmatique avec la phrase. Zwicky (Id., p. 790-791) effectue le test suivant : un terme d'adresse pouvant être remplacé par what's your name ou you a une fonction d'appel ; s'il ne le peut pas, il a une fonction d'adresse. Remplaçons les termes d'adresse des deux exemples précédents par what's your name et you :

3) But need you set off in this way, what's your name/*you? 4) Now, what's your name/you, don't interfere with me.

Si la seconde phrase semble correcte, ce n'est pas le cas de la première avec « you ». Les deux fonctions mentionnées par Zwicky paraissent donc être bien fondées. Bien évidemment, il faudrait appliquer ce test à de nombreuses autres phrases pour pouvoir l'affirmer avec certitude.

Certains facteurs conduisent au choix d'un terme d'adresse en particulier. Dunkling (1990 : 22-29) en dénombre douze : la nationalité, le dialecte, le sexe, l'âge, la classe sociale, la profession, la relation, la religion, la race, l'homosexualité, l'individualité et l'incident verbal. Ces facteurs sont intrinsèquement liés les uns aux autres. Les exemples mentionnés sont de Dunkling.

(iii) Nationalité

Un anglophone peut être anglais, écossais, gallois, irlandais, américain, canadien, australien, etc. L'anglais utilisé est différent selon le pays d'origine du locuteur, et ce dernier peut donc avoir recours à des termes d'adresse différents de ceux de ses camarades.

Si une personne appelle une autre personne « buddy » (« mon pote »), « bub » (« mon pote »), « you fink » (« sale mouchard »), etc., cette personne est probablement américaine. Une personne accusant une autre personne d'être un « swaddler » (« protestant irlandais » sera probablement irlandaise, etc.

On peut aussi utiliser un terme d'adresse en fonction de la nationalité de l'allocutaire. Ce facteur est essentiel dans l'emploi de termes comme : « Aussie » (un Australien), « Dago » (un Italien ou un Espagnol), « Eyetie » (un Italien), « Harp » (un Irlandais), « Limey » (un Anglais), « Yank » (un Américain), etc.

de termes d'adresse. Par exemple, dans The Hiding Place de Robert Shaw, on rencontre les termes « you poor German idiots » (« misérables idiots germaniques »).

Cependant, la simple mention d'une nationalité ne nous donne pas des informations précises au sujet de l'allocutaire. Dans Room at the Top de John Braine, « you slant-eyed Mongolian pig » (« espèce de porc mongolien aux yeux bridés ») est clairement une plaisanterie.

(iv) Dialecte

Il s'agit d'une sous-catégorie de la nationalité qui peut influencer le choix du locuteur. Voici des exemples de termes d'adresse apparaissant dans le corpus de Dunkling et qui semblent être dialectaux : « you-all » (« vous tous » dans le sud des États-Unis), « youse » (une variante de « you » en irlandais et dans certains dialectes anglais), « honey-child » (« ma puce », dans le sud des États-Unis), « bonny lad » (« beau gosse »), « feardy gowk » (une expression écossaise employé par les enfants pour qualifier quelqu'un de lâche), « hinny » (une variante de « honey », « chéri(e) », employée en Écosse et au nord de l'Angleterre), « mazidawk » (un terme utilisé dans le Devonshire pour désigner un simple d'esprit maladroit), « rodney » (employé au XIXème siècle pour désigner un paresseux, un homme de mauvais réputation), etc.

(v) Sexe

Pour Dunkling, les hommes emploient plus souvent des termes d'adresse que les femmes. Il a trouvé 277 termes d'adresse du type : « old boy », « old man », « old

chap », « old fellow » et « old lad » (signifiant tous « mon vieux ») dans une cinquantaine

de romans. Dans neuf cas seulement, le locuteur était une femme.

Certains termes, en raison de leur signification, seront normalement utilisés par un seul sexe. Soit les termes « husband » et « wife », employés en fonction du sexe de l'allocutaire, et non en fonction de celui du locuteur. Des termes renvoyant à la famille, comme « Daddy » et « Mummy » sont peut-être davantage féminins, lorsque l'âge du locuteur est pris en considération. Au-delà de seize ans, par exemple, ils sont probablement plus utilisés par des femmes que par des hommes, alors qu'ils sont employés à parts égales par les petits garçons et les petites filles.

Le sexe de l'allocutaire paraît jouer un rôle très important dans le choix d'un terme d'adresse. Dunkling s'est rendu compte que sur près de mille termes d'adresse, près de 33% contenaient des informations sur le sexe de l'allocutaire. De plus, beaucoup de termes du type « bastard » étaient davantage utilisés pour s'adresser à des hommes.

Cette indication sexuelle semble être curieusement nécessaire. Un bon exemple de son caractère indispensable est le prénom. La grande majorité des prénoms utilisés dans les pays anglophones indiquent le sexe de ceux qui les portent. Lorsqu'un prénom devient ambigu sexuellement parlant, et s'appliquant aux deux sexes, l'emploi pour l'un des deux sexes est vite abandonné. Dans cette bataille des sexes, les filles semblent souvent l'emporter. Des prénoms comme « Shirley », « Leslie », « Hilary », « Florence », « Beverly », « Robin », « Jay », etc., d'abord exclusivement masculins, sont désormais essentiellement féminins.

(vi) Âge

L'âge du locuteur joue naturellement un rôle important dans le choix d'un terme d'adresse. Un locuteur de moins de quarante ans, par exemple, peut très bien appeler des allocutaires tout juste rencontrés par leur prénom, quel que soit leur âge, alors qu'un locuteur britannique né au début du XXème siècle aura plutôt recours à un style plus formel. Les jeunes emploieront plus facilement des termes argotiques que leurs aînés. Une personne âgée de plus de trente ans utilisera l'expression « you flid » (« couillon ») par exemple. Néanmoins, des locuteurs plus âgés peuvent continuer à utiliser des termes démodés. On ne peut s'imaginer qu'un jeune puisse dire « you cad » (« goujat »).

Même si une personne enrichit son vocabulaire, elle n'abandonne pas pour autant les termes qu'elle avait jusque-là l'habitude d'employer. Ce sont précisément ces termes qui la différencient des autres locuteurs, et qui reflètent son âge.

Le terme « little » fait parfois référence à la jeunesse, même s'il peut exprimer le mépris du locuteur pour l'insignifiance de l'allocutaire. Les hommes l'emploient aussi fréquemment pour insulter des femmes, comme dans « you little fool » (« petite

conne »), « you little whore » (« sale pute ») ou « you little goose » (« sale dinde »).

L'emploi de « boy » ne signifie pas toujours que l'on s'adresse à un jeune allocutaire ; il en est de même pour « old man » qui ne renvoie pas forcément à un vieil homme. La formule « Master + prénom » est, depuis peu, seulement utilisée pour s'adresser à de jeunes hommes, alors que « Miss » n'est pas toujours employé pour s'adresser à de jeunes femmes. Des termes comme « Grandad » ou « Granny » impliquent logiquement que les allocutaires ont un certain âge, même si, parfois, on peut les utiliser pour plaisanter.

(vii) Classe sociale

Ce facteur est probablement plus important pour les locuteurs britanniques que pour les autres anglophones. Alors que les différences de classe sociale dépendaient autrefois du milieu social familial, aujourd'hui, elles dépendent davantage du niveau professionnel ou d'éducation.

Les termes d'adresse du type « old boy » (« mon vieux »), de nos jours plus rares, étaient considérés en Grande-Bretagne comme un indicateur des classes moyennes ou privilégiées. Beaucoup de locuteurs employaient ces termes, inconsciemment ou pas, afin de souligner leur niveau social. Les officiers s'adressaient les uns aux autres de cette façon. Les ouvriers parodiaient parfois cet emploi en utilisant les termes « old

cock », « old fruit », « old scout » ou « old son ». Ils sont toujours utilisés en

Grande-Bretagne, en particulier pour désigner des personnes souhaitant mettre en évidence leur statut de membre de classe moyenne par leur accent ou d'autres habitudes langagières.

Les termes « mam », « maw », « mum », « da », « dad », « pop », etc., sont utilisés par la classe ouvrière. Les classes supérieures emploient les termes « mother » (locuteurs), « mother darling », « mummykins », etc. (locutrices), et « father » (locuteurs des deux sexes). Le terme « dear » s'emploie, quels que soient les milieux sociaux. En revanche, « dear

boy », « dear girl », « dear lady », « my dear chap », « my dear fellow », « my dear + prénom »

sont des termes utilisés par les classes moyennes. Les termes amicaux employés par la classe ouvrière sont : « mate » (« mon pote »), « ducks » (« couillons »), « love », « cock »

(« connard »), « tosh » (« débile »), « wacker » (« mon pote »), « hen » (« ma poule »), « pet » (« mon chou »), etc. Il ne s'agit là que d'exemples britanniques. Il semble difficile de parler d'autres sociétés lorsqu'il est question de classe sociale.

(viii) Profession

Dans certaines professions, seuls les employés utilisent certains types de termes d'adresse. L'emploi de « me lud » dans les tribunaux par des avocats britanniques en est un exemple, même si apparemment cet usage a disparu. Il existe des titres professionnels et des surnoms traditionnels dans la marine britannique que seuls les officiers utilisent. Les hommes d'église doivent faire attention à leur emploi des termes d'adresse. Ils doivent faire preuve de sympathie et de gentillesse envers leurs fidèles, en évitant d'utiliser des termes affectueux qui pourraient être mal interprétés.

On utilise des titres professionnels uniquement dans un environnement professionnel. Dans bien des cas, la description générique d'une profession est employée comme termes d'adresse. Ainsi, un chauffeur de taxi est un « cabbie » ou un « driver », un serveur, un « waiter ».

(ix) Relations

L'appartenance à une même famille d'un locuteur et de son allocutaire permet l'emploi de certains termes d'adresse. Lorsqu'il existe plusieurs formes comme « mom », « mum », « ma », etc., le choix de l'un ou l'autre de ces termes dépend d'autres facteurs, comme la nationalité, l'âge ou le sexe du locuteur.

La relation existant entre un locuteur et son allocutaire, qu'elle soit intime, amicale ou distante, influencera le choix d'un terme d'adresse. Des locuteurs sensibles et polis essaieront d'employer les termes les plus appropriés à la nature de la relation les liant à leur allocutaire, ce que ne feront pas des locuteurs moins sensibles. Cela conduit presque à un autre facteur, à savoir le niveau de délicatesse sociale du locuteur.

(x) Religion

restreindre leur emploi des termes d'adresse. On s'adresse généralement à eux en utilisant des titres professionnels.

(xi) Race

Les origines d'un locuteur peuvent influencer le choix de ses termes d'adresse. Plus le locuteur sera éduqué, moins il emploiera des termes d'adresse différenciant les origines. Les locuteurs d'origine juive, en particulier ceux parlant yiddish, peuvent employer des termes yiddish comme « shmuck » (« connard ») ou « boychick » (« mon garçon ») dans une conversation en anglais. Un locuteur ne parlant pas yiddish peut très bien les utiliser. Des termes comme « clever boy » (« petit malin ») ou « wise guy » (« petit futé »), apparemment issus du yiddish, sont fréquemment employés.

Les origines d'une personne peuvent conduire à l'emploi de certains termes d'adresse, souvent insultants. Dans son corpus, Dunkling a trouvé les termes suivants : « boogie » (une personne à la peau noire), « darky » (une personne à la peau noire), « greaseball » (un terme anglais américain désignant une personne à la peau mâte ou aux cheveux bruns, ayant des origines latines ou méditerranéennes), « gyp » (une abréviation de « gypsy », « gitan »), employé en anglais américain pour désigner un escroc, un tricheur, un arnaqueur), « wop » (un terme injurieux pour un Italien), « Hebe » (une abréviation de « Hebrew », « hébreu », une insulte pour un juif), « honky » (un terme utilisé pour désigner un étranger, venant surtout d'Europe centrale), « paleface » (« visage pâle », terme surtout connu pour être employé par les Indiens d'Amérique pour désigner les hommes blancs ; mais il semblerait qu'il soit également utilisé par les personnes à la peau noire pour désigner les personnes à la peau blanche), « yid » (une injure pour un juif), « hooknose » (une injure pour un juif), « kike » (une injure pour un juif, surtout présent aux États-Unis), « sheeny » (une injure pour un juif), « nigger » (une insulte adressée à une personne à la peau noire), « nip » (un terme utilisé pour désigner une personne d'origine japonaise, dans une conversation plutôt familière), « white boy » (terme d'adresse affectueux utilisé au XVIIème siècle pour désigner un favori ; de nos jours, il est surtout employé par des personnes à la peau noire pour parler à des personnes à la peau blanche) et « white

shit » (une insulte utilisée par une personne à la peau noire pour s'adresser à une

personne à la peau blanche). (xii) Homosexualité

Dans le corpus de Dunkling, beaucoup d'homosexuels apparaissent comme des personnages fictifs. Les romanciers indiquent souvent que ces locuteurs ont des façons différentes de s'exprimer, ce qui peut inclure un usage particulier des termes d'adresse. Voici des exemples de termes d'adresse employés par des locuteurs homosexuels : « ducky » (« mon lapin »), « darling » (« chéri(e) »), « sweety » (« ma puce »), « handsome » (« beau gosse »), « love » (« mon amour »), « you mean thing » (« vilain »), termes qui sont souvent inhabituels d'un locuteur masculin à un allocutaire du même sexe. Les hétérosexuels utilisent souvent des termes d'adresse amicaux entre eux, mais rarement des termes affectueux.

Certains homosexuels brisent volontairement les conventions en ayant recours à ce genre de termes d'adresse. D'autres ne le font pas, préférant ne donner aucun signe de leur relation. Lorsqu'un hétérosexuel s'adresse à un homosexuel, il peut employer des termes d'adresse insultants, comme les termes suivants, empruntés au corpus de Dunkling : « fag », « faggot », « pouff », « homo », « queer », « nelly », « punk », « poofter », « queen », « sissy » et « fruitcake » (chacun de ces termes pourrait être traduit par « pédé », « tapette », « tantouze »).

(xiii) Individualité

Chaque locuteur a sa propre façon de s'exprimer, et donc d'utiliser des termes d'adresse. Cet idiolecte, ou dialecte personnel, s'est formé de manière naturelle. Parfois, des locuteurs ont conscience de leurs particularités langagières qui peuvent affecter leur emploi des termes d'adresse de deux façons différentes.

Il existe des locuteurs qui emploient le même terme d'adresse pour s'adresser à presque tout le monde. Dunkling se souvient avoir été appelé « baby » par un journaliste, la seule fois qu'on l'avait appelé de cette façon dans sa vie d'adulte. Il s'est avéré que ce journaliste appelait tout le monde de cette façon, sans distinction d'âge ou de sexe. L'emploi de ce terme d'adresse était, en quelque sorte, sa marque de fabrique.

Les romanciers commentent parfois les particularités langagières de leurs personnages. Par exemple, dans Bethel Merriday de Sinclair Lewis, l'auteur dit qu'un terme d'adresse usuel de l'un de ses personnages est « my pet » ; un autre personnage utilise « darling » et « kitten » (« chaton ») ; un troisième, « child ». Dans Scenes of Clerical

Life, George Eliot remarque que pour M. Gilfil, tous les garçons sont des « young shaver » (un jeune homme qui se rase depuis peu), et toutes les filles sont des « two shoes » (littéralement « deux chaussures »). D'autres romanciers ne font aucune

remarque de ce genre, mais font des démonstrations. Dans Brothers in Law de Henry Cecil, Grimes emploie constamment le terme d'adresse « my dear fellow » (« mon cher ami »). L'auteur termine le roman en disant : « We shall see, my dear fellow, we shall see » (« Nous verrons, mon cher ami, nous verrons »), et aucun lecteur n'a de difficultés à identifier le personnage prononçant ces mots.

Il y a aussi ce que Dunkling nomme le « syndrome Sam Weller ». Cela caractérise un personnage employant un grand nombre de termes d'adresse. C'est notamment le cas de Sam (personnage ayant inspiré la dénomination de ce syndrome), qui devient le serviteur de M. Pickwick dans The Pickwick Papers de Charles Dickens. Il a recours à des termes comme « old 'un » (« mon vieux »), « governor » (« gouverneur »), « my patriarch » (« mon patriarche »), « you portable engine » (« moteur portatif »), « my ancient » (« mon ancien »), « old codger » (« vieux bonhomme »), « my Prooshan blue » (« mon bleu de Prusse »), « corpilence » (« corpulence »), « young dropsy » (« jeune oedème »), « young opium-eater » (« jeune consommateur d'opium »), « young boa-constructer » (« jeune boa constricteur »), et bien d'autres termes pour s'adresser à des personnes rencontrées au cours de ses voyages. Des locuteurs comme Sam aiment créer des termes d'adresse passagers, alors que la plupart des gens utilisent des termes d'adresse standards.

(xiv) L'incident verbal

Tous les facteurs mentionnés précédemment ne sont pas linguistiques. Parfois, l'emploi d'un mot conduit à celui d'un terme d'adresse. L'auteur ne parle pas ici d'écho, comme dans : « You pig! » « Pig yourself! » (« sale porc ! » « porc toi-même »). Il ne parle pas non plus d'une situation proche de l'écho, lorsqu'un locuteur que l'on vient d'appeler par un terme qui ne lui plaît pas, comme « pal », « friend », « mate »