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Interaction stratégique, agglomération et développement

2 Géographie et développement : principes théo riques

2.2 Interaction stratégique, agglomération et développement

Tout comme la géographie physique semble être un facteur déterminant pour l’ex- plication des écarts de développement observés dans le monde, des éléments d’une autre nature qui impliquent l’interaction entre les individus en un lieu semblent être à l’origine de concentrations d’activités économiques et du développement. On ob- serve ainsi que nombre d’activités économiques sont concentrées géographiquement ; la plupart des individus aussi bien dans les pays développés que les pays en déve- loppement sont concentrés dans des zones métropolitaines étendues et densément peuplées ; la plupart des industries, y compris les banques, sont aussi concentrées géographiquement et de tels rapprochements sont d’importantes sources d’échanges et de spécialisation internationale. Biens des décideurs économiques choisissent de se localiser proches les uns des autres et des centres administratifs.

Toutefois, tout le monde ne réside pas dans une grande ville ; l’économie mondiale ne concentre pas la production de chaque bien en un seul lieu. Il y a des décideurs économiques qui ne sont pas localisés dans le centre économique ou qui décident de s’éloigner de ces centres.

Le développement apparaît donc spatialement concentré avec des activités concen- trées sur quelques grands marchés. Ces agglomérations sont la résultante d’opposi- tions entre forces déterminées par des éléments de seconde nature relativement dif- férents de la géographie physique. Il y a une opposition entre des forces qui tendent à promouvoir la concentration géographique et celles qui poussent à la dispersion. Les premières sont les forces centripètes et les secondes sont les forces centrifuges. Ces forces sont représentées de manière synthétique dans le tableau 1.1 du chapitre 1. Elles sont importantes dans l’explication des énormes écarts de productivité et de revenus moyens entre pays riches et pays pauvres même si ces pays ont des facteurs géographiques similaires.

Ces interactions ont été révélées par la prise en compte de la géographie dans les modèles économiques par les économistes Paul krugman et Antony Venables1. Cela a donné lieu à de nombreux travaux dans le domaine de l’économie géographique. Ces travaux reposent sur la concurrence monopolistique et la prise en compte des économies d’échelle croissantes qui poussent les …rmes à concentrer leurs productions en quelques lieux. Ce champ de l’économie spatiale est plus connu sous le vocable de nouvelle economie géographique (NEG)2. La nouvelle économie géographie fait suite à la nouvelle théorie du commerce en montrant comment les économies d’échelle

1La notion d’espace et sa relation avec les activités économiques ont toutefois été étudiée en

début du 19ème siècle par Von Thünen en 1826. Les travaux récents de Krugman (1991a,b) ont remis au goût du jour l’importance de la géographie dans les modèles économiques.

2Robert-Nicoud (2004) fait une revue de littérature des di¤érents modèle du champ de la NEG et

en dégage une structure mathématique identique malgré les mécanismes d’agglomération particulier de ces modèles.

croissantes, les économies d’agglomération, les coûts de transport et la di¤érencia- tion des produits peuvent conduire à une organisation spatiale très di¤érenciée des activités économiques. Les modèles de la NEG illustrent la possibilité d’un processus d’agglomération auto-réalisateur conduisant à une distribution industrielle polarisée composée d’un centre et d’une périphérie. Ce processus d’auto-réalisation se produit sous l’e¤et de forces centripètes ou centrifuges plutôt que de di¤érences entre climats ou zones écologiques.

2.2.1 La con…guration spatiale

La formation des centres d’activité résulte de la confrontation entre les forces centripètes et centrifuges. Les modèles théoriques de la NEG font dépendre la ré- sultante de cette opposition de di¤érents paramètres. Au delà d’une certaine valeur de paramètre, il pourrait y avoir une dispersion des activités entre les localisations. Robert-Nicoud (2004) résume les équilibres et leur stabilité selon les hypothèses du modèle. Les coûts de transaction tiennent une place importante dans l’aggloméra- tion. Pour des coûts de transaction élevés, les activités seront dispersées de même que pour de faibles coûts de transaction. L’agglomération est susceptible de se pro- duire donc à des coûts de transaction intermédiaires. Quand les coûts de transport baissent en dessous d’un niveau critique, un processus de di¤érenciation entre région va se mettre en place, avec une concentration des industries manufacturières dans le centre et une relégation des producteurs de biens primaires dans la périphérie. Une baisse continuelle produit des e¤ets inverses.

Cette approche simple o¤re la possibilité de la justi…cation du retard du Sud comme un phénomène qui ne s’est pas développé en isolation. C’est la conséquence nécessaire d’un processus qui a aussi produit l’industrialisation du Nord. Le déve-

loppement et le sous-développement sont simplement la manifestation de l’agglomé- ration des activités économiques.

2.2.2 Des approches complémentaires

Les deux approches de l’e¤et de la géographie sur le développement semblent apparemment di¤érentes mais sont toutefois complémentaires. Dans bien des cas, les éléments de la géographie physique sont importants pour le développement non pas parce que ces éléments naturels jouent un rôle crucial mais parce qu’ils inspirent les facteurs d’agglomération. Aussi dans les modèles d’économie géographique, une di¤érence dans les dotations naturelles peuvent être à l’origine d’une agglomération et l’apparition d’un schéma centre périphérie. La région qui a la dotation naturelle avantageuse devient le centre, le développement n’est plus une question de chance. Une toute petite di¤érence inhérente à un facteur naturel peu conduire à des déve- loppements radicalement di¤érents.

La complémentarité des deux approches est illustrée par de nombreux travaux empiriques qui revendiquent la pertinence de combiner les e¤ets d’agglomération et les avantages comparatifs dans l’étude du commerce et la distribution de la produc- tion (Davis et Weintein, 2002, Midelfart-Knarvik et al 2000, Baldwin et al 2003). La prise en compte des avantages comparatifs provient soit d’une dotation initiale en facteurs de production inégale, soit de di¤érences technologiques entre les nations.

2.3

Caractéristiques et inégalités dans les pays en dévelop-