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Dotations naturelles ou éléments de première nature et développement

2 Géographie et développement : principes théo riques

2.1 Dotations naturelles ou éléments de première nature et développement

géographique. La première approche explique le développement économique par la géographie physique et les dotations naturelles d’un pays. Le développement semble être ainsi une question de prédestination. L’agglomération des …rmes et des individus peut être ainsi expliquée par une accumulation accidentelle de facteurs naturels favorables. Ces facteurs naturels tels que le climat et les dotations en ressources sont exogènes à l’économie. Krugman (1993) les désigne par éléments de première nature. La seconde approche est celle de la NEG géographique qui met l’accent sur les éléments de second ordre ou seconde nature pour expliquer la di¤érence de développement économique. Le développement est la résultante de la confrontation des forces d’agglomération et de dispersion des activités économiques. Cette section est consacrée à la présentation de ces deux approches.

2.1

Dotations naturelles ou éléments de première nature et

développement

L’analyse du développement économique au niveau mondial fait apparaître une corrélation entre la géographie et le développement. L’importance de la géographie pour la croissance et le développement économique a été relevée par di¤érents au- teurs. On peut citer entre autres Acemoglu et al (2001, 2002, 2003), Easterly (2001), Rodrik (2002), Rodrik et al (2002), Sachs et Warner (1995, 1999, 2001), McArthur et Sachs (2001) et Gallup et al (1999). On les subdivise en deux groupes ; le premier

groupe formé de Acemoglu et al (2001, 2002, 2003), Easterly (2001), Rodrik (2002) et Rodrik et al (2002) montre que la géographie est déterminante pour le développe- ment mais les institutions, en particulier les droits de propriété et l’état de droit, ont la primauté sur la géographie dans l’explication du développement économique. Le second groupe composé de Sachs et Warner (1995, 1999, 2001), McArthur et Sachs (2001) et Gallup et al (1999) attribue un rôle dominant à la géographie, déterminant principal du climat et des dotations en ressources naturelles, pour le développement économique.

2.1.1 L’in‡uence globale de la géographie

La géographie est le déterminant principal du climat et des dotations en res- sources naturelles et peut aussi jouer un rôle essentiel dans la morbidité, les frais de transport et le degré de di¤usion de nouvelles technologies en provenant de régions plus avancées. Par conséquent, elle in‡ue notablement sur la productivité agricole et la qualité des ressources humaines. Parmi les travaux les plus remarquables concer- nant cette théorie …gurent de récentes études de Jared, Diamond et Je¤rey Sachs (1999).

La corrélation entre géographie et développement économique est multiforme. A peu près, tous les pays situés dans la zone tropicale sont pauvres et presque tous les pays des grandes latitudes sont riches. Les pays situés sur les côtes ont généralement des revenus plus élevés que les pays enclavés. Presque tous les pays enclavés ont de faibles revenus par tête. Quand on se rapporte à la densité de la population, on observe que les zones côtières et les zones connectées au littoral par des ‡euves navigables sont densément plus peuplées que l’hinterland. A l’intérieur des pays, il y a une relative corrélation positive entre la densité de la population et le revenu

Tab. 2.1 –Caractéristiques de certaines régions

Population

PIB Terre située à

par tête Super…cie dans les 100 km du

(US Populations millions tropiques littoral

Regions Dollars) (millions) de km2 (%) (%)

Afrique Sub-Saharienne 1 865 580 24 91 19

Europe de l’Ouest 19 230 383 3 0 53

Asie de l’Est 10 655 1 819 14 30 43

Asie du Sud 1 471 1 219 4 40 23

Economies en Transition 3 902 400 24 0 9

Amerique Latine America

et les Caraibbes 5 163 472 20 73 42

Source :Gallup et al (1999)

par tête.

Gallup et al (1999) relève d’autres aspects de la corrélation entre la géographie et le développement (cf. Tableaux 2.1 et 2.2). L’Afrique subsaharienne, la région la plus pauvre présente di¤érentes caractéristiques géographiques associées à la faiblesse des revenus. Cette région a la plus forte concentration de terre dans la zone tropicale, une population plus concentrée à l’intérieur des terres, une faible densité côtière de la population. A l’opposé, l’Europe de l’Ouest, la région la plus riche n’est pas située en zone tropicale, sa population, faiblement dense, est plus concentrée proche des zones côtières. Il n’y a pas de pays enclavés.

Le climat in‡uence la croissance économique. L’impact du climat sur le dévelop- pement provient de la relation entre le climat et les maladies endémiques, la relation entre le climat et la productivité agricole, la relation entre localisation et technologie de transfert.

Tab. 2.2 –Caractéristiques de certaines régions (suite)

Population située à 100 km du

littoral ou Distance Densité Densité

d’un ‡euve Population au marche costale intérieure navigable enclavée centre (population (population

Regions (%) (%) (km) par km2) par km2)

Afrique Sub-Saharienne 21 28 6,237 40 22

Europe de l’Ouest 89 4 922 109 125

Asie de l’Est 60 0 3,396 381 91

Asie du Sud 41 2 5 744 387 287

Economies en Transition 55 21 2 439 32 16

Amerique Latine America

et les Caraibbes 45 3 4 651 52 18

Source :Gallup et al (1999)

La littérature économique relève des exemples qui illustrent l’impact de la géo- graphie sur le développement. E. L. Jones (1981) et Alfred Crosby (1986) expliquent principalement le développement économique de l’Europe par le rôle central de la géographie et du climat. Schas et Warner (1995, 1997) montrent que la localisation en zone tropicale, l’enclavement et la dépendance des matières premières inhibent le développement et la croissance. Bloom et Sachs (1998) et Sachs (2001) soutiennent que la localisation en zone tropicale conduit au sous-développement du fait de la fragilité et de la faible productivité des sols, la grande prévalence des insectes et des parasites, l’excessive respiration des plantes et le faible taux net de photosynthèse, une forte évaporation et une o¤re instable d’eau, des conditions écologiques favo- risant de grandes endémies infectieuses et des coûts de transport élevés. Diamond (1997) soutient que les maladies a¤ectent directement le développement technolo- gique des sociétés dans le long terme.

graphie sur le développement. Relativement aux régions tempérées, les régions tro- picales sont entravées dans leur développement économique par de grandes maladies endémiques et la faiblesse de la productivité agricole. Les régions côtières et celles reliées au littoral par des ‡euves navigables sont plus favorisées pour le développe- ment relativement aux régions enclavées. Les régions enclavées sont particulièrement désavantagées par le manque d’accès direct à la mer même quand elles n’en sont pas très éloignées. Trois raisons expliquent cela : d’une part la migration transfrontalière est relativement plus di¢ cile que la migration à l’intérieur des régions, d’autre part le développement d’infrastructures transfrontalières est plus di¢ cile à conduire que des investissements similaires à l’intérieur du pays, en…n ces régions pourraient subir des coûts d’accès à la mer imposés par les pays côtiers.

Une forte densité de la population semble être favorable au développement éco- nomique des régions côtières avec un bon accès aux marchés internationaux. Dans l’hinterland, une forte densité semble être anticorrélée au développement écono- mique.

2.1.2 L’e¤et de la distance et des coûts de transport

Le taux de croissance de l’économie est a¤ecté par plusieurs facteurs : la produc- tivité totale des facteurs, le coût des transport et les politiques protectionnistes qui accroît les prix domestiques des biens capitaux importés. Ces facteurs ont tendance à réduire la croissance de long terme.

Les coûts de transport dépendent de di¤érentes caractéristiques. Les économies des pays côtiers ont généralement des coûts de transport plus faibles que les pays de l’hinterland. Les pays proches du centre, pays pourvoyeurs de biens capitaux, sup- portent de faibles coûts de transport relativement aux pays éloignés. La croissance

diminue donc en proportion de la distance au centre.

De faibles coûts de transport peuvent produire d’importants e¤ets sur le produit et la croissance quand la part des biens de consommation intermédiaire dans la demande …nale est importante.

Les biens de consommation intermédiaire représentent une forte proportion du produit …nal dans de nombreux secteurs d’exportation des pays en développement. Dans les industries à forte intensité en main d’oeuvre telle que les industries d’as- semblage électronique, les pays en développement importent une large portion de la valeur du produit …nal. Les biens intermédiaires sont assemblés par les ouvriers domestiques et réexportés vers le marché mondial. Ces pays vendent essentiellement le service de la main d’oeuvre dans les opérations d’assemblage plutôt que de vendre le produit …ni entier. Pour de telles industries d’assemblage, même de faibles ac- croissement du coût des transports peut rendre le secteur non compétitif. Pour cette raison, seuls les pays en développement qui ont de bonnes infrastructures de trans- port pourront accéder au marché mondial et abriter de telles industries (Radelet et Sachs, 1998).

Relativement à ce type d’argument, les pays enclavés sont encore plus désavanta- gés par rapport aux pays côtiers (pour le développement économique). Presque que tous les processus de production modernes sont subdivisés en des étapes distinctes avec des inputs bien souvent produits dans di¤érentes entreprises spécialisées, tant étrangères que domestiques. La faiblesse des coûts de transport pour de tels biens est cruciale, spécialement pour les pays en développement, où la plupart des inputs sont importés. Seules les zones côtières ou les zones reliées à la côte par des ‡euves navigables ou avec de faibles coûts de transport terrestres pourront être compétitives dans de telles activités.

2.1.3 L’e¤et de la densité de peuplement

L’e¤et de la pression de la population sur la croissance économique semble di¤é- rer entre l’hinterland et les zones côtières. Dans l’hinterland, les coûts de transport sont extrêment élevés, la division du travail est faible et le produit …nal est géné- ralement caractérisé par des économies d’échelle décroissantes en travail vis-à-vis de l’o¤re limitée de terre. Ainsi une forte densité de la population sera associée à de faibles revenus par tête, une tendance observée dans plusieurs pays en dévelop- pement, notamment les pays africains. Mais pour les pays côtiers où les coûts de transport sont relativement faibles et la division du travail élevée, une croissance de la population peut être associée à des revenus par tête stables ou même croissants, en dépit d’une baisse du ratio capital-travail. Une forte densité de la population renforce la division du travail.

Dans un contexte où les capitaux et les personnes circulent avec di¢ culté, les inconvénients d’une géographie défavorable (isolement physique, maladie endémique ou autre problème local (comme un sol peu fertile)) sont ampli…és. Il est probable que, lorsque le capital humain est su¢ samment concentré en un lieu, le capital physique y a- uera comme facteur de production complémentaire. Le cas de Denver illustre cette question. Ville enclavée et en altitude, Denver peut quand même servir de centre de pointe du tourisme, du commerce et des technologies de l’information (Overman et al, 2003).

Toutefois, lorsque des pays isolés ou ayant d’autres problèmes géographiques possèdent un nombre réduit de travailleurs quali…és, ces derniers sont bien plus susceptibles d’émigrer que d’attirer du capital physique dans leurs pays. Ceci reste aussi vrai pour les régions géographiquement isolées au sein d’un pays. Par exemple, la Chine peine à attirer des investissements dans ses provinces occidentales et doit

faire face à un exode massif de la main-d’oeuvre, y compris des rares ouvriers quali…és des provinces occidentales, vers les provinces orientales et côtières (Demurger et al, 2002).

Les facteurs géographiques de seconde nature retracent les interactions spatiales entre les individus dans une zone donnée. Ils présentent des liens avec les facteurs géographiques de première nature qui relèvent de caractéristiques inhérentes de la zone. Les facteurs de seconde nature ont été développés dans le cadre de la nouvelle économie géographique par les travaux de Krugman et Venables. Les modèles de la NEG montrent comment les économies d’échelle croissant, les économies d’agglomé- ration, les coûts de transport et la di¤érenciation des produits peuvent conduire à des organisations spatiales très di¤érentes des activités économiques même avec des facteurs géographiques physiques similaires.