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Les approches de la convergence

2 Croissance économique et convergence

2.1 Les approches de la convergence

Malgré la place prise par les modèles de croissance endogène au cours des der- nières décennies, la théorie classique reste à l’origine de nombreux travaux empi- riques sur les questions de convergence et déterminant de la croissance. Cette ap- proche classique utilise les données en coupes transversales. Elle s’appuie sur deux dé…nitions de la convergence des économies : la notion de rattrapage énoncée par Baumol (1986) et la notion d’homogénéisation.

2.1.1 Le principe de rattrapage

Selon la notion de rattrapage, la convergence est associée à un rapprochement de l’indicateur d’une économie moins développée (PIB par tête, productivité, ...) vers l’indicateur d’une économie plus développée. Les revenus par tête nationaux convergeraient vers un niveau de long terme identique quelles que soient les condi- tions initiales. Déduite du modèle néoclassique de croissance initié par les travaux de Solow (1956) et Swan (1956), cette notion de rattrapage peut être présentée à l’aide du concept de -convergence utilisé par Barro et Sala-i-martin (1990, 1992, 1995), Mankiw, Romer et Weil (1992) et Sala-i-Martin (1996).

Il y a -convergence lorsque les économies pauvres tendent à croître plus rapide- ment que les économies plus riches. On distingue toutefois la notion de convergence inconditionnelle (ou absolue) de celle de convergence conditionnelle (ou relative). La convergence inconditionnelle étudie la relation entre le taux de croissance du PIB par tête et son niveau initial par tête. On accepte l’hypothèse de convergence inconditionnelle si, sur une période donnée, le taux de croissance du PIB par tête d’un pays est d’autant plus élevé que son PIB par tête initial est faible. Ainsi la convergence est dite inconditionnelle lorsque le rattrapage du PIB d’une écono- mie vers le PIB d’une autre économie plus développée se réalise indépendamment des conditions initiales. La véri…cation empirique la plus souvent employée consiste, par des estimations en coupe transversale, à régresser le taux de croissance par tête, moyen ou cumulé, pendant la période considérée sur une constante et le PIB par tête initial en logarithme. Si le coe¢ cient du PIB par tête initial est négatif et signi…catif, on accepte l’hypothèse de convergence inconditionnelle.

Le test de convergence inconditionnel repose sur l’estimation de l’équation :

gi;0;T = i+ yi;0+ "i (3.1)

où yi;0 est le logarithme du PIB par tête de l’économie i à la date initiale, gi;0;T est le taux de croissance du PIB par tête entre les date 0 et T et "i le terme d’erreur qui est un bruit blanc. La notion de convergence exige que soit négatif et statistiquement signi…catif. Ce paramètre permet en outre de mesurer l’intensité du processus de convergence ou de divergence. Si est négatif, l’équation (3.1) implique que le taux de croissance de l’économie i est d’autant plus élevé que le niveau initial de son PIB par tête est faible. En calculant la durée nécessaire pour que l’économie comble la moitié de l’écart qui la sépare de son état stationnaire, c’est-à-dire la démi- vie, on peut obtenir une indication sur le rythme auquel se déroule le processus de convergence.

Barro et Sala-i-Martin (2004) montrent que l’hypothèse de convergence est véri…ée quand elle est testée sur des données économiques relativement homogènes telles que celles des Etats des Etats-Unis, les pays de l’OCDE ou les régions d’Eu- rope. Par contre, il n’y a généralement pas de corrélation entre le revenu initial et la croissance pour les données provenant de groupes plus hétérogènes tel pour un échantillon quelconque de di¤érents pays.

L’hypothèse de convergence conditionnelle suppose que la relation entre le taux de croissance du PIB par tête et le PIB par tête initial est véri…ée à condition que les pays de l’échantillon atteignent des niveaux communs pour certaines variables de nature économique ou non. Ces variables sont censées contrôler l’hétérogénéité de long terme. La convergence est donc conditionnelle lorsque le rattrapage du PIB par tête d’une économie vers le PIB d’une autre économie plus développée se fait in-

dépendamment des conditions initiales et lorsque ces économies sont supposées être identiques au niveau de leurs caractéristiques en terme de préférences, technologie, politiques gouvernementale, etc. Dans l’hypothèse de convergence conditionnelle, les économies ne convergent pas entre elles si les déterminants de leur comportement de long terme di¤èrent. La méthode la plus souvent utilisée pour véri…er cette hypo- thèse consiste à régresser le taux de croissance par tête sur le PIB par tête initial et les variables caractéristiques des trajectoires de long terme. Si le coe¢ cient du PIB par tête initial est négatif et signi…catif, on accepte l’hypothèse de convergence conditionnelle.

Le test d’hypothèse de la convergence conditionnelle nécessite une constance des déterminants de l’état stationnaire de chaque économie. On peut soit restreindre l’équation (3.1) à des sous échantillons d’économie pour lesquelles l’hypothèse d’état stationnaire est réaliste, soit estimer l’équation suivante :

gi;0;T = i+ yi;0+ Xi+ "i (3.2)

où Xi est un vecteur de variables permettant de maintenir l’état stationnaire d’une économie i à son niveau constant (ratio d’investissement sur PIB, le degré d’ouver- ture de l’économie, le taux de croissance des prix, etc.).

La comparaison de ces deux notions amène les remarques suivantes. Bien que dans les deux cas, les économies tendent vers un état stationnaire respectif, dans le premier cas, les états stationnaires sont supposés identiques tandis que dans le second, ils peuvent être di¤érents. La convergence des niveaux de PIB par tête dans le second cas, ne peut se faire qu’à condition que les paramètres dé…nissants les états stationnaires soient les mêmes. Dans le cas contraire, la convergence est une convergence uniquement en terme de taux ; les disparités en niveau demeurent sur

le long terme.

Di¤érentes études empiriques sur la notion de -convergence établissent le taux de convergence a environ 2% par an (Durlauf et al 2005). On peut citer en cela Barro et Sala-i-Martin (1991, 1992), Mankiw, Romer et Weil (1992), Sala-i-Martin (1996a, 1996b), Persson (1997), Shioji (2001). Toutefois, malgré ce grand nombre de tra- vaux, l’idée de la bêta-convergence globale reste controversée (Quah, 1996b et Barro et Sala-i-Martin (2004)). Les auteurs discutent notamment la robustesse du choix des variables de contrôle (les paramètres dé…nissant les états stationnaires), les pro- blèmes d’endogénéité et les erreurs de mesures, les e¤ets tributaires des techniques d’analyse.

Compte tenu de l’importance et du rôle des caractéristiques structurelles des pays dans la détermination de l’équilibre économique de long terme, l’hypothèse de la convergence absolue a très vite été rejetée par les régressions économétriques fondées sur les données transversales (Barro, 1991) et sur l’évolution de la distribution des revenus entre pays (Quah, 1996a).

Ainsi, comme le fait remarquer Barro (1991), Mankiw et al. (1992) ou Barro et Sala-i-Martin (1995), le modèle de croissance néoclassique implique plutôt la conver- gence conditionnelle que la convergence absolue, de sorte que le rejet de l’hypothèse de convergence absolue n’implique pas forcément le rejet du modèle de croissance néoclassique en soi.

L’hypothèse de convergence conditionnelle suggère que, parmi tous les pays si- milaires en terme de préférences, de technologies, de croissance démographique, de politiques publiques, etc., le taux de croissance est une fonction décroissante du ni- veau de production par tête. En conséquence, les pays qui sont identiques à tous égards, sauf en ce qui concerne leur niveau initial de revenu par tête, sont supposés

converger vers le même état stationnaire ou, ce qui est équivalent, converger les uns vers les autres. Dans ce scénario, un choc temporaire ne peut altérer les classements internationaux qu’à court terme, mais n’aura aucun e¤et persistant.

Cette hypothèse de convergence conditionnelle est étroitement liée à l’idée que chaque économie se caractérise par un équilibre stationnaire unique, globalement stable. Il s’en suit que les pays identiques dans leurs fondamentaux (et donc en terme de système dynamique) convergent les uns vers les autres indépendamment de leurs conditions initiales.

2.1.2 Le principe d’homogénéisation

Selon le principe de l’homogénéisation, représenté par le concept de -convergence, il y a convergence si l’on observe une réduction de la dispersion des performances des di¤érentes économies au cours du temps. Il se dé…nit comme suit : il y a - convergence lorsqu’on observe une diminution de la variance inter-pays des PIB par tête au cours du temps. On s’intéresse de savoir si le gap entre les riches et les pauvres diminue dans le temps ou si les positions des uns et des autres sont …xes ou s’écartent.

Le test de l’hypothèse de -convergence repose sur le calcul de l’écart-type des PIB par tête t;et consiste à comparer t et t+1:L’hypothèse de -convergence est ainsi accepté si t+1 < t avec

t= 1 N N X i=1 [yi;t yt] 2 !1=2 (3.3)

où yt = N1 PNi=1yi;t est la moyenne des yi;t à la date t.

de montrer l’existence d’une sigma-convergence à partir d’une région8. La notion de sigma-convergence est souvent utilisée dans les approches en série temporelle de la notion de convergence (voir Evan 1996). Les approches en série temporelle sont purement statistiques et ne reposent pas sur une théorie particulière.

Henin et Le Pen (1995) montrent que la -convergence peut aller de pair avec un accroissement de la variance entre les indicateurs des di¤érents pays et ne pas impliquer une réduction de la variance entre les pays au cours du temps. Ainsi l’acceptation de la -convergence est une condition nécessaire mais non su¢ sante de la -convergence. Toutefois le concept de -convergence n’est pas dépourvu d’utilité (Sala-i-Martin (1994)). L’analyse des deux concepts permet d’obtenir une vision plus …ne du processus de convergence.

Des nombreux auteurs ont critiqué cette approche classique de la notion de convergence et ont démontré la robustesse des clubs de convergence. Nous expo- sons ces critiques et la notion de club de convergence dans la section suivante.

2.2

Les clubs de convergence et la critique de l’approche