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Intérêt spatial, politique, culturel et géographique des terrains d’étude Le choix de nos trois terrains d’étude répond principalement à leur création récente ou à

SECONDE PARTIE

1.1. Intérêt spatial, politique, culturel et géographique des terrains d’étude Le choix de nos trois terrains d’étude répond principalement à leur création récente ou à

la transition de leurs politiques internes de gestion. Quatre grands types de facteurs peuvent néanmoins être soulignés : spatiaux, géographiques, culturels et politiques. Tout d’abord, en ce qui concerne la dimension spatiale, il nous a semblé intéressant de comparer trois parcs nationaux localisés sur un même Continent. Chaque terrain répond à une vision particulière de gestion de la biodiversité et des populations locales. Il s’agira ainsi d’un parc Canadien - québécois (contexte de gestion nord-américain), d’un parc français d’outre-mer (contexte de gestion européen) et d’un parc amazonien colombien (contexte de gestion latino-américain). Le premier est centré sur la découverte de grands espaces de nature et le développement du marché et des activités touristiques ; le second est plus attaché à la vision économique, sociale et politique du territoire ; et le troisième, focalisé sur une protection in situ de la nature, affiche un intérêt majeur pour l’ouverture à l’écotourisme international et l’intégration de territoires culturels de populations amérindiennes à la gestion du territoire protégé.

Au niveau géographique, nous avons choisi de travailler sur des territoires caractérisés par leur difficulté d’accès. Cet isolement peut découler d’une part de leur situation géographique à l’intérieur du territoire national, c’est-à-dire, d’un éloignement administratif vis à vis de la capitale du pays (cartes 8). Nous avons aussi tenu compte des spécificités géo-biologiques internes du territoire dont le relief, les écosystèmes - certains extrêmement fragiles à gérer (forêt amazonienne, eaux marines) - ou les espèces (menacées) abritées par le parc national (béluga, singes, jaguar, etc.). Ces caractéristiques rendent les territoires plus vulnérables aux pressions externes et aux politiques de gestion mises en place.

Au niveau culturel nous avons choisi d’étudier des parcs nationaux naturels habités et fortement impactés par les actions anthropiques découlant d’acteurs externes au territoire protégé. Cette dimension nous tient à cœur car elle représente une nouvelle entrée d’analyse de ces territoires « hybrides », nous permettant en conséquence de leur donner une plus grande visibilité en tant qu’objet d’étude pour les sciences sociales. De ce fait, les populations locales identifiées en tant que « résidentes du parc national » peuvent répondre à une diversité culturelle et ethnique multiple (Photos 1). Pour le terrain canadien, il s’agira des populations blanches (québécois) et amérindiennes (Première nation innu). Les acteurs externes sont principalement des touristes (canadiens et internationaux) et des entreprises privées (croisières d’observation des mammifères marins).

Sur les trois cartes on peut observer la distance géographique qui sépare les terrains d’étude par rapport à la

capitale de chaque pays. Pour la France, il s’agit de la distance

entre Paris et Cayenne en Guyane française (7086Km). Pour le Canada,

et plus particulièrement pour le Québec c’est la distance entre Tadoussac (secteur administratif du parc marin) et Montréal (189 Km). Et pour la Colombie, on note la distance entre Bogotá et Leticia, en Amazonie

Pour le terrain français, il s’agira des populations amérindiennes (wayana137 et wayãpi) ainsi que des populations noir marron (aluku). Le territoire protégé est habité également par des petites communautés créoles et métropolitaines. Les acteurs externes qui cohabitent (illégalement) sur le territoire protégé sont principalement des Brésiliens et des Surinamiens, entre autres138 (Piantoni 2009). En conséquence, on trouvera aussi dans le parc national des gendarmes (lutte contre l’orpaillage illégal), très présents au sud de la Guyane, et aujourd’hui, de plus en plus de chercheurs et de touristes. Pour le terrain colombien, on trouvera plus spécialement des populations amérindiennes Ticuna ; les acteurs externes sont souvent des colons (paysans déplacés à cause de la violence) ou des populations amérindiennes voisines non résidentes du parc, ainsi que des touristes nationaux et étrangers.

Pour notre analyse comparative, nous avons privilégié la variable amérindienne comme une constante culturelle présente dans nos trois terrains d’étude. Ces populations traditionnelles bénéficient actuellement d’une reconnaissance internationale et quelque fois nationale, qui leur permet d’avoir une visibilité importante au sein de la conservation, et par-là, certains privilèges sur l’usage des ressources naturelles grâce à l’adaptation des dynamiques locales de gestion. Nous tenons également compte d’autres groupes culturels (Noirs marron, Paysans, Blancs) dans la comparaison mais pour un niveau de comparaison plus secondaire. Ce deuxième niveau d’analyse nous permet de comparer d’une part, la diversité de relations qui coexistent entre les gestionnaires du parc et les diverses populations d’habitants ; et d’autre part, la comparaison multiculturelle peut nous permettre aussi d’identifier quels sont les impacts de cette diversité sur la gestion et la gouvernance du parc national, et des mesures qui y sont prises en compte pour répondre à cette diversité. Enfin, la comparaison multiculturelle nous permet d’identifier les jeux d’acteurs et les types de relations qui se créent entre les diverses populations et sur quel type de motivations (revendication culturelle, économique, conservation, etc.).

137 Sur notre terrain d’étude nous avons travaillé avec les communautés Wayana au sud-ouest du parc ; les communautés Wayãpi étant localisées au sud-est du parc.

138 La Guyane recense des flux de migration importants. Ces flux ont été favorisés historiquement pendant la période coloniale dans une optique de peuplement du territoire. Aujourd’hui, la « prospérité » que représente la Guyane française par rapport à ses voisins, favorise l’implantation d’un grand nombre d’immigrés illégaux.

Photos 1. Populations locales et acteurs anthropiques présents sur les terrains d’étude Guyane

Populations noir marron – aluku

Clichés Sierra J. M., 2012

Guyane

Population amérindienne – wayana

Clichés Sierra J. M., 2012

Colombie

Populations amérindienne –ticuna

Clichés du PNN Amacayacu, 2010

Québec

Première nation innu et entreprises de croisières

Cliché Sierra J. M., 2011

Clichés du Conseil de bande ESSIPIT

Finalement, au niveau politique, nous avons choisi de travailler avec des territoires complexes de par leur superposition territoriale et donc, politique. En effet, la superposition de pouvoirs de gouvernance qui découle de celle des territoires (administratifs, protégés, culturels) apporte une « couche » supplémentaire aux défis de gestion locale. Pour le Canada, il s’agit principalement d’une superposition politique entre le niveau étatique national et le niveau provincial du Québec. Puis, au niveau local, il s’agit d’une superposition territoriale et culturelle entre le territoire protégé et celui de la réserve de la Première nation innu, dont une partie du territoire est actuellement en processus de revendication auprès des gouvernements canadien et québécois.

Pour la Guyane, il s’agit d’une part, d’un conflit de pouvoir entre les instances métropolitaines (dont le Conseil Général) et les instances régionales d’Outre-Mer (Conseil Régional et autres) sur le sud guyanais, aujourd’hui devenu parc amazonien. D’autre part, on relève de même un conflit de légitimité entre les autorités coutumières (wayana et aluku) et les représentants nationaux et régionaux. Enfin, c’est aussi un conflit géopolitique entre zones frontalières (Surinam et Brésil). Quant au cas colombien, on trouve un conflit de superposition territoriale entre le parc national et les divers resguardos ou territoires amérindiens qui y habitent.

Bref, ces quatre dimensions nous permettent d’avoir un éventail d’éléments à comparer entre nos trois terrains d’étude, tant par ces similitudes que par ces différences ou ces complémentarités et spécificités. Notre démarche comparative est destinée à mettre en évidence les impacts de chacune de ces dimensions sur la gestion territoriale, et par-là, des transformations majeures dans la gestion des parcs nationaux naturels anthropisés.

1.2. Intérêt de la comparaison internationale entre trois terrains d’étude

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